L’Encyclopédie/1re édition/PROVERBE

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PROVERBE, s. m. (Littérat.) Cambden le définit un discours concis, spirituel & sage fondé sur une longue expérience, & qui contient ordinairement quelque avis important & utile. Voyez Adage.

On pourroit en ce sens appeller proverbes tant d’apophtegmes & de maximes des sept sages de la Grece & des philosophes de l’antiquité. Et c’est sur le même fondement qu’on a donné le nom de proverbes à cet excellent recueil de maximes, qui fait partie des livres de l’ancien testament, sous le titre de proverbes de Salomon.

Par proverbes on entend communément une maxime concise, & qui renferme beaucoup de sens, mais énoncée dans un style familier, & qu’on n’employe guere que dans la conversation, tels que ceux-ci : qui trop embrasse mal étreint : chat échaudé craint l’eau tiede : un tiens vaut mieux que deux tu l’auras : il faut garder une poire pour la soif : à pere avare enfant prodigue : à bon chat bon rat, &c.

On nous a donné un recueil alphabétique des proverbes de cette derniere espece ; mais ce qui le rend presque inutile, c’est qu’on a négligé de rechercher l’origine de la plupart de ces manieres de parler proverbiales, ou d’expliquer ce qui y a donné occasion.

Proverbes, (Théol.) nom d’un des livres canoniques de l’ancien testament. C’est un recueil des sentences morales & de maximes de conduite pour tous les états de la vie, que l’on attribue à Salomon.

Cependant quelques critiques, & entr’autres Grotius, ont douté que Salomon fût l’auteur de ce livre. Ils avouent que ce prince fit faire pour son usage une compilation de ce qu’il y avoit alors de plus beau en fait de morale dans les anciens écrivains de sa nation, mais que sous Ezéchias on grossit ce recueil de ce qui avoit été écrit d’utile depuis Salomon, & que ce furent Eliacim, Sobna & Joaké qui firent alors cette compilation. Grotius apporte en preuve de cette opinion, qu’on remarque dans les diverses parties de ce livre une différence palpable de style. Les neufs premiers chapitres qui ont pour titre paraboles de Salomon, sont écrits en forme de discours suivi ; mais au chap. X. quoique ce soit le même titre, le style est tout nouveau, coupé & plein d’antitheses : ce qui continue jusqu’au verset 17 du chap. xxij. où l’on trouve un style plus semblable à celui des neuf premiers chapitres ; mais il redevient court & sententieux au vingt-troisieme verset du chap. xxjv. Enfin au commencement du chap. xxv. on lit ces mots : voici les paroles qui furent recueillies & compilées par les gens d’Ezéchias, roi de Juda. Ce recueil va jusqu’au chap. xxx. On y lit : discours d’Agur, fils de Joaké. Enfin le chap. xxxj. & dernier a pour titre, discours du roi Lamuel.

De tout cela il paroit certain que le livre des proverbes, en l’état où nous l’avons aujourd’hui, est une compilation d’une partie des proverbes de Salomon faite par plusieurs personnes ; mais on n’en peut pas conclure que l’ouvrage ne soit pas de ce prince. Inspiré par le St. Esprit il avoit écrit jusqu’à trois mille paraboles, comme il est rapporté dans le III. liv. des Rois, c. iv. v. 32. Diverses personnes en purent faire des recueils, entr’autres, Ezéchias, Agur, Esaïe, Esdras, & de ces différens recueils on a composé l’ouvrage que nous avons.

On ne doute pas de la canonicité du livre des proverbes. Théodore de Mopsueste, parmi les anciens, & entre les modernes, l’auteur d’une lettre insérée dans les sentimens de quelques théologiens de Hollande, sont les seuls qui l’ayent révoquée en doute, & qui ayent prétendu que Salomon avoit composé cet ouvrage par une pure industrie humaine.

Les Hébreux appellent ce livre סשלו, misle ou mischle, ce que les Grecs ont rendu par παραβολαὶ, paraboles. La version grecque de ce livre s’éloigne assez souvent de l’hébreu, & ajoute un assez grand nombre de versets qui ne sont pas dans l’original. Le grec de l’édition romaine renferme diverses transpositions de chapitres entiers. On ne sait d’où viennent ces dérangemens. Dans les anciennes éditions latines on trouve aussi plusieurs versets ajoutés, mais que l’on a retranchés depuis saint Jérome. Calmet, dictionn. de la bibl. Tom. III. p. 298.

Proverbe, (Critiq. sacrée.) en grec παροιμία, proverbium dans la vulgate. Ce mot dans l’Ecriture signifie 1°. une sentence commune & triviale : 2°. une chanson, idcirco dicetur in proverbio, nom. xxj. 27 ; c’est pourquoi on dit en chanson, venite in Herebon : 3°. jouet, raillerie : erit Israel in proverbium, & in fabulam cunctis populis, Deuter. xxviij. 37, Israël deviendra la risée de tous les peuples : 4°. une énigme, une sentence obscure, occulta proverbiorum exquiret. Eccl. xxxjx. 3, le sage tâchera de pénétrer le secret des énigmes : 5°. une parabole, discours figuré par lequel on représente une vérité ; hoc proverbium dixit eis Jesus, Jesus leur dit cette parabole, Joan. x. 6. (D. J.)