L’Encyclopédie/1re édition/RÉCHAUD

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RÉCHAUD, s. m. (Ustencile général.) ustencile de ménage qui sert à mettre du feu pour cuire & rechauffer les choses refroidies. On en fait de fer, de cuivre, & quelquefois d’argent. Les deux premieres sortes sont du métier de chauderonier, la derniere de celui d’orfévre. Un rechaud de fer doit être fait de fer de cuirasse, & être composé d’un corps, d’une grille, d’un fond, d’une fourchette & d’un manche. Savary.

Réchaud, (Littérat.) en grec ἐσχαρίδα. Clément d’Alexandrie met cet ustencile parmi les instrumens du luxe, parce qu’on l’employoit de son tems, comme nous nous en servons aujourd’hui, pour empêcher les viandes qu’on sert sur la table de se refroidir ; c’est ce qui peut nous faire entendre ce passage de Séneque, épist. 85. Circa cænationes ejus, tumultus coquorum est, ipsos cum obsoniis focos transferentium. Hoc enim jam luxuria commenta est, ne quis intepescat cibus, ne quid palato jam calloso parum ferveat ; cænam culina prosequitur. « A ses soupers, tout retentit du bruit des cuisiniers, qui transportent des réchauds avec les viandes, car la friandise a déja imaginé ce rafinement, afin qu’aucun mets ne tiédisse, & que tout soit assez chaud pour ces palais endurcis ; la cuisine suit le souper ». Voilà bien du bruit pour des réchauds portés sur la table, qui empêchent seulement de manger froid, & avec dégoût, ce qui n’est bon & agréable que chaud.

Au reste, Séneque ne veut pas dire que l’invention du réchaud fût nouvelle de son tems, il ne parle que de l’usage qu’on en faisoit, qui en effet étoit nouveau mais très-sensé.

On trouvera dans les antiquités romaines de M. le comte Caylus, tom. I. la représentation d’un des réchauds de bronze des Romains, avec trois oies qui lui servent d’appui. Il a 7 pouces depuis l’extrémité d’une des trois têtes d’oiseau, jusqu’au bord opposé de sa circonférence. Cette espece de plateau a quinze lignes de creux, & les piés l’élevent au-dessus de deux pouces du plan. Les trois oies, car elles paroissent telles, forment les trois appuis qui se terminent par des piés de bœufs, & leurs aîles déployées avec assez de grace, sont d’un bon goût d’ornement. Ces têtes, qui se reploient sur leur estomac, & qui forment des especes d’anses, excédent d’un demi-pouce la circonférence du plateau.

Nous avons bien perfectionné cette invention, car je crois que nos réchauds à l’esprit-de-vin l’emportent de beaucoup sur ceux contre lesquels Séneque est si fort irrité. (D. J.)

Réchaud, (Jardinage.) ce mot est aujourd’hui plus en usage parmi les jardiniers que celui de réchauffement. Le réchaud est une épaisseur de fumier d’un ou deux piés, dont on environne des couches pour les réchauffer, avant que leur chaleur soit éteinte. S’il n’y a qu’une couche, on fait ce réchaud tout-au-tour d’environ deux piés de haut ; s’il y a deux couches ou plus, on ne donne cette épaisseur que du côté isolé. Quand les réchauds sont faits, on jette quelques voies d’eau par-dessus, pour empêcher le fumier de brûler la terre ; on fait les réchauds plus élevés que les couches, parce qu’ils s’affaissent promptement, & on les recharge de nouveau fumier pour les tenir continuellement un peu plus hauts que les couches. (D. J.)