L’Encyclopédie/1re édition/SAUF-CONDUIT

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Sauf-conduit, (Droit politiq.) les sauf-conduits sont des conventions faites entre ennemis & qui méritent qu’on en dise quelque chose. On entend par sauf-conduit un privilege accordé à quelqu’un des ennemis sans qu’il y ait cessation d’armes, & par lequel on lui accorde la liberté d’aller & de venir en sûreté.

Toutes les questions que l’on propose sur les sauf-conduits peuvent se décider, ou par la nature même des sauf-conduits accordés, ou par les regles générales de la bonne interprétation.

1°. Un sauf-conduit donné pour des gens de guerre regarde non-seulement des officiers subalternes, mais encore ceux qui commandent en chef, c’est l’usage naturel & ordinaire des termes qui le veut ainsi.

2°. Si l’on permet à quelqu’un d’aller dans un certain endroit, on est aussi censé lui avoir permis de s’en retourner, autrement la premiere permission se trouveroit souvent inutile ; il pourroit cependant y avoir des cas où l’un n’emporteroit pas l’autre.

3°. Si l’on a accordé à quelqu’un la liberté de venir, il ne peut pas pour l’ordinaire envoyer quelqu’autre à sa place ; & au contraire celui qui en a permission d’envoyer quelqu’un ne peut pas venir lui-même ; car ce sont deux choses différentes, & la permission doit naturellement être restrainte à la personne même à qui elle est accordée, car peut-être ne l’auroit-on pas accordée à une autre.

4°. Un pere à qui l’on a accordé un sauf-conduit, ne peut pas mener avec lui son fils, & un mari sa femme.

Pour les valets, quoi qu’il n’en soit fait aucune mention, on présume qu’il est permis d’en mener un ou deux, ou même davantage, selon la qualité de la personne.

6°. Dans le doute & pour l’ordinaire, le privilege d’un sauf-conduit ne s’éteint pas par la mort de celui qui l’a accordé ; rien n’empêche cependant qu’il ne puisse, pour de bonnes raisons, être révoqué par le successeur ; mais alors il faut que celui à qui le sauf-conduit avoit été donné soit averti de se retirer, & qu’on lui accorde le tems nécessaire pour parvenir en lieu de sûreté.

7°. Un sauf-conduit accordé pour aussi long tems qu’on voudra, emporte par lui-même une continuation du sauf-conduit, jusqu’à ce qu’on le révoque bien clairement ; car sans cela, la volonté est censée subsister toujours la même quelque tems qui se soit écoulé ; mais un tel sauf-conduit expire, si celui qui l’avoit donné vient à n’être plus revêtu de l’emploi en vertu duquel il l’avoit donné. Voilà les principes du droit politique les plus communs sur cette matiere ; cet Ouvrage ne permet pas de plus grands détails (D. J.)