L’Encyclopédie/1re édition/SCHÉLESTAT

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SCHÉLESTAT, (Géog. mod.) on écrit aussi Selestat, Nestat & Schlestat, mais je suis l’ortographe la plus commune, en remarquant qu’on écrivoit autrefois Soladistat, comme on le voit par les anciennes annales de Charlemagne. Ville de France dans la haute Alsace, sur l’Iss, à 4 milles de Brisac, & à 3 au midi de Strasbourg. Long. 25. 12. lat. 48. 16.

Schélestat a succéde à l’ancienne ville d’Ell, appellée dans les itineraires Elcebum, & dans la table de Peutinger Helellum ; en sorte que l’ancienne Ell n’est plus qu’un petit village des environs. Schélestat étoit déja considérable du tems de Charlemagne qui y célébra la fête de Noël, & le premier jour de l’an 776. L’empereur Charles le gros y avoit un palais où il faisoit quelquefois sa résidence, comme le prouve plusieurs de ses chartes données en ce lieu.

Cette ville tomba néanmoins dans la décadence jusqu’au xiij. siecle, que Wolfelin préfet d’Alsace, la fit fermer de murailles en 1216, la rendit franche, & la peupla d’habitans. L’empereur Sigismond lui donna le pouvoir de choisir ses magistrats. Louis XIV. la prit l’an 1673 ; & la fit fortifier l’an 1679, après la paix de Nimégue ; c’est aujourd’hui un gouvernement de place avec état major.

Bucer (Martin) né à Schélestat l’an 1491, mort à Cambridge l’an 1551, se montra l’un des plus habiles théologiens protestans de son siecle. Non-seulement il savoit prêcher & faire des livres, mais il étoit encore très-propre à manier les affaires ecclésiastiques. S’il n’eut pas le bonheur de pacifier les différens des Luthériens & des Zuingliens, ce ne fut ni manque de zele, ni de beaucoup de dextérité. Il ne s’amusa point en Angleterre à condamner la hiérarchie ; il témoigna tout au contraire qu’il n’approuvoit pas sur cet article les idées de Calvin.

Beatus Rhenanus, né à Schélestat en 1485, & mort à Strasbourg en 1547, âgé de 62 ans, s’acquit aussi beaucoup de gloire par sa modération dans les disputes théologiques, & dans les belles-lettres par ses commentaires sur Pline, Tite-Live, Velleius Paterculus, Tacite & autres historiens de l’ancienne Rome. Ses ouvrages furent imprimés à Basle en 1551, & à Strasbourg en 1610.

Wimphelinge (Jacques), son compatriote, avoit déja rompu la glace dans l’étude de la littérature, & s’étoit même distingué dans la poésie. Les Augustins le firent citer à Rome, pour avoir écrit que S. Augustin n’avoit jamais été moine ; mais le pape Jules II. assoupit la mauvaise querelle qu’on faisoit à ce savant. Il a laissé quelques ouvrages sur divers sujets, & entr’autres un traité assez curieux sur les hymnes. Il mourut dans sa patrie en 1528, à 79 ans. (D. J.)