L’Encyclopédie/1re édition/SCHOENE

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SCHOENE D’EGYPTE, s. m. (Mesure itinér. anc.) mesure itinéraire évaluée par Hérodote à 60 stades.

Les écrivains de l’antiquité en traitant de l’Egypte, font mention de cette mesure géodésique, qu’ils désignent par le terme grec σχοῖνος, dont la signification est la même qu’en latin funis, autrement juncus, c’est-à-dire un cordeau, une canne, ou un roseau. S. Jerôme, dans son commentaire sur Joël, nous fait connoître d’où venoit l’usage de désigner ainsi la mesure dont il s’agit. Il dit que les bateaux sont tirés sur les rives du Nil par des hommes, ce que nous appellons haller à la cordelle, & que la longueur de chaque espace, au terme duquel les bateliers se relaient dans ce travail, est nommé funiculus.

Peu de savans ont été curieux de rechercher l’évaluation qu’on doit donner au schoene d’Egypte. Cette évaluation est néanmoins très-importante, en ce que diverses distances qui sont indiquées par schoenes, si elles ne sont pas connues par une analyse, peuvent paroître peu convenables dans leur application au local actuel, & contradictoires même à d’autres indications qui se trouvent également dans l’antiquité.

Hérodote dit dans son second livre, que chez les Egyptiens on mesure les grands espaces de terre par schoenes, à la différence des espaces moins étendus, qui se mesurent par orgyes, par stades & par parasanges, en suivant la gradation qui fait enchérir ces mesures l’une sur l’autre. Il ajoute ensuite une définition formelle du schoene à 60 stades, définition qui est confirmée par la comparaison du nombre des schoenes à celui des stades en plusieurs distances ; comme lorsqu’il compare 3600 stades à 60 schoenes, qui se comptoient dans ce que l’Egypte avoit d’étendue sur la mer Méditerranée. Diodore de Sicile a connu de même la mesure du schoene sur le pié de 60 stades, puisque les dix schoenes qu’il compte entre Memphis & le lac Myris ou Moeris, sont par lui évalués à 600 stades.

Enfin M. d’Anesille a trouvé par des recherches dans l’antiquité, plusieurs moyens de reconnoître la mesure du schoene & de l’évaluer. Nous n’en citerons qu’un pour exemple. L’itinéraire d’Antonin indique une mansion sous le nom de Penta-schoenon ; dans l’intervalle du mont Casius à Peluse ; & la distance est marquée également à l’égard de l’un & de l’autre de ces lieux, sur le pié de 20 milles. De cette maniere il y a tout lieu d’inférer que la position intermédiaire tirant sa dénomination de la distance respective à l’égard de deux points différens, distance valant cinq schoenes d’un côté comme de l’autre, le schoene est compensé par quatre milles romains.

Cette compensation convient à ce que dit Pline, que le schoene est composé de 32 stades ; aliqui xxxij stadia singulis schoenis dedere ; car, selon l’emploi le plus général du stade, sur le pié de huit pour le mille romain, les 32 stades sont l’équivalent de 4 milles. Or la mesure du mille romain, selon la scrupuleuse analyse, s’évaluant à 756 toises, le schoene comparé à quatre milles, revient à 30 milles 24 toises ; & le stade qui sert à la composition du schoene, étant fort inférieur en mesure au stade grec olympique, se borne à 50 toises 2 piés 5 pouces moins quelques lignes. Mém. des Inscript. tom. XXVI. in-4°. (D. J.)