L’Encyclopédie/1re édition/SEMOIR

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SEMOIR, s. m. (Economie rustique, Agricult.) machine avec laquelle on ensemence les terres. On en a inventé de différentes sortes ; celui que nous donnons réunit à une construction facile, la sureté de ses effets, & les différens avantages de tous ceux qui ont paru jusqu’à present ; l’objet que l’on se propose en se servant de ces machines, est d’économiser & de distribuer également les grains dont on ensemence les terres, & d’obtenir des recoltes plus abondantes.

La machine dont il s’agit, representée dans les Planches d’Agriculture, est composée d’un cylindre dont la surface est entaillée de plusieurs cellules dans lesquelles le grain se place, & dans lesquelles il est enlevé à mesure que ce cylindre tourne, pour être versé dans les sillons que les socs dont cet instrument est armé, ont tracés dans la terre précédemment ameublie par les labours ordinaires, où il est aussitôt recouvert par des herses, ensorte qu’il ne devient point la proie des oiseaux.

La fig. 1. Pl. représente le semoir tout monté & en perspective, & la fig. 2. en est l’élévation latérale. AB DC, les deux brancards AD BC, les deux traverses qui les assemblent. Bg, Ch, les mancherons assemblés dans les extrémités des brancards & reliés ensemble par une entretoise CB, fig. 5. Les deux brancards sont aussi traversés par l’essieu des roues, qui a la liberté de tourner avec une d’elles à laquelle il est fixé par la cheville de fer y. Sur les bouts antérieurs A & D des brancards. sont fixés plusieurs crochets de fer, aux uns ou aux autres desquels on attache les traits du cheval qui tire cette machine, selon que l’on veut qu’elle charge plus ou moins en arriere sur les brancards ; entre les mancherons & les roues est fixe solidement un coffre de bois, dans lequel est renfermé le cylindre dont on voit un des tourillons en k dans les faces latérales du coffre, qui sont fortifiées en cet endroit par une piece de bois circulaire, dont le tourillon occupe le centre.

Au dessous des brancards & du coffre est fixée solidement une forte planche, à laquelle sont fixés les six socs GH, dont on ne peut voir que deux dans la fig. 2. les trois socs G, que nous nommerons antérieurs, & les trois socs H, que nous nommerons postérieurs, étant cachés par les premiers de leurs rangées, ils sont disposés tous les six en échiquier, & espacés de maniere que les sillons qu’ils tracent parallelement sur le terrein, sont tous éloignés les uns des autres de six pouces ; les trois socs antérieurs tracent les sillons marqués par les trois lignes 1, 3, 5 ; & les socs postérieurs, ceux marqués par les lignes 2, 4, 6, fig. 5. & les trois dents de herse KLK, tracent d’autres sillons tux, qui servent à combler les premiers, après que la semence y est tombée par les entonnoirs ou couloirs qui sont placés derriere les socs ; une seule dent de herse remplit à la fois deux sillons ; la dent L qui trace la ligne u rejette la terre dans les deux sillons 3, 4, & chacune des deux dents KK, qui décrivent les lignes t & x, la rejette dans les sillons 1, 2, 5, 6, ensorte que tout le grain que cette machine a repandu, est entierement couvert.

Le coffre qui contient le cylindre, est divisé par dix cloisons paralleles entr’elles & aux faces latérales du coffre ; l’espace, coté 1, fig. 5. & qui répond au-dessus du premier soc antérieur, à main droite, est occupé par la premiere partie du cylindre cellulaire KK ; ainsi de ceux cottés 2, 3, 4, 5, 6 ; les espaces intermédiaires sont seulement occupés par l’axe ou corps du cylindre, d’un moindre diametre que la surface cellulaire ; les cloisons dont on en voit une représentée séparément, fig. 10, s’appliquent exactement par leur plan, contre les bases des différentes tranches cylindriques 1, 2, 3, 4, 5, 6, aussi-bien que les deux faces intérieures des côtés du coffre, elles s’appliquent aussi par leur partie ceintrée, sur le corps du cylindre ; chacune des cloisons peut se placer ou se déplacer à volonté, étant mobiles, entre deux petites tringles de bois qui leur servent de coulisses, lesquelles sont placées contre les longs côtés du coffre.

Au milieu du cylindre, dans l’espace qui sépare les deux divisions 3, 4, est fixée une poulie polygone, dont on voit le profil en B, fig. 8, aussi-bien que d’une semblable poulie C, appartenant à l’essieu des roues ; les nombres des côtés de ces poligones, doivent être pairs, & occupés alternativement par des chevilles de fer, de forme pyramidale quadrangulaire tronquée, comme on voit en abcd, fig. 8. & 13 ; ces éminences servent à retenir la chaine sans fin, qui embrasse les deux poulies C & B, par le moyen de laquelle le mouvement communiqué à l’axe des roues, est transmis au cylindre que le coffre renferme ; la face antérieure du coffre est percée de deux ouvertures inférieures, pour laisser entrer la chaine, & la supérieure pour la laisser sortir ; on voit, fig. 6. le cylindre cellulaire, l’axe des roues, & la chaine plate VN qui les embrasse, & dont la construction est détaillée plus en grand dans la fig. 13, même Planche.

La fig. 7. représente l’axe des roues ; M est une portée qui s’applique contre la face intérieure d’un des brancards ; MP est une partie de l’axe qui est quarrée, & sur laquelle glisse le verrouil représenté en A & B fig. 9. & en ΛΔ fig. 5. P Q partie arrondie de l’axe sur laquelle tourne la noix ; la grosseur de cette partie est telle qu’elle peut laisser passer le verrouil, c’est-à-dire égale au cercle inscrit dans la partie quarrée ; Qy, My, sont les parties de l’essieu qui entrent dans les moyeux des roues ; la noix C & D, fig. 9. qui porte la petite poulie polygone C, fig. 8, peut tourner ou ne pas tourner avec l’axe, sur la partie PQ selon que les points 1, 2, 3, du verrouil, sont ou ne sont pas engagés dans les trous 4. 4. de la poulie auprès de laquelle le verrouil s’approche en glissant sur la partie quarrée MP de l’axe. Dans la fig. 5. le verrouil ΛΔ est en prise dans la poulie de la noix P, ce qui fait qu’elle doit tourner avec l’axe des roues, & faire par conséquent, au moyen de la chaine, tourner le cylindre cellulaire ; au-lieu que dans la fig. 6. les dents 1, 3, du verrouil n’étant point engagées dans les entailles de la poulie de la noix, il peut tourner sans que celle C tourne, & sans le cylindre cellulaire.

Pour pousser ou éloigner le verrouil de la poulie de la noix, on se sert du gouvernail FETR, fig. 1, 2, 3, 4, 5, & 11. Fl levier assemblé à charniere avec la piece E ; cette piece est percé d’un trou quarré qui reçoit l’axe de l’arbre vertical ET dont le collet supérieur est embrassé par une bride adhérente au couvercle du coffre ; le tourillon inférieur T roule dans un trou pratiqué à la face supérieure de la planche à laquelle les socs sont attachés ; TR, fig. 11. est une fourchette entre les branches de laquelle la gorge 6, 6, 7, fig. 6. & 9, est saisie, sans que cela l’empêche de tourner librement : lors donc que l’on pousse le pommeau F du gouvernail, à droite, l’extrémité R de la fourchette pousse le verrouil contre la noix, & les pêles 1, 2, 3, étant entrés dans les gaches ou mortaises 4, 4, destinées à les recevoir, ces deux pieces sont alors fixées sur l’arbre, & obligées de tourner avec lui ; pour au contraire éloigner le verrouil, il suffit de pousser le pommeau F du gouvernail dans le sens opposé, c’est-à-dire de droite à gauche, & les pêles 1, 2, 3, étant sortis des gaches de la noix, celui-ci pourra continuer de tourner, sans que la noix ni la chaine aient aucun mouvement, & la machine cessera de répandre la semence. Pour fixer le gouvernail dans l’un ou l’autre de ces deux états, il y a sur le couvercle du coffre, fig. 1. une piece de bois mn d’une longueur convenable, contre laquelle on appuie le gouvernail, ce qui assujettit le verrouil dans l’une ou l’autre situation ; c’est pour faciliter ce mouvement que l’on a fait la charniere l, qui permet de lever le gouvernail, pour le faire passer sur la piece mn ; cette charniere permet aussi d’élever le gouvernail assez haut pour pouvoir ouvrir le couvercle du coffre & verser du grain dans les trémies.

Tout ceci bien entendu, il reste à expliquer où on place la semence, & de quelle maniere elle sort de son réceptacle pour se répandre uniformément dans les sillons que les socs tracent à mesure que la machine avance ; c’est ce que les fig. 3. & 4. font voir ; la fig. 3. est une coupe longitudinale du semoir, par un plan qui passeroit par le milieu d’un des trois socs antérieurs ; & la fig. 4, une coupe semblable, mais par le milieu d’un des trois socs postérieurs ; dans l’une & l’autre figure, le cylindre cellulaire tourne du même sens, c’est-à-dire selon l’ordre des lettres dbefp. dbers. ab est une petite planche qui fait le fond de la trémie ; elle est assemblée dans des rainures pratiquées dans les faces des cloisons qui regardent les cellules ; bd autre petite planche ceintrée, ou feuille de fer blanc, logée dans des entailles circulaires concentriques au cylindre, pratiquées dans les cloisons, fig. 10, ensorte que ces planches courbes puissent être mues concentriquement au cylindre, pour approcher ou éloigner leur extrémité inférieure d à discrétion, du morceau de bois n qui est le fond de la trémie. On fixe ainsi cette piece par le moyen de la vis b qui la traverse, aussi-bien que la planche supérieure ab ; on remplit du grain que l’on veut semer, tout l’espace abd, & le semoir est chargé ; le grain dont les trémies sont remplies, s’écoule par dessous l’extrémité inférieure de la lame courbe bd, & remplit successivement les cellules du cylindre, à mesure qu’elles passent devant l’ouverture qui est entre la lame courbe & la piece n qui doit toucher le cylindre ; les cellules remplies de grain, montent par-dessous la lame courbe db, & le versent du côté de e, dans l’entonnoir ou couloir efp, fig. 3. ers, fig. 4. attaché à la partie postérieure de chacun des socs par où il tombe dans le sillon que le soc a tracé, où il est aussi-tôt recouvert par la terre que les herses y repandent, comme il a été dit ci-dessus ; on voit par la fig. 3. que les socs antérieurs G sont fixés à la planche qui est au-dessous des brancards par un tenon & une clé x, & par la fig. 4. on voit que les socs postérieurs Hy sont affermis par un tenon & un étrier de fer x, & que le couloir rs traverse leur masse : la partie antérieure des uns & des autres qui est arrondie, est garnie d’un sabot de forte taule, attaché avec plusieurs clous pour les conserver, ainsi que l’on peut voir dans toutes les figures.

La fig. 12. représente plus en grand, une des tranches cylindriques du cylindre cellulaire, où l’on voit la disposition de cellules dont la partie inférieure est plane, & la supérieure arrondie ; cette disposition étoit nécessaire pour que d’un côté elles ramassassent mieux le grain, & de l’autre, après qu’elles l’ont monté à la partie supérieure, elles le répandissent avec plus de facilité dans les couloirs destinés à le porter au fond des sillons.

La fig. 13. représente en grand la construction de la chaîne plate N V fig. 6. composée alternativement de maillons quarrés & vuides, & de maillons pleins ; les premiers sont des anneaux de fer, & les seconds des plaques de fortes taules, dont les extrémités sont ployées en rond pour embrasser les parties transversales des maillons ou boucles quarrées qui sont arrondies ; la longueur des uns & des autres doit être égale aux côtés des polygones sur lesquels ils doivent s’appliquer ; on voit au-dessous le profil de trois des chevilles ou pyramides tronquées dont chacun des polygones est hérissé, & qui entrent successivement dans les maillons évuidés de la chaîne sans fin, ensorte que la noix fixée à l’essieu des roues, par le verrouil, ne sauroit tourner sans entraîner nécessairement avec elle, le cylindre cellulaire distributeur de la semence, & dont le rapport de la vîtesse à la vîtesse des roues, est le même que celui du nombre des côtés du polygone fixé sur leur essieu, au nombre des côtés du polygone fixé sur le cylindre ; c’est-à-dire dans la figure comme 12 à 20. ainsi il faut que les roues fassent vingt tours, pour en faire faire douze au cylindre.