L’Encyclopédie/1re édition/SICYONE

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SICYONE, (Géog. anc. & mod.) ville du Péloponnese dans l’Achaïe propre, & dans les terres, près de l’Asopus. Cette ville autrefois puissante, & qui eut ses propres rois, devint ensuite libre ; & durant la guerre des républiques de la Grece, elle fut tantôt soumise aux Athéniens, tantôt aux Lacédémoniens. Justin dit, liv. XIII. ch. v. Démosthenes, Sicyona, Argos, & Corinthum, cæterasque civitates eloquentiâ suâ, Atheniensibus junxit. Quoique Sicyone fut dans l’Achaïe, comme le marque Pline, l. IV. ch. v. cependant elle se trouve avoir été comprise dans l’Argolie.

Le royaume de Sicyone est le plus ancien royaume qui ait été dans la Grece. Son premier roi s’appelloit Egialée, & selon Eusebe, le commencement de son regne précéda de 74 ans la naissance d’Abraham. Le dernier roi, qui étoit le vingt-sixieme, s’appelloit Zeuxippus. Après lui, la forme du gouvernement changea ; les prêtres d’Apollon exercerent l’autorité souveraine pendant 30 ou 40 ans ; & enfin les rois d’Argos & de Mycenes s’en emparerent. Ce royaume dura 962 ans ; il finit lorsqu’Hélie étoit souverain sacrificateur & juge des Juifs.

On célebroit à Sicyone de cinq en cinq ans des jeux pythiens en l’honneur d’Apollon, & on y donnoit pour prix des coupes d’argent. Les ouvriers de cette ville le disputoient à ceux de Corynthe pour la perfection des ouvrages. Dipænus & Scyllis enrichirent Sicyone des plus belles statues en marbre ; ils formerent plusieurs éleves, qui sculpterent tant de figures de dieux, que les Sicyoniens en prêterent à leurs voisins, qui n’en avoient point encore ; mais le culte que les Sicyoniens rendoient à Bacchus, étoit trop honteux pour être agréé dans d’autres pays ; car ils adoroient ce dieu sous un nom si contraire à la décence, qu’il n’y a que des gens très-effrontés qui osassent le proférer dans une conversation libre ; du moins c’est ce qu’assure Clément d’Alexandrie, admonit. ad gentes, p. 15.

Le luxe étoit fort répandu à Sixyone ; les souliers de cette ville passerent en proverbe ; ils étoient si galans, qu’il n’étoit pas permis à un homme grave de les porter.

Mais au milieu de ce luxe, Sicyone donna la naissance à l’un des plus grands capitaines de l’antiquité ; je veux parler d’Aratus, qui défit Nicoclès tyran de sa patrie, s’empara de la citadelle de Corinthe, chassa le roi de Macédoine, & délivra la ville d’Argos de ses usurpateurs. Philippe II. roi de Macédoine, le fit empoisonner, vers l’an 214 avant J. C. Il mourut à Egion, & son corps fut porté à Sicyone, où on lui éleva un monument qui subsistoit encore du tems de Pausanias. Aratus avoit écrit l’histoire des Achéens, qui s’est perdue, & dont Polybe fait un grand éloge.

Prascilla, qui se rendit illustre par ses poésies lyriques, étoit aussi de Sicyone. Elle vivoit en la 28e. olympiade, selon Eusebe. Suidas & Athénée la citent quelquefois. Phylarque naquit, selon quelques-uns, à Sicyone, & mit au jour plusieurs ouvrages historiques, entr’autres une histoire de l’expédition de Pyrrhus dans le Péloponnese. Plutarque parle de cet auteur grec. Athénée & les scholiastes de Pindare, citent l’histore de Sicyone donnée par Menechme, qui y étoit né, & qui florissoit du tems des premiers successeurs d’Alexandre. Si cette histoire nous fût parvenue, nous serions instruits de mille choses curieuses que nous ignorons sur le royaume de ce nom.

La ville de Sicyone a été souvent endommagée par des tremblemens de terre. Celle que l’on a rebâtie sur son territoire, se nomme présentement Vasilica, ou Basilica ; elle appartient au turc ; elle avoit encore quelque apparence, lorsque les Vénitiens étoient maîtres de la Morée ; mais ce n’est plus à présent qu’un monceau de ruines ; ce monceau est situé sur une montagne, à une lieue du golfe de Lépante, & la riviere Asopus passe au-dessous. Voyez Sicyonie. (D. J.)

Sicyone, (Lexicog. medic.) σικυώνη ; ce mot dans les médecins grecs désigne tantôt une figue sauvage, tantôt la coloquinte, & tantôt une ventouse conique, ouverte par son extrémité pointue. (D. J.)