L’Encyclopédie/1re édition/VOLATERRAE

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VOLATERRAE, (Géog. anc.) ville d’Italie, dans l’Etrurie, l’une des douze premieres colonies des Toscans, & plus ancienne de cinq cens ans que Rome même. Strabon, l. V. p. 154. dit qu’elle est située dans une vallée, & que la forteresse qui la défendoit étoit sur le haut d’une colline. Elle soutint trois ans le siége contre Sylla, devint ensuite un municipe, & eut le titre de colonie. Les thermes de son territoire sont nommés dans la table de Peutinger aquæ volaternæ ; cette ville conserve son ancien nom ; car on l’appelle Volterra, ou Volterre. Il y avoit encore dans le dernier siecle une maison de son voisinage qu’on nommoit l’Hospitalité, bâtie sur le champ de bataille où Catilina fut tué.

Perse, en latin Aulus Persicus Flaccus, poëte satyrique, naquit à Volaterra, d’une maison noble & alliée aux plus grands de Rome ; il mourut dans sa patrie âgé de 28 ans, sous la huitieme année du regne de Néron. Il étudia sous un philosophe stoïcien nommé Cornutus, pour lequel il conçut la plus haute estime. Il a immortalisé dans ses ouvrages l’amitié & la reconnoissance qu’il avoit pour cet illustre maître ; & à sa mort il lui légua sa bibliotheque, & la somme de vingt-cinq mille écus ; mais Cornutus ne se prévalut que des livres, & laissa tout l’argent aux héritiers.

Perse étudia sous Cornutus avec Lucain dont il se fit admirer ; il méritoit son estime & celle de tout le monde, étant bon ami, bon fils, bon frere, & bon parent ; il fut chaste, quoique beau garçon, plein de pudeur, sobre, & doux comme un agneau. Il est très-grave, très-sérieux, & même un peu triste dans ses écrits ; & soit la vigueur de son caractere supérieure à celle d’Horace, soit le zele qu’il a pour la vertu, il semble qu’il entre dans sa philosophie un peu d’aigreur & d’animosité contre ceux qu’il attaque.

On ne peut nier qu’il n’ait écrit durement & obscurément ; & ce n’est point par politique qu’il est obscur, mais par la tournure de son génie ; on voit qu’il entortille ses paroles, & qu’il recourt à des figure ; énigmatiques, lors même qu’il ne s’agit que d’insinuer des maximes de morale ; mais Scaliger le pere, & d’autres excellens critiques, n’ont point rendu à ce poëte toute la justice qui lui étoit dûe ; M. Despréaux a mieux jugé de son mérite, & s’est attaché à imiter plusieurs morceaux de ses satyres. (D. J.)