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L’isotopie et les éléments isotopes/10

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Société « Journal de Physique » (9p. 106-122).


CHAPITRE X

ANALYSE DES MASSES


Les résultats de cette analyse sont indiqués ici, d’après les auteurs, et principalement d’après Aston. L’ordre suivi est fréquemment le même, conforme à l’évolution progressive des recherches. Les éléments sont, de plus, distingués en deux groupes, selon que les rayons positifs ont été produits dans un tube à gaz ou dans un tube à anode incandescente.

On a désigné par m la masse atomique ou moléculaire déterminée à l’aide des rayons positifs et rapportée à l’oxygène O = 16, par n le nombre d’unités de charge, par P le poids atomique chimique. Pour des groupes de lignes où n = 1, on a indiqué, au lieu du rapport , la masse m qui est mesurée par le même nombre.

27. Rayons positifs des gaz (Planches II et III).

Oxygène P = 16. — L’oxygène est considéré comme étalon de masse. Il fournit 3 lignes fondamentales :

Atome à charge simple 
O+
-- --------- double 
O+ + --»--- 08
Molécule à charge simple 
O2+ --»--- 32


Aucun indice de complexité n’étant observé cet élément est considéré comme simple.

Carbone P = 12.00. — On obtient les lignes suivantes en présence d’oxygène :

Atome à charge simple 
C+
-- --------- double 
C+ + --»--- 06
Molécule CO à charge simple 
CO+ --»--- 28
--- ----CO2----------- 
CO2+ --»--- 44

Aucune ligne n’indique une structure complexe. Le rapport des lignes C+ et CO+ à celles de l’oxygène correspond aux nombres entiers 12 et 28 à la précision du millième que peut donner la mesure. Le carbone est donc un élément simple, de poids atomique entier.

Les lignes du carbone et de ses composés oxygénés apparaissent généralement sur les clichés, par suite de l’introduction de petites quantités de gaz carbonique ou d’oxyde de carbone dans le tube de production, afin de faciliter son fonctionnement.

Hydrogène P = 1,008. Hélium P = 4,00. L’hydrogène joue un rôle très important dans l’étude des rayons positifs. Il est toujours présent dans les tubes à décharge. Ses lignes sont très intenses et peuvent être observées sur l’écran de willémite ; elles sont utilisées pour le réglage du spectrographe. On observe l’atome à charge simple H+ et la molécule H2+ à charge simple. On observe aussi H3+ sous certaines conditions (voir p. 88).

La détermination exacte de la masse de l’hydrogène a été effectuée par comparaison avec celle de l’hélium, comparée elle-même aux masses étalons. Ce procédé a permis d’atteindre une sensibilité élevée.

L’hélium fournit très facilement la ligne He+, mais il a été impossible d’obtenir la ligne He+ +, bien que celle-ci corresponde à l’état dans lequel l’hélium est émis par les radioéléments, lors de transformations radioactives. La difficulté pour libérer le noyau d’hélium est à rapprocher du potentiel d’ionisation très élevé (environ 80 volts) qui correspond à la perte des deux électrons [63]. D’après Aston, un noyau d’hélium mis en liberté ne peut manquer de reprendre un électron lors de son passage entre les fentes ou dans la région du champ.

Pour comparer entre elles les masses H+, H2+, H3+, He+, O+ +, Aston a utilisé la méthode d’encadrement (voir p. 104). Avec l’emploi successif de potentiels 250 volts, . et ., à champ magnétique constant, la ligne H2+ apparut entourée symétriquement par deux lignes atomiques H+ ce qui prouve que la masse de la molécule est exactement double de celle de l’atome. Le champ magnétique ayant été augmenté, les mêmes opérations ont été répétées pour les lignes He+ et H2+, mais cette fois, la parenthèse n’est symétrique ni quand la ligne H2+ est comprise entre deux lignes He+ ni quand la ligne He+ est comprise entre deux lignes H2+. On en déduit que la masse de l’hélium est moins du double de celle de la molécule d’hydrogène. La même méthode est ensuite utilisée pour la comparaison des masses He+ O+ + et H3+. Les résultats sont contrôlés par la comparaison directe des masses He+ et C+ + ainsi que H3+ et He+.

Les résultats les plus précis ont été résumés dans le tableau suivant :

      Masse de comparaison   Masse mesurée
He+
Méthode d’encadrement 
O+ +00 = 8 3,994 — 3,996
Méthode directe 
C+ +x00»  = 6 4,005 — 4,010
H3+
Méthode d’encadrement 
C+ +x00»  = 6 3,025 — 3,027
Méthode directe 
He+x00 »  = 4 3,021 — 3,030
H2+
Méthode d’encadrement 
He+x00 »  = 4 2,012 — 2,018

Aston a conclu de ces nombres que l’hydrogène est un élément simple dont le poids atomique doit être admis égal à 1,008 conformément aux déterminations chimiques précises. Il admit aussi que le composé H3 est une molécule triatomique d’hydrogène à charge simple et que l’hélium est un élément simple.

Ainsi que l’avait déjà observé J. J. Thomson, l’atome d’hydrogène n’apparaît jamais avec charge multiple. Ceci résulte de ce que cet atome dont le nombre atomique est 1, ne possède qu’un électron, et ne peut perdre que celui-là. Dépourvu de cet électron unique, l’atome d’hydrogène est réduit à l’état de noyau, ou électron positif et reçoit, à cet état, le nom de proton.

L’hydrogène présent dans les tubes à décharge s’associe avec l’oxygène et avec le carbone pour donner lieu à des lignes moléculaires, qui constituent des groupes de référence très utiles. Aston considère les groupes suivants :

Groupe C1
CHx +00 m = 1200000000 Groupe C2
m = 24
CH   + m»  13  »xx 25
CH2 + m»  14  »xx 26
CH3 + m»  15  »xx 27
CH4 + m»  16  »xx 28
OH  + m»  17  »xx 29
OH2 + m»  18  »xx 30
CH3 + m»  19

Ces groupes proviennent de traces de vapeur d’eau, de la graisse des rodages et de gaz carbonés introduits dans le tube.

Azote P = 14,01. Cet élément donne une ligne atomique Az+ et une ligne moléculaire Az2+ qui ne peuvent être distinguées, à la précision de l’appareil, des lignes CH2+ et CO+. D’autre part, la ligne de second

PLANCHE II
Spectres de masses.
(Reproduction autorisée par les éditeurs du Philosophical Magazine).
PLANCHE III
Spectres de masses.
(Reproduction autorisée par les éditeurs du Philosophical Magazine).



ordre Az+ + mesurée avec précision, correspond à = 7 exactement. On admet que cet élément est simple.

Bore P = 10,90.xxFluor P = 19,00. Ces éléments ont été examinés simultanément. Leurs poids atomiques ont fait l’objet d’une révision récente [64]. Les tentatives faites pour obtenir les lignes du bore au moyen de l’hydrure n’ayant pas réussi, Aston a utilisé le trifluorure de bore, préparé à partir d’acide borique et de borofluorure de potassium. Ce gaz a été mélangé avec du gaz carbonique, avant l’introduction dans le tube à décharge. Lors du fonctionnement de celui-ci, l’anticathode en silice s’altère visiblement, et le tube est mis hors d’usage. En même temps, réapparaissent dans les spectres les traces de gaz qui avaient été présents dans le tube lors d’expériences préalables, mais qui avaient été éliminés aussi complètement que possible. Cet effet est lié à l’altération des parois.

Les lignes intenses 10 et 11 sont attribuées au bore comme lignes de premier ordre ; elles sont accompagnées de lignes de second ordre 5 et 5,5. On en conclut que le bore se compose de deux isotopes B10 et B11. Les intensités relatives des lignes ne correspondent pas bien au poids atomique moyen ; toutefois, on n’a pu conclure à l’existence d’un isotope de poids atomique 12 qui eût pu expliquer la divergence.

Le poids atomique du fluor est très exactement un nombre entier, et conformément à la présomption qui en résulte, cet élément se montre simple. Il présente une forte ligne F+, m = 19 et une ligne de second ordre F+ +, = 9,5. Une ligne très faible m = 20 est attribuable à HF+. On observe encore les lignes B10 F2+ (m = 48) et B11 F2+ (m = 49).

Aluminium P = 26,96. Ce corps donne une forte ligne, m = 27, qui provient probablement de l’attaque des électrodes. Il est considéré comme simple [66].

Silicium P = 28,3[1]. Dans les spectres obtenus avec le trifluorure de bore on remarque une ligne m = 47 qui est attribuée au fluorure de silicium résultant de l’attaque de l’anticathode. Pour contrôler ce fait on introduisit dans le tube purgé de bore, du tétrachlorure de silicium préparé par l’action de l’acide sulfurique sur le fluorure de calcium et la silice. L’intensité des lignes du bore 48 et 49 fut réduite, alors que la ligne 47 demeurait intense. Elle doit être attribuée au composée Si28 F+ de sorte que Si28 est un composant important du silicium. Cette conclusion est confirmée par la présence de fortes lignes 66 et 85 qui correspondent au bifluorure et au trifluorure de silicium. On trouve de plus un deuxième silicium Si29.

Voici l’ensemble des valeurs observées

000 47  xxxxxxxxxxxxxxxx  29
66 000 14,5
85 48
  67
86

Un dernier groupe de lignes 30, 49, 68, 87, suggère l’existence d’un troisième isotope Si30 rendu probable aussi par les intensités relatives des lignes de Si28 et Si29. Toutefois, le degré de certitude n’est pas le mêmeque pour Si28 et Si29.

Le fluor jouit de la propriété exceptionnelle de former des composés moléculaires à charge double avec le bore ou le silicium. Ainsi s’expliquent les lignes 23,50, 24,50 et 33,50, lignes de second ordre correspondant respectivement aux lignes de premier ordre 47, 49 et 67.

Néon P = 20,20. Une des premières recherches effectuées à l’aide du spectrographe de masses a été l’analyse du néon, en vue de la confirmation de l’hypothèse de J. J. Thomson déduite d’expériences faites par la méthode des paraboles (voir p. 89). Les meilleurs résultats ont été obtenus avec un mélange d’oxyde de carbone et de néon, à 20 % environ de néon.

Le néon apparut sur les spectres avec ses deux lignes du premier ordre et deux lignes du second ordre, appartenant à deux composants de masse 20,00 et 22,00, à la précision de 0,1 %. Voici la série de mesures qui ont conduit à ce résultat [65] :

Moy.000 Premier ordre xxxxxxxxxxxxxxxxxxxx Second ordre
20,00000 22,00 09,98000 11,00
19.95 22,01 10,02 10,99
20,00 21,90 10,01 11,06
19,98 22,10 09,98 10,98
20,00 22,03 09,98 11,01
19,90 21,98
19,97 22,00 10,00 11,00

Les intensités de ces lignes sont en accord avec la proportion 9 à 1 qui correspond au poids atomique moyen 20,20. Une ligne faible suggère la possibilité de l’existence d’un troisième isotope Ne21, mais pourrait aussi appartenir à un hydrure.

Phosphore P = 31,04.--Arsenic P = 74,96. L’analyse de ces éléments a été faite à l’aide des gaz PH3 et AsH3 qui ont donné des résultats très analogues. Dans chaque cas un groupe de 4 raies a été obtenu. Aston attribue la première et la plus forte à l’élément, la deuxième à l’hydrure, la troisième faible au bihydrure, la quatrième assez forte au trihydrure. Les deux éléments paraissent simples et ne donnent pas de lignes de second ordre.

Soufre P = 32,06. Le spectre du soufre a été obtenu par introduction de gaz sulfureux dans le tube à décharge. Ce spectre présente les lignes suivantes :

S     + ----- m = 32 ---------- COS + ----- m = 60
SH   + m = 33 SO2  + m = 64
SH2 + m = 34 CS2  + m = 76
CS  + m = 44

Il est à remarquer que les lignes étalons 32 et 44 apparaissent aussi sur le spectre de comparaison (O2+ et CO2+), mais leur intensité est augmentée en présence du soufre. On observe aussi quelques faibles lignes qui s’expliquent par la présence de composés hydrogénés moins abondants. Aucun isotope n’a été décelé avec certitude. S’il en existait un de masse 33, sa proportion évaluée d’après le poids atomique serait 6%, et l’on devrait observer une ligne 35 correspondant à SH2+.

Chlore P = 35,46. Le spectre de masse du chlore a d’abord été étudié sur le gaz chlorhydrique, auquel ensuite on a substitué le phosgène COCl2 pour éviter l’attaque du mercure. Les spectres obtenus mettent en évidence la structure complexe du chlore. On observe les lignes suivantes :

1er ordre ---------- 2e ordre
Cl35000+000 m = 35 Cl35+ +000 = 17,5
Cl35H00+ »  = 36 Cl37+ +   »  = 18,5
Cl37000+ »  = 37  
Cl37H00+ »  = 38
COCl35 + »  = 63
COCl37 + »  = 65

L’ensemble de ces lignes montre très clairement que le chlore se compose de deux isotopes de masses 35 et 37 [65]. Dans d’autres expériences Aston a obtenu des raies correspondant au chlore à charge négative, et en ce cas les raies 35 et 37 apparaissent seules. Sur certains spectres du chlore une faible ligne correspond à la masse 39 et pourrait provenir d’un troisième isotope. Les expériences ultérieurement faites sont défavorables à l’attribution de cette ligne.

Argon P = 39,9. L’étude de ce gaz a été faite dans un mélange de gaz carbonique et de méthane avec 20 % d’argon. Lignes obtenues

Ar40 + xxxxxxxxxx = 40
Ar36 +   »  = 36
Ar40 + +   »  = 20
Ar40 + + +   »  = 13,33

La première de ces lignes, très forte, met en évidence le constituant principal, confirmé par ses lignes du second et du troisième ordre. Des mesures très précises faites sur cette dernière fixent la masse atomique à 40,00 + 0,02. Le deuxième isotope de masse 36 donne une ligne faible dont l’intensité est néanmoins dans un rapport défini avec celle de la ligne 40.

Le spectre de l’argon a aussi été obtenu dans toutes les expériences faites avec le krypton et le xénon. L’ensemble des observations confirme l’existence de deux isotopes. D’après la valeur du poids atomique, la proportion de l’isotope de masse 36 est environ 3 %.

Fer P = 55,84. En utilisant le fer carbonyle on obtient une forte ligne 56. Il paraît possible que le fer soit un élément simple [67].

Nickel P = 58,68. Le nickel forme un composé volatil, le nickel-carbonyle Ni (CO4), qui est rapidement détruit lors du passage du courant dans le tube à décharge. Les expériences faites par J. J. Thomson avec ce produit, par la méthode des paraboles, ont échoué par suite de ce manque de stabilité. Aston a réussi à obtenir un spectre de masse au moyen d’un mélange de nickel-carbonyle et de gaz carbonique [66, 67], sous forte intensité du courant. Le spectre offre deux lignes dont la première est la plus forte :

Ni58 + xxxxxxxxxx m = 58
Ni60 + m = 60

La mesure des masses est faite par rapport aux lignes du mercure (3e et 4e ordre), à la précision de 0,1 %, et contrôlée par une comparaison avec la ligne 44 du gaz carbonique. Le nickel se compose donc d’au moins deux isotopes dont les masses sont des nombres entiers, à la précision indiquée. Le rapport des intensités (environ 2) est en accord avec la valeur du poids atomique.

La position du nickel dans la classification périodique présente une anomalie en ce sens que le nickel suit le cobalt, contrairement à l’ordre des poids atomiques. Si l’isotope de masse 60 eût été prédominant, cette interversion ne se présenterait pas.

Brome P = 79,92. Les expériences ont été faites avec le bromure de méthyle et ont donné des résultats parfaitement définis. La structure est complexe :

Br7900+xxxx m = 79xxxxxxxxxxxxxxxx Br79 + +xxxx = 39.5
Br79 H + »  = 80 Br81 + +   »  = 40,5
Br8100+ »  = 81
Br81 H + »  = 82

Les lignes 79 et 81, de même intensité, ont été attribuées à deux isotopes du brome, tandis que les lignes 80 et 82, plus faibles, appartiennent aux deux acides bromhydriques correspondants. Les lignes de second ordre des deux bromes sont très faibles. La complexité du brome était inattendue puisque le poids atomique est presque entier.

Krypton P = 82,92. Xénon P = 130,2. Ces gaz ont été étudiés sur des résidus d’évaporation d’air liquide contenant aussi de l’azote, de l’oxygène et de l’argon. Chacun des deux gaz rares offre une structure complexe représentée par un groupe d’isotopes de masses voisines.

Kryptonxxx massesxx 78, 80, 82, 83, 84, 86.
Xénon masses 124, 126, 128, 129, 130, 131, 132, 134, 136.

Le krypton donne une faible ligne 78 et 5 lignes intenses qui sont reproduites dans le deuxième ordre, et avec moins d’intensité dans le troisième ordre. Les lignes de deuxième ordre peuvent être comparées avec précision à celles de l’argon, les lignes du troisième ordre à celles de l’oxyde de carbone ou de l’azote (molécule 28).

Le groupe du xénon est mesuré par l’intermédiaire de la ligne de 2e ordre 64,5, qui est comparée à la ligne du 3e ordre du mercure. Les lignes 124, 126, 128 et 130 sont faibles.

Sélénium P = 79,2. Tellure P = 127,5. L’étude de l’hydrogène sélénié et du tellurure de méthyle n’ont donné aucun résultat. En volatilisant directement le sélénium [66] par bombardement cathodique Aston a obtenu 5 fortes lignes et une faible (pour m = 74).

XXXSéléniumxxxxxxxx massesxx 74, 76, 77, 78, 80, 82.

Quelques-unes de ces lignes correspondent à des isobares du krypton. Le même procédé a été appliqué sans succès au tellure.

Iode P = 126,92. L’expérience faite avec un mélange de CO2 CH4 et d’iodure de méthyle conduit à envisager un seul élément donnant une ligne de masse 127, confirmée par la ligne 142 de l’iodure de méthyle.

Toutefois, les expériences de Kohlweiler [67] sur la diffusion fractionnée de la vapeur d’iode conduisent cet auteur à admettre que celle-ci n’est pas homogène, et qu’en plus du composant principal dont la masse a été mesurée par Aston, il y aurait encore au moins deux isotopes, l’un de masse inférieure et l’autre de masse supérieure (voir p. 187).

Étain P = 118,7. Les expériences faites avec le tétrachlorure d’étain ont permis d’obtenir un groupe de lignes attribuable à l’étain accompagné d’un groupe plus faible pouvant correspondre aux chlorures. Ces résultats n’ont pu être reproduits tout d’abord en raison des difficultés que présente le travail avec ce gaz. Des expériences ultérieures faites avec le tétraméthide, à l’aide de plaques sensibilisées pour les rayons positifs, ont donné des résultats définis. Les lignes suivantes sont attribuées avec certitude à l’étain :

XXXSnxxxxxxxx massesxx 116, 117, 118, 119, 120, 121, 122, 124.

Les intensités relatives de ces lignes sont en accord avec le poids atomique moyen. Les masses qui correspondent aux lignes sont en réalité inférieures de deux ou trois millièmes aux nombres entiers indiqués ci-dessus, tandis que les différences des lignes sont exactement des nombres entiers [66].

Antimoine P = 120,2. Les essais faits au moyen de Sb H3 n’ont donné aucun résultat. En employant le triméthylantimoine, Aston a obtenu deux lignes correspondant aux masses 121 et 123 [67, 69]. Ces résultats ne sont pas en accord avec le poids atomique adopté, mais correspondent très bien au nombre 121,77 récemment déterminé par Willard et Mc Alpine [68].

Mercure P = 200,6. Le mercure étant employé dans diverses parties de l’appareillage, sa vapeur est toujours présente dans le tube à décharge et ses lignes qui apparaissent sur la plupart des clichés servent d’échelle de références.

Le mercure est une substance complexe.
Hg +xxxxxxxxxx m = 197-200xxxxx Groupe non résoluble avec la dispersion
du spectrographe actuel.
Hg + »  = 202
Hg + »  = 204

Le groupe de ces lignes est reproduit au 2e ordre et au 3e ordre. Le mercure est remarquable par la faculté signalée plus haut de porter jusqu’à 8 unités de charge positive, ce qui revient à perdre 8 électrons qu’il récupère ensuite un à un pour donner la série de paraboles observées par J. J. Thomson (voir p. 87).

28. Analyse des rayons anodiques.

Lithium P = 6,94 [70]. Aston et G. P. Thomson ont appliqué la méthode des


Masse atomique
Fig. 24. — Courbe du Lithium.


paraboles à l’examen des rayons anodiques d’un mélange de phosphates de sodium et de lithium. On obtient ainsi une forte parabole correspondant à m = 7 et une autre plus faible correspondant à m = 6. Les mêmes résultats ont été obtenus indépendamment par Dempster, au moyen de la mesure du courant de charge (voir p. 92), et sont représentés dans la fig. 24.

Les mesures de Dempster [70] prouvent que s’il existe des isotopes de masses 5, 8, 9, ce ne peut être qu’en proportion très faible, car l’intensité des courants de charge pour ces valeurs est inférieure à 2 % de celle qui correspond à m = 7. La différence des masses des deux composants est égale à une unité, à la précision de 0,01 à 0,02.

Conformément à la valeur du poids atomique, la proportion des isotopes 6 et 7 devrait être environ 1 à 16. Cependant l’expérience montre que le rapport des courants de charge est très variable (de 37 à 5 dans les expériences faites divers jours, avec des anodes différentes). Les raisons de cette variabilité n’ont pas été élucidées ; il semble que les conditions d’évaporation puissent être


Masse atomique
Fig. 24. — Courbe du potassium.


différentes pour les deux isotopes, suivant l’état de la surface. Les mesures les plus récentes d’Aston donnent pour m les valeurs 6,008 et 7,006, avec un rapport d’intensités normal [72].

La production des rayons du lithium a toujours été accompagnée d’une forte production de rayons d’hydrogène atomique à charge simple, sans H2, H3 ou He en proportion appréciable. Ces rayons H + sont obtenus avec des anodes neuves ou avec celles qui ayant été purgées des gaz occlus, ont été à nouveau au contact de l’air pendant quelque temps, cet air pouvant contenir des traces d’humidité.

Glucinium P = 9,1. Les rayons anodiques du glucinium ont été obtenus par G. P. Thomson à partir d’un mélange de bromure de sodium et de fluorure de glucinium. L’examen par la méthode des paraboles donne une seule ligne intense pour m = 9 (par comparaison avec le sodium m = 23). Aucun composant de moindre intensité n’a été observé aux valeurs m = 10 et m = 11. On conclut que Gl est un élément simple [71], résultat confirmé par Aston qui a trouvé pour m la valeur 9,002 [72].

Sodium P = 23,00. Potassium P = 39,10. Les rayons anodiques du sodium et du potassium ont été examinés par la méthode du courant de charge (Dempster) et par celle des paraboles et du spectrographe de masses (Aston).


Masse atomique
Fig. 26. — Courbe du magnésium.


Ces expériences ont prouvé que le sodium est un élément simple m = 23, ainsi que l’indique son poids atomique, tandis que pour le potassium on trouve deux lignes : m = 39 (forte) et m = 41 (faible) (fig. 25)

Le rapport des intensités de K39 et K41 est égal à 18, en accord avec la valeur du poids atomique chimique.

Magnésium P = 24,32 [72]. Le magnésium a été étudié par Dempster. L’émission provenait d’un ruban ou d’une tige de magnésium rendus incandescents et bombardés par les rayons cathodiques. La courbe (fig. 26) met en évidence l’existence de 3 isotopes de masses 24, 25 et 26, avec, en plus, un maximum à 28, correspondant à la molécule d’azote Az2 + qui a servi comme repère.

Le rapport des intensités s’est montré sensiblement constant dans diverses expériences. Il est exprimé par les nombres 6,9 : 1,04 : 1. On en déduit un poids atomique 24,336 qui correspond bien au poids atomique moyen observé. Cependant là aussi, comme dans le cas du lithium, on a observé des divergences dans le rapport des intensités.

Calcium P = 40,07. G. P. Thomson a observé pour le calcium une parabole intense correspondant à m = 39 à 41. Dempster a obtenu par la méthode du courant de charge un maximum important m = 40, mesuré par comparaison avec ceux du potassium m = 39 et du magnésium m = 24. Il a observé, de plus, un faible composant m = 44 ; celui-ci subsiste même quand on opère avec du calcium distillé dans un vide élevé, afin d’éliminer toute trace de carbonate pouvant donner lieu à la production de la ligne CO2 +. On a donc pour le calcium 2 isotopes, 40 et 44. Le calcium Ca40 est un isobare de l’argon ainsi qu’il a été vérifié par Aston [72]. Le rapport des intensités de Ca40 et Ca44 a été trouvé égal à 70, en bon accord avec le poids atomique chimique.

Scandium P = 45,1. Titane P = 48,1. Vanadium P = 51,0. Chrome P = 52,0. Manganèse P = 54,93. Cobalt P = 58,97. Aston indique pour chacun de ces éléments une ligne unique correspondant au nombre entier présumé [72]. Il est à remarquer que Mn55 est le 8me terme d’une série de masses dont les 7 termes précédents n’ont pas été observés.

Cuivre P = 63,57. Dempster [72] a indiqué pour ce corps 3 isotopes de masses 62, 64 et 66. Les nombres donnés par Aston sont 63 et 65, avec le rapport d’intensités prévu 2,5 : 1, sans déviation de la loi des nombres entiers [72]. Cette structure est plus conforme à celle qu’on peut présumer d’après la valeur impaire du nombre atomique [67].

Zinc P = 65,37. L’examen des rayons anodiques du zinc par Dempster conduit à admettre 4 isotopes (fig. 27). Ces expériences, faites avec une anode, contenant du calcium et du zinc, ont permis une comparaison exacte conduisant aux valeurs :

XXXZnxxxxxxxx massesxx 64, 66, 68, 70.

Ces résultats sont conformes à la règle d’après laquelle des masses atomiques paires correspondent aux nombres atomiques pairs (voir p. 132).

L’intensité relative des lignes variait d’abord considérablement avec les conditions de l’expérience, mais après élimination d’effets perturbateurs attribués au champ électrique, les rapports d’intensité se sont montrés constants et en accord approximatif avec le poids atomique chimique. On peut soupçonner l’existence d’un faible isotope de masse 67.


Masse atomique
Fig. 27. — Courbe du zinc.

Gallium P = 70,1. Germanium P = 72,5. Pour le premier de ces éléments Aston a trouvé 2 isotopes de masses 69 et 71, avec un rapport normal, pour le second 3 isotopes de masses 70, 72 et 74 (nombres entiers), avec un rapport approximatif 2 : 4 : 5.

Rubidium P = 85,45. Cæsium P = 132,81. Aston [61] a examiné les rayons positifs d’un mélange de sels de potassium et de sodium avec du chlorure de rubidium et du chlorure de cæsium. Les lignes du rubidium ont été mesurées par rapport à la ligne 39 du potassium, et celle du cæsium par rapport aux lignes du rubidium. On trouve pour Rb les masses 85 et 87, pour Cs la masse 133.

Le rapport des intensités des lignes du rubidium correspond au poids atomique chimique. Pour le cæsium, on n’a aperçu aucune trace d’une ligne de masse inférieure à 133 pouvant expliquer l’écart du poids atomique chimique à partir de m = 133.

Tableau VIII
TYPES
CHIMIQUES
N P. A.
chim.
n ISOTOPES
Masses
1
Hydrogène 
H 01 001,008 1 1,008
Hélium 
He 02 004,00 1 4
2
Lithium 
Li 03 006,94 2 006 007
Glucinium 
Gl 04 009,1 1 009
Bore 
B 05 010,9 2 010 011
Carbone 
C 06 012,00 1 012
Azote 
Az 07 014,008 1 014
Oxygène 
O 08 016,00 1 016
Fluor 
F 09 019,00 1 019
Néon 
Ne 10 020,20 2 020 022
3
Sodium 
Na 11 023,00 1 023
Magnésium 
Mg 12 024,32 3 024 025 026
Aluminium 
Al 13 026,96 1 027
Silicium 
Si 14 028,3 2 028 029 030
Phosphore 
P 15 031,04 1 031
Soufre 
S 16 032,06 1 032
Chlore 
Cl 17 035,46 2 035 037
Argon 
A 18 039,9 2 036 040
4
Potassium 
K 19 039,10 2 039 041
Calcium 
Ca 20 040,07 2 040 044
Scandium 
Sc 21 045,1 1 045
Titane 
Ti 22 048,1 1 048
Vanadium 
V 23 051,0 1 051
Chrome 
Cr 24 052,0 1 052
Manganèse 
Mn 25 054,93 1 055
Fer 
Fe 26 055,84 1 056
Cobalt 
Co 27 058,97 1 059
Nickel 
Ni 28 058,68 2 058 060
Cuivre 
Cu 29 063,57 2 063 065
Zinc 
Zn 30 065,37 4 064 066 068 070
Gallium 
Ga 31 070,10 2 069 071
Germanium 
Ge 32 072,5 3 070 072 074
Arsenic 
As 33 074,96 1 075
Sélénium 
Se 34 079,2 6 074 076 077 078 080 082
Brome 
Br 35 079,92 2 079 081
Krypton 
Kr 36 082,92 6 078 080 082 083 084 086
5
Rubidium 
Rb 37 085,45 2 085 087
Strontium 
Sr 38 087,63 1 088
Yttrium 
Y 39 088,9 1 089
Zirconium 
Zr 40 090,6
Niobium 
Nb 41 093,1
Molybdène 
Mo 42 096,0
43
Ruthenium 
Rb 44 101,7
Rhodium 
Rh 45 102,9
Palladium 
Pd 46 106,7
Argent 
Ag 47 107,88 2 107 109
Cadmium 
Cd 48 112,40
Indium 
In 49 114,8
Étain 
Sn 50 118,7 8 238,2119 120 121 122 0124
Antimoine 
Sb 51 121,77 2 121 123
Tellure 
Te 52 127,5
Iode 
I 53 126,92 1 127
Xénon 
X 54 130,2 9 124 126 128 129 130 131 132 134 136
6
Cæsium 
Cs 55 132,81 1 133
Baryum 
Ba 56 137,37
Lanthane 
La 57 139,0
Cérium 
Ce 58 140,25
Praséodyme 
Pr 59 140,6
Néodyme 
Nd 60 144,3
61
Samarium 
Sm 62 150,4
Europium 
Eu 63 152,0
Gadolinium 
Gd 64 157,3
Terbium 
Tb 65 159,2
Dysprosium 
Ds 66 162,5
Holmium 
Ho 67 163,5
Erbium 
Er 68 167,7
Thulium 
Tu 69 168,5
Ytterbium 
Yb 70 173,5
Lutécium 
Lu 71 175
Celtium 
Ct 72  
Tantale 
Ta 73 181,5
Tungstène 
W 74 184,0
75  
Osmium 
Os 76 190,9
Iridium 
Ir 77 193,1
Platine 
Pt 78 195,2
Or 
Au 79 197,2
Mercure 
Hg 80 200,6 6 197-200 202 204
Thallium 
Tl 81 204,0 4
Plomb 
Pb 82 207,2 11
Bismuth 
Bi 83 209,0 5
Polonium 
Po 84   7
85
Émanations 
  86   3
7 87
Radium 
Ra 88 226,0 4
Actinium 
Ac 89 2
Thorium 
Th 90 232,15 6
Uranium X2 
UX2 91   3
Uranium 
Ur 92 238,2 2

Strontium P = 87,63. Yttrium P = 88,9. Chacun de ces éléments donne une ligne unique ; les masses sont 88 et 89 (Aston [72]). Le poids atomique de Sr qui diffère notablement du nombre entier 88 serait à reviser.

Argent P = 107,88. Cet élément donne 2 lignes correspondant aux nombres entiers 107 et 109 (Aston [72]).

29. Tableau des isotopes. — L’examen du tableau VIII montre qu’un grand nombre d’éléments sont complexes. Il en résulte que les combinaisons moléculaires peuvent présenter un plus ou moins grand nombre de variétés isotopiques. Ainsi on prévoit deux espèces de molécules HCl (HCl35, HCl37) et trois espèces de molécules de chlore (Cl235, Cl35 Cl37, Cl237). Pour le chlorure de magnésium on prévoit 9 molécules isotopiques et on en trouve encore davantage pour le chlorure de zinc et le chlorure d’étain.




  1. Ce poids atomique est contesté par Baxter, Weatherell et Holmes [68] qui admettent un nombre plus voisin de 28,1.