ou
Les apparences de la vertu
A Claude Debussy
« … C’est fort extraordinaire, dit Roquentin, et qu’a-t-il fait ?
— Oh ! ce qu’il faut faire en pareille occasion. Il a jeté son pistolet à terre d’un air de regret. Il l’a jeté si fort qu’il en a cassé le chien. C’est un pistolet anglais de Manton. Je ne sais s’il pourra trouver à Paris un arquebusier qui soit capable de lui en refaire un »
Amaryllis s’étendit toute languissante sur la mousse, et du bout de sa branche de saule toucha la main du plus jeune homme.
« A toi, dit-elle ; parle à ton tour, Clinias. je veux un conte de toi ».
Clinias hésita quelque temps.
« J’ai retenu les légendes que tout le monde connaît ; mais je ne sais pas, comme Thrasès, les façonner selon mon esprit, ni comme toi les renouveler par la grâce des mots, Amaryllis. Je dirai ce que m’a raconté mon ami Biôn de Clazomène, à son retour d’Aethiopie.
— C’est une histoire vraie ? demanda Rhéa.
— Oui. Mais j’aime que vous la teniez pour une fable et que les personnages vous semblent suivis de l’ombre de leur symbole. Si j’avais quelque talent, il me faudrait peu de soins pour faire de cette courte histoire un poème en hexamètres. Peut-être seulement la généraliser ».
Le soleil brillait très ardent au-dessus de la haute forêt, et la fraîcheur sous les feuilles en était plus délicieuse. Des taches de lumière caressaient Lampito, qui avait ramené sa chevelure sur son visage pour protéger ses yeux fermés. Amaryllis était près de Rhéa. Philinna jouait avec ses mains. Mélandryon regardait la terre.
Alors Clinias commença ainsi :