Le Bonheur conjugal (Pert)/6

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Librairie universelle (p. 121--).

LE JARDIN SECRET

Le maître romancier Marcel Prévost, dans le livre dont ce chapitre porte le titre, a prouvé avec trop de talent la nécessité pour les époux de beaucoup se pardonner en bloc et d’admettre que chacun garde en soi le secret de son intimité, de ses pensées et de ses désirs, pour que j’ose apporter ici sur cette question mon témoignage superflu ou que je tente une contradiction.

Chacun a, présente dans la mémoire, cette lumineuse et palpitante autobiographie, de femme qui, bourgeoisement heureuse dans son ménage, découvre soudain que son mari lui a menti, en tout et pour tout, que tout sur quoi elle s’appuyait, s’étayait, n’était que rouille, vermoulures, débris croulants. Puis, prête à écraser cet homme, à rompre la chaîne de son mariage qui lui semble à présent insupportable, elle fait son examen de conscience… elle reconnaît qu’elle aussi a menti constamment, qu’elle a caché sur elle, sur les siens une foule de faits qui, sus par son mari l’eussent révolté, désolé, comme la désole et la révolte ce qu’elle apprit sur lui.

Et une paix, une indulgence lui viennent en constatant par son propre exemple que, si pleins de tares et de défauts que l’on soit, en les dissimulant, on peut quand même faire un compagnon suffisant.

J’ai vu de nombreux exemples dans la vie qui venaient corroborer cette théorie curieuse et audacieuse. Des êtres, rien moins que sages, grâce au décor qu’ils conservaient rigoureusement, parvenaient à en imposer même à ceux qui les touchaient de près, et par là à garder une tendresse qui les eût fui si la vérité s’était montrée.

Mais aussi, que de fois, à l’insu du monde, comme dans le drame intime de l’héroïne du Jardin secret la lumière se fait entre les époux ! Combien de fois ne reste-t-il entre le mari et la femme mutuellement désabusés que la dissimulation de leur écœurement, continuée pour le dehors avec un stérile héroïsme !…

Évidemment, on peut être heureux si votre compagnon reste éternellement aveugle sur votre compte, comme vous le demeurerez sur le sien… mais, si l’un ou l’autre, si l’un et l’autre vous devenez clairvoyants ?…

Il y a aussi un danger à trop s’établir dans l’idée de l’obligation et de la légitimité du Jardin secret ; ce danger réside en ce que cette persuasion incite à mal faire, puisque, croit-on, le mal soigneusement dissimulé ne fera aucun tort à son conjoint.

C’est, en somme ; une variante de « péché caché est demi pardonné ».

« Si nul ne sait que je fais mal, se dit-on, nul n’en souffre. Donc, si je me sens assez adroite, assez prudente et forte pour ne jamais me trahir, pourquoi résister à ce que je désire ? »

Or, le principe est abominablement faux. Le mal que l’on fait est toujours néfaste ; dans l’ombre ou au grand jour, il est toujours perçu autour de soi et se répercute à l’infini, même si ceux qui vous touchent ignorent l’origine et la cause de ce mal. Il est latent ; il est germe de pourriture et de désagrégation pour la famille et tous les individus qu la composent.

C’est ce danger que les religions et la morale poursuivent en essayant de développer dans l’âme de chacun la crainte d’un Dieu qui voit perpétuellement et clairement en vous, la sujétion à sa propre conscience à qui rien de soi n’échappe.

J’avais une « filleule » que j’aimais beaucoup, malgré ses imperfections et ses faiblesses ; nommons-la Charlotte.

Charlotte,
ou la confession préservatrice.

C’était une tête folle, un cœur exquis, à l’émotion de courte durée, mais si spontanée, si sincère !…

Elle s’était élevée comme elle avait pu, dans un intérieur désuni, dont le Jardin n’était pas secret, grand Dieu !… où le fumier sur lequel s’ébattaient Monsieur et Madame s’étalait au contraire, visible pour tous, même pour la fillette qui grandissait au milieu.

Elle y avait pris l’horreur du vice, superficiellement ; et pourtant, au fond d’elle, à son insu, contre sa volonté, elle en garda un besoin ardent de volupté.

On la maria, le plus vite possible, avec un jeune homme peu intelligent, peu perspicace, qu’éblouissait le luxe de la famille de sa fiancée et qui n’avait rien aperçu de ce qui se passait dans la maison.

Charlotte l’épousa avec l’élan du prisonnier pour le libérateur, quel qu’il soit, qui lui ouvre la porte de son cachot.

Elle ne tarda pas à prendre son mari en grippe ; mais, comme elle avait bon cœur et aussi un certain respect de ses devoirs d’épouse, elle s’évertua à lui dissimuler en face cette aversion et à ne se satisfaire le cœur que par derrière lui. Il n’était pas de tour saugrenu ou spirituel qu’elle ne lui jouât journellement… Quelquefois, c’était inoffensif ; parfois, de la dernière gravité, sans qu’elle en eût conscience. À deux reprises, pour contenter ses petites rancunes puériles, elle brisa la carrière de ce brave garçon, qui ne s’en douta jamais et usa sa vie à essayer de surmonter les barrières que sa compagne avait dressées devant lui, par espièglerie.

Pourtant, elle était loin de le détester. Elle déclarait volontiers :

— J’aime beaucoup mon mari… seulement, je ne peux pas le souffrir ; c’est plus fort que moi.

Jusqu’à vingt-cinq ans, l’amour fut lettre morte pour elle : elle se moquait de ses soupirants et les menait tambour battant, s’amusant simplement des désirs qui la frôlaient.

Puis, un chagrin qu’elle ne confia pas à son mari, car il touchait aux secrets de famille qu’elle ne lui eût pas révélé pour tout au monde, un moment de trouble, de désarroi, de solitude morale, la jeta aux bras d’un homme, qui avait su assumer auprès d’elle un rôle protecteur et affectueux en cette minute unique et favorable.

Elle se trouvait aux eaux, avec sa mère atteinte d’une grave affection aux reins. Un jour, au Casino, elle entendit un groupe traiter celle-ci outrageusement. Cela ne lui apprenait rien de nouveau ; pourtant, elle resta saisie de voir la façon dont le monde jugeait celle à qui elle devait d’être.

Dans son émoi, elle avoua tout à un homme, jusque-là une simple connaissance, que le hasard avait amené auprès d’elle au moment où elle n’avait pas encore surmonté son émotion.

Il devint son amant ; et, comme elle l’a reconnu depuis, elle ne fit aucune difficulté à céder à l’impulsion qui la poussait vers lui, parce qu’elle était bien certaine que jamais son mari si confiant ne l’apprendrait. Non pas qu’elle craignit sa colère, mais, malgré qu’il l’agaçât, elle rendait justice à ses qualités, et c’est elle qui me le disait elle se fût regardée comme un monstre de désoler un homme qui l’aimait, qui se dévouait journellement pour elle.

Si elle avait cédé à l’attrait que lui offrait la compassion de son premier amant, elle ne devait pas tarder à se lasser de ces amours larmoyantes.

— Chère marraine, me confiait-elle de son air impayable, c’était abominable, j’avais tant pleuré avec lui que rien que sa vue, même son souvenir me piquaient les yeux, m’oppressaient la poitrine,… je sanglotais sans cause, sans pouvoir m’en empêcher.

Son second amant la fit rire, et le troisième la délassa, en entretenant chez elle tour à tour, également, le rire et les larmes.

Or voici qu’à ce moment — un peu tard, il est vrai — le mari aveugle s’avisa de recouvrer la vue et devint horriblement jaloux.

Charlotte se trouva dans l’alternative de se ranger totalement ou de risquer d’être découverte.

Eh bien, malgré l’habitude prise d’une vie passablement dévergondée, malgré son besoin de distractions et de sensations, elle n’hésita pas une minute à tout sacrifier.

— Pauvre homme ! s’écriait-elle, voyez-vous quel désespoir serait le sien s’il apprenait que sa petite chérie, sa poule d’or, son bébé l’a si vilainement trompé durant des années ! Non, quoi qu’il m’en coûte, je veux qu’il ne se doute de rien… et il ne trouvera rien, car il n’y aura rien !…

Pour l’engager à persévérer dans cette bonne vole, je lui avais conseillé de dire à son mari, chaque soir, les lieux où elle avait été durant l’après-midi, sans omission, sans mensonge, sans tricherie.

— Faudra-t-il aussi lui raconter tout ce que j’ai fait, dit et pensé ? demanda-t-elle, la mine longue.

— Non, filleule, ce que je te dis suffit.

Elle eut un rire soudain.

— Ce n’est pas sûr, marraine !… Ainsi, admettez qu’un ami loue un pied-à-terre dans la rue où vous-même vous habitez… Je pourrais dire alors à Louis : « Aujourd’hui, de cinq à sept, je suis allée rue Washington »…

Je protestais

— Je t’ai dit sans tricherie !…

Elle m’obéit et m’avoua par la suite que, souvent, sa vertu ébranlée, fut retenue par cette obligation prise de ne rien tenir secret de ses visites et de ses courses.

— D’autant plus, ajoutait-elle, que j’ai eu la bêtise, dans un élan, de prévenir Louis que, si je lui donnais ainsi mes itinéraires, c’était pour m’enlever la possibilité d’aller à un rendez-vous… et, le misérable, mis en défiance, contrôlait !…

Il est évident qu’en certain cas un aveu intempestif fait écrouler les dernières chances de bonheur relatif que l’on peut avoir ; mais, parfois, la crainte d’avoir à révéler un acte mauvais, une pensée douteuse, empêche de commettre cet acte, de s’étendre com plaisamment sur cette pensée.

Je connaissais une dame très pieuse, mais de conduite fort légère. Un indiscret lui demandait un jour comment l’idée d’avoir à avouer ses péchés à un prêtre ne la retenait pas de les commettre.

— Oh ! s’écria-t-elle, c’est qu’à chaque fois je me promets de ne plus retourner à confesse !…

Lorsque le manquement à la fidélité conjugale provient du mari, il me semble que l’abandon résolu du « jardin secret » a encore moins d’inconvénient que pour la femme fautive.

Un mari ne pardonnera, n’oubliera jamais que sa femme s’est donnée à un autre. Donc, une femme devra toujours regarder à deux fois avant de risquer un aveu qui lui aliénera sûrement le cœur de son époux.

Au contraire, l’épouse pourra souffrir d’avoir été trompée, éprouver de grandes, désillusions, mais, néanmoins, si elle croit que son mari lui est sincèrement revenu, elle pourra pardonner et oublier l’infidélité maritale.

Le « jardin secret » de la femme peut avoir le but de préserver du désespoir un mari confiant ; celui de l’homme est surtout pour cultiver sans danger des plantes défendues.

Je me rappelle un cas de franchise de la part d’un jeune mari qui, s’il ne fut pas motivé par une impulsion très louable, eut néanmoins d’excellents résultats.

Sa femme se nommait Élisabeth.

ÉLISABETH,
OU LE PÉCHÉ DU MARI.

Elle était jeune, jolie ; elle et son mari possédaient une large aisance et s’étaient épousés, sinon précisément par amour, leur rencontre ayant été précédée par un accord des deux familles, du moins avaient-ils ressenti immédiatement en s’apercevant ce petit émoi charnel qui prouve que l’on se plaira complètement plus tard.

Et, de fait, à peine étaient-ils époux qu’ils devinrent amants, furieusement.

Cela avait duré huit ans, sans désemparer. Après quoi, le beau Fernand avait pris l’habitude de corser ses désirs un peu émoussés en courtisant l’une et l’autre, juste assez pour revenir à sa femme tout à fait empressé.

Un jour, je le vis arriver seul chez moi, avec cet air penaud, fat et mystérieux d’un homme qui se prépare à raconter une galante aventure.

— Je viens vous demander conseil, car je suis cruellement embarrassé…

Je l’interrompis.

— Si vous avez réellement, sérieusement regret de ce que vous avez fait, dis-je, cachez-le soigneusement à Élisabeth. Si, au contraire, vous y avez pris goût, avouez-lui tout immédiatement… peu importe le chagrin qu’elle éprouvera… C’est le seul moyen de vous enrayer…

Il sourit, un peu déconcerté.

— Alors, puisque vous avez deviné, il ne me reste plus rien à vous dire…

— Pardon, les détails… C’est là ce qui me renseignera sur l’état de votre cœur…

Il protesta.

— Oh ! mon cœur…

— Mettons, votre épiderme, si vous préférez.

En deux mots, l’aventure avait pris corps en la personne d’une jeune, jolie et brûlante veuve qui s’était, prétendait-il, emparée de lui presque de force. Cela s’était passé l’avant-veille.

Il s’était rendu seul à Melun à l’enterrement d’un ancien professeur qu’il aimait beaucoup. Une pluie torrentielle saisit le convoi. Au retour du cimetière, la dame en question, qui était une amie d’Élisabeth et une parente du mort, offrit une place à Fernand dans son coupé. Il y monta sans arrière-pensée, satisfait d’échapper à la douche céleste. Elle le fit entrer chez elle, causa, le garda à dîner… et le lendemain, Fernand raconta à sa femme qu’un dîner d’anciens camarades du lycée l’avait empêché de prendre le train du soir.

— Je vous jure, protestait-il hypocritement, je n’ai songé à rien, je n’ai rien imaginé, jusqu’au moment où, vraiment, faire le Joseph eût été trop grotesque…

Je haussai les épaules.

— Ce n’est pas à moi qu’il faut conter de pareilles bourdes, mon ami !… Vous n’êtes pas un collégien pour, dès le premier frôlement dans la voiture, n’avoir pas compris où la dame voulait en venir…

Il se récria, réprimant un sourire.

— Mais il n’y a pas eu de frôlements !… Non, je vous l’affirme !… Elle pleurait… elle me disait que cet enterrement lui rappelait celui de son mari, des choses dans ce goût-là… Ah ! et puis, elle m’a confié qu’elle venait de faire planter cent dix pieds de rosiers greffés dans son jardin… ça n’était ni farceur, ni suggestif, convenez-en ?

— Et chez elle ?

— Eh bien, elle m’a reparlé de son jardin ; elle m’a montré des portraits de son époux… elle m’a parlé de son enfance à elle… de ses gouts…

— Aïe, aïe !… et vous, toujours innocent ?

— Certainement… elle m’ennuyait. Je ne l’écoutais que par politesse… Tenez, jusqu’à 4 heures 20, j’ai pensé prendre le train qui me ramenait pour dîner à Paris.

— Et, après 4 heures 20 ?

— Oh ! alors, quelque chose m’a intrigué…

— Vous l’avouez !

— Non ! pas ce que vous croyez !… Ma parole, si je me doutais que ses lèvres seraient sur les miennes quelques heures plus tard !… Mais, voilà, elle m’avait appris qu’elle ne se remarierait jamais parce que d’abord sa douleur, son regret, et patati, patata… Puis, c’est là où cela devint intéressant, elle m’assura que le veuvage ne lui serait jamais pénible parce qu’elle avait aimé uniquement par le cœur et qu’elle ne se croyait pas capable d’aimer par les sens…

J’eus une impatience.

— Quoi, c’est avec des pauvretés, des vieilleries pareilles qu’elle vous a retenu !… Je vous croyais en vérité moins naïf, moins hébète, mon cher Fernand !

— Je ne vois pas quelle naïveté j’ai montrée ! répliqua-t-il vexé. Je vous affirme et j’en ai eu la preuve qu’elle était sincère… C’est une femme dont le tempérament est absolument dans les limbes… qui ne se doutait pas de la sensation et qui ne se doute encore pas le moins du monde de la plénitude qu’elle peut atteindre…

— Vierge alors, avant et après vous ?

— Vierge ?… non, bien pis.

— Et vous croyez cela ?… Vous ne voyez pas que vous vous êtes trouvé devant une farceuse qui, pour pallier ce qu’avait de brutal, de cynique, le petit passe-temps auquel elle vous conviait, pour vous aguicher, a flatté votre amour-propre en vous affublant de cette défroque d’initiateur dont vous vous drapez vaniteusement !… Oh ! allez, allez !… dites tout de suite : « Il n’y avait que moi au monde pour vaincre la pudeur de cette femme, pour éveiller les sens en elle ! » Dieu, que les hommes sont sots !…

Il rit du bout des dents, moitié déconfit, moitié satisfait.

Ma chère marraine, nous avons que votre flair est infaillible… pourtant, reconnaissez qu’ici vous procédez par induction et sur les seules données — très incomplètes — que vous apporte…, au lieu que moi j’ai des souvenirs… des preuves qui, si j’osais vous les faire apercevoir, vous persuade raient que je ne suis pas tout à fait imbécile ni si aisé à berner que vous l’imaginez…

Je le vis prêt à m’étaler toutes les petites vilenies de leur nuit.

— Halte-là, s’il vous plaît !… Sur ce sujet, j’adore les confidences féminines… mais celles d’un homme sont toujours répugnantes.

— Vous êtes dure !

— Non… je concède que, dans l’amour, vous êtes parfois plus délicats, plus convenables que les femmes… Mais en le racontant, vous devenez ignobles.

Il fit un geste.

— Allons, je vois bien qu’il faut me résigner à avoir tort !

— Certainement, car au fond de vous-même, vous commencez à reconnaître que j’ai raison…

Il ne put s’empêcher de rire.

— Écoutez, si cette femme joue la comédie, elle la joue rudement bien ! et de tout elle, pas seulement en parole… J’ai eu affaire à trois ou quatre vierges dans ma vie, et, certes, elles paraissaient plus informées que cette veuve…

Je l’interrompis.

— Revenons au but de votre visite qui n’est pas, je suppose — du moins de façon avouée — un prétexte pour vous remémorer agréablement en ma compagnie vos faits et gestes de l’autre soir… Vous me demandiez s’il faut tout avouer à votre femme ?… Certainement oui, et tout de suite.

— Vraiment, vous croyez que c’est nécessaire ?

— Si vous ne vous y décidez pas aujourd’hui, demain j’apprends tout à Élisabeth.

Il eut un cri :

— Ne faites pas cela !…

— Cela vous priverait du plaisir de jouir de la souffrance de votre femme ? fis-je avec quelque ironie.

Cette fois, une réelle irritation le traversa : signe que j’avais, frappé juste.

— Vous savez fort bien que j’aime profondément Élisabeth, dit-il sérieux, un peu sec.

Je hochai la tête.

— J’en suis convaincue, ce qui n’empêche que vous en êtes à la période où il faut des stimulants à votre amour… et celui de voir pleurer un être tout cœur, toute tendresse… un être qui vous est entièrement dévoué, en est un de la meilleure saveur.

Il dit, pensif :

— Si je croyais qu’elle dût éprouver un réel chagrin de ma sotte aventure, je l’enterrerais aussitôt.

— Gardez-vous en bien ! Les enterrements vous sont funestes, vous le voyez… Racontez-lui le principal… seulement laissez dans l’ombre le chapitre sur les ignorances contestables de la dame… Soyez bref et tâchez de paraître contrit.

Il eut un mot involontaire.

— Oh je suis sûr d’être sincèrement ému, du moment qu’elle pleurera… Ses larmes me bouleversent…

— Allez, allez, et pleurez de concert… De cette façon Élisabeth vous accompagnera désormais aux enterrements et vous surveillera de plus près.

Si, par la suite, il ne pécha plus — ou presque plus — il est bien réel, que ce fut parce que, mise en éveil, la jalousie d’Élisabeth le harcela.