Le Jeu de saint Nicolas/Introduction

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Texte établi par Alfred JeanroyHonoré Champion (p. iii-xiv).

INTRODUCTION


I. L’auteur. — Il se nommait Jean Bodel et vivait à Arras de son métier de jongleur, dans les dernières années du xiie siècle et les premières du xiiie. Outre le Jeu de saint Nicolas, nous avons de lui une chanson de geste (les Saisnes), quatre ou cinq pastourelles et une pièce fort originale d’où il résulte que, atteint d’une maladie incurable, il se retira, aux environs d’Arras, dans une léproserie, où probablement il mourut[1].

Les deux premiers de ces ouvrages ne contiennent naturellement aucune indication chronologique ; celles que l’on a essayé de tirer de l’une des pastourelles[2] sont des plus incertaines. Les Congés nous fournissent, en revanche, le nom d’un grand nombre des personnages que le poète fréquenta, presque tous artésiens, dont plusieurs vécurent dans les premières années du xiiie siècle. La croisade dont les préparatifs sont mentionnés dans ce document (str. ix) est donc celle de 1202. D’autre part, le célèbre Registre des jongleurs et bourgeois d’Arras, dont nous savons maintenant que c’est un nécrologe, inscrit le nom de « Bodel » à l’année 1210, au terme de la Purification ; l’auteur aurait dont cessé de vivre dans le premier mois de cette année ou les trois derniers de la précédente (le terme antérieur étant celui de la Saint-Remi)[3].


II. Le manuscrit. — Le Jeu de saint Nicolas nous a été conservé par un seul manuscrit, provenant de la bibliothèque du duc de La Vallière (mort en 1780), qui porte aujourd’hui à la Bibliothèque nationale le no 25566 du fonds français. C’est un volume de moyen format, de 283 feuillets de parchemin, très soigneusement écrit aux alentours de l’an 1300 ; il contient une ample anthologie d’œuvres picardes de l’époque immédiatement antérieure, et notamment tous les ouvrages d’Adam de la Halle[4]. Le texte du Jeu est écrit, sur deux colonnes, à un vers par ligne, sauf les alexandrins, répartis sur deux lignes[5]. Les répliques sont précédées de rubriques désignant les personnages, écrites généralement à l’encre rouge[6]. Si le texte est remarquablement correct, les erreurs, en revanche, abondent dans ces rubriques.


III. La pièce. — Le Jeu de saint Nicolas est, dans l’histoire de notre ancien théâtre, un morceau capital, non seulement parce qu’il est le plus ancien exemple connu du miracle dramatique en français, mais parce qu’il est sans contredit, et à beaucoup près, le chef-d’œuvre de ce genre.

Les origines du miracle sont, on le sait maintenant, indépendantes de celles du drame liturgique et cela explique suffisamment les différences qui séparent les deux genres[7]. Le drame liturgique, né dans l’église, se proposa toujours et exclusivement pour but l’instruction des fidèles et n’admit, au moins tant qu’il fut joué en latin dans le sanctuaire, qu’une infime quantité d’éléments comiques. Le miracle, au contraire, né dans les écoles annexées aux cathédrales ou aux monastères, destiné à embellir les solennités scolaires, joué par les écoliers ou leurs maîtres, tendit de bonne heure à récréer les spectateurs autant qu’à les édifier[8].

Les plus anciens spécimens du genre, qui sont naturellement en latin, ont tous pour héros le fameux évêque de Myrrhe, qui avait été adopté comme patron par la jeunesse des écoles et dont la fête, célébrée le 6 décembre, se prolongeait en joyeux échos jusqu’à Noël. Ce sont donc des miracles de saint Nicolas que mettent en scène les quatre « jeux » du manuscrit de Fleury-sur-Loire, où ils sont, comme on le sait, associés à des drames liturgiques[9], et dont deux ont été retrouvés récemment dans un manuscrit de la fin du xie siècle provenant de l’abbaye de Saint-Godoard à Hildesheim[10], où ils se présentent sous une forme beaucoup plus concise et plus forte. Cette découverte permet donc de faire remonter l’origine du genre au moins au milieu du xie siècle[11].

C’est encore un miracle de saint Nicolas que mit à la scène, un peu avant le milieu du xiie siècle, Hilarius, ce célèbre disciple d’Abélard qui nous a laissé de curieux, mais trop brefs spécimens de ses talents de poète érotique, satirique et dramatique[12]. Ce petit drame est doublement intéressant : d’abord par les intentions comiques qui y apparaissent très nettement et plus encore par la présence, dans les morceaux lyriques, de refrains en français. Il nous achemine donc vers le miracle en langue vulgaire, dont il est fort probable que Bodel n’est pas le créateur.

Le trouvère artésien le traita, du moins, avec une rare et puissante originalité. La légende qu’il a utilisée nous apparaît d’abord dans une rédaction grecque, écrite, sans doute au xe siècle, dans l’Italie byzantine, peut-être en Calabre : cette rédaction a été traduite en latin et cette traduction a été jointe à la Vie de saint Nicolas composée à la fin du ixe siècle par Jean, diacre napolitain, d’après des sources grecques ; c’est sous cette forme latine et en addition à l’œuvre de Jean Diacre que la légende de l’image de saint Nicolas s’est répandue en Occident. Dans cette version, l’infidèle est un Sarrasin d’Afrique, percepteur de droits de péage (tholonarius) ; au cours d’une razzia en Calabre, il s’empare d’une image, une icone peinte du saint, dont les vertus miraculeuses lui sont révélées par un captif[13].

Bodel ne s’est pas seulement approprié l’idée d’établir le contact entre les protagonistes au moyen d’une expédition guerrière, il a fait de cette expédition une croisade, dont les chrétiens prennent l’initiative ; il a, en outre, très heureusement imaginé de transformer ce tonloier en un roi, chef d’un immense empire, et de mettre sur la scène, avec tous ses préparatifs, la bataille qui aboutit à la capture de l’image du saint et du preudome. Ce n’est qu’un hors-d’œuvre, un peu long, mais d’une incontestable grandeur. Bodel, qui, un jour, regretta de ne pouvoir accompagner en Terre Sainte les croisés d’Artois[14], et qui venait d’écrire (ou allait écrire) la chanson des Saisnes, était alors visiblement en pleine atmosphère épique, et le souffle des plus belles chansons de geste a vraiment passé sur cet épisode de son drame[15].

Il a aussi déployé dans l’invention des détails et la recherche du pittoresque une piquante et vigoureuse fantaisie. Ses quatre « amiraux » sont tour à tour grotesques ou terribles à souhait et la description des merveilles de leurs pays d’un genre de comique fort approprié à un public sans délicatesse. Dans les versions antérieures, qu’au reste Bodel avait bien peu de chances de connaître, les autres personnages étaient dépourvus de tout relief. Chez lui, ce ne sont pas seulement les figures du tavernier, de son varlet, du messager, des crieurs publics, du geôlier, mais surtout celles des trois malandrins ivrognes et bons enfants, Cliquet, Pincedé et Rasoir, qui sont traitées avec une verve intense et parfaitement dédaigneuse de la couleur locale : sans se demander un instant si les mœurs de ces lointaines régions différaient de celles de sa ville natale, c’est avec une évidente complaisance et un savoureux réalisme que, dans un style approprié, il a décrit des scènes de jeu, de beuveries et de rixes, toutes semblables à celles qui avaient dû souvent se dérouler sous les yeux de ses spectateurs[16]. L’invention même des noms révèle une imagination ingénieuse et hardie. Ainsi s’est constituée cette étonnante association de fantaisie et d’esprit d’observation, ce surprenant mélange de grandiose et de comique qui nous permet de saluer dans le jongleur artésien un génial précurseur de Shakespeare et du Victor Hugo d’Hernani et de Ruy Blas.


IV. La mise en scène et les acteurs. — Vu l’absence totale de didascalies, nous sommes très mal renseignés sur les conditions matérielles de la représentation. Les mansiones sont au moins au nombre de huit : le palais du roi, un simulacre de temple ou du moins une colonne pour la statue de Tervagant, une taverne, les quatre lieux figurant la résidence des « amiraux », une fosse servant de geôle, le tout disposé autour d’un espace libre où se passent les scènes sans localisation précise et où se livre la bataille. Sur les accessoires et les costumes, nous ne savons rien de précis.

Il serait encore plus intéressant de connaître la qualité des acteurs et les circonstances de la représentation. Celle-ci fut donnée le 5 décembre, veille de la fête du saint (v. 105), sans doute en un lieu clos, au cours d’une de ces réunions, pieuses d’intention, mais assez joviales de fait, qui, la veille des fêtes solennelles, réunissaient les fidèles dans les églises ou les monastères. Ces « veilleurs » n’étaient sans doute ni des écoliers, ni des clercs, à qui on eût offert le régal d’une pièce en latin, mais des laïques, et surtout des bourgeois, connaissant à fond leur bonne ville d’Arras. Les spectateurs et les acteurs appartenaient-ils à une confrérie placée sous l’invocation du saint ? L’hypothèse est probable, mais ce n’est qu’une hypothèse.


V. La langue. — La langue est l’artésien commun du xiiie siècle, assez fortement teinté de francien, en somme une langue mixte à base picarde.

De nombreux traits picards sont attestés par la rime :

Aufrique : rike (227-8) ; Jake : vaque (155-6) pugnie, estoutie (1353-4) ; saus (solidos) : saus (salvos) (741-2) ; dechut : lut (licuit) (67-8) ; emplut : but (749-50).

Mais les formes doubles ne sont pas rares : on a seoir (1172) à côté de seïr (1099) ; paour (491) à côté de peür (195) ; andoi (152, 633) à côté de andui (932)[17].

Enfin, des formes non picardes sont aussi exigées par la rime : Dieus (non Dius) : veus (voles) (877-8) : deus (duos) (753-4) : eüreus (1365-6) ; cheus (non chius, de ecce illos) : deus (duos) 1115-6.

La déclinaison est remarquablement conservée.

Dans la conjugaison les faits les plus notables sont les suivants :

à l’ind. prés., 1re pers. sing., absence totale de e et s analogiques[18] ; au subj. prés., 1re conj., 1re et 3e pers. sing., quelques exemples de e : gieue (804) ; escape (826). À la 1re pers. pl. des présents, il y a oscillation entre -ons (671, 715, etc.) et -omes (4, 750, etc.) ; à la même pers. des imparfaits et conditionnels, entre -iens (qui est monosyllabique) (742, 843, etc.) et -iemes (1119, 1159, etc.)[19].

Au futur, nombreux exemples de l’intercalation picarde de e entre muette et liquide (vainterés 208, perderas 479, etc.) à côté des formes normales (metra 415, perdrai 474)[20].

Ces faits et d’autres analogues sont de nature à nous détourner de tout essai d’uniformisation.


VI. La versification. — La synérèse de e protonique est encore très rare : asseïr, veïr (1099-1100, etc.)[21]. Elle se rencontre dans maloite (1360), batiç (626) (si ce mot est bien un dérivé de batre) et dans ves pour veés, forme verbale devenue adverbiale (1208, 1221)[22]. Nient est, comme dans la plupart des textes du xiiie siècle, monosyllabique (906, 918).

La rime riche, sans être systématiquement cherchée, est assez fréquente. Il y a, en revanche, un assez grand nombre de rimes imparfaites : arbre : Arabe (333-4) ; contes : empruntes (821-2) (où il faut peut-être voir une prononciation locale) ; pec : mer (467-8) ; chers : aprés (492-3) ; voirre : candoille (1101-2) ; rouge : angouche (1107-8).

C’est ici que nous voyons employé pour la première fois le système, qui devait faire une si belle fortune, de la liaison des répliques par la rime.

Le vers le plus employé est l’octosyllabe à rimes plates. Mais de nombreux passages présentent d’autres formes de vers et d’autres dispositions, sans qu’on voie clairement le motif du changement, qui se produit fréquemment à l’intérieur d’une scène.

Sixains d’octosyllabes en aabccb :

171-224 496-549 1191-1268
315-38 565-82 1385-1474
436-63 999-1029 1523-40
482-7

Cette forme est donc, après le distique d’octosyllabes à rimes plates, la plus employée et occupe à peu près le tiers du texte[23].

Viennent ensuite les alexandrins distribués en quatrains : 239-50 ; 384-411 ; 424-8[24] ;

les décasyllabes (en 6+4) distribués de même : 1269-80 ;

deux strophes (d’octosyllabes) en ababccdd : 466-81 ;

une forme strophique incertaine (le texte étant altéré) en vers de 6 syllabes : 550-64.

La polymétrie est donc plus développée ici que dans aucune autre des pièces dramatiques du xiiie siècle, ce qui est un signe d’antiquité de plus.


VII. Constitution du texte. — La leçon du manuscrit a été scrupuleusement respectée, sauf dans les passages évidemment fautifs[25]. J’ai ajouté en marge l’indication des scènes et des personnages qui y figurent ; dans le texte, quand j’ai dû modifier les rubriques désignant les personnages, je les ai placées entre crochets. Enfin, j’ai ajouté, en italiques, dans le texte, quelques indications scéniques indispensables et dans la marge la division en scènes.


VIII. Bibliographie. — Éditions et comptes-rendus :

La Bouderie et Monmerqué, Mysteria et Miracula ad scenam ordinata (publ. pour la Société des Bibliophiles français), Paris, 1834, p. 3-84.

L.-J.-N. Momerqué et F. Michel, Le théâtre français au moyen âge, Paris, 1839 (plusieurs réimpressions), p. 157-207, (avec traduction).

G. Manz, Li jus de saint Nicholas des Arrasers Jean Bodel, Text mit einer Untersuchung der Sprache und des Metrums des Stückes, nebst Anmerkungen und Glossar, Erlangen, 1904 (diss. de Heidelberg). Cette édition a donné lieu à deux importants comptes-rendus, par Alf. Schulze, dans Zeitschrift für rom. Philologie, XXX, (1906), p. 102-108, et Ad. Guesnon, dans Le Moyen âge, XII (1908), p. 67-88.

Éditions partielles :

K. Bartsch, Chrestomathie de l’ancien français, 1re éd. (1866), col. 285-92 (v. 384-627} ; 9e éd. revue par B. Wiese (1908), p. 208-210 (v. 384-635).

L. Constans, Chrestomathie de l’ancien français, 3e éd. (1906) (v. 384-435).

G. Paris et E. Langlois, Chrestomathie du moyen âge, 1897, p. 316-320 (v. 306-435, 466-481).

Études sur le jeu :

L. Petit de Julleville, Les Mystères, Paris, 1880, t. I, p. 97-107.

O. Rohnstrœm, Étude sur Jean Bodel, thèse pour le doctorat, Upsal, 1900, p. 55-70.

Fr. Heithecker, Jean Bodel’s Jeu de saint Nicolas, Münster, 1885 (diss.).

Sur la légende du saint au moyen âge :

O. Rohnstrœm, op. cit., p. 41-55.

H. Fissen, Das Leben des heiligen Nikolaus in der altfranzœsischen Literatur und seine Quellen, Gœttingen, 1921.

Ida del Valle de Paz, La leggenda de S. Nicola nella tradizione poetica medioevale in Francia, Florence, 1921.

Pour l’explication des termes de jeu :

Fr. Semrau, Würfel und Würferspiel im alten Frankreich, Halle, 1910 (Beihefte zur Zeitsch. f. rom. Phil., no 23).


  1. Voir sur la vie et les ouvrages de Bodel le précis et consciencieux ouvrage de O. Rohnstrœm mentionné à la Bibliographie. On peut négliger le livre singulier de Émile Langlade, Jehan Bodel, avec des commentaires sur le « Congé » de Baude Fastoul (Paris, De Rudeval, 1909, gr. in-8, 266 p.), où il y a de l’érudition, encore plus de fantaisie, l’absence de références rendant d’ailleurs tout contrôle impossible. Cf. mon compte-rendu de ce livre dans la Revue critique, 1909, t. II, p. 223.
  2. Contre le dous tens novel (Raynaud, n° 578 ; publiée en dernier lieu par Barisch, Romanzen und Pastourellen, p. 290). Sur la polémique engagée à propos de l’attribution et de la date de cette pièce entre A. Rambeau, Schultz-Gora, W. Cloetta et H. Guy, voir Rohnstrœm, op. cit., p. 14-18 ; ajouter le compte-rendu, par Cloetta, du livre de Rohnstrœm dans Literaturblatt, 1903, col. 161.
  3. Voir sur tout ceci les articles de A. Guesnon intitulés : Le registre de la confrérie des jongleurs et des bourgeois d’Arras (Comptes-rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1899, p. 464-475) et La satire à Arras au XIIIe siècle (Moyen Âge, 1899, p. 156 et 248 ; 1900, p. 1 et 117, notamment p. 161). Cf. une note de G. Paris dans Romania, t. XXIX, p. 145. — Dans le Registre (fol. 6, verso, 1re col., dernière ligne), le nom de bodel, quelque peu effacé, mais très lisible, n’est accompagné ni de prénom ni de mention d’aucune sorte, ce qui pourrait suggérer sur l’identité du personnage quelques doutes qui me paraissent toutefois levés par les faits signalés ci-dessus.
  4. Les neuf premiers feuillets, d’un autre format et d’une époque postérieure, ne font pas partie du recueil. Sur les trente-huit morceaux dont il se compose (en dehors des œuvres d’Adam de la Halle), les deux tiers au moins sont d’origine picarde et particulièrement artésienne. La description la plus complète que l’on ait encore de ce manuscrit est celle de Guillaume de Bure, Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. le duc de La Vallière, 1re partie, Paris, 1783, t. II, p. 226-242. Il a été aussi décrit, très sommairement, par A. Rambeau dans son édition diplomatique d’Adam de la Halle (Ausgaben und Abhandlungen, n° 58, 1886, p. 3 et suiv.) ; très soigneusement, mais incomplètement, par A. Tobler, Li dis dou Vrai Aniel, 3e éd. (Berlin, 1912, p. i-xiii). Notre Jeu y occupe les fol. 68 ro-83 ro et s’y trouve placé entre trois strophes intitulées Ver de la mort et le Bestiaire (en prose) de Richart de Fournival.
  5. Les alexandrins (fol. 50 ro et 71 vo) sont coupés à l’hémistiche, mais un petit signe placé de deux en deux lignes marque la fin des vers.
  6. Au fol. 75 vo, six rubriques (v. 814-5) sont d’une autre encre, d’un bleu vert, mais paraissent toutefois de la même main.
  7. Voir sur ce sujet V. Creizenach, Geschichte des neueren Dramas, 1re éd., 1893, p. 102.
  8. Il est possible toutefois que certains de ces jeux scolaires aient été représentés dans les églises : le premier des miracles du manuscrit de Fleury (voir ci-dessous) se termine par l’Introït de l’une des messes pour le commun des pontifes (Petit de Julleville, Les Mystères, t. I, p. 72).
  9. Ce manuscrit, du xiiie siècle, est conservé à la Bibliothèque municipale d’Orléans (no 178). Édition des miracles dans Du Méril, Origines latines du théâtre moderne, p. 254-84 ; analyse dans Petit de Julleville, Les Mystères, t. I, p. 70-6.
  10. Ce manuscrit, de la fin du xie siècle, est au British Museum (Add. 22414) ; texte publié par E. Dümmler dans Zeitschrift für deutsches Alterthum, t. XXXV (1891), p. 401 ; cf. observations complémentaires, ibid., t. XXXVI, p. 238.
  11. Elle confirme donc le témoignage de Mathieu de Paris relatant la représentation, dans les premières années du xiie siècle, au monastère de Saint-Albans (comté d’Hereford), d’un miracle de sainte Catherine (cette sainte était la patronne des écoliers en philosophie) (texte dans Du Méril, op. cit., p. 35, n. 1). Voici un autre témoignage emprunté à un sermon de Thibaud de Clairvaux (xiiie siècle) : « Sicut videmus in festo sancti Nicolai quod aliqui repræsentant personam ejus, ut clericorum aliqui, aut puellarum, et miracula quæ per eum fecit Dominus. » (Hauréau, Notice sur le no 14952 (lat.) des mss. de la Bibliothèque nationale, dans Notices et Extraits des manuscrits, t. XXXII, 2e partie, p. 327.)
  12. Hilarii versus et ludi [publ. par Champollion-Figeac], Paris, Techener, 1838. Le Ludus super iconia sancti Nicolai est à la p. 34 ; aussi dans Du Méril, op. cit., p. 272. Le manuscrit, du xiie siècle, est aujourd’hui à la Bibliothèque nationale, fonds latin, no 11331.
  13. On trouvera le texte grec dans G. Anrich, Hagios Nikolaos (Berlin, 1913-1917), t. I, p. 339-42 ; cf. t. II, p. 142 et 429. Le texte latin a été imprimé plusieurs fois à la suite de la Vie par Jean Diacre, notamment dans le Sanctuarium de B. Mombritius (réimprimé par deux moines de Solesmes, 1910, t. II, p. 306-7). Voici le début de cette version : « Cum de Africæ partibus Vandolorum exercitus applicuisset ad terram Calabrindem, atque eandem regionem igne succenderent, reperta est ibi a quodam barbaro in cujusdam christicolæ domo sancti Nicolai imago in tabula honeste depicta, quam protinus in sinu suo projecit et abscondit, quamvis ab eo ignoraretur omnino quid esset. Cum autem pervenisset ad eos qui christicolas captivos deducebant vinctos, interrogavit unum ex eis et ait : « Rogo ut mihi indicetur cujus est figura in hac tabula tam pulchre depicta », et hæc dicens demonstravit eis achonam. Cum ergo eam contemplati essent christiani, cum gemitu et lachrymis dixerunt : « Imago hæc quam cernimus sancti Nicolai dicitur, qui multis miraculis et virtutibus apud Deum et homines existens clarus manifeste educet se vivere etiam post sepulchrum. » Cumque vere hoc auditu percepisset ille barbarus, continuo abscondit eam propter suos socios, nemini ex hoc aliquid pandens. Cum autem reversus esset exercitus Vandalorum in Aphricam cum plurimis captivis et spoliis multis, rediit et ipse barbarus, qui sancti Nicolai habebat tabulam, in domum suam. Erat ipse thelonarius.… » Un peu plus loin (Mombritius, réimpr., t. Il, p. 307, 10) le barbare est appelé Sarrasin : « quæ de illius Saraceni theloneo abstulerant. » Dans le drame d’Hilarius ; l’infidèle est un barbare, sans autre désignation ; dans le drame de Fleury, c’est un juif ; dans les versions dramatiques, il n’y a aucune désignation de lieu.
  14. Mais j’ai fait mon pelerinage.
    Deus m’a desfendu le passage
    Dont bone volenté avoie.

    (Congés, v. 103-5.)
  15. L’influence des chansons de geste sur toute cette partie du drame est très sensible. J’ai relevé (Romania, L, p. 435) des emprunts évidents du Jeu à Fierabras.
  16. On sait que les scènes de taverne tiennent aussi une grande place dans les jeux de Courtois d’Arras et de la Feuillée, l’un et l’autre artésiens.
  17. Pour avoir une rime correcte aux v. 589-90, il faut substituer le francien ensemble au picard ensanle, la forme emble (imbolat) paraissant seule usitée, même dans le domaine picard. — Quoique o fermé libre soit ordinairement rendu par eu, au reste attesté par la rime (preu : peu 879-80 ; keutes : teutes 169-70), et que la graphie seigneur soit presque constante, on a une fois seignour (900).
  18. Porte (267) exige une correction.
  19. Voir un relevé à peu près complet de ces formes dans Manz. Li jus de saint Nicholas, p. 28.
  20. Voir Manz, op. cit., p. 29.
  21. La correction de porte en port permet de lire seël (243).
  22. De même habituellement (trois cas sur quatre) dans la Feuillée (voir éd. Langlois, Glossaire, à vir).
  23. Il n’y a qu’un seul exemple de cette forme dans Courtois d’Arras (1-90) et deux dans la Feuillée (33-182, 837-72).
  24. Dans Courtois d’Arras (427-46) cinq quatrains d’alexandrins ; aucun exemple dans la Feuillée.
  25. Le manuscrit a été soigneusement collationné par moi-même et par Mlle Eugénie Droz, à qui j’exprime ici mes vifs remerciements.