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Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/Rognon

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Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 307).

ROGNON, s. m. — Outre le rognon proprement dit, c’est-à-dire le rein, nous appelons de ce nom une partie de la longe de veau, non fibreuse, graisseuse, savoureuse, et fondante. Je suppose (je ne suis pas fort en anatomie) qu’elle enveloppe le rein. C’est par comparaison de ce morceau que nous disons :

Le rognon d’une affaire, La partie la plus fructueuse d’une affaire ; Le rognon d’une propriété, La partie d’une propriété où la terre est le plus fertile, etc., etc. M. Lenthéric, à propos du village de Rognonas, dit que ce nom signifie en provençal gras, fertile, mais le mot ne figure dans aucun dictionnaire à ma connaissance.

Avoir les rognons couverts, Être riche. Métaphore empruntée à la physiologie porcine. Quand un cayon est bien gras, parlant par respect, il est immanquable qu’il ait les rognons couverts. M. de Rothschild a les rognons couverts.

Vous avez rognon. Voy. sous clarinette. Observer que l’on ne dit jamais Vous avez rognon, sans ajouter la graisse m’étouffe. Je constate le fait sans l’expliquer. Peut-être la phrase primitive était-elle : « la graisse vous étouffe, » puisque c’est la personne à qui l’on parle qui a le rognon, et que le rognon est enveloppé par la graisse. Quoi qu’il en soit, on ne saurait nier que c’est extrêmement spirituel.