Le Mespris de la vie et consolation contre la mort/« Pense toy qui te fie en ta jeune vigueur »
Le Mespris de la vie et consolation contre la mort
CXXXIX.
Pense toy qui te fie en ta jeune vigueur
Combien d'autres munis de plus grandes prouesse
Sont en peu d'heures cheus en debile foiblesse,
Trainant leur pauvre vie en misere et langueur
Voys comme va le tems, & de quelle longueur
Il compasse tes jours, & de quelle vistesse
Il t'ameine la mort, & de quelle rudesse
La Parque contre tous exerce sa rigueur.
Puis fondant tout en pleurs de l'homme si fragile
Tu plaindras en regret la nature imbecille,
Comme ce roy Persan amerement pleuroit
Qui contemplant d'en haut son nombreus exercite
Estoit bien asseuré que d'une telle suitte,
Pas un cent ans passez vivant ne resteroit.