Le Miroir des jours/Pour rien

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Pour rien (1912)
Le Miroir des joursMontréal (p. 152-153).
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POUR RIEN


 
Nous nous étions fâchés. Pourquoi ? Je ne sais pas. ―
Les amoureux toujours se firent des querelles. ―
Et j’oubliai le bruit chuchotant de ses pas
Dans la soie et dans les dentelles.

Je sentis en mon cœur comme un rêve expirant.
Je ne songeai plus même aux yeux de mon amie.
Le souvenir passa du pur baiser s’offrant…
J’avais vraiment l’âme endormie.


Elle revint, jolie et douce, et me parla
Avec cette voix d’or liquide comme l’onde,
Et ce qu’elle m’apprit du temps me révéla
Son indifférence profonde.

Alors, je dis un mot. Je ne sais plus lequel.
Mais sa lèvre trembla, d’émotion blêmie,
Et je vis dans ses yeux se fondre à fleur de ciel
Le cœur de ma petite amie…

Ah ! fous que nous étions ! Mon amour réveillé
Ressuscita par la puissance d’une larme,
Comme s’épanouit à l’air ensoleillé
Une violette de Parme !