Le Rôle de la Diplomatie dans la question grecque

La bibliothèque libre.
Le Rôle de la Diplomatie dans la question grecque
Revue des Deux Mondes3e période, tome 41 (p. 212-224).
LE
ROLE DE LA DIPLOMATIE
DANS LA QUESTION GRECQUE

Il en est de toutes les assemblées, petites ou grandes, comme des simples particuliers : elles succombent facilement à la tentation de se mêler de ce qui ne les regarde pas. Tout récemment, le conseil général des Bouches-du-Rhône et celui de Saône-et-Loire ont tenu, sans que personne les en priât, à faire acte d’adhésion aux doctrines des Amis de la paix. Ils ont voté une motion en faveur de l’abolition de la guerre, ils ont émis le vœu que désormais tous les différends internationaux fussent jugés pacifiquement par un aréopage européen. Ce vote a paru fort singulier, et il en faut conclure que l’air qu’on respire à Marseille comme à Mâcon prédispose à la foi, car aujourd’hui ces deux villes sont les seules de toute l’Europe où l’on croie encore aux aréopages. Partout ailleurs le sentiment qui domine est une défiance peut-être exagérée à l’égard des arbitrages et des arbitres.

Il faut avouer que depuis quelque temps la diplomatie n’a pas eu la main heureuse ; elle semble s’appliquer à fournir des armes et des argumens aux sceptiques ; qui prétendent qu’elle ne sert plus à rien, que les gouvernemens devraient rappeler leurs ambassadeurs et les remplacer par des téléphones. Tous les hommes qui raisonnent trop finissent par déraisonner, et c’est ce qui arrive à ces sceptiques. Il n’en est pas moins vrai que le grand public, qui ne juge des choses que par l’événement, est disposé à voir d’un œil peu favorable les prétendus services que la diplomatie rend à la tranquillité des peuples et à la paix générale. On se plaignait après la guerre franco-allemande qu’il n’y avait plus d’Europe ; l’Europe s’est retrouvée, on a rétabli le concert des grandes puissances, mais ce concert a été impuissant à prévenir et à conjurer les horreurs d’une nouvelle guerre d’Orient. Cette guerre enfin terminée, on recommençait à respirer, on se flattait que la paix était assurée pour quelques années au moins. Malheureusement, une conférence internationale s’est réunie à Berlin pour faire exécuter les dernières clauses du traité de Berlin, et cette conférence a rouvert la boîte de Pandore en imposant à la Turquie des conditions si rigoureuses qu’aucun sultan, pour ne pas dire aucun souverain, ne consentirait à s’y soumettre. On met Abdul-Hamid en demeure d’octroyer au royaume hellénique, à titre de don gratuit, la Thessalie avec Larissa et les deux versans de la vallée du Pénée, l’Épire, en y comprenant Janina, c’est-à-dire qu’on lui demande des cessions de territoire encore plus considérables que celles dont on était d’abord convenu. Abdul-Hamid résiste, les inquiétudes se réveillent, tout semble remis en question, la péninsule du Balkan est menacée de nouvelles tempêtes, et voilà pourquoi Marseille et Mâcon sont les seules villes de l’Europe où l’on conserve une foi imperturbable à la vertu toute-puissante des aréopages.

Les intentions de l’aréopage de Berlin étaient sans doute excellentes, et tout le monde s’associe en quelque mesure aux sentimens dont il s’est inspiré, car tout le monde est porté à croire à l’avenir de la Grèce beaucoup plus qu’à celui de la Turquie. Les vices héréditaires, les maladies incurables dont le gouvernement turc est travaillé, on les connaît depuis longtemps, on en a parlé mille fois. Dernièrement encore, un voyageur allemand de grand mérite, M. de Löher, faisait un tableau aussi mélancolique que sincère de la situation lamentable que créent à l’empire ottoman les abus de la vénalité et les excès de la concussion[1]. — « Sur les bords du Bosphore, écrivait-il, tous les pachaliks sont cotés comme à la bourse. Les prix fixés par le tarif varient selon l’importance et le nombre des demandes. Il y a à Stamboul beaucoup de grandes familles dont le chef considère qu’il a été mis au monde pour s’enrichir par le gouvernement. Ces hommes destinés au gouvernement sont condamnés à de perpétuels embarras ; l’argent leur coule à travers les doigts et les fantaisies de leurs femmes leur coûtent gros. Après avoir vécu d’expédiens pendant deux ou trois années, ils voient un jour apparaître le banquier arménien, qui leur déclare qu’il entend recouvrer ses créances et rentrer dans ses débours. Le débiteur insolvable répond au banquier qu’il n’a pas d’autre moyen de le payer que d’obtenir quelque emploi lucratif, et il le dépêche auprès du ministre pour lui demander un pachalik. Le ministre fait d’abord grise mine ; il a d’autres bons amis à pourvoir ; mais il doit lui-même des sommes considérables à l’Arménien ou à l’un de ses compères, qui est aussi un Arménien. On le met à son tour en demeure de s’acquitter, il aime mieux recevoir que payer, et moyennant un gros pot-de-vin, il se décide à accorder le pachalik pour un temps qu’il n’a garde de préciser. »

Le nouveau pacha s’installe dans son konak, c’est-à-dire dans le soi-disant château qui lui sert de résidence et qui n’offre au regard que de longues murailles nues, occupées à contempler quelques vieux divans. Il déclare dès son arrivée qu’il a de vastes projets de réformes, à quoi il ajoute que tel sous-pacha ou caïmakan lui paraît s’acquitter fort mal des devoirs de sa charge. Aussitôt se présentent de nombreux candidats à la succession, apportant des bourses pleines ; mais le caïmakan apporte des bourses encore mieux garnies et conserve la place. A peine a-t-il conjuré le danger, il songe à se refaire aux dépens du paysan. Village après village, tout le monde est mis à contribution. Les mudirs et les agas connaissent sur le bout du doigt la fortune de chacun ; ils ont compté les cochons, les chèvres, les grains vendus et à vendre. Il ne s’agit que de trouver un prétexte. On allègue que le maître a besoin de ferrer à neuf ses chevaux, et la somme qu’on réclame suffirait pour ferrer deux régimens de cavalerie. Les malheureux résistent ; on loge chez eux comme garnisaires des zaptiés ou gendarmes, qui d’abord sont charmans et qui par degrés deviennent insupportables. Les rénitens sont menacés de peines corporelles ou du cachot. Bientôt leur résistance mollit, ils entrent en composition, on marchande longtemps, on finit, par tomber d’accord. « Où ces pauvres diables trouvent de l’argent, personne ne l’a jamais su, ajoute M. de Löher. Dès que les zaptiés ont touché la somme, ils la portent au maître, après quoi ils s’en vont prendre quartier dans un village voisin, où recommence la même tragi-comédie. C’est ainsi que de jour en jour quelques familles de plus sont ruinées ; c’est ainsi que chaque année quelques arpens de terre sont convertis en friches et que les provinces s’épuisent pour engraisser Stamboul. Mais de l’argent qu’elles y envoient, la plus petite partie sert à fournir au luxe des harems, le reste disparaît comme par miracle, il s’immobilise dans les mains des Arméniens. Les uns disent qu’ils le déposent dans leurs couvens, les autres qu’ils l’enfouissent clandestinement dans quelque trou. »

Ce que raconte M. de Löher, bien d’autres l’ont dit à leur manière avant lui. Tous les voyageurs sérieux rapportent d’une tournée en Orient beaucoup d’estime pour le paysan turc, pour le marchand turc, pour le soldat turc, et en général pour tous les Turcs qui ne sont rien et qui réalisent quelquefois la perfection de l’humaine vertu. En revanche, ils professent des sentimens fort différens à l’égard de cette jeunesse dorée de Constantinople dans laquelle se recrutent d’ordinaire les services de l’état ; ils flétrissent de leurs mépris ceux qu’on appelle les effendis de Stamboul, « ces dix mille qui ont droit à toutes les places, » cette oligarchie corrompue qui tient en régie l’empire ottoman et qui s’entend comme personne à tondre les moutons en les écorchant, à presser les citrons et à faire périr les citronniers, à faire le vide dans les coffres-forts et à convertir les champs en friches, joignant les inventions subtiles du renard aux serres crochues et aux procédés sommaires du vautour. Le Punch racontait l’autre jour qu’un Anglais, conversant avec une charmante Américaine qui avait beaucoup voyagé, lui demanda ou elle avait rencontré les hommes les mieux élevés et les plus aimables ; elle répondit : « Dans l’aristocratie anglaise. » Chatouillé dans son amour-propre national, l’Anglais lui demanda ensuite où elle avait trouvé les hommes les plus déplaisans et les butors les plus accomplis ; elle répondit également : « Dans l’aristocratie anglaise. » On en pourrait dire autant de ce pauvre peuple turc, qui allie les plus belles vertus aux vices les plus déplorables. Le corps de la nation est robuste et sain ; mais quand un corps ne réussit pas à assainir sa tête, il faut bien qu’il partage les fâcheuses destinées de cette tête perverse et maudite, qui refuse de se laisser guérir.

Les voyageurs s’accordent aussi à reconnaître que de tous les peuples qui habitent l’Orient le plus perfectible, le plus apte à la civilisation, celui qui a l’esprit le plus actif et partant le plus d’avenir est l’Hellène. On a dit que le Turc comme le Magyar a l’instinct de la politique, que le Bulgare s’entend à l’agriculture, à l’élève du bétail et au petit commerce, que le Juif et l’Arménien ont le génie de la banque, que l’Albanais est né pour se promener dans la montagne un fusil sur l’épaule et sa pipe à la bouche, mais que le Grec est né pour tout faire et tout apprendre. Cependant on a dit aussi que le Grec qui ne se faisait pas négociant ou marin manquait sa vocation, et personne ne peut nier que la Grèce ne fournisse à l’Europe quelques-uns de ses plus habiles négocians, en même temps qu’elle produit les plus admirables marins. Mais le caractère distinctif de ces marins et de ces négocians est qu’ils ont pour la plupart la passion de s’instruire, et c’est là ce qui fait leur originalité au milieu de toutes ces races à demi barbares que le Turc a gouvernées après Byzance. Si Athènes n’est plus une grande école d’art et de philosophie, Athènes est une ruche qui envoie dans tout l’empire ottoman comme un essaim d’institutrices et d’instituteurs, chargés de répandre sur tous les rivages les souvenirs et les espérances de la Grèce. La propagande que font ces instituteurs a d’autant plus d’effet qu’ils ont le bonheur d’exprimer leurs pensées dans un idiome qui ressemble chaque année davantage à la plus belle langue que les hommes aient jamais parlée.

Un Hellène qui écrit en allemand, M. Pervanoglu, a fait récemment un portrait un peu flatté peut-être de ses compatriotes, bien qu’il affecte de mêler quelques vérités aux louanges qu’il leur décerne, et qu’il en use comme ces mères qui font semblant de fouailler leurs enfans et qui les effleurent à peine du bout de la verge[2]. M. Pervanoglu traite de calomnieuse la réputation de ruse et d’astuce qu’on a faite aux Grecs. Homère pourtant, quelque tendresse qu’il eût pour Ulysse, n’a pas craint de confesser que le roi d’Ithaque avait quelque goût pour les voies obliques et plus d’un bon tour dans son sac. Il ne faut pas être plus royaliste que le roi ni plus philhellène qu’Homère. Il est certain toutefois que plusieurs des défauts qu’on impute aux Hellènes sont la suite fatale de leurs destinées ou même un effet inévitable de leurs bonnes qualités. On leur fait un crime d’avoir souffert si longtemps le brigandage jusqu’aux portes d’Athènes, on oublie que le brigandage est une industrie répandue dans tout l’Orient ; depuis leur émancipation, les Bulgares paraissent la cultiver avec amour, et en bons voisins ils cherchent à la propager en Roumanie, bien que les ingrats Roumains leur en témoignent une médiocre reconnaissance. On reproche encore aux Grecs leur indiscipline, leur penchant à tout critiquer, à tout censurer, on les accuse de pousser jusqu’à l’abus le goût de l’universelle discussion, si bien que chez eux le simple soldat discute sa consigne avec son officier. C’est un malheur dont se préserve difficilement un peuple qui a l’esprit très prompt, très délié, et beaucoup de loisirs, ayant peu de besoins ; quand on est capable de vivre d’eau claire et d’une poignée d’olives, le plaisir de raisonner et de parler tient lieu de tous les autres. Les modernes Athéniens peuvent se consoler en pensant que Cléon, s’il faut en croire Thucydide, reprochait déjà à leurs ancêtres « d’aimer à conjecturer l’avenir d’après ce qu’en disent les beaux parleurs, comme si les destinées devaient obéir à l’éloquence, de se plaire avant tout à la nouveauté du propos, d’être esclaves de l’extraordinaire et dédaigneux des circonstances communes, de chercher autre chose que ce qui convient au monde où nous vivons et de se laisser conduire aux aventures par le plaisir des oreilles. » — « O spectateurs de beaux discours ! leur disait Cléon, infatigables écouteurs d’événemens ! »

On se plaint que les Hellènes sacrifient tout à la politique, que leur occupation favorite est de faire et de défaire des cabinets, quand ils auraient cent autres manières de mieux employer leur temps. C’est encore un péché véniel. Faut-il s’étonner que l’une des nations les mieux douées de la terre soit aussi l’une des plus ambitieuses, et qu’on y trouve beaucoup de particuliers désireux de s’élever par l’étude et le savoir au-dessus de leur condition ? Ils estiment que l’instruction est l’outil universel, et quand on se flatte de posséder l’outil, on aspire à tout, même à devenir président du conseil. En voyageant dans son pays, M. Pervanoglu a entendu plus d’un paysan qui disait : « Je veux que mon fils aille à l’Université, afin que lui aussi devienne ministre. » Comme le Juif, le Grec a beaucoup d’imagination, ce qui ne l’empêche pas d’être le moins romanesque des hommes. Ce n’est pas la Vénus de Milo que tel jeune Thébain ou tel jeune Spartiate voient passer dans leurs rêves d’adolescens, c’est un beau portefeuille de maroquin, et ce portefeuille leur fait prendre en pitié les cornes de la charrue.

On prétend, disent les censeurs et les contempteurs du petit royaume hellénique, que les Grecs sont un peuple progressif. Où en est aujourd’hui leur agriculture ? où en est leur industrie ? Il n’y a pas chez eux d’autres progrès visibles que celui de leur dette publique, des intérêts qu’ils doivent payer pour leurs emprunts successifs et des dépenses improductives qu’ils aiment à s’imposer. Leur ministre des finances avait prévu pour 1880 un déficit de 11 millions ; Dieu sait à quoi il montera ! En 1877, leur budget s’élevait à 41 millions de drachmes, et 8 millions et demi étaient consacrés au service de la dette extérieure et intérieure, près de 4 millions aux pensions militaires ou autres, plus d’un million à la liste civile, 450,000 drachmes aux indemnités des députés, un million à la diplomatie et 8 millions au ministère de la guerre. Trop de soldats, trop d’officiers, trop de généraux, trop de discoureurs en chambre ou en plein vent, trop d’emprunts, trop de dettes et pas une route, voilà la Grèce. Il y a bien un petit chemin de fer qui relie Athènes au Pirée, et l’on peut se rendre à Eleusis en voiture, mais c’est tout et pour aller de Tripolitza à Sparte, il faut cheminer à travers champs, à dos de cheval ou de mulet. — Les économistes devraient avoir quelque indulgence pour un petit pays qui considère sa situation comme un pis-aller, comme un état provisoire, et qui se croit appelé aux plus grandes destinées. On pourrait comparer les Grecs à un fils de famille tombé dans la misère, qui nourrit l’espoir d’hériter prochainement de son tuteur, dont il attend la mort avec une joyeuse impatience ; assuré de son avenir, certain qu’avant peu il aura un grand train de maison, il épuise ses finances déjà fort courtes pour acquérir tous les arts inutiles, agréables et coûteux qui conviennent a un gentilhomme. Les Grecs se flattent d’être les héritiers prédestinés du Turc, de posséder un jour Constantinople et d’y établir l’empire de Byzance. C’est là ce qu’on appelle « la grande idée » à laquelle tout Hellène a dressé un autel dans son cœur. Mais rien n’est plus coûteux qu’une grande idée, elle condamne un peuple aux dépenses improductives, elle l’oblige de sacrifier à son armée l’équilibre de son budget et ses joies présentes à ses lointaines prévisions. La Suisse, qui n’a pas de grande idée, a des voies ferrées, des industries prospères, des routes admirablement entretenues. Les hommes doivent. choisir entre le bonheur et l’espérance, mais il en est pour qui l’espérance est le premier des bonheurs, et les Grecs sont dans ce cas ; aussi n’ont-ils garde d’envier la félicité des Suisses. — « A quelles conditions le royaume hellénique pourrait rétablir l’équilibre de son budget, personne ne peut le savoir, a dit fort sensément un Anglais. Les finances grecques dépendent de la politique grecque, et la politique grecque dépend à son tour du bon plaisir de l’Europe[3]. »

S’il suffisait de frapper la terre avec une baguette magique pour que « la grande idée » s’exécutât, il se trouverait sans doute en Europe une majorité pour applaudir à ce coup et à cet effet, car le philhellénisme réveille encore bien des échos dans les cœurs. Mais si l’on démontrait à l’Europe que, dans l’état présent des choses, la grande idée ne peut s’accomplir sans faire couler des torrens de sang et qu’à vouloir précipiter le dénoûment, on risque d’allumer une guerre générale, nous pensons que la majorité des peuples s’entendrait pour prier les Grecs de patienter un peu. Les diplomates ne croient guère à la magie ni aux miracles, et ils savent que de la coupe aux lèvres le chemin est souvent très long. Qu’ils s’intéressent à la Grèce, qu’ils lui veuillent beaucoup de bien, personne ne songe à les en blâmer ; car tout le monde en fait autant ; mais leur métier est d’avoir quelquefois des scrupules que tout le monde n’a pas, de faire des réflexions que tout le monde ne fait pas, de prévoir des conséquences qui échappent à la clairvoyance du vulgaire.

Le conseillers-généraux de Saône-et-Loire et des Bouches-du-Rhône, qui ont décrété l’abolition de la guerre et résolu de faire trancher désormais toutes les difficultés internationales par voie d’arbitrage, sont persuadés sans doute que l’office propre d’un arbitre est de défendre la raison contre toutes les déraisons, le droit contre les ambitions excessives et le vaincu contre les abus de la force. Il faut croire que leur conviction est si fortement raisonnée qu’elle résiste à toutes les expériences, puisque ni le congrès ni la conférence de Berlin n’ont pu les guérir de leur illusion. Il a été convenu dans tous les temps que la guerre crée des droits, et c’est une règle de l’histoire universelle que le vainqueur est autorisé à garder tout ou partie de ce qu’il a pris. La victoire est un fait brutal et terrible, elle saisit le vaincu à la gorge, elle lui met la main sur la bouche et il faut qu’il s’exécute en silence ; ce n’est pas d’hier qu’a été proféré pour la première fois ce cri farouche : Væ victis ! Il appartenait à la nouvelle école de diplomatie qui semble avoir fait ses premières armes à Berlin de déclarer que le vaincu n’a pas seulement une dette à payer au vainqueur, mais qu’il doit encore une sorte d’indemnité à tous ceux de ses voisins qui, le voyant aux prises avec l’ennemi, ont eu la générosité de ne pas profiter de ses embarras et de ses détresses pour envahir son territoire à main armée. — « La Grèce, ont dit les diplomates à la Turquie, vous a rendu le service essentiel de ne pas faire la conquête de la Thessalie et de l’Épire pendant que vous vous battiez avec les Russes et que vous arrosiez Plevna de votre sang. Un bienfait ne doit jamais être perdu, la reconnaissance est le plus sacré des devoirs. Hâtez-vous donc de récompenser les Grecs de leur bon procédé en leur cédant et l’Épire et la Thessalie, qu’ils seraient incapables de vous prendre. » — Les Turcs ont peu goûté ce raisonnement, et cette demande leur a paru exorbitante ; ils ont chicané, chipoté, marchandé. Impatientée de leurs délais, la conférence de Berlin leur a dit : « On n’accorde pas de délais aux mauvais payeurs ; donnez sur-le-champ tout ce qu’on vous demande et même Janina qu’on ne vous demandait pas. » Si cette nouvelle théorie s’introduisait à jamais dans le droit international, on pourrait écrire un beau livre intitulé : « Ce qu’on doit à ses bons voisins, ou de l’art de conquérir des provinces sans brûler une cartouche. » Donner sa bourse au voleur qui vous met le pistolet sur la gorge est une extrémité à laquelle on se résigne, tout en se promettant de trouver quelque occasion de la reprendre ; mais consentir par déférence pour un arbitre à donner sa montre au passant qui a eu l’obligeance de ne pas vous achever pendant que vous étiez à terre, voilà un effort dont bien peu d’hommes sont capables. Peut-être, en dépit des honorables conseillers-généraux de Saône-et-Loire et des Bouches-du-Rhône, le vaincu jugera-t-il qu’un ennemi vaut mieux qu’un pacificateur, que les droits de la guerre sont moins durs que la sentence d’un tribunal et que les événemens sont des maîtres moins insolens que des arbitres.

Les honorables conseillers-généraux qui croient encore à la souveraine vertu des aréopages auraient bien dû nous dire comment, juste ou injuste, ils doivent s’y prendre pour faire exécuter leur sentence. Sans doute à Marseille comme à Mâcon, à Mâcon comme à Marseille, on estime que la persuasion est toute-puissante. On s’est fait à Berlin la même illusion, mais le résultat a trompé l’attente générale. En vain les six grandes puissances signataires, appuyant la conclusion de la conférence, ont-elles dit d’une commune voix au sultan : « Encore un coup, accédez à notre désir. Vous nous rendrez service, vous nous tirerez une épine du pied. Si vous résistiez, nous serions dans un cruel embarras ; songez au contraire à la réputation d’habileté que nous ne manquerions pas d’acquérir si ceux d’entre nous qui ont à rendre compte de leurs actions à un parlement pouvaient lui annoncer dès demain qu’il nous suffit de parler pour être obéis. On en conclurait que notre éloquence produit des miracles, et vous pourriez compter sur notre éternelle gratitude. Pour vous en donner un gage éclatant, nous vous promettons de ne plus rien vous prendre, jusqu’à nouvel ordre du moins ; si quelques-uns de vos sujets viennent à se révolter, nous ne leur accorderons que notre appui moral ; sir Charles Dilke l’a dit, et sa parole fait foi. Pensez d’ailleurs qu’il y va de votre plus cher intérêt. On a commencé à vous démembrer : qui a bu boira, et c’est le commencement de la fin. Donnez aux Grecs dès ce jour Larissa, Metzovo, Janina et le reste, c’est la meilleure opération que vous puissiez faire ; n’est-il pas évident que ce que vous donnez, on ne pourra plus vous le prendre ? Que si vous demeurez sourds à nos argumens, cela prouvera une fois encore que vous êtes des barbares à l’esprit obtus, des fanatiques incapables de rien comprendre, et il passera pour démontré que le Coran est inconciliable avec les lumières modernes. » Les oreilles de la Turquie ne se sont point ouvertes et son cœur n’a point été touché ; elle a refusé de rien comprendre. Le sultan a répondu obstinément : « Je suis bien sensible aux assurances et aux preuves d’amitié que vous me donnez dans cette conjoncture comme à toutes celles dont vous me promettez de me combler plus tard ; mais il n’est pas dans nos habitudes, et peut-être n’est-il dans les habitudes d’aucun peuple et d’aucun souverain de céder des portions considérables de territoire à un voisin qui ne les a pas prises et qui serait incapable de les prendre. Si j’en usais de la sorte, non-seulement cela créerait un antécédent fâcheux, mais je ne serais pas en état de me faire obéir de mes sujets, et il se pourrait qu’avec mon honneur j’exposasse mon trône et ma vie. Quelque désir que j’aie de vous obliger et dussé-je passer pour un fanatique, je ne consens pas à faire la guerre aux Albanais ou Skhipétars mes sujets, pour les contraindre à se donner aux Grecs. » — « Puisqu’il faut faire la guerre, disait Louis XIV, j’aime mieux la faire à mes ennemis qu’à mes enfans. » — C’est à peu près ce qu’a répondu Abdul-Hamid, et tout cela en vérité fait penser à une fable de La Fontaine, car bien que La Fontaine n’ait fait parler que « les héros dont Ésope est le père, » toute la politique du jour est résumée dans ses fables.

Quand la persuasion demeure sans effet, quelle conduite doivent tenir les aréopages ? à quels moyens doivent-ils recourir ? Ni à Marseille ni à Mâcon, on ne s’est occupé de nous l’apprendre. Quant aux six puissances signataires, elles ont pensé qu’où la persuasion n’agit pas, il faut recourir à la force, et elles ont délibéré sérieusement sur les mesures à concerter en commun pour réduire l’obstination de la Sublime-Porte. Mais, pour agir en commun, il faut avoir les mêmes goûts, les mêmes inclinations, les mêmes intérêts, les mêmes visées. Le grand Frédéric, dont on peut dire, en lui appliquant une parole de M. de Metternich, qu’il était « le bon sens cristallisé, » écrivait le 28 février 1745 à un de ses conseillers privés de légation pour le prier « de faire entendre à lord Chesterfield, quoique avec toute la politesse imaginable, qu’à la vérité il y a des situations violentes en politique où souvent des intérêts assez opposés d’alliés se soutiennent pendant un temps, mais que ces situations ne sont que momentanées, et que les véritables intérêts des princes, qui servent de règle à leur conduite, les entraînent tôt ou tard et les ramènent à leurs véritables principes… Vous ajouterez à tout ceci, écrivait-il encore, que les grands princes ne font rien pour les beaux yeux l’un de l’autre. » Les ministres et les diplomates des puissances signataires n’ont pas tardé à s’aviser que leurs intérêts respectifs s’accordaient mal, qu’ils n’étaient point disposés à rien faire pour les beaux yeux l’un de l’autre, que toute mesure exécutoire rouvrirait la question d’Orient et qu’on ne pouvait la rouvrir sans risquer de mettre le feu à l’Europe.

La question d’Orient est plus que jamais pour l’Europe un trouble-fête, un cauchemar, un danger permanent. Depuis que le congrès de Berlin a sonné l’hallali de la grande curée, depuis que l’empire austro-hongrois s’est fait sa part en occupant la Bosnie et l’Herzégovine, il ne peut plus se tirer dans la péninsule du Balkan un seul coup de fusil (nous ne parlons pas de l’escopette des brigands) qui ne risque de mettre aux prises Vienne et Saint-Pétersbourg. L’Autriche, depuis ses nouvelles annexions, s’est créé en Orient, comme on l’a remarqué, une situation fort analogue à celle qu’elle a eue si longtemps en Italie[4]. Quand elle possédait la plaine lombarde, elle combattait de toutes ses forces les tendances à l’unité nationale qui travaillaient les Italiens et qui la menaçaient dans ses possessions, et pour les combattre, elle s’appuyait sur les princes, dont elle exploitait les jalousies réciproques. En Orient, elle doit recommencer le même jeu en se défendant contre le panslavisme. Malheureusement le panslavisme, qui s’appelle aujourd’hui le panbulgarisme, est soutenu du dehors par la Russie. La Bulgarie est désormais l’enfant chéri du cabinet de Saint-Pétersbourg ; il la comble de ses bienfaits, il lui fournit non-seulement des informations, des avis et des conseils, mais des agens-voyers, des ingénieurs, des munitions, des soldats, des officiers, des généraux, jusqu’à des ministres, et il rêve de l’agrandir en annexant Philippopoli à Sophia, la Roumélie orientale aux états du prince Alexandre.

La politique autrichienne est condamnée à remonter les courans, la Russie les descend, ce qui est plus commode. L’Autriche, bien qu’elle soif un pays constitutionnel, cherche à se concilier le cœur des princes ; la Russie, qui n’a pas de parlement, mais qui s’entend à se servir des parlemens des autres, la Russie, qui en matière de politique étrangère est le plus admirable des démagogues, s’occupe de s’attacher les chefs de partis et de constituer partout avec leur aide des comités d’action ; quand les princes ont à son égard des velléités d’indépendance, les comités et les chefs de parti se chargent de les mettre à la raison. L’Autriche veut du bien aux Grecs parce que les Grecs ne sont pas des Slaves, mais elle veut avant tout le maintien du statu quo ; elle sent que toute agitation nouvelle, toute entreprise violente contre le Turc profiterait à la Russie, et elle peut compter pour l’assister dans sa politique conservatrice sur le puissant concours de son puissant allié, l’empire d’Allemagne. La Russie n’a cure que des Bulgares, elle aime peu les Grecs, mais elle leur saurait un gré infini de rouvrir la question d’Orient, ce qui lui fournirait l’occasion de mettre enfin sur pied sa Grande-Bulgarie, et il s’est trouvé que, dans cette occurrence, l’appui de l’Angleterre, représentée par M. Gladstone, lui était acquis, non que M. Gladstone entende lui livrer l’Orient, mais il déteste deux choses, le croissant et Rome. Monténégrins, Serbes ou Bulgares, tout ce qui n’est ni musulman ni catholique peut faire appel à sa bienveillance. D’ailleurs il est convaincu que le plus sûr moyen d’arracher les Slaves du midi à l’influence russe est de leur accorder tout ce qu’ils demandent, parce que, n’ayant plus rien à désirer, ils n’auront plus besoin d’un protecteur, — comme s’il avait jamais existé un seul Slave qui n’eût plus rien à désirer ! Enfin il avait pris pendant sa dernière campagne électorale des engagemens qui le lient. Son éloquence est la trompette qui a renversé les murs de Jéricho ; les trompettes sont quelquefois trop bruyantes, elles parlent trop, et leurs souvenirs les gênent lorsqu’on les convie brusquement à présider et à diriger un cabinet. Quant aux Italiens, ils ne s’intéressent bien vivement ni aux Slaves ni aux Grecs, mais il leur importe que l’héritage du Turc ne tombe pas tout entier dans les mêmes mains. D’autre part, ces enfans gâtés de la fortune, toujours a l’affût des occasions, ne craignent pas les grands vents qui remuent les grandes eaux ; ce sont d’incomparables pêcheurs. Voilà ce qu’on appelle le concert européen, et voilà pourquoi il s’est trouvé en Europe plusieurs puissances peu disposées à rouvrir la question d’Orient, en prenant en commun des mesures de rigueur contre le sultan.

Cependant la diplomatie s’était avisée d’un mode d’exécution qui paraît à tous les dangers, qui sauvait tous les inconvéniens. Elle avait décidé que le meilleur moyen de prévenir un périlleux conflit entre le sultan et le roi George était de faire occuper l’Albanie par une des six puissances signataires, en confiant cette tâche à la plus désintéressée, à celle dont les intentions étaient le moins suspectes et le plus limpides. — Il y a en Europe, se disait-on, une puissance disposée à s’acquitter des besognes ingrates qui ne rapportent rien, une puissance qui a des inclinations chevaleresques et le goût de faire le bonheur d’autrui, une puissance qui se console de tous les sacrifices qu’elle s’impose par le plaisir de vanité qu’elle en retire. Bien que la France, qui possède l’Algérie, soit tenue de ne pas se brouiller avec Mahomet, elle n’a pas hésité à prendre parti pour la Grèce ; une fois encore ses généreuses sympathies ont prévalu sur son intérêt. Le sultan n’osera pas se commettre avec la France. Qu’elle se charge d’occuper l’Albanie, il lui suffira d’envoyer et de débarquer une simple division. A vrai dire, il lui en coûtera de 30 à 40 millions ; mais n’a-t-elle pas déclaré depuis longtemps qu’elle est assez riche pour payer sa gloire ? — Parmi ces diplomates avisés, quelques-uns se flattaient du secret espoir que les Albanais ne seraient pas commodes à réduire, que l’occupant aurait à se débattre avec de grosses difficultés, avec des accidens imprévus ; Il y a sur le Pinde et ailleurs des fourrés épineux où l’on reste pris malgré soi ; on y entre difficilement, il est plus difficile encore d’en sortir. Le gouvernement français a trompé ces espérances et déjoué ces calculs en déclinant résolument l’honneur qu’on voulait bien lui conférer. Il a répondu à l’Europe qu’il se prêterait volontiers à une action commune, mais que si chers que lui fussent les Grecs, il ne se chargeait point de travailler lui tout seul à leur bonheur, qu’il entendait réserver ses soldats et ses millions pour quelque affaire où son intérêt serait visiblement engagé. « N’entreprends jamais dans la république plus que tu ne peux persuader, » disait Cicéron. Le gouvernement français a désespéré de faire comprendre à la France qu’il y allait de son honneur et de son salut d’en découdre avec les Turcs et des Albanais pour procurer Janina à la Grèce.

N’ayant réussi à persuader ni la Turquie ni la France, que fera la diplomatie européenne ? Elle vient d’adresser une nouvelle note au sultan ; espérons que cette note aura plus de succès que la première. S’il en était autrement, les gouvernemens se décideront-ils, coûte que coûte, à recourir aux voies de fait ; ou bien dira-t-on simplement à la Grèce : « Nous vous faisons présent de la Thessalie et de l’Épire, mais à la condition que vous vous chargerez d’arracher lambeaux par lambeaux ces deux provinces aux Turcs, aux Albanais, à la ligue de Prizrend, aux Guègues et aux Tosques. C’est un précieux rayon de miel que nous vous donnons, allez vous-mêmes le chercher dans la ruche, et que Dieu vous protège contre les abeilles liguées avec les guêpes et les frelons ! » Qu’en penserait la Grèce ? — « Nous croyons, a dit un publiciste qui nous parait bien informé, qu’elle ne sortirait pas victorieuse de cette lutte. Mais supposons qu’elle parvienne à briser la résistance albanaise et à établir sa frontière sur le Kalamas, dans quel état trouvera-t-elle ce pays ? Nous savons tous aujourd’hui comment la guerre se fait entre les peuples de la péninsule des Balkans. Les Albanais ravageront toute la partie grecque de la province ; les Grecs, les volontaires, sinon l’armée, en ravageront toute la partie albanaise, et au bout de compte, il ne restera au vainqueur, quel qu’il soit, que des ruines ensanglantées… Pendant longtemps le trésor grec n’en tirera donc aucun revenu, et même les revenus futurs de la Thessalie seront amoindris par cette guerre, car, commencée en Épire, elle s’étendra nécessairement de l’autre côté du Pinde, où les irréguliers de la Haute-Albanie sont déjà habitués à fourrager… Si nous ajoutons que probablement la Grèce aura à accepter, avec le territoire cédé par la Porte, une partie correspondante de la dette publique de celle-ci, nous ne pouvons considérer cette annexion comme une bonne affaire qu’à la condition qu’elle puisse s’exécuter pacifiquement[5]. » Le président du nouveau cabinet grec avait jugé que son pays, n’étant point intervenu dans la guerre russo-turque, ne devait pas mendier une part dans les dépouilles du vaincu, qu’il devait plutôt user de son influence pour améliorer le sort des raïas en Turquie. Il engageait ses compatriotes à calmer leurs impatiences, à réformer leur budget, à faire des économies, à rétablir un peu d’ordre dans leurs finances embarrassées. La diplomatie est venue traverser tous les plans de M. Tricoupis. Elle a réveillé les espérances du petit royaume, elle lui a montré la proie, elle le convie aux aventures, elle l’oblige à s’épuiser en armemens. Si désormais elle abandonnait les Grecs à eux-mêmes, leur ruine serait son ouvrage, et ils auraient sujet de se plaindre qu’on les a joués, ils auraient le droit de citer leurs mystificateurs devant le tribunal de l’histoire.

Mais nous raisonnons en profanes qui ne sont pas initiés aux secrets des dieux. Il est à présumer que nous calomnions la diplomatie, qu’elle ménage à l’Europe une surprise, qu’elle tient en réserve quelque savante combinaison qui donnera deux provinces à la Grèce sans rien compromettre et sans troubler la paix. Elle s’appliquera sans doute à justifier le vote des honorables conseillers-généraux des Bouches-du-Rhône et de Saône-et-Loire, à leur prouver qu’ils ont raison de croire aux aréopages, et peut-être se trouvera-t-il que Marseille et Mâcon sont les seuls endroits du monde où l’on voie clair. Avant peu l’événement nous l’apprendra. L’événement est un juge souverain, c’est lui qui justifie et qui condamne ; qu’on soit soldat, diplomate ou conseiller-général, c’est lui qui décide de toutes les renommées. Dans une lettre datée du 16 juillet 1745, le grand Frédéric, qui ne savait ce qu’il devait penser du génie du prince de Conti, écrivait à son cher Rothenbourg : « La perspective politique n’est pas fort claire à présent, mais il faut attendre que le brouillard tombe ; alors on verra s’il faut donner au prince de Conti des lauriers ou des chardons. »


G. VALBERT.

  1. Cypern, Reiseberichte über Natur und Landschaft, Volk und Geschichte, von Franz von Löher. 3me édition, Stuttgart, 1880.
  2. Culturbilder aus Griechenland, von Dr J. Pervanoglu, Vorm. Custos der Universitatsbibliotbek zu Athen ; Leipzig, 1880.
  3. Greece, by Lewis Sergeant, with illustrations ; Londres, 1880.
  4. Voir dans l’Allgemeine Zeitung du 19 août 1880 un article intitulé : die Fürstenbesuche in Ischl.
  5. L’Albanie et les Albanais, par le colonel Becker ; Paris, Dentu, 1880.