Le parfait mareschal/100

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Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 286-288).


LEs Peignes sont des gratelles farineuses qui sont causées par une crasse aduste, jaune, & maligne, qui sort par la racine du poil, & s’attache sur le cuir, par son acrimonie elle le fait dresser à la couronne & au dessus ; & enfin, le fait tomber absolument.

On les connoist en ce que le poil est herissé sur la couronne, & souvent les Peignes occupent & tiennent tout le paturon, & à quelques-uns jusqu’au boulet, en maniant & touchant l’endroit on le trouve plein de crasse farineuse, & la couronne est enflée, par l’abondance des humeurs qui se jettent en cette partie, d’où le plus subtil s’exhalle & sort au travers des pores, & rencontrant le poil, s’espoissit & se congele en sel, qui s’attache au cuir, & fait cette crasse, que tous les Chevaux qui ont des Peignes ont sur la couronne : Il y a deux sortes de Peignes des seches ; qui ne rendent Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/301 Chap.
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humides ; j’y appliquay de l’esprit de vitriol, meilleur & plus fort que je ne croyoïs, & qu’on ne le vend communement dans les Boutiques à Paris, en une seule fois trop abondamment, en sorte qu’il luy fit enfler le nerf, & toute la jambe, qui estoit si douloureuse qu’il ne pouvoit se soûtenir ; j’eus recours à l’emmielure rouge, pour ôter la douleur des jambes, & particuliérement du nerf qui estoit furieusement irrité, & sur l’endroit où il y avoit des Peignes, qui avoit esté atteint trop vivement avec l’esprit de vitriol, j’y appliquay l’emmielure blanche qui adoucît le mal, & bien-tost toute la couronne tomba ; ensuite quoy que la chair & la peau revinssent & les playes se soudassent, il y manquoit beaucoup de poil, & jamais il n’en revint sur les cicatrices. Les Peignes guerirent & jamais il n’y en eût apparence, mais le Cheval fut deux mois sur la litière, & cette cure fut un peu violente : j’ay allegué cet exemple pour faire connoistre la consequence qu’il y a de trop appliquer pour un coup de l’esprit de vitriol, s’il est bon, car celuy qu’on achette ordinairement à Paris, n’est pas si violent ; & il vaut mieux y revenir à deux, mesme à trois fois, que d’en trop mettre la premiere.

L’esprit de sel fera le mesme effet que celuy de vitriol, & presentement que je connois les effets de l’esprit de sel, je m’en servirois plutost que de celuy de vitriol, il est plus detersif.

Le remède suivant pourra reüssir ; faites dissoudre du sel ammoniac dans de l’esprit de vin à discretion, c’est à dire tout autant que l’esprit de vin en voudra dissoudre ; car dés-lors qu’il restera du sel au fonds, l’esprit est assez chargé, il n’en faut pas davantage ; bassinez-en les Peignes, apres les avoir bien nettoyées & frottées.

Beaucoup des gens qui croyoient guerir les vieilles Peignes, n’en sont pas venus à bout, l’esprit de vitriol ou de sel en guerissent quelquefois qui ne reviennent plus, mais non pas toûjours ; & les poireaux, & des maux aussi grands, sont plus faciles à guerir que les Peignes particulierement celles qui sont vieilles & malignes.