Les Animaux historiques/3

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LE CHEVAL DE DARIUS
I

Après la mort de Cambyse, le frère de Pasisithe, chef des mages, profitant d’une ressemblance frappante avec Smerdis, frère de Cambyse, que ce dernier avait fait mettre à mort, usurpa le trone de Perse. Bientôt une conspiration des sept principaux seigneurs de l’empire se forme pour le détrôner. Dans cette conjoncture, les mages invoquent le témoignage public de Prexaspe, qu’ils avaient gagné, et qui prétendait avoir sauvé Smerdis malgré les ordres de Cambyse. Prexaspe se rend à leur vœu, monte sur une tour pour être mieux entendu, et, soit mouvement subit, soit remords, soit aveu médité, il s’écrie :

« Peuple, je reconnais que j’ai été forcé par Cambyse de tuer son frère. J’en demande pardon aux dieux et aux hommes. Celui qui occupe maintenant le trône est Smerdis le mage. »

Il dit, et s’élance du haut de cette tour. Les conjurés profitent de l’émotion du peuple, se jettent dans le palais et tuent les deux frères. (Avant J.-C. 521.)

L’autorité devait naturellement rester entre les sept conjurés. Ils s’assemblèrent et convinrent que l’un d’entre eux serait roi. Les compétiteurs agitèrent quelle serait la forme de l’élection. Ne pouvant tomber d’accord, ils voulurent rapporter l’honneur de l’élection au soleil, qu’ils adoraient, et décidèrent que le lendemain ils se rendraient dans un certain endroit du faubourg de la ville, et que celui dont le cheval hennirait le premier, au lever du soleil, serait reconnu roi.

Abarès, écuyer de Darius, ayant appris ce dont ils étaient convenus, s’avisa d’un stratagème pour assurer la couronne à ce prince. Il attacha la nuit précédente une cavale à l’endroit du rendez-vous, et y amena le cheval de son maître. Les seigneurs s’étant trouvés le lendemain au lieu désigné, le cheval de Darius ne fut pas plus tôt dans l’endroit où il avait senti la cavale qu’il hennit, et Darius fut aussitôt salué roi de Perse.