Les Médailles d’argile/L’Oisive

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Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 42).

L’OISIVE


Ni tisseuse de lin, ni fileuse de laine…
La quenouille, le dé, l’aiguille ou le fuseau
Ne les sculpte aux parois de mon jeune tombeau,
Car ma vie en ses jours fut paresseuse et vaine.

Pour que ton souvenir me suive et se souvienne,
Lui faut-il le rouet, l’aiguille et le fuseau ?
Pense au passé charmant où mon corps était beau,
Ni fileuse de lin, ni tisseuse de laine !

Non ! je n’ai pas ourdi mes oisives années,
Laborieusement, parmi les fleurs fanées ;
Le vent les dispersa dès l’aurore, et, là-bas,

Regardes-en flotter, déjà presque invisibles,
Au fond de ta mémoire et à tes yeux ingrats,
Les souples fils errants qu’emporte l’air flexible.