Les Plantes potagères/Crambé

La bibliothèque libre.
Vilmorin-Andrieux
Vilmorin-Andrieux & Cie (p. 192-193).


CRAMBÉ


Crambe maritima L.
Fam. des Crucifères.


Synonyme : Chou marin.
Noms étrangers : angl. Sea kale. all. Meer- oder See-Kohl. flam. et holl. Zeekooly Meerkool. dan. Strandkaal. esp. Soldanela maritima, Crambe, Col marine.


Indigène.Vivace. — Plante à feuilles amples, épaisses, frangées, souvent contournées et découpées sur les bords en segments arrondis, d’une couleur vert glauque toute particulière et à peu près identique sur les deux faces de la feuille ; tiges fortes, ramifiées, hautes de 0m,50 à 0m,60, portant un grand nombre de fleurs blanches, larges, et faisant place à des silicules à peu près sphériques d’un peu moins d’un centimètre de diamètre, blanches, assez dures, ne s’ouvrant pas à la maturité, et ne renfermant qu’une seule graine chacune. La graine non décortiquée pèse 210 grammes par litre, et un gramme en contient de 15 à 18 ; sa faculté germinative baisse rapidement après la première année.

Le crambé ou chou marin, qui se rencontre à l’état sauvage sur une grande

Crambé.
pousses blanchies, réd. au tiers.
partie des côtes de l’Europe occidentale, est fort peu usité comme légume en France, tandis qu’il est depuis de longues années l’objet d’une culture importante en Angleterre. Ce sont les feuilles, ou plutôt les pétioles qui sont employés comme légume. On a soin, pour cela, de les blanchir en les privant de lumière, et l’on obtient de la sorte des pousses tendres d’un goût agréable, ne présentant plus qu’une légère amertume, tandis que le goût en serait d’une âcreté insupportable si on les laissait se colorer sous l’influence de la lumière.

Culture. — Le crambé est une plante vivace qui peut se multiplier par divisions ou par boutures de racines, aussi bien que par le semis. Pour employer la première méthode, on divise, à la fin de l’hiver et avant le réveil de la végétation, c’est-à-dire au mois de février ou au commencement de mars, les diverses ramifications des vieilles touffes de crambé, en tronçons d’une dizaine de centimètres^ que l’on plante immédiatement en place, dans une bonne terre bien amendée et profondément labourée. Comme les plantes prennent un assez grand développement, il est bon de les espacer de 0m,80 en tous sens. Dès la première année, les jeunes crambés prennent une certaine force et peuvent à la rigueur donner une récolte au printemps suivant. Il vaut mieux cependant ne commencer à couper qu’à la seconde année.

La multiplication du crambé par semis peut se faire, soit en place, soit en pépinière. Dans tous les cas, on sème la graine le plus tôt possible après la récolte, et sans la dépouiller de son enveloppe. Dès que les jeunes plants ont quatre ou cinq feuilles on les met en place, à la même distance que les boutures dont nous avons parlé plus haut. Le semis en place se fait en poquets placés, eux aussi, à la même distance les uns des autres. Ces poquets ou fossettes doivent être bien terreautés et tenus bien propres ; les arrosements doivent être fréquents jusqu’au développement complet des plants. Quand ils sont assez forts et que les attaques du tiquet ne sont plus à craindre, on arrache les plants, à l’exception du plus fort, qu’on laisse seul en place ; pendant toute la fin de l’année du semis et pendant toute l’année suivante les mêmes soins d’entretien doivent être donnés aux jeunes semis qu’aux plantations par boutures. Ce n’est qu’au troisième printemps que l’on peut commencer à cueillir sur les jeunes plantes, et elles peuvent ensuite rester en pleine production pendant huit ou dix ans.

Pour blanchir le crambé, on couvre chacune des têtes de la plante d’un pot de jardin bien fermé, pour ne pas laisser entier la lumière, et on le recouvre en outre plus ou moins complètement de terre ou de feuilles sèches.


Si l’on veut forcer les plantes, on se sert de fumier, dont on entoure et recouvre le pot ; au bout de quelques semaines, les pousses sont suffisamment développées pour être cueillies. On ne doit pas craindre, en les détachant, d’en couper la base à une certaine distance au-dessous de la partie blanche, car les souches tendent toujours à sortir de terre. Le crambé peut encore se forcer en serre, en bâche ou dans tout autre endroit où l’on dispose de chaleur artificielle. On arrache pour cela les pieds entiers, et on les replante près à près dans du sable frais. Les pousses doivent, comme en plein air, être soustraites à l’action de la lumière, soit par un abri artificiel, soit par une épaisseur de sable assez grande. Il faut, tous les ans, avoir la précaution de les recouvrir de terre, pour empêcher qu’elles ne se déchaussent. Pour conserver la vigueur des plantes de crambé, il est nécessaire de ne pas couper toutes les pousses d’un même pied ; il faut, par contre, veiller à ce que ces pousses qu’on a ménagées ne fleurissent pas, ce qui épuiserait inutilement la plante. Il est bon, à l’automne, de donner à la plantation quelques soins, qui consistent dans l’enlèvement des feuilles mortes, dans la suppression des pousses faibles et surabondantes et dans l’épandage d’un peu de terre légère ou de terreau sur les portions qui tendraient à se déchausser. Comme le crambé est une plante maritime, un peu de sel commun, employé comme amendement, ne peut qu’en favoriser la végétation.

Usage. — Les pétioles blanchis se mangent cuits à peu près à la manière des asperges ou des côtes de cardon. Bien préparés, ils conservent toute leur fermeté et présentent, avec une très légère amertume, une saveur de noisette très fine et très agréable.