Les Quatre Évangiles (Crampon 1864)/Marc/02
CHAPITRE II
1 Quelques jours après, Jésus revint à Capharnaüm. Et lorsqu’on sut qu’il était dans la maison, il s’y assembla un si grand nombre de personnes, que l’espace même en dehors de la porte ne les pouvait contenir ; et il leur prêchait la parole de Dieu[1]. Alors on lui amena un paralytique porté par quatre hommes. Et, comme ils ne pouvaient le lui présenter à cause de la foule, ils découvrirent le toit au-dessus du lieu où il était, et par l’ouverture descendirent le lit où gisait le paralytique[2]. Jésus, voyant leur foi[3], dit au paralytique : Mon fils, vos péchés vous sont remis. Or, il y avait là quelques Scribes assis, qui pensaient dans leur cœur : Comment cet homme parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui peut remettre les péchés, que Dieu seul[4]) ? Aussitôt Jésus, connaissant dans son esprit[5] ce qu’ils pensaient en eux-mêmes, leur dit : Pourquoi pensez-vous ces choses dans votre cœur ? Lequel est le plus facile de dire au paralytique : Vos péchés vous sont remis, ou de lui dire : Levez-vous, prenez votre lit et marchez ? Mais afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de remettre les péchés, je vous le commande (dit-il au paralytique), levez-vous, prenez votre lit, et vous en allez dans votre maison. Et aussitôt celui-ci se leva, et, prenant son lit, il s’en alla en présence de tous, de sorte que tout le peuple était dans l’admiration et rendait gloire à Dieu, disant : Jamais nous n’avons rien vu de semblable.
13 Jésus sortit de nouveau du côté de la mer ; et tout le peuple venait à lui, et il les enseignait. Or, ayant vu sur son passage Lévi[6], fils d’Alphée, assis à un bureau de péage, il lui dit : Suivez-moi ; et, se levant, il le suivit. Il arriva que Jésus étant à table dans la maison de cet homme, beaucoup de publicains et de pécheurs y mangeaient avec lui et ses disciples ; car un grand nombre d’entre eux le suivaient aussi. Les Scribes et les Pharisiens, voyant qu’il mangeait avec les publicains et les pécheurs, dirent à ses disciples : D’où vient que votre Maître mange et boit avec des publicains et des pécheurs ? Entendant cela, Jésus leur dit : Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les malades ; car je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs.
18 Les disciples de Jean et les Pharisiens jeûnaient souvent. Ils vinrent le trouver et lui dirent : Pourquoi, tandis que les disciples de Jean et ceux des Pharisiens font beaucoup de jeûnes[7], vos disciples ne font-ils pas de même ? Jésus leur répondit : Les conviés aux noces[8] peuvent-ils jeûner pendant que l’époux est avec eux ? Aussi longtemps qu’ils ont l’époux, ils ne peuvent pas jeûner. Mais viendront des jours où l’époux leur sera enlevé, et ils jeûneront en ces jours-là. Personne ne coud une pièce d’étoffe neuve à un vieux vêtement : autrement la pièce neuve emporte quelque chose de l’autre, et la déchirure devient plus grande ; et personne ne met de vin nouveau dans des outres vieilles : autrement, le vin rompant les outres, le vin se répandra et les outres seront perdues. Mais il faut mettre le vin nouveau dans des outres neuves[9].
23 Il arriva encore[10] que le Seigneur passant le long des champs de blé un jour de sabbat, ses disciples, tout en s’avançant, cueillaient des épis. Et les Pharisiens lui dirent : Pourquoi font-ils, le jour du sabbat, ce qu’il n’est pas permis de faire ? Il leur répondit : N’avez-vous pas lu ce que fit David pressé par le besoin, lorsqu’il eut faim, lui et ceux qui l’accompagnaient ? Comment il entra dans la maison de Dieu, au temps du grand-prêtre Abiathar[11], et mangea les pains de proposition dont il n’était permis de manger qu’aux prêtres seuls, et en donna même à ceux qui étaient avec lui ? Il leur dit encore : Le sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat. C’est pourquoi[12] le Fils de l’homme est maître même du sabbat.
- ↑ L’Évangile.
- ↑ Les toits étaient plats. Ces gens arrivèrent soit par un escalier en dehors de la maison, soit par le toit des maisons voisines ; puis, enlevant les briques ou les tuiles au-dessus de l’endroit où était Jésus, qui prêchait sans doute dans le cénacle ou salle à manger, ils, etc.
- ↑ Jésus pardonne au malade à la considération non-seulement de sa foi, mais encore de celle des autres. « À quelque prix que ce soit, ô mon Sauveur, je veux vous aborder pour obtenir votre indulgence ; si je ne puis entrer par la porte, je me ferai descendre par le toit ; je tenterai les voies les plus difficiles, je ne vous aborderai pas seul ; j’aurai avec moi des intercesseurs semblables à ceux qui descendirent ce paralytique aux pieds du Sauveur, et dont la foi le toucha. » Bossuet. Ce passage confirme le dogme catholique de la Communion des Saints.
- ↑ Cela est vrai, et, rapproché des vers. 9 et 10, prouve tout à la fois que Jésus se dit Dieu et l’est en effet.
- ↑ Shallow : L’Esprit de Jésus-Christ, c’est l’Esprit-Saint. Patrizzi : Par lui-même, sans que personne le lui révélât.
- ↑ Appelé aussi Matthieu, l’Évangéliste.
- ↑ Il s’agit de jeûnes non commandés par la loi.
- ↑ Litt. les fils des noces, peut-être, au moins en grec, avec le sens plus restreint de paranymphes, ou compagnons de l’époux : voy. Matth. xxv, 1.
- ↑ Sens : les Apôtres ne sont pas encore assez forts pour que j’exige d’eux des choses difficiles.
- ↑ Un peu après Pâque, l’an 27 de l’ère vulgaire.
- ↑ Le premier livre des Rois (chap. xxi) le nomme Achimélech, père d’Abiathar, qui ne devint grand-prêtre qu’un peu plus tard. On a donné beaucoup d’explications de cette différence de nom ; la plus simple est de supposer qu’Achimélech avait pour surnom Abiathar.
- ↑ Le sabbat a été institué pour que l’homme pût rendre à Dieu les hommages qu’il lui doit et réparer ses forces par le repos. C’est pourquoi, en faveur des besoins de l’homme, etc.