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Les Quatre Évangiles (Crampon 1864)/Matthieu/28

La bibliothèque libre.
Traduction par Augustin Crampon.
Tolra et Haton (p. 166-168).
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CHAPITRE XXVIII


RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST. — GARDES CORROMPUS PAR LES PRINCES DES PRÊTRES. — JÉSUS EN GALILÉE. — MISSION DES APÔTRES (Marc, xvi ; Luc, xxiv ; Jean, xx).


1 Dans la nuit du sabbat qui se termine au premier jour[1], Marie-Madeleine et l’autre Marie vinrent voir le sépulcre. Et voilà qu’il se fit un grand tremblement de terre ; car l’ange du Seigneur, étant descendu du ciel, s’approcha et roula la pierre, et il était assis dessus[2]. Son visage brillait comme l’éclair, et son vêtement comme la neige. Les gardes furent frappés d’épouvante, et devinrent comme morts[3]. Et l’ange, s’adressant aux femmes, leur dit : Vous, ne craignez point ; car je sais que vous cherchez Jésus qui a été crucifié. Il n’est point ici ; car il est ressuscité comme il l’avait dit. Venez, et voyez le lieu où le Seigneur avait été mis, et hâtez-vous d’aller dire à ses disciples qu’il est ressuscité. Voici qu’il sera-avant vous en Galilée ; là, vous le verrez, je vous le prédis[4]. Aussitôt elles sortirent du sépulcre avec crainte et grande joie, et coururent porter cette nouvelle à ses disciples. Et voilà que Jésus se présenta devant elles et leur dit : Je vous salue. Elles s’approchèrent, et, embrassant ses pieds, elles l’adorèrent. Alors Jésus leur dit : Ne craignez point ; allez dire à mes frères qu’ils se rendent en Galilée : c’est là qu’ils me verront.

11 Quand elles furent parties, quelques-uns des gardes vinrent dans la ville et annoncèrent aux Princes des prêtres tout ce qui s’était passé. Ceux-ci rassemblèrent les Anciens, et, ayant tenu conseil, ils donnèrent une grosse somme d’argent aux soldats, en leur disant : Publiez que ses disciples sont venus la nuit, et l’ont enlevé pendant que vous dormiez ; et si le gouverneur vient à le savoir, nous l’apaiserons, et nous vous mettrons à couvert. Les soldats prirent l’argent, et firent ce qu’on leur avait dit ; et ce bruit qu’ils répandirent se répète encore aujourd’hui parmi les Juifs[5].

16 Or les onze disciples s’en allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait marquée. Et, le voyant, ils l’adorèrent ; mais quelques-uns hésitaient à croire[6]. Et Jésus, s’approchant[7], leur parla ainsi : Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai recommandé : et voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des siècles[8].

  1. Le jour du sabbat, comme tous les autres, étant entre deux nuits, on veut marquer qu’il s’agit de celle qui vient après et se termine à l’aurore du premier jour de la semaine, le dimanche chez les Juifs. La plupart des exégètes allemands traduisent : Le Sabbat étant passé, dès l’aurore du premier jour de la semaine, ce qui offre le même sens général, et peut se soutenir. — Ayant passé dans leurs maisons le grand sabbat, le jour le plus saint de l’année, ces pieuses femmes ne savaient pas qu’une garde avait été mise au tombeau le vendredi soir ou le samedi matin, et elles venaient avec des aromates pour embaumer Jésus. Le P. Patrizzi traduit : Le soir du sabbat, le premier jour de la semaine (on sait que les jours se comptaient chez les Juifs d’un coucher du soleil à l’autre), et distingue cette visite des saintes femmes au sépulcre, de celle qui est racontée Luc, xxiv, 1 sv. Jean, xx, 1 sv. ; mais nous ne partageons pas ce sentiment. Sur les saintes femmes au sépulcre, voy. Luc, xxiv, 1, note.
  2. La résurrection, ainsi que l’enseignent les Pères, eut lieu sans que le tombeau fût ouvert. Ce fut l’ange qui l’ouvrit le premier.
  3. Puis ils s’étaient enfuis avec précipitation, de sorte que les saintes femmes ne les trouvèrent plus à leur arrivée.
  4. Les Apôtres, qui étaient Galiléens, devaient naturellement s’en retourner dans leur pays après la fête de Pâques. Jésus s’y trouva avant eux.
  5. « Comment ces hommes faibles, que l’arrestation de Jésus avait dispersés, auraient-ils trouvé après sa mort l’audace de l’imposture ? Comment ces hommes simples (on le peut voir au ton de leur récit et à la candeur de leurs propres aveux) auraient-ils inventé, Jésus mort, tout un système que, de son vivant même, ils n’entendaient pas ? » Wallon.
  6. Quelques-uns, non des Apôtres, mais des simples disciples, S. Paul dit que N.-S., après sa résurrection, se fit voir à plus de cinq cents (I Cor. xv, 6).
  7. Voyez Luc, xxiv, 31, note.
  8. Digne parole de l’Époux céleste, qui engage sa foi pour jamais à sa sainte Église. Ne craignez point, mes Apôtres, ni vous qui succéderez à un si saint ministère : moi ressuscité, moi immortel, je serai toujours avec vous ; vainqueur de l’enfer et de la mort, je vous ferai triompher de l’un et de l’autre ; et l’Église que je formerai par votre sacré ministère, comme moi sera immortelle. Bossuet.