Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes/BERNA
Si ceux qui travaillent pour devenir excellents dans une partie
n’étaient arrêtés par la mort dans leurs meilleures années, il est
certain que nombre de beaux génies parviendraient au but souhaité
par le monde et par eux-mêmes. Mais la brièveté de la vie et les
accidents qui leur surviennent de toutes parts les frappent trop souvent
prématurément ; c’est ce qui arriva au malheureux Berna[1] de Sienne
qui, bien qu’étant mort jeune, laissa des œuvres si nombreuses qu’on
pourrait croire qu’il vécut longtemps, et si belles qu’il serait certainement
devenu un maître excellent s’il n’était mort si tôt.
On voit de lui à Sienne quelques fresques dans deux chapelles de
l’église Sant’Agostino[2]. Dans cette même église, sur une muraille
qu’on a récemment détruite, pour y percer des chapelles, il représenta
l’histoire d’un jeune homme que l’on conduit au supplice, dans
laquelle il rendit la pâleur du visage trahissant la crainte de la mort
d’une façon si semblable à la réalité qu’on ne saurait rien imaginer
d’aussi parfait. À côté du jeune homme se tenait un moine, cherchant
à le réconforter, et, en somme, l’œuvre était si énergiquement exécutée
qu’il faut que le Berna ait compris toute l’horreur d’une pareille
situation pour avoir su la rendre avec le pinceau, de manière que
la réalité ne causerait pas plus d’émotion. À Cortone, outre d’autres
œuvres que l’on voit dans différents édifices de la ville, il peignit la
majeure partie des voûtes et des murs de l’église Santa Margherita,
qui appartient aujourd’hui aux Récollets[3]. De là, il se rendit à
Arezzo, l’an 1369 quand les Tarlati avaient fait terminer le couvent et
l’église de Sant’Agostino. Il fit de nombreuses fresques tirées de la
vie de saint Jacques, dans la chapelle de ce saint. On y voit en particulier l’histoire
du bandit Marino, qui, ayant vendu son âme au diable, se
recommande à saint Jacques pour être libéré de sa promesse[4].
D’après Lorenzo Ghiberti, le même sujet peint par Berna existait à
Santo Spirito de Florence, dans la chapelle des Capponi, dédiée à saint
Nicolas, avant l’incendie de cette église. Il peignit encore, dans une
chapelle de l’évêché, et pour Messer Cuccio di Vanni Tarlati di Pietramala,
un Christ en croix, entre la Vierge, saint Jean évangéliste et
saint François dans une attitude désolée[5]. Cette œuvre mérite
d’autant plus d’éloges que sa parfaite conservation la fait croire peinte
d’hier. On y voit encore l’archange saint Michel et, dans le bas, le
donateur Cuccio, à genoux et en armes, au pied de la croix. Dans
l’église paroissiale d’Arezzo, il peignit, dans la chapelle des Paganelli,
plusieurs épisodes de la vie de la Vierge, et y représenta au naturel
San Ranieri faisant l’aumône à de nombreux pauvres qui l’entourent[6]
À San Bartolommeo il laissa plusieurs sujets tirés de l’Ancien Testament,
et une Adoration des Mages[7] ; à Santo Spirito, dans ses
fresques de saint Jean évangéliste, on reconnaît son portrait et ceux de beaucoup de ses amis, gentilshommes d’Arezzo[8]. Étant retourné,
après ces œuvres, dans sa patrie, il fit plusieurs peintures sur bois
grandes et petites, mais il ne resta pas longtemps à Sienne, parce que,
appelé à Florence, il peignit à Santo Spirito la chapelle de saint
Nicolas[9], dont nous avons fait mention ci-dessus, ainsi que d’autres
œuvres qui furent détruites par le malheureux incendie de cette
église.
Dans la ville de San Gimignano di Val d’Elsa, il commença, dans l’église paroissiale, plusieurs fresques tirées de l’Ancien Testament[10], qu’il était près de terminer, lorsqu’il tomba un jour, du haut de l’échafaudage, et se brisa les membres si malheureusement qu’il mourut en deux jours, pour le plus grand dommage de l’art. Les habitants de la ville lui donnèrent une sépulture honorable dans la dite église, et couvrirent son tombeau de vers à sa louange. Giovanni d’Asciano conduisit à bonne fin le dernier ouvrage de son maître. Parmi ses autres élèves, on compte Luca di Tomè, qui laissa à Sienne et dans toute la Toscane nombre de peintures[11].
Les productions du Berna datent de l’an 1381 environ. Il était bon dessinateur, et ce fut lui le premier qui commença à bien dessiner les animaux.
- ↑ Parmi les jurés de la Mercanzia de Sienne, en 1340, on voit un Maestro Barna Berlini, dipintore del popolo di San Pellegrino.
- ↑ Peintures détruites.
- ↑ Ces peintures n’existent plus.
- ↑ Ibid.
- ↑ Existe encore, dans le Dôme, troisième autel à droite ; attribution douteuse.
- ↑ Ces différentes œuvres n’existent plus.
- ↑ Ibid.
- ↑ Ces différentes œuvres n'existent plus.
- ↑ Ces différentes œuvres n'existent plus.
- ↑ Existent encore, fortement restaurées , seule œuvre authentique.
- ↑ Il en existe dans les musées de Sienne et de Pise.
die XV ; Mensis ollobr. Angelus Tadey taddi pictor de populo Sancti Petri Magioris Quarterio Santi Johannis, sepultus in ecclesia Sante Crucis. Retulit Dopninus Fortiori becchamortus : banditus fuit. Il fut enterré à Santa Croce.