Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte/Texte entier

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H. Nicole (p. 1-285).
MACHIAVEL
COMMENTÉ
PAR BUONAPARTE.


MANUSCRIT DE BUONAPARTE.


Nocturnà versate manu, versate diurnà.



LE PRINCE,
Par Nicolas Machiavelli, secrétaire et citoyen de Florence[1].




NICOLAS MACHIAVELLI,
Au Magnifique Laurent, fils de Pierre de Medici[2].




Ceux qui veulent obtenir la faveur d’un prince ont coutume de lui présenter les choses qui passent pour lui être les plus agréables, ou dans la jouissance desquelles on sait qu’il se complaît davantage. Les uns lui offrent en conséquence des chevaux ; les autres, des armes ; ceux-ci, des étoffes d’or ; ceux-là, des pierres précieuses ou d’autres objets également dignes de sa grandeur.

Voulant moi-même présenter à Votre Magnificence, quelqu’offrande qui pût lui prouver tout mon dévouement pour elle, je n’ai trouvé parmi les choses que je possède, rien qui me soit plus cher et dont je fasse plus de cas que ma connaissance de la conduite des plus grands hommes d’état qui ayent existé. Je n’ai pu acquérir cette connaissance que par une longue expérience des terribles vicissitudes politiques de notre âge, et par une continuelle lecture des histoires anciennes. Après avoir examiné long-temps les actions de ces hommes-là, et après avoir médité sur elles avec la plus sérieuse, attention, j’ai renfermé le résultat de ce pénible et profond travail en un petit volume ; et c’est ce petit volume que j’envoie à Votre Magnificence.

Quoique cet ouvrage me paraisse indigne de votre grandeur, j’ai néanmoins la confiance que votre bonté lui procurera l’avantage d’un accueil favorable, si vous daignez considérer que je ne pouvais vous faire un don plus précieux que celui d’un livre par lequel vous pourrez comprendre en peu d’heures ce que je n’ai connu et compris qu’en plusieurs années, avec beaucoup de fatigue et de très-grands dangers.

Je n’ai pas rempli cet ouvrage de ces gloses prolixes avec lesquelles on fait parade de science ; je ne l’ai point orné de phrases pompeuses, d’expressions ampoulées, ni de tous ces autres charmes extrinsèques à la matière, par lesquels beaucoup d’auteurs ont coutume de parer ce qu’ils ont à dire[3]. J’ai voulu que mon livre n’eût d’autre parure et d’autre agrément que la vérité des choses et l’importance du sujet.

Je désirerais cependant qu’on ne regardât pas comme une présomption répréhensible dans un homme de condition inférieure et même basse si l’on veut, la hardiesse qu’il a de discourir sur les gouvernements des princes, et de prétendre leur donner des règles. Les peintres chargés de dessiner un paysage, doivent être, à la vérité, sur les montagnes quand ils ont besoin que les vallées se découvrent bien à leurs regards ; mais aussi ce n’est que du fond des vallées qu’ils peuvent bien voir dans tous leurs développements les montagnes et les sites élevés[4]. Il en est de même en politique : si, pour connaître la nature des peuples, il faut être prince ; pour bien connaître celle des principautés, il convient d’être parmi le peuple.

Que Votre Magnificence reçoive ce faible don avec la même intention que j’ai en le lui offrant. Quand elle daignera lire cet ouvrage et le méditer avec soin, elle y reconnaîtra le désir extrême que j’ai de la voir parvenir à cette élévation que lui promettent déjà son destin et ses éminentes qualités. Et si Votre Magnificence daigne ensuite, du haut de sa grandeur, abaisser quelquefois ses regards sur l’humiliation dans laquelle je me trouve, elle comprendra toute l’injustice des rigueurs extrêmes que me fait éprouver sans interruption, la malignité de la fortune.





machiavel. buonaparte.

CHAPITRE PREMIER.

Combien il y a de sortes de principautés, et de quelles
manières on les acquiert.




Tous les États, toutes les dominations qui ont exercé, et qui exercent une autorité souveraine sur les hommes, ont été et sont, ou des républiques ou des principautés. Les principautés sont, ou héréditaires, lorsque la famille de celui qui les tient les a possédées longtemps ; ou elles sont nouvelles.

(1) Telle sera la mienne, si Dieu me prête vie. G.

Les nouvelles sont, ou nouvelles en tout (1), comme le fut celle de Milan pour François Sforce[5] ; ou comme des membres ajoutés à l’État déjà héréditaire du prince
qui les acquiert : et tel est le royaume de Naples à l’égard du roi d’Espagne [6].

Ou les États nouveaux, acquis de ces deux manières sont accoutumés à vivre sous un prince ; ou ils sont accoutumés à être libres.

Ou le prince qui les a acquis, l’a fait avec les armes d’autrui ; ou il les a acquis avec ses propres armes.

Ou c’est la fortune qui les lui a procurés ; ou il les tient de sa valeur.

machiavel.

CHAPITRE II.

Des princes héréditaires.


Je négligerai de parler ici des républiques, parce que j’en ai déjà raisonné longuement dans un autre ouvrage[7] ; et je ne tournerai mes regards que vers la Principauté (1). En reprenant dans mes discours les distinctions que je viens d’établir, je discuterai la manière dont on peut gouverner et conserver les Principautés.

Je dis donc que, dans les Etats héréditaires qui sont accoutumés à voir régner la famille de leur prince, il y a beaucoup moins de difficulté pour les conserver[8], que

(1) Il n’y a que ça de bon, quoi qu’ils en disent ; mais il me faut chanter sur le même ton qu’eux, jusqu’à nouvel ordre. G. lorsqu’ils sont nouveaux (1). Le prince alors n’a besoin que de ne pas outrepasser l’ordre suivi par ses ancêtres, et de temporiser avec les événements ; il ne lui faut après cela qu’une industrie ordinaire pour se maintenir toujours, à moins qu’il y ait une force extraordinaire et portée à l’excès, qui vienne le priver de son Etat. S’il le perd, il le recouvrera, s’il le veut, quelque puissant, quelqu’habile que soit l’usurpateur qui s’en est emparé (2).

Nous avons pour exemple, en Italie, le duc de Ferrare, que n’ont pu renverser les attaques des Vénitiens, en 1484 ; ni celles du pape Jules, en 1510, pour la seule raison que sa famille était, de père en fils, établie depuis longtemps dans cette souveraineté.


(1) Je tâcherai de suppléer à cela en me rendant le doyen des autres souverains d’Europe, G.

(2) Nous verrons cela. Ce qui me favorise, c’est que je ne l’ai pas pris sur lui, mais sur un tiers qui n’était qu’un gâchis insupportable de républicanisme. L’odieux de l’usurpation ne tombe pas sur moi. Les phrasiens à mes gages l’ont déjà persuadés. Il n’a détrôné que l’anarchie. Mes droits au trône de France ne sont pas mal établis dans le roman de Lemont… Pour le trône d’Italie, j’aurai une dissertation de Montga…- C’est la ce qu’il faut aux Italiens qui font les raisonneurs. Un roman suffisait pour les Français. Le menu peuple qui ne lit pas, aura les homélies des évêques et des curés que j’ai faits ; plus encore mon catéchisme approuvé par le légat du pape. Il ne résistera pas à cette magie. Rien n’y manque

Le prince naturel ayant moins de motifs, et moins besoin d’offenser ses sujets, en par cela même plus aime ; et s’il n’a pas des vices trop criants qui le fassent haïr, ses sujets l’aimeront naturellement et avec raison. L’ancienneté et la continuation du régne de sa dynastie, ont fait oublier la trace et les causes des changements qui l’instalèrent : ce qui est d’autant plus avantageux que toujours un changement laisse une pierre d’attente pour en faire un autre (1).

puisque le pape a sacré mon front impérial. Sous ce rapport, je dois paraître encore plus inamovible qu’aucun des Bourbons. R. I.

(1) Que de pierres d’attente on me laisse ! Tous les miens sont encore là ; et il faudrait qu’il n’y en restât pas un seul pour que je perdisse tout espoir. J’y retrouverai mes aigles, mes N, mes bustes, mes statues, peut-être même le carrosse impérial de mon sacre. Tout cela parle sans cesse aux yeux du peuple en ma faveur, et me rappèle. E.

machiavel. buonaparte.

CHAPITRE III.
Des principautés mixtes.

C’est dans la Principauté nouvelle que se trouvent les difficultés ; et d’abord, si elle n’est pas entièrement nouvelle, et qu’elle ne soit qu’un membre ajouté à une Principauté ancienne, que déjà l’on possède, et qu’on peut, dans leur réunion, appeler, en quelque sorte, une Principauté mixte (1), ses incertitudes naissent d’une difficulté qui est dans la nature de toutes les Principautés nouvelles. Elle consiste en ce que les hommes qui volontiers changent de maître dans l’espoir d’améliorer leur sort (en quoi ils se trompent), et qui, dans cette folle espérance, se sont armés contre celui qui les gouvernait, pour en prendre un autre, ne tardent pas à se convaincre, par l’expérience, que leur condition est deve- (1) Comme le sera ma domination sur le Piémont, la Toscane, Rome, etc. R. C. nue pire[9]. Cela provient de la nécessité où celui qui devient un prince nouveau, se trouve naturellement et ordinairement, d’offenser ses nouveaux sujets, soit avec des gens de guerre, soit avec une infinité d’autres procédés fâcheux, que l’acte de sa nouvelle acquisition entraîne après lui (1).

Par-là, tu te trouves avoir pour ennemis tous ceux que tu as offensés en occupant cette Principauté ; et tu ne peux te conserver pour amis ceux qui t’y ont placé, parce qu’il ne t’est pas possible de satisfaire leur ambition au point qu’ils s’en étaient flat-

(1) Peu m’importe : le succès justifie. R. C. tés ; ni d’employer des moyens de rigueur pour les réprimer, attendu les obligations qu’ils t’ont fait contracter à leur égard (1). Quelque fort qu’un prince soit par ses armées, il a toujours eu besoin de la faveur d’une partie au moins des habitants de la province pour y entrer. Voilà pourquoi Louis XII, après avoir occupé Milan avec facilité, le perdit aussitôt (2) ; il ne fallut pour le lui le ravir, cette première fois, que les forces de Ludovic, parce que ceux des Milanais qui avaient ouvert leurs portes au roi, se voyant détrompés de leur confiance dans les faveurs de son gouvernement, et de l’espoir qu’ils en avaient conçu pour l’avenir (3), ne pouvaient déjà plus supporter le désagrément d’avoir un nouveau prince[10]. (1) Les coquins ! Ils me font sentir cruellement cette vérité. Si je ne parvenais pas à me débarrasser de leur tyrannie, ils me sacrifieraient. R. I. (2) Les Austro-Russes ne me l’auraient pas enlevé, si j’y fusse resté en 1798. R. C. (3) Je n’avais du moins pas trompé les espérances de ceux qui m’en avaient ouvert les portes en 1796. R. C.

Il est bien vrai qu’en reprenant une seconde fois les pays qui s’étaient révoltés, Louis XII ne se les laissa pas enlever aussi facilement, parce que, se prévalant de la rébellion antérieure, il fut moins réservé dans les moyens de se consolider[11]. Il punit les coupables, démasqua les suspects, et fortifia les parties les plus faibles de son précédent gouvernement (1).

Si, pour faire perdre Milan au roi de France la première fois, il n’avait fallu que l’arrivée menaçante du duc Ludovic sur les confins du Milanez, il fallut, pour le lui faire perdre une seconde fois, que tout le monde s’armât contre lui, et que ses armées fussent chassées d’Italie, ou détruites (2).

Néanmoins la seconde, comme la première fois,

(1) C’est à quoi je me suis appliqué en reprenant ce pays en 1800. Demandez au prince Charles si je m’en suis bien trouvé. R. I.

Ils n’entendent rien à cela ; et les choses vont à souhait pour moi. E. (2) Cela n’arrivera plus. R. C. l’État de Milan lui fut enlevé. On a vu les raisons de la première perte qu’il en fit ; et il nous reste à connaître les raisons de la seconde, et à dire les moyens qu’il avait, et que peut avoir quiconque se trouverait dans le même cas, pour se maintenir dans sa conquête mieux qu’il ne le fit (1).

Je commencerai par établir une distinction : ou ces États qui, nouvellement acquis, sont réunis à un État occupé depuis long-temps. par celui qui les a obtenus, se trouvent être de la même province, avoir la même langue ; ou il n’en est pas ainsi. Quand ils sont de la première espèce, il est très-facile de les conserver, surtout lorsqu’ils ne sont point accoutumés à vivre libres, c’est-à-dire en république (2). Pour les posséder sûrement, il suffit d’avoir éteint la lignée du prince qui y régnait (3), parce que, dans le reste, en leur conservant leurs anciennes constitu-

(1) J’en sais plus que Machiavel à cet égard. R. C.

Ces moyens, ils n’ont pas l’air seulement de s’en douter. On leur en conseille de contraires : tant mieux. E.

(2) Quand même ils le seraient, je saurais bien les réduire. G.

(3) Je ne négligerai pas ceļa, partout où j’établirai mon régne. G. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/104 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/105 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/106 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/107 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/108 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/109 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/110 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/111 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/112 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/113 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/114 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/115 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/116 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/117 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/118 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/119 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/120 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/121 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/122 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/123 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/124 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/125 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/126 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/127 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/128 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/129

machiavel.
buonaparte.

CHAPITRE V.

De quelle manière on doit gouverner les cités, ou principautés qui, avant d’être occupées par un nouveau prince, se gouvernaient avec leurs lois particulières.

Quand on veut conserver ces états qui étaient accoutumés à vivre avec leurs lois et en république, il faut prendre l’un de ces trois partis : tu dois ou les ruiner (1), (1) Cela ne vaut rien dans le siècle où nous sommes. G.ou aller y demeurer, ou enfin laisser à ces peuples leurs lois (2), en te faisant payer (2) Mauvais principe ; la suite est ce qu'il y a de mieux. G.par eux une contribution annuelle, et en créant chez eux un conseil d’un petit nombre, qui ait soin de te les maintenir fidèles[12]. Ce conseil étant créé par le prince, et sachant qu’il ne peut subsister sans son amitié et sa puissance, a le plus grand intérêt à le maintenir dans sa domination. Une cité accoutumée à vivre libre et qu’on veut conserver, est bien plus facilement contenue par l’influence immédiate de ses propres citoyens que de toute autre manière (1). (1) À Milan, une commission exécutive de trois dévoués ; comme mon triumvirat direcsial de Gênes. R. C. Les Spartiates et les Romains nous l’ont prouvé par leurs exemples.

Cependant les Spartiates qui avaient tenu Athènes et Thèbes, au moyen d’un conseil d’un petit nombre de citoyens, finirent par les perdre ; et les Romains qui, pour tenir Capoue, Carthage et Numance, les avaient désorganisées, ne les perdirent pas. Quand ceux-ci voulurent tenir la Grèce à peu près comme les Spartiates l’avaient tenue, en la laissant libre avec ses lois ; ce procédé ne leur réussit point, et ils furent forcés de désorganiser plusieurs cités de cette province pour la garder. À parler vrai, il n’y a pas d’autre moyen sûr pourconserver de tels états que deles ruiner (1). Celui qui devient (1) Mais cela peut se faire à la lettre, de plusieurs manières, sans les détruire, en changeant toutefois leur constitution.  G. maître d’une cité accoutumée à vivre libre, et n’en défait pas le régime, doit s’attendre à être défait lui-même par elle. Toujours elle aura pour justifier sa rébellion, le nom de liberté, et ses lois anciennes, dont le temps ni les bienfaits du conquérant ne pourront jamais lui faire perdre l’habitude. Quoi qu’on fasse, quelque expédient de prévoyance qu’on emploie, si on n’en désunit pas, si on n’en disperse pas les habitants[13], elle n’oubliera jamais ce nom de liberté, ni ses constitutions particulières ; elle y recourra même, à la première occasion, comme Pise l’a fait quoiqu’elle eût été de nombreuses années, et même depuis un siècle, sous la dépendance des Florentins (1). (1) Genève pourrait me donner quelque inquiétude ; mais je n’ai rien à craindre des Vénitiens et des Génois. R. C.

Mais quand les cités ou les provinces sont accoutumées à vivre sous un prince, et que la famille de ce prince est éteinte ; comme elles sont d’une part accoutumées à obéir, et que de l’autre elles n’ont point leur ancien maître, les citoyens ne s’accordent point entr’eux pour en choisir un nouveau ; et, ne sachant pas vivre libres, ils sont plus lents à prendre les armes. On peut, avec plus de facilité, les conquérir (2), et (2) Surtout quand on dit qu’on apporte au peuple la liberté et l’égalité. G. s’en assurer la possession.

Dans les républiques au contraire, il y a plus de courage, une plus grande disposition de haine contre le conquérant qui s’y fait prince, et plus de désir de vengeance contre lui. Comme le souvenir de l’antique liberté ne s’y perd point, et qu’il y survit avec toute son activité, le plus sûr parti est de les dissoudre (1), ou d’y (1) Neutraliser et révolutionner suffisent. G. habiter (2). (2) Cela n’est plus nécessaire quand on les a révolutionnées, et qu’en leur disant qu’elles sont toujours libres, on les tient ferme sous sa dépendance. G.

CHAPITRE VI.

Des Souverainetés nouvelles qu’on acquiert par ses propres armes et par sa valeur. Qu’on ne s’étonne point, si en parlant soit des états qui sont nouveaux sous tous les rapports, soitde ceux qui ne le son t que sous celui du prince, ou sous celui de l’état Juinaême, je présente de très-grands exemples de l’antiquité. Les hommes marchent presque toujours en des voies déjà battues par d’autres, et ne font guère qu’imiter leurs prédécesseurs, dans les actions qu’on leur voit faire (3) ; mais comme ils ne peuvent (3) Je pourrai bien quelquefois te faire mentir. G. C.ooole pas tenir en tout le chemin suivi par les anciens, ni s’élever à la perfection des modèles qu’ils se proposent ; l’homme prudent doit choisir seulement les voies battues par de grandshommes, et imiter ceux d’entr’eux qui ont surpassé les autres, afin que s’il ne parvient pas à les égaler, ses actions ayent du moins quelque ressemblance avec les leurs (1). Il doit faire comme les arbalétriers bien avisés qui, voyant leur but trop éloigné pour la force de leur arc, visent beaucoup plus haut que l’objet qu’ils ont en vue, non pour que leur vigueur et leurs flèches atteignent un point de mire à cette hauteur, mais afin de pouvoir, en mirant ainsi, parvenir en ligne parabolique à leur but véritable (2).

Je dis donc que dans les principautés qui sont nouvelles en tout, et dont par conséquent le prince est nouveau, il y a plus ou moins de difficulté à les conserver,

(1) Passe pour cela. G.

(2) Je ferai voir qu’en ayant l’air de viser plus bas, l’on peut y arriver également. G. suivant que celui qui les a acquises est plus ou moins valeureux. Comme l’événement par lequel un homme devient prince, de particulier qu’il était, suppose de la valeur ou du bonheur (1), il semble que l’une ou l’autre de ces deux choses applanissent en partie beaucoup de difficultés ; néanmoins on a vu que celui qui n’avait point été secondé par la fortune s’est maintenu plus longtemps. Ce qui procure encore des facilités, est qu’un tel prince, n’ayant point d’autres états, vient habiter celui dont il est devenu le souverain.

Mais pour en venir aux hommes qui, par leur propre valeur, et non par la fortune, sont devenus princes (2), je dis que les plus excellents à imiter sont Moïse, Cyrus, Romulus, Thésée et autres semblables. Et d’abord, quoiqu’on ne doive pas raisonner sur Moïse, parce qu’il n’a été qu’un pur exécuteur

(1) La valeur est plus nécessaire que le bonheur ; elle le fait naître. G.

(2) Cela me regarde. G. des choses que Dieu lui avait ordonné de faire ; je dirai cependant qu’il mérite d’être admiré, ne fût-ce que pour cette grâce qui le rendait digne de parler avec Dieu (1). Mais en considérant Cyrus et les autres qui ont acquis ou fondé des royaumes, on les trouvera tous dignes d’admiration (2). Et si l’on examinait leurs actions et leurs institutions en particulier, elles ne sembleraient point différentes de celles de Moïse, quoiqu’il eût eu Dieu pour maître. En examinant leurs actions et leur conduite, on ne verra pas qu’ils tinssent de la fortune autre chose qu’une occasion favorable, qui leur fournit le moyen d’introduire, dans leurs nouveaux états, la forme qui leur convenait (3). Sans cette occasion, la valeur de leur courage se serait éteinte ; mais aussi sans cette valeur, l’occasion se serait présentée envain (4). Il était donc nécessaire pour Moïse qu’il trouvât le peuple d’Israël es-

(1) Je n’aspire pas si haut ; et je m’en passe. G.

(2) Je grossirai ce catalogue. G.

(3) Il ne m’en faut pas davantage ; elle viendra ; soyons prêt à la saisir. G.

(4) La valeur avant tout. G. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/138 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/139 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/140 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/141 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/142 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/143 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/144 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/145 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/146 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/147 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/148 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/149 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/150 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/151 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/152 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/153 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/154 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/155 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/156 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/157 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/158 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/159 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/160 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/161 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/162 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/163 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/164 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/165 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/166 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/167 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/168 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/169 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/170 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/171 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/172 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/173 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/174 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/175 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/176 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/177 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/178 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/179 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/180 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/181 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/182 par la faveur du peuple, doit chercher à conserver son amitié ce qui lui est facile, parce que le peuple ne lui demande que de n’être pas opprimé. Mais celui qui est devenu prince par le moyen des grands, et contre le vœu du peuple, doit avant tout chercher à se le concilier : ce qui lui est aisé quand il le prend sous sa protection (1). Quand les hommes reçoivent du bien de celui de qui ils n’attendaient que du mal, ils ne s’en attachent que mieux à lui (2). Ainsi donc le peuple assujéti par un prince nouveau qui se rend son bienfaiteur, conçoit plus d’affection pour lui, que s’il l’eût porté lui-même, par bienveillance, à la souveraineté. Or le prince peut se concilier le peuple de plusieurs manières ; mais elles sont si nombreuses, et tiennent à tant de circonstances variables que je ne saurais donner une règle fixe et certaine à cet égard. Je me borne à conclure qu’il est nécessaire que le prince ait l’amitié du

(1) Je tâcherai de le lui faire croire, G.

(2) Cependant il me faut des contributions fortes et de nombreux conscrits. R. C. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/184 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/185 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/186 que les citoyens ont besoin de l’état, parce qu’alors chacun court, chacun promet, chacun veut mourir pour lui, attendu que la mort est éloignée (1). Mais dans les temps de crise, lorsque l’état a besain des citoyens, il ne s’en trouve que bien peu[14].

Cette expérience est d’autant plus périlleuse, qu’on ne la prue faire qu’une seule fois (2) ; en conséquence un prince sage doit imaginer un mode, au moyen duquel ses sujets ayent toujours, et de toutes les manières, dans toutes les circonstances quelles qu’elles soient, un très-grand besoin de sa principauté (3). C’est le plus sûr expédient pour se les rendre à jamais fidèles.

(1) Voilà ce qu’ils n’entrevoient pas dans ces protestations, ces adresses qui les tranquillisent : ils ne savent donc pas encore comme cela se fait ! E.

(2) S’ils s’en tiraient bien une première fois, je prendrais donc ma revanche avec avantage, quand je pourrais la prendre, ou la faire prendre. E.

(3) On ne pense jamais assez à cette vérité là. E.
CHAPITRE X.
Comment on doit mesurer les forces de toutes les Principautés.

Ou la principauté est assez grande pour que le prince y trouve, au besoin, de quoi se soutenir par lui-même (1) ; ou elle est telle que, dans ce cas, il soit forcé d’invoquer le secours des autres (2).

Les princes peuvent se soutenir par eux mêmes, quand ils ont assez d’hommes et d’argent pour former une armée convenable, avec laquelle ils soient en état de livrer bataille à quiconque viendrait les attaquer (3). Ils ont besoin des autres, ceux qui, ne pouvant se mettre en campagne contre les ennemis, sont forcés de se renfermer dans leurs murs, et de se borner à les garder (4).

On a parlé du premier cas ; et il en sera question encore, lorsque l’occasion s’en présentera.

(1) Comme la France avec les réquisitions, etc. G.


(2) Cela ne vaut rien. G.



(3) À plus forte raison quand ils peuvent attaquer, et faire trembler tous les autres. G.


(4) La triste chose ! Je n’en voudrais point. G.
et il en sera question encore, lorsque l’occasion s’en présentera.

Dans le second cas, on ne peut qu’encourager de tels princes à nourrir et à fortifier la ville de leur résidence, sans s’inquiéter du reste du pays (1). Quiconque aura bien fortifié le lieu de son séjour, et se sera bien conduit envers ses sujets, comme on l’a dit ci-dessus, et on le dira ci-après, ne sera jamais attaqué qu’avec beaucoup de réserve, parce que les hommes sont toujours éloignés des entreprises où ils voient de la difficulté, et qu’on ne peut espérer un succès facile, en attaquant un prince qui a sa ville bien fortifiée, et n’est point haï de son peuple (2).

Les villes d’Allemagne sont très-libres ; elles ont, dans leur alentour, peu de territoire qui leur appartiène ; elles obéissent à l’Empereur quand elles le veulent ; et ne craignent ni lui, ni aucun autre puissant du voisinage,

(1) Cela ne me regarde point.

R. C.

(2) Je me suis pourtant trouvé dans ce cas là ; mais je saisirai la première occasion de me faire une fortification dans ma capitale, sans qu’on en devine le véritable motif E.

parce qu’elles sont fortifiées de manière que chacun d’eux voient qu’il leur serait difficile et funeste de les attaquer (1). Toutes ont des fossés, de bonnes murailles, une artillerie suffisante ; et elles conservent dans leurs celliers, leurs greniers et leurs magasins, de quoi manger, boire et brûler pendant une année. En outre, afin de pouvoir tenir la populace suffisamment alimentée, sans qu’elle soit à charge au public, elles ont toujours en commun de quoi lui donner à travailler pendant un an à ces sortes d’ouvrages qui sont le nerf et la vie de la cité, et du produit desquels cette populace se nourrit. Elles maintiennent encore les exercices militaires en grande considération, et prennent beaucoup de soins pour qu’ils restent en vigueur (2).

Ainsi donc, un prince qui a une ville forte, et ne s’y fait point haïr, ne peut être attaqué ; et s’il l’était, celui

(1) C’était bon pour le temps passé ; et il ne s’agit pas ici de Français qui seraient les aggresseurs. G.

(2) A quoi ces précautions ont-elles servi contre notre ardeur, en Allemagne et en Suisse ? R. C.

qui l’attaquerait s’en retournerait avec honte. Les choses de ce monde sont si variables, qu’il est presque impossible que celui qui attaque, étant rappelé chez lui par quelque vicissitude inévitable dans ses états, reste une année à rôder avec son armée, sous des murs qu’il ne peut franchir (1).

Si quelqu’un objectait que, dans le cas où un peuple ayant ses possessions au dehors, les venait brûler, il perdrait patience, et qu’un siège prolongé et son intérêt personnel lui feraient oublier celui de son prince ; je répondrais qu’un prince puissant et courageux surmontera toujours ces difficultés, tantôt en faisant espérer à ses sujets que le mal ne sera pas long ; tantôt en leur faisant craindre des cruautés de la part de l’ennemi ; tantôt enfin en s’assurant avec adresse de ceux de ses sujets qui lui paraîtraient trop audacieux dans leurs plaintes (2).

(1) Je ne rôde pas un an, sans rien faire, sous les murs d’autrui. R. C.

(2) Le meilleur moyen, l’unique même, est de les contenir tous également par une grande terreur ; opprimez-les, ils ne se révolteront pas, et n’oseront souffler. R. I.

Au surplus, l’ennemi ayant dû naturellement, dès son arrivée, brûler et ruiner le pays, lorsque les assiégés étaient dans la premiére ardeur de la défense, le prince doit d’autant moins avoir de défiance ensuite, qu’après qu’il s’est écoulé quelques jours, les esprits sont refroidis, les dommages se trouvent faits, les maux ont été déjà soufferts, et restent sans remède. Les citoyens alors viennent d’autant mieux se réunir à lui, qu’il leur paraît avoir contracté envers eux une nouvelle obligation, à raison de ce que leurs maisons et leurs possessions ont été ruinées pour sa défense (1). La nature des hommes est de s’engager ainsi par les bienfaits qu’ils accordent, comme par ceux qu’ils reçoivent. Il en faut conclure que, tout bien considéré, il n’est pas difficile à un prince, qui a de la prudence, détenir d’abord, et dans la suite pendant tout le temps d’un siège, les esprits de ses

(1) Que cela soit ou ne soit pas, je m’en soucie peu : je n’en ai pas besoin. R. I.

concitoyens attachés à sa personne, quand il ne leur manque, ni de quoi vivre, ni de quoi se défendre (1).

(1) De quoi se défendre : c’est là l’essentiel. R. I.


CHAPITRE XI. Des Principautés ecclésiâstiques. 11 ne nous reste à parler maintenant que des principautés ecclésiastiques, sur lesquelles il n’y a de difficulté que pour en adquérir la possession, parce qu’il faut, à cet effet, de la valeur, ou une bonne fortune. INi l’une ni l’autre ne sont nécessaires pour les conserver. On y est soutenu par des institutions, qui, antiquement fondées sur la religion, sont si puissantes, et ont de tellespropriétés, qu’elles main tiennent le prince dans son état, de quelque manière qu’il procède et se conduise (2). 11 n’y a que ces princes qui (2) Ah ! si je pouvais, eu France, me faire moi — même Auguste, et Pontife suprême de

la religion ! G. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/194 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/195 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/196 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/197 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/198 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/199 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/200 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/201 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/202 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/203 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/204 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/205 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/206 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/207 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/208 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/209 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/210 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/211 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/212 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/213
ne pouvaient avoir que bien

peu de fantassins, ni en nourrir beaucoup, et que par conséquent l’infanterie ne pouvait leur faire acquérir un grand renom (1). Ils préféraient la cavalerie, dont ils proportionnaient la quantité aux ressources du pays qui devait l’alimenter, et dans lequel elle était honorée d’autant plus qu’on l’y nourrissait avec facilité. Les choses en étaient au point que, dans une armée de vingt mille hommes, on ne comptait pas deux mille fantassins (2).

Ils avaient, en outre, pris tous les moyens possibles, pour éloigner de leurs soldats et d’eux-mêmes la fatigue et la peur, en introduisant l’usage de ne pas tuer dans les mêlées, mais d’y faire des prisonniers, sans les massacrer (3). Pendant la nuit, ceux des tentes n’allaient point camper dans les terres, et ceux des terres ne revenaient pas aux tentes ; ils ne faisaient autour de leur camp

(1) Misérable ! pitoyable ! G.

(2) Pas le sens commun. Et on les vante ! G.

(3) Lâcheté ! ineptie ! sabrer, hacher, tailler en pièces, écraser, foudroyer, etc. G.
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qui n’est pas fondée sur ses

propres forces[15].

Les armes propres sont celles qui se composent des soldats, ou des citoyens, ou des créatures du Prince : toutes les autres sont ou mer- cénaires ou auxiliaires (1). Le mode, pour se former des armes propres, sera facile à trouver (2), si l’on examine les institutions dont j’ai parlé ci-dessus, et si l’on consi- dère comment Philippe, père d’Alexandre, ainsi que plu- sieurs Républiques et plu- sieurs Princes, se firent des armées et les ordonnèrent. Je renvoie entièrement à leurs constitutions pour cet

objet (3).
(1) Ils n’en ont réellement

pas d’autres, si tant est encore que celles qu’ils ont, soient pour eux. E.

(2) Pas pour eux, au moins de sitôt. E.

(3) C’est bon ; mais on penti encore mieux s’en rapporter à

moi : R. L
machiavel.
buonaparte.

CHAPITRE XIV.
Des devoirs du Prince, en ce qui concerne l’art de la guerre.

Un Prince doit n’avoir d’autre objet, d’autre pensée, ni cultiver d’autre art que la guerre, l’ordre et la discipline des armées (1), parce que c’est le seul qu’on s’attende à voir exercer par celui qui commande[16]. Cet art est d’une si grande utilité, que, non-seulement il maintient sur le trône ceux qui sont nés Princes, mais encore il fait souvent monter au rang de Prince des hommes d’une condition privée (2). Par une raison contraire, il est arrivé que des Princes, qui s’occupaient plus des douceurs de la vie que des choses militaires, ont perdu leurs États (1). La première cause qui te ferait perdre le tien serait de négliger l’art de la guerre : comme la cause qui fait acquérir une principauté à celui qui n’en avait point, est d’exceller en cet art. François Sforce s’y montra supérieur par cela seul que, n’étant que simple particulier, il devint Duc de Milan (2) ; et ses fils, pour avoir évité les fatigues et les incommodités de la profession des armes de Ducs qu’ils étaient, devinrent à-peu-près de simples particuliers (3).
(1) On dit que je vais prendre la plume pour écrire mes Mémoires. Moi ! écrire ! me prendrait-on pour un niais ? C’est déjà trop que mon frère Lucien fasse des vers. S’amuser à de telles puérilités, c’est renoncer à régner. E.

(2) J’ai montré l’un et l’autre. R. I.

Parmi les autres sources du mal qui t’arrivera, si tu n’exerces pas toi-même le métier des armes, tu dois compter le mépris qu’on en aura conçu pour ta personne (4) : ce qui est l’une de ces infamies dont le Prince doit se garantir, comme on le dira ci-après en parlant de celles qu’il se permet avec utilité. Entre celui qui est guerrier et celui qui ne l’est pas, il n’y a nulle proportion. La raison nous dit que le sujet qui est armé n’obéit pas volontiers à quiconque est désarmé (1), et que le maître qui est désarmé ne peut être en sûreté parmi des serviteurs armés (2). Avec le dédain qui est dans le cœur de l’un, et le soupçon qui est dans l’esprit de l’autre, il n’est pas possible qu’ils fassent ensemble de bonnes opérations (3).


(1) C’est immanquable. E.


(2) Et moi donc ! E.


(3) Comme eux, bientôt. E.


(4) L’épée et les épaulettes n’en préservent pas, lorsqu’il n’y a que cela. R. I.
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machiavel.

CHAPITRE XVI.

De la libéralité, et de la misère (l’avarice).

Commençant par la première de ces qualités, je dirai combien il serait utile d’être libéral ; cependant, la libéralité qui empêcherait qu’on ne te craignît, te serait nuisible. Si tu l’exerces sagement comme elle doit l’être, de manière qu’on ne le sache pas (1), tu n’encourras pas pour cela l’infamie du vice contraire. Mais comme celui qui veut se conserver, parmi les hommes, la réputation d’être libéral, ne saurait s’abstenir de paraître somptueux, il arrivera toujours qu’un Prince qui veut en avoir la gloire, consumera en prodigalités toutes ses richesses ; et à la fin, s’il veut continuer à passer pour libéral, il sera forcé de gréver extraordinairement

(1) C’est aussi trop évangélique. A quoi servirait d’être libéral, si l’on ne l’était pas par intérêt et par vanité ? R. C. ses peuples, d’être extrême- ment fiscal, et de faire tout ce qu’il est possible d’ima- giner pour avoir de l’ar- gent[a]. Or, cette conduite commencera à le rendre odieux à ses sujets (1) ; et, en s’appauvrissant ainsi de plus en plus, il perdra l’es- time de chacun d’eux (6), de telle sorte qu’après avoir

» (a)

(A) Cicéron assure que le prince libérât perd plus de cœurs qu’il n’en gagne, et que la haine de ceux auxquels il prend pour donner, est bien plus grande que la reconnaissance’de ceux auxquels il donne i Ncc tanta studia assequuntur qorum quibus dederunl, quanta odia eorum quibus ademerutit ( Qffic. L. 2). Pline le jeune pensait qn’e le prince ne devait rien donner, s’il ne~pouvait donner aux uns qu’en prenant aux autres ; iVïfoV iargiaturprincept, dùm nihil auferat ( Panegyr). La pensée de Tacite est aussj uafe que profonde, lorsqu’on parlant d’Othon il dit : 1 Ce prince qe saura pas donner, mais il saura dissiper ; et cqyx— là qe trompent fort, qui prennent la prodigalité-pour la libéralité : Perdere iste sciet, donare nesciet. Fallunlur quibus luxuria speciem liberalitqlis imponit. — Pline le jeune ne veut point qu’on appèle libéraux ceux qui ôtent à l’un pour donner à l’autre ; « ils n’.mt acquis, dit-il, leur réputation de libéralité, que par une véritable avarice » : Qui quod huic donant auferunt illi, famam UberalitaUs avaritiâ pet uni (Ep. 3o. L. 9). Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/241 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/242 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/243 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/244 il doit être économe[17] ; dans le second, il ne doit négliger aucun genre de libéralité (1). Le Prince qui, avec ses armées, va se repaître de butin, de sacs, de massacres, et disposer de la fortune des vaincus, est forcé d’être prodigue envers ses soldats, parce que, sans cela, il ne serait point suivi par eux (2). Tu peux alors te montrer amplement généreux, puisque tu donnes ce qui n’est pas à toi ou à tes soldats, comme le firent Cyrus, César, Alexandre (3) ; et cette dépense qu’en cette occasion tu fais du bien des autres, loin de nuire à ta réputation, lui en ajoute une brillante (4). La seule chose qui puisse te nuire, c’est de dépenser le tien.

Il n’y a rien qui s’épuise de soi-même comme la libéralité : pendant que tu l’exerces, tu perds la faculté de

(1) Qui l’a mieux fait que moi ? R. I.

(2) Voilà le secret de la licence que j’ai laissée pour les sacs et les pillages. Je leur donnais tout ce qu’ils pouvaient prendre : de la leur immuable, attachement pour moi. E.

(3) Et moi. R. I.

(4) Qui sert pour augmenter l’autre. R. I. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/246 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/247 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/248 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/249 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/250 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/251 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/252 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/253 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/254 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/255 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/256 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/257 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/258 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/259 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/260 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/261 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/262 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/263 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/264 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/265 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/266 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/267 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/268 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/269 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/270 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/271 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/272 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/273 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/274 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/275 pour conspirer (1). Si tout conspirateur, avant l’exécution de son complot, est ordinairement saisi de la crainte de ne pas réussir, il l’est bien plus en ce cas-là ; car il doit craindre encore, lors même qu’il réussirait, d’avoir le peuple pour ennemi (2), parce qu’alors il ne lui resterait aucun refuge.

On pourrait, à ce sujet, citer une infinité d’exemples (3) ; mais je me borneà un seul dont nos pères nous ont transmis la mémoire. Messire Annibal Bentivoglio, aïeul de messire Annibal d’aujourd’hui, étant Prince à Bologne, fut assassiné par les Canneschi[18] à la suite d’une conspiration ; et son fils unique, messire Jean, étant encore au maillot, ne pouvait le venger : mais le peuple aussitôt se souleva contre les assassins, et les massacra. Ce fut l’effet naturel de la bienveillance populaire que

(1) Il reste bien toujours des malveillans en assez grand nombre mais les surveillans !R. I.

(2) Le peuple ! n’est-il pas ingrat, et ne se tourne-t il pas toujours du côté de celui qui l’emporte, surtout quand celui-ci l’éblouit ? R. I.

(3) L’esprit amolli de notre siècle ne permet plus qu’ils se renouvellent. R. C. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/277 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/278 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/279 opinion, puisqu’il y eut tel empereur qui perdit l’empire, ou fut assassiné par les siens conjurés contre lui, quoiqu’il se fût conduit parfaitement, et qu’il eût montré beaucoup de grandeur d’âme. Voulant répondre à ces objections, j’examinerai les qualités de ces Empereurs, et montrant que la cause de leur ruine ne diffère point de celle-là même dont j’ai voulu préserver mon Prince ; et je ferai entrer en considération certaines choses qui ne doivent pas être négligées par ceux qui lisent les histoires de ces temps-là (1).

Il me suffira de prendre les Empereurs qui se succédèrent dans l’empire depuis Marc-le-Philosophe jusqu’à Maximin, c’est-à-dire Marc-Aurèle, Commode son fils, Pertinax, Julien, Septime-Sévère, Caracalla son fils, Macrin, Héliogabale, Alexandre-Sévère et Maximin.

Observons premièrement qu’en des principautés d’un

(1) Qu’on ne lit trop que comme des romans. R. C. autre genre que la leur, on n’a guère à lutter que contre l’ambition des grands et l’insolence des peuples ; mais que les Empereurs romains avaient en outre un troisième obstacle à surmonter, savoir, la cruauté et l’avarice des soldats : ce qui était si difficile (1), que plusieurs y échouèrent. Il n’est pas facile en effet de contenter à-la-fois les soldats et le peuple, parce que les peuples aiment le repos, et pour cela même les Princes dont l’ambition est modérée (2) ; tandis que les soldats veulent un Prince qui ait l’esprit militaire et qui soit insolent, cruel et rapace[19]. La volonté de ceux de l’em-

(1) Je ne le sais que trop.
R. I.

(2) Mon embarras est extrême ; et ce n’est pas à moi qu’il faut imputer mon ambition guerrière, mais à mes soldats, à mes généraux, qui m’en font un besoin de première nécessité. Ils me tueraient si je les laissais plus de deux ans sans leur présenter l’appât d’une guerre. R. I. pire était que le leur exerçât ces funestes dispositions sur les peuples, pour avoir une paye double, et pour donner un libre cours à leur cupidité et à leur avarice (1) ; d’où il arrivait que les Empereurs qui n’étaient pas réputés capables de tenir les soldats et le peuple en respect (2), succombaient toujours. La plupart d’entr’eux, surtout ceux qui montaient à la souveraineté comme Princes nouveaux, ayant senti la difficulté de concilier ces deux choses, prenaient le parti de contenter les soldats (3), sans trop craindre d’offenser le peuple et il ne leur était guère possible de faire autrement (4). Les Princes, ne pouvant éviter d’être haïs de quelques uns, (5) doivent, à la vérité, s’efforcer avant tout de ne l’être pas du grand nombre ; mais quand ils ne peuvent atteindre ce but, ils doivent s’ingénier pour éviter, par toute sorte d’expédients, la haine de la classe qui est la plus puissante (6).

(1) Ils m’y forcent pour les mêmes motifs. Les soldats sont partout les mêmes, quand on dépend d’eux. R. I.

(2) Je suis parvenu à faire l’un et l’autre ; mais pas encore assez. R. I.

(3) Il ne faut pas me le dissimuler : Je me trouve encore dans le même cas, sous tous les rapports. R. I.

(4) Voilà mon excuse aux yeux de la postérité. R. I.

(5) Ce n’est que trop vrai.
R. I.
(6) C’est toujours l’armée quand elle est aussi nombreuse que la mienne.
R. I.

Ainsi donc, ces Empereurs qui, à raison de ce qu’ils étaient Princes nouveaux, avaient besoin de faveurs extraordinaires, s’attachaient aux soldats bien plus volontiers qu’au peuple ; et cela tournait ou à l’avantage, ou au désavantage du Prince, selon qu’il savait se maintenir en grande réputation auprès des soldats (1). Telles sont les causes qui firent que Pertinax et Alexandre, quoiqu’ils fussent d’une conduite modérée, amis de la justice, ennemis de la cruauté, humains et bons (2), ainsi que Marc (Aurèle), dont la fin fut heureuse, en eurent néanmoins une très-misérable (3). Marc seul vécut et mourut très-honoré, parce qu’il avait succédé à l’Empire par droit d’hérédité, et n’était pas dans la nécessité d’agir comme s’il le devait aux soldats ou au peuple (4). Étant d’ailleurs doué de beaucoup de vertus qui le rendaient respectable, il contint jusqu’à sa mort le peuple et le soldat en de justes

(1) Tout faire pour cela : j’y suis forcé. R. I.

(2) Vertus déplacées en ce cas-là. On est à plaindre quand on ne sait pas y substituer les vertus politiques de la circonstance. R. I.

(3) Cela devait être ; et je l’aurais prévu. R. I.

(4) Ce bonheur n’est réservé qu’à mon fils. R. I. limites, et ne fut jamais ni haï, ni méprisé (1).

Mais Pertinax, créé Empereur contre le gré des soldats qui, sous Commode, s’étaient habitués à la vie licencieuse, ayant voulu les ramener à une vie honnête qui leur était insupportable (2), fit naître en eux de la haine contre lui (3). A cette haine se joignit le mépris pour sa personne, parcequ’il était vieux (4) ; et Pertinax fut assassiné dès le commencement de son règne[20]. Cet exemple nous met

(1) S’il m’était donné de renaître pour succéder à mon fils, je serais adoré. R. I.

(2) Ils ne peuvent s’en dispenser. E.

(3) C’est inévitable. E.

(4) Ce n’est pas moi que cela regarde. E. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/285 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/286 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/287 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/288 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/289 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/290 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/291 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/292 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/293 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/294 difficulté à prendre cette ville, conjura de même sa perte (1). Fatiguée de sa cruauté, et ne le craignant plus autant, depuis qu’elle lui voyait tant d’ennemis, elle le massacra.

Je dédaigne de parler d’Héliogabale, de Macrin et de Julien, qui, se trouvant méprisables en tout, périrent presqu’aussitôt qu’ils furent élus ; et je viens de suite à la conclusion de ce discours, en disant que les Princes de notre âge éprouvent moins, dans leur gouvernement, cette difficulté de contenter les soldats par des moyens extraordinaires (2). Malgré les égards qu’ils sont obligés d’avoir pour eux, cette difficulté s’applanit bien vite, parce qu’aucun de nos Princes n’a de corps d’armée qui, par un long séjour dans les provinces, se soient en quelque sorte amalgamés avec l’autorité qui les gouverne et leurs administrations (3), comme l’avaient fait les armées

(1) On le mérite, quand on laisse venir les choses à ce point. R. I.

(2) Elle ne m’embarrasse effectivement pas. R. I.

(3) Changer souvent les garnisons. R. I. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/296 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/297 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/298 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/299 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/300 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/301 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/302 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/303 et principalement ceux qu’on vantait comme sages, avaient coutume de dire que si, pour conserver Pise, il était nécessaire d’y avoir des forteresses, il convenait, pour tenir Pistoie, d’y fomenter des factions. Et voilà pourquoi, dans quelques terres de leur domination, ils entretenaient des différends qui leur en rendaient effectivement la possession plus facile. Cela pouvait convenir dans un temps où il y avait un avait un certain équilibre en Italie ; mais il ne paraît pas que cette méthode puisse être bonne aujourd’hui, parce que je ne crois point que les divisions dans une ville procurent jamais aucun bien (1). Il est même impossible qu’à l’approche d’un ennemi les villes ainsi divisées ne se perdent pas aussitôt ; parce que des deux partis qu’elles renferment, le plus faible s’attachera toujours. aux forces qui attaqueront et que l’autre dès-lors ne suffira plus pour résister.

(1) On ne doit pas prendre ce raisonnement à la lettre, parce que du temps de Machiavel, les citoyens étaient soldats en cas d’attaque de leur cité. Aujourd’hui ce n’est plus sur les citoyens que l’on compte pour la défense d’une ville attaquée, mais sur les bonnes troupes qu’on y a mises. Je pense donc comme les vieux politiques Florentins, qu’il est bon d’entretenir des partis quelconques dans les villes, les provinces, pour les occuper quand elles sont d’un caractère inquiet, bien entendu qu’aucun d’eux ne se dirigera contre moi. R. C. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/305 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/306 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/307 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/308 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/309 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/310 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/311 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/312 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/313 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/314 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/315 Il l’avait d’abord commencée sans combattre et sans crainte d’en être empêché, en ce que son premier soin avait été de tenir l’esprit des barons de Castille occupés de cette guerre. En les y faisant penser sans cesse, il les détournait de songer à machiner des innovations pendant ce temps-là ; et de cette manière il acquérait sur eux, sans qu’ils s’en aperçussent, beaucoup d’empire, et se procurait une grande considération (1). Ensuite il put, avec l’argent de l’église et des peuples, entretenir des armées, et se créer, au moyen de cette longue guerre, une bonne milice, qui finit par lui attirer beaucoup d’honneur (2). En outre, afin de pouvoir faire de plus grandes entreprises, mettant toujours en avant le prétexte de la religion, il recourut à l’expédient d’une cruauté dévote ; et il chassa les Maranes de son royaume, qui fut par là délivré de leur présence (3). On ne peut rien faire de

(1) Mes circonstances différaient trop des siennes dans mon entreprise sur l’Espagne, pour que j’eusse chez moi de pareils succès. Au surplus, je pouvais m’en passer R. I.

(2) Ferdinand fut plus heureux que moi, ou il eut des occasions plus favorables. Faire agir mon frère (Eh ! quel frère !), n’est-ce pas comme si j’agissais moi-même ? R. I.

(3) Ma dévotion du Concordat n’a pu m’autoriser qu’à chasser les prêtres qui s’étaient toujours montrés et se montraient encore rétifs aux promesses et aux serments. Il ne m’en fallait que de souples, bien jésuitiques. De temps à autre, je vexerai par calcul leurs Pères de la Foi ; Fesche les protégera ; et ils le feront Pape.R. C. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/317 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/318 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/319 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/320 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/321 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/322 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/323 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/324

Un Prince doit encore se montrer ami généreux des talents, et honorer tous ceux de ses sujets qui excellent dans un art quelconque (1). En conséquence, il doit exciter les citoyens à exercer paisiblement leur profession, soit dans le commerce, soit dans l’agriculture, soit dans tout autre métier, et faire en sorte que, par la crainte de se voir enlever le fruit de leurs travaux, ils ne s’abstiennent point d’en enrichir son État, et que, par celle des impôts, ils ne soient point détournés d’ouvrir un nouveau commerce (2). Enfin, il doit préparer des récompenses pour quiconque veut faire d’utiles établissements, et pour quiconque songe, en quelque manière que ce soit, à étendre les ressources de sa ville et de son État (3).

Son devoir est en outre d’occuper ses peuples de fêtes et de spectacles (4), dans les temps de l’année où il con-

(1) Multiplier les brevets d’invention. R. C.

(2) Les impôts n’effrayent jamais la cupidité mercantile.R. C.

(3) A-t-on jamais multiplié ces moyens-là autant que je l’ai fait ? R. I.

(4) Les fêtes et les spectacles de l’église ne pouvaient me servir. Leur suppression est compensée bien plus avantageusement pour moi, par la pompe de mes fêtes civiles. R. I. Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/326 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/327 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/328 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/329 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/330 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/331 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/332 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/333 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/334 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/335 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/336 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/337 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/338 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/339 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/340 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/341 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/342 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/343 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/344 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/345 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/346 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/347 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/348 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/349 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/350 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/351 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/352 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/353 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/354 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/355 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/356 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/357 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/358 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/359 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/360 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/361 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/362 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/363 MACHIAVEL. BCONAPAïtTE. 275 chargés, ils les auraient tous détruits. On peut .donc, après avoir reconnu le défaut de l’une et de l’autre de ces deux infanteries , en imaginer une nouvelle qui résiste aux cavaliers et n’ait pas peur des fantassins ; ce qu’on obtiendra , non de telle ou telle nation de combattants, mais en changeant la manière de combattre (i). Ce sont l’a de (1) Taut cela est fait. G. ces inventions qui , par leur nouveauté comme par leurs avantages, donnent de la .réputation , et procurent.de la grandeur k un Prince nouveau (2). ( ?) Ma tactique,, dont ils n’ont pas encore îe seçret, m’eu Il ne faut donc point laisser procurc biçn.plus que Laurent passer l’occasion du terinps n’en .potivait obtenir. G. présent, sans que ’l’Italie , après de si longues années d’attente, voye enfin paraî- . tre son Rédempteur (3,). Je (o)Ellel’a enfin,wconnü dans ne saurais exprimeravec,quel «»ôi. R..L amour il serait reçu ’dans toutes oes provinces qui ont tant souffert de l’inondation des étrangers ; avec quelle soif de vengeance , avec

Googk {{colD|quelle fidélité imperturbable, avec quelle piété, avec quelles larmes il serait accueilli et suivi ! Eh ! quelles portes lui pourrait-on fermer ? Quels peuples pourraient lui refuser l’obéissance ? Quelles jalousies sauraient s’élever contre lui ? Quel serait celui des Italiens qui pourrait ne pas le révérer comme son Prince, tant cette domination barbare de l’étranger est dégoûtante pour chacun d’eux (1) (1) J’ai vu toutes ces prédictions vérifiées en ma faveur. Tout, jusqu’à la ville éternelle, se glorifie d’être sons mon empire. R. I. ? Que votre illustre maison embrasse le projet de leur délivrance avec tout le courage et toute la confiance qu’inspirent les entreprises légitimes ; enfin, que sous votre bannière notre patrie s’ennoblisse(2)(2) Elle le sera davantage encore, si elle peut l’être sans danger pour moi. R. I., et que sous vos auspices se vérifie enfin cette prédiction de Pétrarque :

La valeur prendra les armes contre la fureur ; et le combat ne sera pas long, parce que l’antique bravoure n’est point encore éteinte dans le cœur des Italiens (3) (3) Elle revit presque entièrement, grâce à moi ; mais gardons-nous bien de les laisser réunir en un seul corps de nation, a moins que je ne veuille écraser la France, l’Allemagne, l’Europe entière. R. I..

fin du livre du Prince.
NOTE relative à Barnabô Visconti, souverain de Milan, au 14e siècle (Voy. ci-devant pag. 228).


Machiavel était trop instruit et trop clairvoyant, pour s’être laissé tromper sur le compte de Barnabô, par le mal qu’en avaient dit les adulateurs du Prince qui l’avait détrôné, comme il arrive toujours, en de pareilles circonstances. C’était ainsi qu’en France le flatteur de Charlemagne, ce moine Eginard qu’il combla de présens, et à qui il donna sa fille en mariage, avait accrédité pour masquer le crime de l’usurpation de Pépin, la fausse opinion que Childéric III, et les autres derniers rois de la première race n’étaient que des fainéans, indignes de régner. De même que celui-ci, après avoir été détrôné, avait été enfermé par l’usurpateur, père de Charlemagne, dans un cloître où il ne tarda pas à périr ; Barnabô surpris par une trahison de son neveu Jean Galéas, en 1385, sous le masque de la dévotion, s’était emparé de sa personne, de ses états, et l’avait fait jeter dans le château de Trezzo, où peu de temps après il mourut empoisonné. Ce Jean Galéas, qui se mit aussitôt à éblouir las Milanais, par la fondation de leur vaste et fameuse église cathédrale, et auquel les écrivains de son temps s’empressèrent de dresser une généalogie qui le faisait descendre d’Anglus, fils ou petit-fils d’Enée, n’en manqua pas non plus qui, pour l’exalter davantage, se mirent à décrier Barnabô.

Celui-ci était à la vérité, dur et brutal, mais ami de la justice, et doué de la fermeté qui était nécessaire alors pour gouverner les hommes. On peut en juger par ses institutions qui, dans le fait, comme le dit Machiavel, furent remarquables par leur originalité. Voyant que beaucoup de débiteurs, les uns par mauvaise foi, les autres par dérangement de fortune, ne payaient point leurs dettes, il fonda une maison de force où il les fit enfermer, en Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/367 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/368 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/369 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/370 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/371 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/372 Page:Machiavel commenté par Napoléon Buonaparte.djvu/373 disposer du reste autrement que les lois ne l’avaient réglé[21]. • •

§ II.


Un peuple corrompu qui s’est mis en république, ne peut s’y maintenir qu’avec une extrême difficulté ( Ch. 17 du Liv. I.)

Sans revenir sur l’exemple de Rome, je me borne à celui des Milanais, qui, après la mort du duc Philippe-Marie Visconti., se constituèrent en république, et ne purent y rester que deux ans et demi, à cause de leur extrême corruption.

. . . . . . . . . . . . . . .

  1. La présente traduction a été collationnée sur le manuscrit original qui est dans la Bibliothèque Medici-Laurenziana, à Florence. (Note de l’Editeur.).
  2. Neveu du pape Léon X, et père de Catherine de Médicis, qui épousa, en 1533, le Dauphin de France, devenu roi en 1547, sont le nom d’Henri II. (Idem.).
  3. Comme Tacite et Gibbon. Note de Buonaparte. G.
  4. C’est par-là que j’ai commencé, et qu’il faut commencer. On connaît bien mieux le fond des vallées quand on est ensuite au faîte de la montagne. Note de Buonaparte. R. C.
  5. Généralissime des armées de la république milanaise, il conduisit très républicainement à des victoires, à des conquêtes ; et quand, avec la magique empire qu’un général acquiert par là sur l’esprit du soldat, il put disposer de ses troupes au gré de son ambition, il vint asségier et soumettre les republicains de Milan il se fit recevoir en cette ville comme un libérateur, et bientôt il obtint d’y être proclamé prince et duc de tous les états milanais.
  6. Depuis 1442 qu’Alphonse V, roi d’Aragon, s’était fait proclamer roi de Naples, les rois d’Espagne conservèrent ce second royaume jusqu’en 1707.
  7. Discours sur la, première décade de Tite-Live.
  8. Tacite dit que celui qui a acquis un empire par le crime et la violence, ne peut le conserver en employant tout-à-coup la douceur et l’ancienne modération : Non posse principatum scelere quæsitum subitâ modestiâ et priscâ gravitate retineri. (Hist. I.) ; et il prévient que la rigueur qu’il faut exercer pour conserver cet empire, est souvent cause qu’on le perd par la révolte des sujets à qui la patience échappe : atque illi, quamvis servitio sueti, patientiam abrumpunt (Ann, 12).
  9. Machiavel (Disc. Liv. 3, ch. 6), appelait sentence d’or, les paroles de ce sénateur romain, qui disait « qu’admirant le passé sans blâmer le présent, et bien qu’il souhaitât de bons princes, il supportait patiemment ceux qui n’étaient pas tels, attendu la nécessité de vivre selon les temps où l’on est » : Se meminisse temporum quibus natus sit : ulteriora mirari, præsentia sequi, bonos imperatores expectare, qualescumque tolerare. (Tacit. Hist., Liv. 4). Claudius répondit aux ambassadeurs des Parthes qui étaient venus lui demander un autre roi que le leur : « De tels changements ne valent rien ; il faut s’accommoder le mieux que l’on peut au caractère des rois que l’on a : Ferenda regum ingenia, neque usui crebras mutationes ». (Ann. 12).
  10. Tacite raconte que les Parthes reçurent Tiridate à bras ouverts, espérant d’être mieux traités par lui qu’ils ne l’étaient par Artaban ; et que, peu de temps aprés, ils haïrent Tiridate autant qu’ils l’avaient aimé, et rappelèrent Artaban : Qui Artabanum ob sævitiam execrati corne Tiridatis ingenium sperabant… ad Artabanum venere, etc. (Ann. 6).
  11. Rhadamiste ayant repris l’Arménie, d’où il avait été chassé par ses sujets, se conduisit envers eux comme envers des rebelles qui n’attendaient que l’occasion de se révolter encore : Vacuam rursus Armeniam invasit, truculentior quàm anteà, tanquam adversus defectores, et in tempore rebellaturos (Ann. 12).
  12. C’est ce qu’Artaban, roi des Parthes, fit à Seleucie dont il changea le gouvernement populaire en une oligarchie, par laquelle on se rapprochait de la monarchie. Ainsi le voulait son intérêt, au jugement de Tacite : Qui plebem primoribus tradidit ex suo usu. Nam populi imperium juxtà libertatem, paucorum dominatio regiæ libidini propior est. (Ann. 6.)
  13. Au lieu, de disperse, Amelot de la Houssaie a mis très-odieusement et de son chef le mot extermine, quoiqu’il y ait dans le texte : dissipano. Machiavel, que l’esprit des traducteurs n’a pas peu contribué à faire décrier, reste sagement fort au-dessous de l’intention d’Amelot. — Tacite (Ann. 6,) raconte que, tant que les Séleuciens agirent d’un commun accord, le Parthe fut méprisé ; mais que lorsqu’on eut mis la dissension parmi eux, chacun cherchant alors un secours contre ses émules, le Parthe les eut bientôt subjugués.
  14. Prosperis Vitellii ebus certaturi ad obsequium, adversam ejus fortunam ex æquo detrectabant. « Tous s’empressaient de servir Vuellius quand ses affaires étaient heureuses ; et ils le desservirent à l’envi quand la fortune lui devint contraire ». (Tacit. Hist. 2) — Languentibus omnium studiis, qui primo alacres fidem atque animum ostentaverant ; etc. : « tous ceux qui avaient d’abord fait parade d’un courageux dévouement, n’eurent plus qu’une languissante indifférence pour lui, etc. » (idem, Hist. i.)
  15. Tacite disait : Nihil rerum mortalium tam instabile ac fluxum est, quam fama potentiæ, non sua vi nixæ : « Parmi les choses périssables, il n’y en a point qui ait si peu de stabilité, et soit si chancelante que la réputation d’une Puissance qui n’est pas appuyée sur sa propre force « (Ann. 13)
  16. Un roi de Thrace, au rapport de Tacite, disait que s’il ne connaissait pas le métier de la guerre, il ne différerait en rien de son palfrenier ; et Néron, dans ses jours de sagesse, faisant d’avance le plan de son gouvernement futur, disait qu’il ne se mêlerait pas d’autre chose que de commander les armées (Ann. 13).
  17. Tacite loue Galba d’avoir été économe de son bien, et avare de celui du public : Pecuniæ suæ parcus, publicæ avarus (Hist. 1).
  18. Famille rivale des Bontivoglies, en 1445.
  19. « Il y en avait que la mémoire de Néron, et le désir du retour de l’ancienne licence enflammaient », dit Tacite : erant quos memoria Neronis, ac desiderium prioris licensiæ accenderet (Tacite Hist. 1). Galba perdit l’empire et la vie pour avoir dit qu’il ne prétendait point acheter l’affection des soldats, mais prendre leurs personnes : legi à se milites, non emi (Hist. 1) ; comme encore pour voir usé d’une sévérité de discipline que Néron avait laissé perdre dans la licence : Nocuit antiquus rigor, et nimia severitas cui jam pares non sumus… Severitas ejus angebat coaspernantes veterem disciplinam, atque ita quatuordecim annis à Nerone assuefactos, ut haud minus vitia principum amarent quam olim virtutes verebantur (Hist. 1).
  20. Tacite, comme l’observe Amelot de la Houssaie, explique ce malheur en parlant d’autres Empereurs qui étaient à la méme époque de la vie : ipsa ætas Galbæ, et inrisui et fastidio erat adsuetis juventæ Neronis, Imperatores formâ et decore corporis (ut est mos vulgi) comparantibus (Hist. 1). — Reputante Tiberio publicum sibi odium, extremam ætatem (Ann. 6). — « Quand ils se soutenaient, c’était moins par leur force que par l’effet de leur précédente réputation » : magisque famâ, quant vi stare res suas (Ibid.). — « Les ennemis du dehors, ne les voyant plus en état de se défendre, les bravaient » : Artabanus senectutmi Tiberii ut inermem despiciens (Ann. 6). — « Pour avoir occasion de ne pas les respecter, on prétendait que leur esprit était sur son déclin » : fluxam senio mentem objectando (Ibid.). — « Les scélérats, toujours intrigants, venaient accaparer leur confiance, et les diriger à leur gré » : invalidum senem, odio oneratum, contemplu inertiæ destruebant (Hist. i) ; — « et des affranchie entrant alors dans les
  21. C’était gênant ; mais on dicte soi-même les lois ; et en ayant l’air de s’y conformer, on dispose de tout à sa guise, G.

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