Nouveau Prophète en Afrique

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NOUVEAU PROPHÈTE

EN AFRIQUE.




Le Madhy.




FRAGMENT.


… Il est peu de personnes qui ne sachent aujourd’hui combien la superstition des sectateurs de Mahomed, leur histoire (et surtout celle des Maures), ont donné de célébrité au titre de Mahdy, porté à diverses époques par des hommes qu’entourait la vénération du peuple…

Le titre de Mahdy a été adopté comme un simple surnom honorifique par divers princes musulmans, soit d’Orient, soit d’Afrique ou d’Espagne… Mais on ne saurait confondre avec ces qualifications purement nominales, le même titre de Mahdy dans son application spéciale à des personnages qui l’ont reçu ou usurpé comme le signe du caractère de leur mission, mission de réforme religieuse et de domination politique. Voici, d’après l’opinion universellement adoptée, la croyance populaire dans laquelle ces divers apôtres ont trouvé, à différentes époques, l’origine et le prétexte de cette mission.

On se rappelle que, dès la mort de Mahomed, des divisions éclatèrent parmi ses disciples à l’occasion du choix de ses successeurs : un grand schisme en résulta, qui subsiste encore. D’un côté sont rangés ceux qui ne reconnaissent de succession légitime, tant au spirituel qu’au temporel, que dans la lignée directe du Prophète, issue de son gendre A’ly, et éteinte à la douzième génération, en la personne du jeune Abou-’bqâsem Mohhammed, surnommé par excellence al-Mahdy. Enlevé, enfant encore, au culte de ses dévots partisans, ce jeune prince termina sans retour, en l’année 264 ou 267 de l’hégire (877 ou 880 de l’ère vulgaire), la série des grands Imâms ou souverains pontifes légitimes. De l’autre part se trouvent les Sonnytes, ou observateurs de la tradition, distribués plutôt que séparés en quatre sectes également orthodoxes ; ceux-ci, tout en professant un respect profond pour la descendance directe de Mahomed, n’ont point pour elle une vénération aussi exclusive, ni aussi superstitieuse que leurs adversaires qu’ils ont flétris du nom de Schyaytes ou schismatiques.

Dans l’opinion de ces derniers, le douzième Imâm, disparu du monde depuis tant de siècles, est toujours plein de vie, toujours prêt à reparaître pour réformer les abus, subjuguer la terre, et reprendre le double sceptre. Les sonnytes ne croient point à la perpétuité d’existence du Mahdy ; mais il semble avéré que les Maures, bien que professant généralement la secte orthodoxe mâlékyte, ont conservé, de leur contact prolongé avec des dynasties schyaytes, une foi aveugle, soit à la réapparition réelle du jeune Mohhammed parmi les hommes, soit à la venue d’un nouvel Imâm, son image parfaite, son représentant et son successeur légitime. Ils attendent donc ou le Mahdy lui-même, ou un Mahdy comme lui.

Est-il dès-lors surprenant que des hommes enthousiastes, et qui ont pu être plus fanatiques encore qu’ambitieux, subjuguant par leur supériorité intellectuelle le vulgaire ignorant et superstitieux, aient voulu faire croire, et aient cru eux-mêmes qu’ils étaient appelés à remplir cette glorieuse mission de réforme et de domination ?

Une tradition, d’ailleurs, reçue comme authentique, attribue à Mahomed une prophétie d’après laquelle l’Afrique occidentale est désignée comme le théâtre futur d’une révolution remarquable : elle annonce en effet qu’un jour un soleil se lèvera au couchant ; et pour les Arabes, le couchant (al-maghreb), c’est l’Afrique occidentale. Aussi est-ce en ces contrées qu’ont apparu à diverses fois de prétendus Mahdy dont quelques-uns ont bouleversé les gouvernemens établis, pour s’élever à leur place, et sont devenus les fondateurs de puissantes dynasties.

Tel fut O’bayd-Allah ben Mohhammed, le schyayte, qui, le premier, voulut justifier la prophétie en s’élevant en occident au temps marqué par elle, c’est-à-dire, à la fin du troisième siècle de l’hégire. Il prit le titre de Mahdy, que portèrent aussi ses successeurs immédiats, lesquels publiaient que, par une sorte de métempsycose, l’esprit du dernier Imâm vivait et se perpétuait héréditairement en eux. Ce fut à Ségélmâsah, sur la limite atlantique du grand Ssahhrâ, que O’bayd-Allah saisit l’étendard de la réforme et de la conquête ; de proche en proche, sa dynastie, élevée sur les ruines de dynasties rivales[1], porta jusqu’au Caire le siége de sa puissance…

À l’exemple d’O’bayd-Allah, mais substituant le titre plus modeste de Marabouth ou ermite à celui de Mahdy, A’bd-Allah ben Yasyn Al-Gézouly prêcha la réforme, et la faisant triompher par le glaive, jeta au milieu des belliqueuses tribus de Ssanhâgah les fondemens de la dynastie des Lamtounydes, qui étendirent bientôt leur empire depuis l’Océan jusqu’à l’Égypte, et depuis les bords de l’Èbre jusqu’au cœur des états nègres, limitrophes des populations mauresques. Les romanciers espagnols ont appelé cette dynastie puissante, du nom d’Almorabides, reproduction défigurée de celui d’al-Morâbethyn, c’est-à-dire religieux, que les Lamtounydes s’étaient eux-mêmes attribué.

Un autre Mahdy s’éleva dans le Maghreb, et fit crouler cette monarchie formidable : il se nommait Abou-Mohhammed A’bd-Allah ben Tomrout. À son tour, il prêcha la réforme, rassembla de nombreux partisans, et s’élança, des gorges de l’Atlas, à la conquête des vastes états que possédaient les Lamtounydes : ainsi commença et grandit la puissance des Mouahhedyn ou unitaires, que les romans andalous ont appelés Almohades.

C’est aux mêmes lieux, dans l’Afrique occidentale, parmi les peuples musulmans établis au sud du désert, près des tribus mauresques, que vient d’apparaître le nouvel apôtre, auquel la populace a donné le titre de Mahdy. Avant de rapporter ce que nous ont appris à son égard les renseignemens parvenus de nos établissemens d’Afrique, quelques observations préliminaires sont indispensables.

Au sud des populations mauresques de l’immense désert, habite, au milieu des races nègres, une race cuivrée, qui s’étend comme une zône depuis le célèbre empire de Barnouh jusque vers les bords de la mer Atlantique. Ces peuples, que l’on désigne sous les noms divers de Fellâtas, Foulahs, Fouleys, Peules, etc., se donnent eux-mêmes le nom de Fellâns, ainsi que me l’a affirmé un voyageur européen, qui a contracté avec la famille d’un de leurs chefs les plus étroites liaisons[2]. Ils se comptent, aussi bien que les Maures, parmi les nations blanches. Leurs traditions les font venir de l’Orient, ce que justifie la longue traînée qu’ils forment de l’est à l’ouest, et qui, d’abord non interrompue, a depuis, été scindée en diverses portions par l’invasion d’une race nègre puissante[3]… Les Fellâns se trouvent donc naturellement partagés en divers états : ceux qui forment le groupe le plus occidental occupent deux royaumes, gouvernés par des princes indépendans l’un de l’autre : l’un de ces royaumes est celui de Bondou, vers l’est ; l’autre est celui de Foutah, à l’ouest.

Celui-ci, dont je veux spécialement parler, comprend trois grandes provinces : le Foutah proprement dit au milieu, à l’est le Damghah, à l’ouest le Toro. Ce dernier pays, peuplé en majeure partie de nègres qu’on appelle Torodos, est une dépendance plutôt qu’une portion intégrante de l’empire fellân de Foutah. Les trois provinces ont pour voisins, au nord, les Maures de Ferârzah et de Berâknah, tribus issues de celles de Ssanhâgah.

C’est dans la province de Foutah, au village de Faldy[4], sur la rive gauche du Ouâd-Negher, que nous appelons Sénégal, que réside habituellement le roi de tout le pays. Autrefois revêtus du simple nom de saltigké ou général, que les Européens ont défiguré en celui de siratik, ces princes sont, depuis moins d’un siècle, décorés du titre révéré de émyr-âl-moumenyn ou chef des fidèles, que les nègres contractent et corrompent en celui d’Almamy. La date de l’adoption de ce titre imposant, devenu dérisoire par son application à de si faibles monarques, coïncide avec celle d’une révolution par suite de laquelle le mahométisme, déjà introduit depuis long-temps parmi ces peuples, devint exclusivement la religion de l’état. Depuis cette époque aussi, la couronne n’est dévolue au prince que par l’élection du conseil des Imâms, pontifes religieux et chefs politiques des provinces et des districts. Ce conseil tient ses assemblées à Kélogn, capitale de tout l’empire. Le caprice, l’intrigue, l’esprit de parti, ne président que trop souvent à de tels choix ; aussi les dépositions, les mutations fréquentes, sont-elles la suite naturelle de cet ordre de choses.

Il y a dix ans, l’émyr-âl-moumenyn Yousef ben Siry fut déposé. Après quelques mois d’anarchie, l’émyr Ibrahym obtint le sceptre ; mais il fut bientôt déposé lui-même. Une nouvelle lutte s’engagea, dans laquelle le parti de l’émyr Yousef eut le dessus, et depuis lors il régna sans partage, malgré les menées sourdes ou les tentatives ouvertes de son compétiteur Ibrahym, moins puissant et moins redouté que lui. C’est au milieu de ce conflit mal éteint de prétentions et de droits, au sein d’une nation où la ferveur religieuse conserve encore une partie de son enthousiasme (surtout dans la province de Toro), qu’est venu se montrer le nouveau Mahdy.

Mohhammed ben A’mar ben Ahhmèd est né vers 1803, à Souymah, grand village de la province de Toro, dans le voisinage de la ville de Podor, où la compagnie française d’Afrique avait autrefois un poste fortifié. Il montra de bonne heure cette ardeur des études théologiques qui distingue en général les habitans du Toro ; il fut un des jeunes thâlebs les plus distingués d’entre les disciples d’Al-hhasan, chef du village de Maou, et d’Abou-baker, imâm du district de Dimar, le plus puissant, le plus influent de ceux du Toro, qui fait sa résidence à Galmag, sur le Sénégal, à quelque distance au-dessus de notre poste de Daghanah. De ces écoles, Mohhammed passa, en 1819, âgé alors d’environ seize ans, à celle des Marabouths, les plus renommés d’entre ceux des tribus maures qui errent dans le Ssahhrâ, on dit qu’il parcourut aussi, avide d’instruction et de science, diverses contrées de l’Afrique ; mais il ne paraît point qu’il ait fait le saint pélerinage de la Mekke.

C’est au mois d’avril 1828, c’est-à-dire pendant la lune sainte de Ramadhân[5], que Mohhammed ben A’mar revint à Souymah. Ses yeux étincelans, ses lèvres muettes et pourtant agitées, toute sa physionomie, accusaient en lui l’existence de pensées extraordinaires, de mouvemens intérieurs incompréhensibles. Ses concitoyens stupéfaits, effrayés, le crurent en démence, et, d’après les usages héréditaires, bâtirent au malheureux une case distincte en dehors de l’enceinte commune. Mohhammed, la tête haute, les bras croisés sur la poitrine, silencieux et fier, traversa cette foule que son regard rendait stupide de crainte, et prit possession de son habitation nouvelle. À peine entré dans la hutte, il frappa la terre de son front et demeura, dit-on, douze jours entiers en prières, observant le jeûne le plus absolu.

Le treizième jour, il reparaît à Souymah ; c’était l’heure de la prière d’al-assri[6]. Ses traits beaux et imposans, sa démarche noble, grave, et pourtant aisée, tout en lui appelait l’attention. Il prend la parole : sa voix était tonnante, son éloquence irrésistible, nous disent les rapports venus de ces contrées ; et les Imâms, les Marabouths de tout âge, de tout rang, saisis d’enthousiasme à ses prophétiques discours, se déclarent ses disciples, et réclament de lui leur confirmation ; le peuple transporté s’écrie qu’il est le Mahdy tant annoncé, et si long-temps attendu…

Les partis politiques, qu’une rivalité toujours subsistante tenait en présence, ne pouvaient manquer de rechercher l’appui de cet homme extraordinaire, dont la voix seule subjuguait des populations entières. L’Imâm Abou-baker, l’ancien précepteur de l’obscur Mohhammed, devint, pour l’émyr déchu Ibrahym, un appui auprès du nouveau Mahdy. Ibrahym met à la disposition de celui-ci tout ce qu’il a de soldats, d’armes, de chevaux ; il marche lui-même sous ses ordres, et l’on s’avance contre Faldy, qu’habite l’émyr Yousef. Cette expédition a l’air d’un triomphe plus que d’une attaque ; car le Mahdy promet la victoire aux musulmans réformés.

Mais hélas ! cette réforme n’était peut-être point assez profondément entrée au cœur de son armée ; Yousef, sans l’attendre à Faldy, vint le battre complètement à quelques lieues de là, près des villages de Bounbah et d’A’bd-Allah. L’émyr Ibrahym prit la fuite : quant au Mahdy, il avait disparu dans la mêlée.

Deux mois après, on le revit à Souymah ; il sortait des cases habitées par ses femmes et ses esclaves : vêtu de pagnes blanches, l’air grave, triste et recueilli, il portait sur son bras gauche son jeune fils encore à la mamelle ; sa main droite était armée d’un poignard nu.

À sa vue, le peuple s’ameute, accourt, s’empresse autour de lui ; un tronc d’arbre abattu lui sert de tribune ; son regard impose silence à la foule, et sa voix éloquente se fait entendre. Il dit avec chaleur que, « si Dieu n’a pas favorisé contre Yousef, les armes des réformés, la cause en est aux souillures dont ceux-ci ne sont point lavés ; les péchés odieux des Fellâns n’ont pu être rachetés par ses seules prières ; il faut à Allah une offrande expiatoire, ainsi que le prescrit le livre de la loi ; la victime à immoler, il ne la demande point aux pères, aux mères qui l’entourent ; c’est lui-même sur qui doit retomber le sacrifice, car c’est lui qu’Allah a désigné pour effacer les péchés de son peuple, et c’est dans le sang qu’il va verser que les vrais croyans ont à laver les souillures de leur front. »

Il plonge alors le poignard dans la gorge de son jeune enfant[7], et jette le cadavre au milieu du peuple saisi d’horreur et d’enthousiasme. « Prenez, leur crie-t-il, voilà le sang de mon fils ; » et, cachant sa tête sous ses pagnes, il tombe prosterné vers l’Orient, et passe, dans cette attitude, le reste du jour en prières.

Cet affreux dévoûment rallume au plus haut degré la ferveur religieuse des partisans de cet homme étrange, et grossit la foule de ses prosélytes. L’émyr al-moumenyn Yousef, bien que vainqueur naguère, n’ose plus se fier uniquement à la fortune des armes ; vainement il tente de le faire périr par trahison, ou de le décrier auprès des Fellâns ; enfin, il emploie la dernière voie qui lui reste : il cite le Mahdy à comparaître devant le conseil suprême des Imâms.

Le terme de cette citation solennelle devait échoir aux premiers mois de la présente année.

Cependant la ville de Podor, plus éclairée des lumières de la civilisation, à raison de l’ancien contact de ses habitans avec les Français de la compagnie d’Afrique, n’avait point suivi le torrent. Une famille puissante, celle du chef Mokhtâr Bouba, récemment décédé, était à la tête de l’opposition. L’un des fils de Mokhtâr, lié d’intérêts avec Ahhmédo, scheykh de la tribu maure de Berâknah, était le gardien d’un riche dépôt de marchandises appartenant à celui-ci. La vengeance et la cupidité avaient dû tenter doublement Mohhammed ben A’mar ; aussi pendant que des guerres intestines occupaient ailleurs le scheykh de Berâknah, le Mahdy était venu fondre sur Podor, l’avait enlevée d’assaut, et l’avait livrée au pillage et à l’incendie.

Ce triomphe n’eut point une longue durée. L’appel de Yousef au conseil des Imâms vint détacher, en apparence du moins, du parti de Mohhammed, les plus puissans de ceux-ci, pour les rallier à la cause de l’émyr. D’un autre côté, Ahhmédo envoyait une armée commandée par son plus jeune fils, demander compte au Mahdy de la violation du dépôt de marchandises qu’il avait à Podor ; les Maures assiègent à leur tour cette place et l’enlèvent pour la saccager de nouveau.

Mohhammed effectue sa retraite le long du fleuve ; les gens de Berâknah le pressent vivement ; il est obligé de traverser le Sénégal au village de Galmag, et de s’enfoncer dans le désert. On crut d’abord qu’il était allé chercher un asile auprès des tribus mauresques qu’il avait autrefois visitées ; mais au commencement de mars, il était à Daghanah, dépendance du Ouâlo. L’émyr Yousef, instruit de la présence de son ennemi dans les états du Brak (roi) de Ouâlo, menace celui-ci de la guerre, s’il ne refuse l’hospitalité à Mohhammed ben A’mar, et le roi, faible, âgé, infirme, privé depuis deux mois du Boukanégh[8] habile qui régnait pour lui, promet au puissant émyr de chasser de ses états le Mahdy fugitif.

Mais cet émyr puissant, dont le Brak subissait les volontés, a, depuis lors, été privé du sceptre ; le conseil des Imâms l’a déposé, pour la deuxième fois, au mois de mai dernier. Qui sait si le doigt du Mahdy n’a point dirigé cette révolution inattendue, et si le génie de cet homme ne prépare point à son peuple d’extraordinaires destinées ?…


A…


  1. Edrysytes de Fès, Aghlabytes de Qayrouan, Medrârytes de Segelmâsah, Rostomydes de Tahort, etc.
  2. Ce voyageur est M***. Un séjour de plusieurs années auprès de Hhaoua-Déha, roi du Kassou, lui a rendu familières la langue, les manières et les mœurs des indigènes. Le roi, voulant resserrer l’amitié qu’il avait conçue pour le voyageur, lui offrit pour épouse sa fille aînée, promettant de laisser sa couronne à l’enfant mâle qui pourrait naître d’elle ; mais de cette union il n’est encore résulté qu’une fille. J’ai vu, en 1828, ce voyageur dans le costume fellân, drapé avec grâce des mêmes pagnes qu’il portait dans le Kassou, ayant au cou l’amulette obligée, à la ceinture le poignard, et parlant au jeune esclave, présent de noces de son royal beau-père, tantôt l’une, tantôt l’autre des diverses langues de la Sénégambie, toutes avec une égale aisance et une égale volubilité.
  3. Celle de Banbarrad (Manding), laquelle paraît avoir affecté sa marche du midi vers le nord.
  4. Faldy est le même village que les colons européens appellent Saldé.
  5. Le Ramadhân avait commencé le 18 mars et devait finir le 17 avril : tout le monde sait que c’est le temps du jeûne et du recueillement pour les musulmans. Il est, en outre, intéressant de remarquer ici que c’est dans la lune de Ramadhân que Mahomet lui-même avait reçu sa mission divine.
  6. La prière de l’après-midi, qui se fait vers trois heures de relevée.
  7. Le jour de ce sacrifice a dû être précisément le 10e du mois de Dzou-l’hhagah, répondant au 25 juin 1828, jour de l’Ayd-Kébyr ou grande fête des musulmans, qui lui donnent aussi le nom de Ayd al-Adhha ou fête des victimes ; à pareil jour, les fidèles égorgent un mouton et se marquent au front du sang de la victime.
  8. Boukanégh signifie proprement esclave ; on appelle Boucanégh Nghiourbél, ou plus exactement Baknyk Gorbél, celui qui, au village royal de Gorbel, sur le marigot (ruisseau) de Taouy, préside à la cérémonie de la proclamation du Brak. D’après un usage assez singulier, cette cérémonie est une partie de pêche dans le marigot. Le Briok (prince royal), plongé dans l’eau, pêche de ses propres mains, quelque poisson que d’officieux courtisans ont soin de tenir prêt d’avance. Il montre au peuple le fruit de sa pêche, et il est aussitôt proclamé. Le Baknyk Gorbél remplit auprès du nouveau monarque la charge d’intendant-général et de premier ministre