PALMIRE,
BALLET HÉROÏQUE EN UN ACTE,
REPRÉSENTÉ DEVANT LEURS MAJESTÉS, À FONTAINEBLEAU,
LE 24 OCTOBRE 1755.
BALLET HÉllOIQUE.
On voit au fond du théâtre les portes du temple de l'Amour.
SCÈNE PREMlÈRlL.
LE GRAND PRÊTRE, seul.
Zélé>or va paruîU';; annoncé par la gloire , Sa valeur a sauvé !e temple de l'Amour.
Hélas ! laut-il voir, eu ce jour , La reine devenir le prix de sa \ icloiie ?
CHOEia DE PEipr.E , derrière le théâtre.
Régnez, aimfiz, jeune vainqneur, Que la gloire et l'amou!- parl:ui:ent volie coeur !
LE GRAND lUÈTRE.
Ces chants redoublent mes alarmes. Dieux ! que c esî un destin iatal D'être forcé d'admirer son rival ! IMais de son sort je troublerai les charmes. Fatal hymen ! funeste jour ! Pour mon cœur déchiré , ta pompe est un outrai^e ! J'éteindrai tes flambeaux dans les maiivs de i'an:ourî Ils ne s'allumeront que du feu de ma rage !
IV. u(>
�� � 402 OEUVRES
SCÈNE IL
/
LE GRAND PRÊTRE , ZÉLÉNOR , PALMIRE , PEUPLES.
��Régnez , aimez , jeune vainqueur . Que la gloire et l'ainour partagent votre cœur!
ZÉLÉNOR.
31inislrc du dieu dont l'empire S'étend sur tout ce qui respire , Présentez-lui deux cœurs qui chérissent ses fers. Quels hommages lui sont plus chers Que lessentimcns qu'il inspire!
��L'oracle Je l'Amour doit approuver mon choix ; Daignez l'interroger, qu'il nous dicte ses lois.
��Si j'en crois les transports de mon âme ravie , Déjà j'entends ce dieu vous consacrer ma vie.
Quel sera mon bonheur. Si j'en crois les transports de mon âme ravie !
PALMIRE.
L'oracle de l'Amour est écrit dans mon cœur.
�� � DE CHAMFORT. 4o3
CHOEUK.
Que leurs chaînes soient éternelles ! Puissant Amour ! remplis leurs vœux :
Rends ces amans heureux
Autant qu'ils sont fidelles.
LE GBAND PRETRE.
Allons prier ce dieu d'approuver leur ardeur ; Qu'il les unisse l'un et l'autre; Lui demander de faire leur bonheur , C'est foi"mer des voeux pour le vôtre.
SCÈNE III.
ZÉLÉNOn, PALWIRE.
��L'excès de ma félicité Répand l'ivresse dans mon âme; Mes yeux vous expriment ma flâmc, Les vôtres sont garan? de ma fidélité.
PALM IRE.
Au plus tendre penchantje me laissai conduire ; Quand je vous vis, je commençai d'aimer : J'ignorais le bonheur ; mais mon cœur sut m'instruirc
Vous avez le don de charmer , Et les autres mortels n'ont que l'art de séduira Ah ! l'Amour me devait un si parfait amant
�� � 4o4 ŒUVRES
ZÉLÉNOR.
Que l'Amour est un dieu charmant. Quand il fait partager les transports qu'il inspire !
PALMiaK.
Cher Zélénor !
ZÉLÉNOR.
Adorable Palmire !
ENSEMBLE.
Je yous aimerai toujours , Je veux passer tous mes Jour» A répéter l'aveu du serment qui nous lie , Et vous redire encore , en terminant ma vie : Je vous adorerai toujours.
( On entend an brait de synip/ionic champêtre. )
PALMIRE.
Le son charmant de ces musettes Annonce ici les bergers de ces lieux.
ZÉLÉNOR.
Ils quittent leurs retraites , Pour offrir à vos yeux L'hommage le plus pur et le plus précieux.
PALRinVE.
L'Amour se plait à les entendre ; Pour notre bymcu c'est un présage heureux.
�� � DK CHàMFORT. 4o5
ZÉLÉNOR.
Pour un cœur embrasé de l'ardeur la plus tendre , Le vrai présage est celui de ses feux.
SCÈNE IV.
Les Précédens, BERGERS , BERGÈRES.
( On danse. )
ZÉLÉNOR.
Bergers, chantez une reine si belle.
PALMIRE.
Bergers, chantez la gloire de mon choix.
CHOECR.
Chantons une reine si belle; Chantons la gloire de son choix,
PALMIRE.
Vous chérii'ez ses loix.
ZÉLÉNOR.
Je les recevrai d'elle.
CHŒUR.
Chantons , etc.
��( On danse. )
�� � 4o6 OEUVRti
��Éclalez , transporls d'allégresse , Consacrez l'ardeur de mes feux ; Témoins de toute ma tendresse , Chaniez l'amant le plus heureux
Eclatez, transports d'allégresse,
Consacrez l'ardeur de mes feux ;
Ali! qu'il est doux de lire.
Dans tous les yeux. Le souverain empire De l'objet de ses feux.
Éclatez , transports d'allégresse , Consacrez l'ardeur de mes feux.
��On il un se. )
��SCÈNE y.
Les Précédens. LE GRAND PRÊTRL.
��LE GRAND PllETRE.
��A'iens, Ai-iour, dicte tes arrêts, Fais le bonheur d'un amant qui t'implore : Ne triomphe d'un cœur, et n'y lance tes traits Que pour l'unir à l'objet qu'il adore !
��LU CHOEUR.
��Viens, Amour, dicle tes arrêts; Triomphe . prononce tes décrets.
�� � i)F. cnAT.iForvT. 407
��LE GUANO PRETRF
��Le dieu lu'cnlend, il va pzononcer ses décrets; Que du plus saint respect votre âme soit saisie !
��L ORACLE.
��Palmire, ce n'est pas aux profanes mortels Que l'Amour destine ta vie :
Tu ne dois être unie Qu'au ministre de ses autels.
��O'iel oracle fatal î
��Quel désespoir extrême ! L'Amour lui-nHMiie, hélas ! veut donc nous séparer?
LE GRAND PRETRE.
Le dieu vient de se déclarer; Vous devez respecter sa volonté suprême : C'est un crime d'en murmurer.
��Dieu barbare ! quelle est la rigueur de tes chaînes ?
Tu ne te plais qu'à voir couler nos pleurs. Si pour les tendres cœurs tu réserves les peines ,
Sur moi seule du moins épuise tes rigueurs.
LE GRAND PRETRE.
Chaque instant vous rend plus coupables j
�� � 4o8 ' ŒUVRES
L'Amour condamne votre ardeur; Ses arrêts .^ont irrévocables : ■Venez à ses auteîs, prévenez sa fureur.
ZÉtÉNOR.
Peuples , opposez-vous à cette barbarie.
zÉLÉîiOR AVEC LE CHOEUR.
ije ne souffrirai j
nous ne souffrirons )
(me I Qu'elle { \ soit ravie.
( te )
Frémissez, ministres ingrats ; '
Et craignez les transports de ma juste furie.
Non , non , etc.
LE GRAKD PRÊTRE ET SA SUITE.
Amour, on méprise tes lois; \ iens effrayer la terre ;
- ■ i iwes j , .
^soutiens la puissance et J | droits,
I ses j Du souverain des dieux emprunte le tonnerre.
( On entend le tonnerre. )
PALMIRE ET ZÉlÉNOR.
Hélas ! nous nous voyons pour la dernière fois.
�� � DE CHAMFORT. 409
SCÈNE VI. Les Précédens, L'AMOUR.
l'amotir.
En vain à mes projets voulez-vous mettre obstacle ; Pour les faire accomplir , je descends en ces lieux.
Tremblez, mortels audacieux !
Et soumeltez^vous à l'oracle.
LE GRA>D PRÊTRE.
Qu'entends-je ?
PAIMIRE ET zÉlÉNOR.
Juste Ciel !
l'amour.
Et toi , de mes autels Ministre coupable et parjure , Je vais faire éclater tes complots criminels ,
Je vais punir ton imposture : Tu trompas ces amans par un oracle faux ;
Il va servir à faire ton supplice. Pour augmenter ta honte et terminer leurs maux,
Je veux que l'hymen les unisse. Zélénor, présidez dans ce temple sacré; L'oracle est accompli, je vous joins à Palmire.
�� � /|,IO ' OJ-tiVBES
LE GRAKD PRÈïRE.
O rage ! ô désespoir I quel rigoureux martyre !
PALMiuE 2T zÉlÉxor , cnsciiiblc cl alternativement.
Quelle t'élicilé ! Nos chaînes seront éternelles. Pour te servir avec sincérité. Tu ne pouvais choisir deux amans plus fidelles , Ni plus remplis de ta divinité. Quelle félicité ! . Nos chaînes seront éternelles ; Lamour vient de combler nos vœux ; C'est Tamour qui nous rend heureux.
Quelle félicité! Nos chaînes seront éternelles.
SCÈNE VII ET DERNIÈRE.
LE GRAND - PRÊTRE , ZÉLÉNOR, PALMIRE L'AMOUR, SviTE DE l'Anotjr.
i'amour.
Vous qui bridez d'une si belle flâmc . Tendres amarr, livrez-vous aux désirs;
Vous ressentirez dans votre âme
Que je suis le Dieu des plaisirs ;
Le l>onheur vous rendra fidelles ; Ff)rmcz des vœux, je les remplirai tous;
Je suis le tyran dos jaloux;
��
�
Mais je suis l’esclave des belles.
Volez, plaisirs, rassemblez-vous ;
Dans vos jeux retracez l’histoire
De la déesse des forêts:
Célébrez à jamais
Ma plus éclatante victoire.