Panthéon égyptien/29

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Panthéon égyptien, collection des personnages mythologiques de l'ancienne Égypte, d'après les monuments
Firmin Didot (p. 61-62).

ΡΟΟΗ, ΡΙΙΟΗ, ΙΟΗ.

(lunus, le dieu-lune, sélène.)
Planche 14 (B)

Les formes de convention sous lesquelles les Égyptiens figuraient le dieu Pooh dans leurs tableaux religieux ou symboliques, ne peuvent plus être incertaines d’après ce qu’on vient d’établir par l’autorité des monuments, dans l’explication de la planche précédente. Il nous resterait à connaître la manière dont on exprima le nom de ce dieu dans l’écriture sacrée. Malheureusement les dessinateurs de la commission d’Égypte, en copiant avec fidélité les différentes images de cette importante divinité, à laquelle toutefois on donne le nom d’Harpocrate dans le texte de la Description de l’Égypte, ont négligé de copier aussi avec le même soin les légendes hiéroglyphiques placées à côté de ce personnage. Nous n’avons pu suppléer à cette omission en consultant les peintures des sarcophages et des enveloppes des momies, parce que le dieu Pooh n’est jamais figuré, à notre connaissance du moins, sur les monuments funéraires de ce genre. Mais le dessin du zodiaque circulaire de Dendéra, donné dans ce magnifique ouvrage, nous a permis de remplir cette lacune : le nom hiéroglyphique du dieu Pooh est tracé deux fois dans les légendes sacrées perpendiculaires[1], placées à côté de la grande figure de femme ayant les bras étendus, sculptée à la gauche du zodiaque, et qui représente la déesse Tpé, le ciel personnifié.

Le nom hiéroglyphique du dieu Pooh ou Piioh (la Lune), (Voyez notre pl. 14 (A), no 1), est formé de deux caractères : 1o d’un croissant à-peu-près semblable à celui que nous plaçons dans nos almanachs pour exprimer le premier ou le dernier quartier, figure qui, d’après le témoignage de Clément d’Alexandrie, était le signe de l’idée Lune dans l’écriture sacrée égyptienne[2] ; 2o du caractère symbolique Dieu-måle, signe déterminatif d’espèce qui est le caractère final de tous les noms propres des dieux égyptiens.

Ce groupe répond aux mots de la langue parlée POOH-NOUTÉ le Dieu-lune. Nous ajouterons aussi que le croissant renversé était, selon Horapollon[3], le signe de l’idée mois (Voyez notre pl. 14 (A), no 3). Ce même caractère est en effet le signe initial de tous les groupes hiéroglyphiques, exprimant les noms propres des mois égyptiens. On trouve enfin, dans les inscriptions précitées du zodiaque circulaire de Dendéra, ce même croissant placé les cornes en haut (Pl. 14 (A), no 9). Il servait à noter le commencement du mois ; comme sa position inverse, le croissant les cornes en bas, en exprimait la fin et l’accomplissement[4].

La planche 14 (B) contient une nouvelle image du Dieu-lune accompagnée de symboles indiquant une circonstance particulière du cours de cet astre. Ce tableau emblématique est reproduit parmi les peintures des manuscrits funéraires, soit hiératiques, soit hiéroglyphiques, un peu complets[5].

Pooh, la tête surmontée du disque entier, peint tantôt en jaune, tantôt en rouge, ainsi que du croissant, se montre assis sur une bari ou barque, symbole du mouvement de l’astre autour de la Terre. Devant le dieu est un autel chargé d’un pain sacré et d’une fleur de lotus ; derrière lui est le groupe hiéroglyphique exprimant l’idée d’Adoration, de service ou d’honneur rendu aux dieux dans le texte sacré de l’inscription de Rosette[6]. Hors de la barque sont des cynocéphales faisant face au dieu et élevant leurs bras vers le ciel. La posture de ces animaux indique sans aucun doute que le tableau entier représente emblématiquement le lever de la Lune. Horapollon dit en effet que le cynocéphale debout et les mains élevées vers le ciel exprime le lever de la Lune[7], que cet animal semble ainsi féliciter et accueillir avec joie[8].


Notes
  1. Descr. de l’Égypte, A., vol. IV, pl. 21.
  2. Σελήνην γράψαι βουλόμενοι σχῆμα μηνοειδὲς ποιοῦσι, les Égyptiens voulant écrire la lune tracent la figure d’un croissant. Stromat. liv. V, pag. 657. Édit. Potter.
  3. Hiéroglyphicor., lib. I, §. 4.
  4. Idem. Ibidem.
  5. Voyez Descript. de l’Égypte, A., vol. II, pl. 7, au-dessus des colonnes 21 à 39. — Id. MSS. hiératique, pl. 70.
  6. Texte hiéroglyphique, ligne 7, au commencement. Ce groupe répond au mot Θεραπεύειν de la 40e ligne du texte grec.
  7. Horapollon, Hiéroglyph., lib. I, §. 15.
  8. Idem. Ibidem.

——— Planche 14 (B) ———