Petits Poèmes d’Automne/Je suis mort au bord de la grève

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Petits Poèmes d’automneLéon Vanier, libraire-éditeur (p. 77-79).

VII

Je suis mort au bord de la grève
D’un pays dont je fus roi :
Las moi ! qu’ai-je trompé le rêve
Des blancs guerriers de la foi ?

Leurs trompettes d’or dans l’automne
Tonnent, et leurs cris de deuil
Vibrent dans le vent monotone
Qui souffle sur mon cercueil.


Dans ma main se rouille l’épée
Qui flamba sur maints combats
Quand les chantres de l’épopée
Suivaient l’éclair de mes pas.

Tout est fini. La Renommée
Ne sacrera plus ce front
Des fraîches palmes d’Idumée
Qui sauvent de tout affront.

Et les vierges qui par les routes
Semaient sous mon char des lys,
Je crois qu’elles vont s’enfuir toutes,
Riant des jours de jadis.

Pourquoi pleurer les infidèles
En mon éternel sommeil ?
Je sais que quand les hirondelles
Voleront vers le soleil,


Tu viendras, ô Reine du rêve,
De l’hiver des mers du Nord,
Ravir mon âme vers la grève
Où tout souvenir s’endort.