Pleureuses/36

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PleureusesErnest Flammarion (p. 137-138).


À UNE AMIE


Les voix s’exaltent et s’élèvent…
Je suis vieux comme les aïeuls,
J’ai des rêves lassés qui rêvent
Tout seuls.

C’est le temps triste et monotone,
C’est le désespoir grand ouvert,
C’est le printemps, l’été, l’automne,
L’hiver !


Le souvenir de l’ancien geste,
Le souvenir du mal ancien :
Ce qui reste, quand il ne reste
Plus rien.

Ô vous, ma sœur d’après la veille,
De l’instant splendide et sacré
Où le rêve qui s’ensommeille
Est vrai…

Petit poème magnifique,
Éclos par le pardon du soir,
Où l'on entend de la musique
Sans voir…

Je vous bénis, ange en sourire,
Mains qui servent mon désespoir,
Bonté qui fait que je m’admire
Le soir !