Recueil des lettres missives de Henri IV/1578/18 juillet ― À mon cousin monsieur de Dampville

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1578. — 18 juillet. – Ire.

Orig. – B. R. Fonds Béthune, Ms. 8715, fol. 38 recto.


À MON COUSIN MONSR DE DAMPVILLE,

MARESCHAL DE FRANCE

Mon Cousin, Vous avez peu entendre les beaux commencementz qui avoient esté donnez en l’execution de l’establissement de la chambre, remise de la ville d’Agens, en l’estat qu’elle doibt demeurer suivant iceluy edict, et par les conferances que nous avons eues ensemble les sieurs mareschal de Biron et de Foix, et pour les chevaulchées dudict sr mareschal et la resolution du voyage des srs de Foix et de Turenne. Dont est advenu que, sur une requeste de ceulx de la Religion du ressort du parlement de Thoulouse, qui ont demandé l’establissement de la justice pour y avoir recours en lesdicts afflictions et oppressions, et que, au moyen de laquelle les infracteurs de l’edict et violateurs de la foy et seureté publique estant punis selon la rigueur et severité des lois, cela servist d’exemple à tous aultres de ne rien attenter au prejudice du repos public, remonstrant que sans cela le voyage desdicts sieurs de Foix et de Turenne seroit inutile, j’ay despesché le sr de Chassincourt vers Sa Majesté pour entendre sur ce son intention et commandement, et ce pendant le dict voyage a esté surcis et retardé comme aussy ceulx de Quercy. Nagueres ayant faict la mesme remonstrance, les chevauchées du dict sieur mareschal ont cessé. Sur quoy on a faict courir des bruicts et lettres, qui ont desjà apporté en certains endroicts quelque alteration et remuement. Et d’aultant que j’ay maintenant entendu que, depuis, le dict sieur mareschal estoit arrivé à Agens, j’ay bien voulu aller jusqu’à Lectoure pour entendre les occasions et motifs de telles soubdaines alterations et remuemens, et regarder les moyens d’y couper chemin à l’advenir et d’obvier aux perilleuses consequences qui de là pourroient naistre et nous precipiter à la longue en quelque inconvenient irreparable ; en quoy j’ay bien voulu vous tenir adverty et vous prier de tenir la main à ce que la paix s’entretienne ; en attendant que le voyage des dicts srs de Foix et de Turenne se paracheve, favoriser la charge desdicts sieurs du parlement, qui est selon vos bonnes et droictes intentions, pour y faire tout ce qui se pourra pour l’execution de l’edict, et particulierement de faire cesser toutes courses, pilleries et inconveniens et aultres hostilitez, et se mettre en tout debvoir de remettre les choses en paisible estat ; vous priant considérer que l’establissement d’un repos general en ce Royaume, aprés tant d’occasions de defyance et ruptures de paix et massacres, n’est l’œuvre d’un jour, ne qui se puisse parachever qu’avecque quelque temps et patience, et au reste faire entier estat de mon amitié, et de ce qui est en mon pouvoir. Sur ce, je prieray Dieu vous tenir, mon Cousin, en sa trés-saincte garde et protection. De Montauban, ce xviije juillet 1578.

Vostre bien affectionné cousin et parfaict amy,
HENRY.