Recueil des lettres missives de Henri IV/1581/12 novembre ― À mon cousin monsieur de Matignon

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1581. — 12 novembre.

Orig. — B. R. Fonds Béthune, Ms. 8857, fol. 110 recto.


À MON COUSIN MONSR DE MATIGNON[1],

MARESCHAL DE FRANCE.

Mon Cousin, J’ay esté fort ayse de la commission qu’avez despesché au sr de Casenave pour la conduite de la compaignye du capitaine Belsunse à Pemyrol ; mais considérant le peu de moyens qu’a la dicte compaignye, ayant souffert et pasty il y a longtemps, je vous prie luy faire faire monstre de troys moys, et pour le regard de la garnison qui estoit à Pemyrol, à qui il est deub huict moys, luy en faire payer quatre, afin de faire cesser toute plaincte pour ce regard. J’escrips aux srs de Gabarret et de Saveillan[2], par un gentilhomme que j’envoye expres devers eulx, les pryant de me venir trouver, et leur defendant ce pendant de rien attempter l’un contre l’aultre ; esperant que les ayant ouyz je les mettray d’accord. Et vous feray entendre ce que j’auray faict là-dessus ; vous priant bien fort de continuer, comme vous avez commencé, l’execution de l’eedict en toutes les occasions qui se presenteront ; ayant esté bien ayse qu’ayez pourveu au different qu’avez trouvé entre les Catholiques et ceulx de la Religion d’Agen, pour le regard des sepultures ; priant Dieu, mon Cousin, Vous avoyr en sa saincte garde. De Nerac, ce xije jour de novembre 1581.

Vostre bien bon cousin et affectionné amy,


HENRY.


[3] Mon Cousin, Il est impossible que la dicte compaignie puisse entrer en garnison pour si peu. Vous m’avez promis qu’elle seroit payée des dicts trois mois ; je vous prie de rechef de le faire.


  1. Jacques Goyon, sire de Matignon et de Lesparre, prince de Mortagne, comte de Thorigny, baron de la ville de Saint-Lô, marquis de Lonrai, etc. d’une des plus anciennes familles de Bretagne, était fils de Jacques Goyon, sire de Matignon, et d’Anne de Silly, dame de Lonrai. Il naquit à Lonrai, le 26 septembre 1525. Il se trouva aux principales batailles de la seconde moitié du XVIe siècle, fut successivement lieutenant général de Normandie en 1559, maréchal des camps et armées du Roi en 1562, gouverneur de Cherbourg en 1578, maréchal de France et chevalier des ordres du Roi en 1579. En 1581, le Roi, pour l’opposer au roi de Navarre, en remplacement du maréchal de Biron, le pourvut de la lieutenance générale de Guyenne, et, en 1589, du gouvernement de cette province, que le maréchal maintint avec fermeté, après la mort de Henri III, sous l’obéissance de Henri IV. Il fit les fonctions de connétable au sacre de ce prince, et mourut dans sonchâteau de Lesparre, le 27 juillet 1597, avec la réputation d’un des grands hommes de son siècle pour l’esprit, l’humanité et les talents militaires. Sa vie a été écrite d’abord par Brantôme, qui ne l’aimait pas, puis par M. de Caillère. Paris, 1661, in-fol. On la trouve aussi dans le 12e vol. des Grands Capitaines français, par d’Auvigny.
  2. Denys de Mauleon, seigneur de Savailhan et de Saint-Sanby, fils de Jacques de Mauléon et de Perrette de Ferrières, fut gouverneur de Castel-Jaloux, après la prise de cette ville par les religionnaires en 1579, puis commandant pour le roi, sous les ordres du roi de Navarre, de la ville du Mas-Grenier sur Garonne. Il y fut tué, d’une arquebusade, au mois de fé-vrier 1589.
  3. Post-scriptum de la main du roi.