Recueil des lettres missives de Henri IV/1581/1 septembre ― Au roy, mon souverain seigneur

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[1581.] — 1er septembre.

Orig. autographe. — Collection de M. de Chassiron.


AU ROY, MON SOUVERAIN SEIGNEUR.

Monseigneur, Si apres la nouvelle que vous avez receu de la prinse de monsr de Turenne[1], vous vous estes souvenu du bon tesmoingnage que messrs de Villeroy et de Bellievre vous rendirent de sa bonne affection à vostre service, en la negociation et conclusion de la derniere paix, je m’asseure que cela et la consideration de ses autres merites vous aura faict marry de sa prinse. Je le suis de ma part si fort, tant pour la bonne volonté que je sçay qu’il a au bien de vostre service et de vostre Estat, que pour l’amitié que je luy porte, que ce m’est occasion de vous depescher Constans tout exprez, pour vous suplier tres humblement, Monseigneur, de vouloir prendre à cœur et en affection son affaire, et favoriser les ouvertures et expediens qu’on pourra proposer, ou que Vostre Majesté pourra trop mieux adviser pour le retirer de captivité, ou à tout le moins pour pourvoir à sa conservation et soulaigement penndant sa detention. C’est un personnage de qualité et de valeur, dont Vostre Majesté pourroit tirer un grand service ; et ne se presenta jamais occasion pour l’obliger et affectionner d’aultant plus à ce faire, qu’en moyennant sa delivrance. De quoy je vous fais de rechef tres humble requeste ; et en auray pour jamais une aussy grande obligation à Vostre Majesté que si c’estoit pour moy mesmes, ainsy que le dict Constans vous dira ; que je vous supplie vouloir croire en ceste occasion comme

Vostre tres humble et tres obeissant
subject et serviteur,

À Nerac, le 1er septembre.


HENRY.


  1. Ayant accompagné Monsieur en Flandre, il avait été pris par les Espagnols dans un combat livré près de Cambrai au mois d’avril précédent. Il resta prisonnier près de trois ans, et ne recouvra sa liberté qu’en payant une rançon de cinquante-trois mille écus.