Recueil des lettres missives de Henri IV/1583/29 juillet ― À monsieur mon cousin monsieur le prince d’Orange

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[1583. — 29 juillet.] — IIme.

Cop — B. R. Suppl. fr. Ms. l009-3.

Imprimé. — Mémoires de messire Philippe de Mornay, seigneur du Plessis Marli, etc. t. I, p. 235.


[À MONSIEUR MON COUSIN MONSIEUR LE PRINCE D’ORANGE.]

[1] Monsieur mon Cousin, J’ay esté bien ayse d’avoir entendu de vos nouvelles par le sr de Vauffin, nommeement du bon accomplissement de vostre mariage[2]. Je prie Dieu qu’il le comble de l’heur et prosperité que pouvés desirer, comme par sa grace il lui a pleu de sy loin rassembler vos vertus ensemble. Je m’asseure aussy qu’il en tirera du fruict pour ses Eglises ; et mesme que nous y aurons nostre part, pour la conjonction qu’ont nos affaires avec les vostres, que je ressens telles pour mon regard, que je n’estime vos plaies, moins miennes que vostres. Vous sçavés la circonstance du temps où nous sommes, qui est comme la crise de nostre maladie. Sy, esperé-je que Dieu benira tant nostre patience, nonobstant les traverses qu’on nous y donne, que nous demeurerons en paix. C’est un œuvre auquel je m’emploie volontiers, comme le dict sieur de Vauffin vous pourra dire ; qui m’a trouvé embesoigné à renger quelques fols à la raison, qui pensent avoir justifié suffisemment leurs fautes, quand ils alleguent l’impunité de plus grandes, de l’aultre part. Mais j’ay tousjours pensé qu’il valoit mieulx que les aultres amendassent leurs desportemens sur les nostres que si nous empirions les nostres sur les leurs. Et, au reste, oultre ce que la paix est si desirable en elle mesme et si necessaire à cest Estat, qu’elle merite bien d’estre racheptée par beaucoup de grandes peines, et de mediocres maulx, croiés, Monsieur mon Cousin, que ce ne m’est pas une petite exhortation à patienter pour la retenir, quand je considere, comme m’escrivés, qu’elle est utile au bien de vos affaires, et pourroit estre, si nous venons enfin à nous reveiller, dommageable et ruineuse à ceulx qui vous pressent. Or je prieray Dieu, Monsieur mon Cousin, qu’il vous ait en sa saincte garde.

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[HENRY.]


  1. « Faite par M. du Plessis. » (Mém. de Mornay.) La date de cette lettre est indinée de la même manière que celle de la précèdente.
  2. C’était le 12 avril précédent que le prince d’Orange avait contracté ce quatrième mariage avec Louise de Coligny, fille de Gaspard de Coligny, amiral de France, et de Charlotte de Laval. Elle était née à Châtillon-sur-Loing, le 28 septembre 1555, et se trouvait veuve en premières noces de Charles, seigneur de Téligny, de Lierville, etc. lieutenant de la compagnie de l’amiral, son beau-père, et massacré avec lui à la Saint-Barthélemy.