Revue des Romans/Étienne François de Lantier

La bibliothèque libre.
Revue des Romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839
◄  Lamy La Place  ►


LANTIER (E. F. de),
né à Marseille en 1734, mort en 1826


VOYAGE D’ANTÉNOR EN GRÈCE ET EN ASIE, avec des notions sur l’Égypte ; manuscrit grec trouvé à Herculanum, 3 vol. in-8, 1798 ; idem, 15e édit., revue et corrig. par l’auteur, 3 vol. in-8, 1821. — Les voyages d’Anténor ne sont qu’un roman d’imagination, fort gracieux à la vérité, mais qui ne donne que des idées imparfaites, et souvent même fausses, des mœurs de l’ancienne Grèce. Lorsque cet ouvrage parut pour la première fois, il fit une espèce de révolution dans les boudoirs. C’était le temps où, après avoir frissonné le matin au milieu des revenants de Mme Radcliff, on allait sangloter le soir à Misanthropie et Repentir. Ces plaisirs fatigants trouvèrent bientôt un terme ; la sensibilité des jeunes femmes excitée sans ménagement, finit par s’épuiser, leurs pleurs cessèrent de couler, et elles commencèrent à s’ennuyer des vieux châteaux, des spectres, et de toutes la nomenclature des romans noirs. Ce fut dans cette circonstance que Lantier fit paraître ses voyages d’Anténor, et la disposition des esprits fut sans doute une des causes principales du succès qu’ils obtinrent alors. Il en existait cependant un plus puissant ; la conformité du titre rappelait Anarcharsis, et c’est à la réputation si justement acquise de cet ouvrage, qu’Anténor dut une partie de sa faveur. Un cadre heureux, une étude profonde des mœurs et des usages des anciens, des détails curieux et peu connus, des portraits pleins de vérité, et surtout un style pur et brillant, assurent le succès d’Anarcharsis ; dans Anténor, il est plus facile d’indiquer les beautés qui n’existent pas, que de nombrer les fautes que l’on rencontre ; rien n’a la couleur convenable ; les personnages n’ont de grec que le nom, les mœurs et les coutumes des différents peuples n’offrent aucune différence ; les choses sérieuses sont livrées au ridicule, la gaieté manque de naturel et de légèreté ; les tableaux les plus finis sont tout au plus de légères ébauches. En somme, Anténor, avec son esprit, ses connaissances, sa philosophie et son impiété, et Phanor, avec ses aventures scandaleuses et ses plaisanteries, ne conviennent guère qu’aux lecteurs superficiels, plus désireux de s’amuser que de s’instruire.

On a encore de Lantier : Les Voyageurs en Suisse, 3 vol. in-8, 1803. — Voyage en Espagne du chevalier Saint-Gervais, 2 vol. in-8, 1809. — Correspondance de Mlle Suzette Césarine d’Arly, 2 vol. in-8, 1814.