Revue littéraire - Le Livre du prince Napoléon

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Revue littéraire - Le Livre du prince Napoléon
Revue des Deux Mondes3e période, tome 83 (p. 681-693).
REVUE LITTERAIRE

Napoléon et ses détracteurs, par le prince Napoléon. Paris, 1887, Calmann Lévy.

Depuis tantôt cinq ou six mois que l’on savait qu’un prince neveu cousin et fils d’empereurs ou de rois autrefois très puissans, s’était proposé de répondre au libelle, — ainsi qu’il l’appelle. — de M. Taine sur Napoléon, nous attendions sa réplique avec une impatience ou une curiosité que justifiaient également, bien qu’à des titres différens, la réputation de M. Taine d’abord, le nom glorieux de son contradicteur, la grandeur et enfin l’intérêt national du sujet .

Le livre vient de paraître; et si nous pouvons dire sans flatterie qu’il nous a révélé dans le prince un écrivain que nous n’y connaissions pas c’est que nous devons ajouter aussitôt que, ni dans la forme ni dans le fond, le livre lui-même n’est ce qu’il pouvait être. Le prince Napoléon ne voulait point écrire « une Vie de Napoléon, » et on ne le lui demandait pas, car, aussi bien, et pour vingt raisons l’eût-il voulu, qu’il ne le pouvait pas. Mais, au Napoléon de M. Taine, puisqu’il le trouvait faux, et aussi peu conforme à la nature qu’à l’histoire, il pouvait, et nous nous attendions qu’il opposât le sien. En regard des « inventions d’un écrivain dont la passion avait faussé le jugement et obscurci la conscience, — ainsi s’exprime-t-il, — il pouvait rétablir, comme il le promettait dans son Introduction, « l’homme et son œuvre dans leur réalité vivante. » Et dans nos imaginations, où la manière dure et chagrine de M. Taine avait gravé les traits d’un Malatesta ou d’un Sforza moderne.il pouvait enfin substituer, lui, l’héritier du nom et des prétentions dynastiques, la figure du fondateur de la France contemporaine et du dieu même de la guerre. Malheureusement, au lieu de cela c’est à M. Taine lui-même, c’est à sa méthode analytique, c’est aux témoins dont s’autorisait M. Taine que le prince Napoléon a cru devoir s’en prendre, comme un savant dans une académie, qui discuterait sur la valeur ou l’authenticité d’un texte, mais, de plus, avec une liberté de langage et une vivacité de plume qu’en toute autre occasion j’oserais qualifier d’outrageuse.

C’est en effet une condition malheureuse des princes, quand ils nous font l’honneur de discuter avec nous, qu’ils y soient tenus d’une modération, d’une réserve et d’une courtoisie plus grandes encore que les nôtres. On pensera donc unanimement qu’il ne convenait pas au prince Napoléon de traiter M. Taine d’un ton sur lequel M. Taine ne voudrait pas lui répondre, par respect même pour le grand nom qu’on l’accuse d’avoir diffamé. On pensera également qu’il ne lui convenait pas, en parlant de Miot de Mélito, par exemple, ou de tant d’autres serviteurs de l’empire, de paraître ignorer que les princes, eux aussi, demeurent les obligés de ceux qui les ont bien servis. Peut-être même pensera-t-on bien qu’il ne lui convenait pas, en discutant ou en contredisant les Mémoires de Mme de Rémusat, d’oublier sous quels auspices les cendres de l’empereur sont rentrées autrefois dans sa ville de Paris. Mais ce que l’on pensera surtout, c’est qu’il avait autre chose à faire que d’épiloguer sur des témoignages, et beaucoup mieux à dire, quelque chose de plus péremptoire, de plus démonstratif, et de plus littéraire par surcroît, que d’appeler M. Taine des noms d’ « Entomologiste, » de « Matérialiste, » de « Pessimiste, n de « Démolisseur, » d’ « Iconoclaste » et de « Déboulonneur. »

Non pas, sans doute, que M. Taine, et nous l’avons dit plus d’une fois, ici même, avec une entière liberté, s’il a toujours mis beaucoup de patience et de conscience dans la recherche de ses documens, ait toujours mis autant de critique et de discernement dans l’emploi qu’il en faisait. On ne s’explique pas plus qu’il se soit servi dans son Napoléon du témoignage de Bourrienne, par exemple, que naguère, dans sa Révolution de celui de George Duval, ou encore, dans son Ancien régime, de celui du fameux Soulavie. Les documens de M. Taine, en général, ne lui servent point à établir ses raisonnemens ; mais il commence par faire son siège ; et alors il consulte sa bibliothèque, ou il se rend aux Archives, pour y trouver des documens qui corroborent ses raisonnemens. On ne s’explique pas davantage, — et le prince Napoléon a raison encore en ce point, — la facilité véritablement singulière, indifférente et inique à force d’impartialité, dont M. Taine, accueille pour les faire entrer dans l’histoire, les anecdotes les plus invraisemblables, ou les jugemens les plus calomnieux. Qui croira que pour prouver « que jamais homme n’eut moins que Napoléon le sentiment du juste et de l’injuste, » M. Taine ait pu s’adresser à Merlin de Douai? Merlin, l’auteur du décret des suspects; Merlin, le policier qui a continué la Terreur, lui tout seul, jusqu’au 18 brumaire; Merlin, le plus inhumain enfin de ces « grands pourris, » de ces « habitués du pouvoir, » de ces «théoriciens despotiques et sans scrupules » que M. Taine lui-même, dans son précédent volume, avait flétris nominativement! Mais, après cela, il faut bien convenir que, pour en différer, la critique historique du prince Napoléon ne vaut pas beaucoup mieux que celle de M. Taine; que pour l’être d’une autre manière et dans un autre sens, elle n’est pas plus impartiale ni moins passionnée ; — et en voici la preuve.

Le prince Napoléon reproche à M. Taine d’avoir cité « huit fois » les Mémoires de Bourrienne, et, donnant cours à sa rancune, il en prend occasion pour déshonorer cruellement Bourrienne. A-t-il tort? a-t-il raison au fond? Je n’en sais rien, je n’en veux rien savoir, je n’ai pas besoin de le savoir, puisque je sais d’ailleurs que les Mémoires de Bourrienne sont à peine moins apocryphes que les Souvenirs de la marquise de Créqui, par exemple, ou que les Mémoires de M. d’Artagnan. Mais, si ces prétendus Mémoires ne sont pas effectivement de lui, que vient donc faire ici la personne de Bourrienne? et quand l’ancien secrétaire du premier consul, au lieu du concussionnaire éhonté que le prince Napoléon s’attarde inutilement à nous peindre, serait le plus honnête homme du monde, en serait-il plus digne de confiance, étant donné qu’il n’a rien écrit? il suffisait de dire que les Mémoires de Bourrienne sont de Villemarest, comme les Souvenirs de la marquise de Créqui sont de Courchamps, et comme les Mémoires de M. d’Artagnan sont de Courtilz de Sandras.

Après Bourrienne, c’est Mme de Rémusat que le prince Napoléon reproche à M. Taine de n’avoir pas citée moins de vingt et une fois, — il les a comptées, — et il se donne, à ce propos, le malicieux et naturel plaisir d’en appeler de Mme de Rémusat, dans ses Lettres, à Mme de Rémusat, dans ses Mémoires. Le tour est de bonne guerre, peut-être ; mais, quoi ! la question n’en a pas fait un pas. Car elle est de savoir si la vérité se trouve dans les Lettres, ou dans les Mémoires de Mme de Rémusat? Et il se peut qu’elle soit dans les Lettres, mais il se peut aussi qu’elle soit dans les Mémoires. Quand Mme de Rémusat écrivait ses Lettres, de 1802 à 1808, elle était encore sous le charme; quand elle a rédigé ses Mémoires, en 1818, elle n’y était plus; mais quelques sceptiques ne pourront-ils pas dire que c’est alors qu’elle a dû mieux voir, quand les écailles étaient tombées de ses yeux, quand le prestige n’opérait plus, quand le rêve impérial était évanoui? Que Mme de Rémusat eût changé de sentimens, on le savait, et, après tout, c’était son droit : l’empereur avait bien changé de conduite; mais ce qu’il faudrait voir, c’est en quels temps ils furent plus conformes à la vérité, et c’est ce que le prince Napoléon a oublié de rechercher.

Quant aux Mémoires de Miot de Mélito, que le prince Napoléon a compté que M. Taine citait "quatorze fois,» sa grande raison pour en repousser le témoignage et en contester la valeur, c’est, dit-il, que la publication en est due au gendre de l’auteur. M. de Fleischmann, « général allemand très hostile à Napoléon, et qui s’est peut-être laissé dominer par le souvenir de sa conduite en 1813. » On a déjà répondu, voilà vingt ans, au prince Napoléon, que M. de Fleischmann affirmait n’avoir pas mis un mot de lui dans les Mémoires de son beau-père, et que, peut-être. il n’appartenait guère de soupçonner la parole d’un officier wurtembergeois au fils d’une princesse de Wurtemberg et d’un ancien roi de Westphalie. Mais, d’ailleurs, où, en quel endroit des Mémoires, le général de Fleischmann a-t-il montré son « hostilité » contre Napoléon? sur quelles preuves insinue-t-on qu’il s’est « peut-être » laissé dominer par le souvenir de sa conduite en 1813? quelle fut sa conduite en 1813, sinon « peut-être » celle d’un Allemand? et de quel droit enfin l’accuse-t-on ainsi de falsification de textes historiques? C’est ce que ne nous dit point le prince Napoléon. Et, en attendant qu’il l’ait dit, c’est ce qui nous permet d’accorder aux Mémoires de Miot de Mélito la même confiance qu’à tous ceux que le prince Napoléon veut que nous consultions : Bignon, Gandin, La Valette, Champagny, Caulaincourt, — et sans en excepter ceux mêmes de M. X.., dont je ne puis croire qu’il ignore l’auteur.

On pourrait ajouter que ces Mémoires ou ces écrits dont le prince a si longuement discuté, non pas l’autorité, mais uniquement les auteurs, — ce qui est fort loin d’être la même chose, — ne sont pas les seuls dont M. Taine ait invoqué le témoignage; qu’il y en a vingt autres, ceux de Roederer et ceux de Mollien, ceux de Ségur et ceux de Champagny, qu’il y a la Correspondance de Napoléon et le Mémorial de Sainte-Hélène; que tous ces documens concordent en plus de points qu’on ne le laisse entendre avec les Mémoires de Mme de Rémusat et de Miot de Mélito, avec ceux de M. de Metternich et les pamphlets de l’abbé Pradt. Mais, plutôt, laissons de côté ces questions de critique historique, bonnes à remuer dans les écoles ou dans les académies, et venons au fond du sujet. Le prince Napoléon trouve-t-il qu’eu anatomisant la structure mentale du grand homme, et en nous décrivant cet esprit qui, « par sa compréhension et sa plénitude, déborda au-delà de toutes les proportions connues ou même croyables, » M. Taine ait diminué l’idée qu’on doit s’en faire et outragé la mémoire de Napoléon? Ou trouve-t-il vraiment qu’en faisant de Napoléon, « pour la cohérence et la logique interne de son rêve, pour la profondeur de sa méditation, pour la grandeur surhumaine de ses conceptions, » un frère posthume de Michel-Ange et de Dante, et avec eux l’un des trois esprits souverains de la Renaissance italienne, M. laine ait méconnu l’un des plus rares exemplaires qu’il y ait eu de l’homme? Car enfin c’est à peine si M. Thiers en a fait un plus magnifique éloge; le prince Napoléon lui-même, quelque bonne volonté qu’il en eût, n’a rien dit qui le mette plus haut; et si l’on veut des expressions plus fortes, ce n’est pas aux historiens, c’est aux poètes qu’il faut les demander, à Chateaubriand, à Lamartine, à Victor Hugo. Mais une autre comparaison parait avoir surtout blessé le prince Napoléon, et si nous ne saurions, évidemment, lui refuser le droit de s’en blesser, nous avons toutefois, nous, celui de n’y voir que ce que M. Taine y a mis.

« Extraordinaire et supérieur, disait donc M. Taine, fait pour le commandement et la conquête, singulier et d’espèce unique, il faut remonter pour le comprendre jusqu’aux Castruccio Castracani, aux Braccio de Mantoue, aux Piccinino, aux Malatesta de Rimini, aux Sforza de Milan. » Et la comparaison n’était point de lui, mais de Stendhal, — au commencement de son Histoire de la peinture italienne, — et Stendhal est un contemporain que ses fonctions, si je ne me trompe, ont plus d’une fois approché de l’empereur. Veut-on faire là-dessus que les Bonaparte ne soient pas d’origine italienne? ou qu’il soit défendu d’étudier Napoléon dans ses origines? et de rechercher les commencemens de son caractère dans celui de ses ancêtres? Le prince Napoléon n’y consentirait pas un instant, lui, qui nous a si bien montré tout ce que l’empereur tenait de sa mère : « les traits de son visage, ses instincts religieux, sa résolution, ce calme d’âme dans les plus grands périls. » Et qu’est-ce qu’une telle comparaison enfin, résumant et illustrant une semblable recherche, peut avoir de blessant, lorsque l’on pense, comme M. Taine, et qu’on le dit, qu’en aucun temps ni en aucun pays « la plante humaine » n’a été plus forte ou plus belle, n’a poussé de plus vigoureuses ramures ou étendu de plus riches frondaisons, que dans l’Italie de Michel-Ange et de César Borgia, de Jules II et de Machiavel? On peut ne pas aimer ce genre de comparaisons; on peut craindre, — et nous le craignons, — qu’elles n’embrouillent, en le compliquant de tout un appareil de lectures et d’érudition, ce qu’elles ont l’air d’expliquer; on peut ajouter qu’en général, comme Saint-Just est plus connu que « le calife Hakem, » de même Napoléon l’est mieux que Castruccio Castracani; on ne peut pas dire que la comparaison rabaisse Napoléon, encore moins qu’elle soit injurieuse; et, si elle n’explique pas, elle éclaire du moins certains côtés douteux ou obscurs de son génie.

Que manque-t-il donc au Napoléon de M. Taine ? Évidemment, c’est ce que je ne saurais avoir la prétention de dire en quelques lignes, puisque le prince Napoléon, dans tout un livre, ne l’a pas pu. Je pense, toutefois, qu’il lui manque d’abord d’avoir été peint par une autre main que celle de M. Taine, et surtout dans un autre livre que les Origines de la France contemporaine. J’entends par là qu’à mesure que M. Taine avançait dans ce grand ouvrage, la première violence de son st le l’y engageait lui-même, de volume en volume, à de nouvelles violences. Ayant tracé de l’Ancien régime le tableau que l’on sait, — et dont il est bon, en passant, de noter que le prime Napoléon continue de trouver les exagérations parfaitement légitimes, — M. Taine, sans manquer à la plus simple équité, ne pouvait pas se montrer plus indulgent aux crimes de la révolution qu’aux sottises de la monarchie. Mais, après avoir peint la Révolution de la manière trop forte, et avec les couleurs crues et voyantes qu’il y avait employées, comment, sans rompre l’unité de son œuvre, eût-il pu nous représenter l’empire et l’empereur avec des traits plus adoucis et sous un jour plus favorable? C’est pourquoi, si l’on veut avoir sa vraie pensée, il faut, en le lisant, commencer par rabattre la moitié des choses qu’il dit, ou de la manière dont il les dit. Supposé qu’il traitât Louis XV d’Héliogabale, cela signifierait seulement que le royal amant de la Pompadour et de la Du Barry n’a pas respecté la foi conjugale. Pareillement, en qualifiant naguère Danton de Cartouche et de Mandrin, M. Taine ne voulait parler que d’une certaine énergie dans le mal dont ces bandits fameux avaient fait preuve. Et pareillement aujourd’hui, quand il compare Napoléon à César Borgia, comptez que ce Borgia-là n’est dans sa pensée ni le ruffian, ni l’assassin, ni l’empoisonneur de la légende, mais le type accompli du prince de Machiavel, et de ce que les Italiens de la renaissance appelaient du nom étrangement appliqué de Virtu. Par malheur, il n’en est pas moins vrai que si ces gros mois, pour M. Taine, et à mesure qu’il en abusait, ont perdu de leur force, ils l’ont conservée tout entière dans la langue usuelle; qu’avec de pareils procédés, ce que l’on veut ou ce que l’on croit peindre, il nous parait, à nous, lecteurs qu’on le déforme; et que le Napoléon de M. Taine, après sa Révolution, et après son Ancien régime, en est un nouvel et non moins mémorable exemple.

C’est au surplus une idée chère à M. Taine, que le commencement de l’art consisterait, et la formule est de lui, — « dans une altération systématique des rapports réels des choses; » et c’est encore par là que son Napoléon se distingue si profondément de la nature et de la vérité. M Taine n’appuie que sur de certains caractères, auxquels il subordonne tous les autres d’une telle manière, qu’ils en deviennent imperceptibles. Par là, en la supprimant, il se tire de la principale difficulté du portrait historique : c’est de remettre à leur juste place, dans une physionomie, les mille et une contradictions qui en font l’originalité. Tout est plus simple, mais tout est moins vrai; tout est plus un, mais tout est moins réel ; tout est plus fort, mais tout est moins humain. Où est, par exemple, dans son Napoléon, le donneur de batailles, l’homme né pour la guerre, le plus grand capitaine qui fut peut-être jamais, dont l’esprit n’était jamais si lucide qu’au milieu des combats, l’imagination si prompte, et l’invention si féconde? Où est-il, ce vainqueur, dont les souvenirs de gloire, après avoir anéanti celui de ses propres défaites, nous servent encore aujourd’hui de consolation dans les nôtres ? Où est encore ce charmeur, dont toute la France a subi quinze ans la séduction fascinatrice, débris de l’ancien régime et survivans de la Convention, les femmes de sa cour et les grenadiers de sa garde, l’archiduchesse Marie-Louise et le tsar Alexandre? Mais où est encore ce génie puissamment organisateur, dont la main a seule affermi sur ses fondemens l’édifice social à l’abri duquel nous vivons toujours? Oui, je le sais bien, tous ces traits, M. Taine les a indiqués, çà et là, d’un ou deux mots, pour n’y plus revenir, comme il avait fait des services rendus par la Constituante. Mais, par malheur, ils ne frappent pas la vue; pour les trouver, il faut les chercher; et parce qu’ils sont ainsi repousses ou noyés dans l’ombre, les autres en prennent un relief, un éclat, une importance démesurés. Des anecdotes à la Stendhal, une historiette, le récit d’une scène de cour, le dîner d’Alexandrie, le coup de pied de Volney, deviennent des événemens considérables, qui ont l’air, aux yeux de M. Taine, de contre-peser Arcole ou le Code civil. Ou plutôt, ils font plus que de les contre-peser, puisque effectivement ils tiennent plus de place et qu’ils font un plus grand étalage dans une Étude sur Napoléon.

Et il manque encore au Napoléon de M. Taine d’avoir vécu, si je puis ainsi dire, et, comme les autres hommes, d’être situé dans le temps et de s’y être développé. « Napoléon n’est point fait d’une seule pièce. Son caractère s’empreint des idées qu’il reçoit et du milieu dans lequel il vit; son génie natif s’adapte aux circonstances qui le favorisent; il grandit avec sa fortune... Vouloir le juger en bloc, apprécier son caractère en superposant, par un perpétuel anachronisme, ses opinions et ses actes aux diverses époques de sa vie, c’est méconnaître la réalité et c’est fausser l’histoire. » Si les princes pouvaient être sensibles à cette gloriole, je dirais volontiers que l’on ne saurait mieux dire, et le prince Napoléon, dans tout son livre, n’a certainement rien écrit de plus juste ni de plus décisif. Tout ce qu’il est, le Napoléon de M. Taine l’est d’abord, il l’est constamment, il l’est toujours, et toujours le même. C’est en vain que de Brienne à Waterloo, écolier, lieutenant d’artillerie, général d’armée, consul, empereur, il a vécu plusieurs existences d’homme, et c’est en vain que de l’une à l’autre des deux îles, de la Corse à Sainte-Hélène, ayant traversé tous les milieux, nul peut-être n’a vu plus de choses ni manié plus d’hommes, M. Taine, pour le mieux étudier, l’immobilise sur sa table, il l’abstrait de l’espace et du temps, il le ramasse tout entier comme en un point indivisible, et d’un être humain, réel et vivant, il finit par le transformer, si l’on peut ainsi dire, en une proposition ou en un théorème de psychologie physiologique. Mais je suis étonné qu’ayant tant fait jadis pour assimiler ou réduire la critique et l’histoire à l’histoire naturelle, et n’écrivant encore aujourd’hui que « pour les amateurs de zoologie murale et les naturalistes de l’esprit, » M. Taine, dans son Napoléon comme dans sa Révolution, ait semblé faire si peu de cat, de l’évolution, et qu’après Darwin et Hæckel il en demeure toujours à Geoffroy Saint-Hilaire et Cuvier. Car ici, par malheur, la conséquence en est que sa révolution et son Napoléon, fussent-ils vrais à tous autres égards, seraient encore faux, pour n’être pas successifs. Ce que Napoléon pouvait être à seize ans, il ne l’était plus à trente ou quarante ans; mais, consul ou empereur, il était devenu ce que n’était point l’écolier de Brienne; et, pour montrer d’un seul mot l’importance de la distinction, le Corse était devenu Français.

Ce n’est certes pas nous qui refuserons d’admettre avec M. Taine que nos rois « se sentaient chargés d’une vie plus longue et plus grande que leur propre vie ; » qu’ils « regardaient au-delà d’eux-mêmes aussi loin que leur vue pouvait porter; » qu’en dehors d’eux « il y avait pour eux une chose réelle, solide et d’importance supérieure, à savoir l’état. » Nous ajouterons même qu’ils ne le sentaient jamais si bien, tout au rebours de ce que l’on croit, que lorsqu’ils identifiaient, comme Henri IV ou comme Louis XIV, cette « chose réelle » avec eux. Mais, ils l’eussent voulu, qu’ils n’eussent pas pu s’en détacher; et Napoléon, devenu chef d’état, ne l’a pas pu ni voulu plus qu’eux. S’il était Corse encore à Brienne, un étranger parmi ses camarades; et dans la confusion révolutionnaire, à Toulon, à l’armée d’Italie, jusqu’en Égypte peut-être, s’il n’était « qu’un officier de fortune, qui ne songe qu’à son avancement,» il est devenu Français en même temps que la France devenait sienne, et son ambition a fini par se confondre avec un intérêt ultérieur et supérieur à elle-même, comme son amour-propre et son orgueil avec la gloire de sa seconde patrie. Ni le sentiment populaire, ni l’histoire ne s’y étaient mépris, ni surtout l’étranger, juge encore plus sûr de ce qu’un homme a fait pour la France, parce qu’il le mesure à la diminution de pouvoir qu’il en a ressentie. Et comme l’étranger, comme l’histoire, comme le sentiment populaire, M. Taine aussi l’aurait vu, si, moins préoccupé de retrouver dans Napoléon ses Piccinino et ses Malatesta; « aventuriers militaires, usurpateurs et fondateurs d’états viagers, » il eût seulement distingué les époques avec plus d’exactitude, et, puisqu’il faisait de l’histoire, s’il eût un peu plus respecté la chronologie. Faut-il aller plus loin? et, avec le prince Napoléon, faut-il aussi lui reprocher d’avoir méconnu le génie pacifique de l’empereur? Voilà bien au moins la découverte la plus étrange, plus singulière elle toute seule que toutes celles de M. Taine, et nous aurons besoin d’un peu de temps pour nous y faire. « La paix en 1805, dit le prince Napoléon, la paix en 1807, la paix en 1809, la paix en 1812, la paix en 1813, qui donc la désire plus que lui? » Qui ? mais ses ennemis d’abord, puis ses peuples ensuite, et enfin ses maréchaux, — pour ne rien dire de ses frères. On « accepte » la paix quand on est chef d’empire, et on la propose au besoin, pour mieux se préparer à de nouvelles guerres ; on ne la « désire à point, et surtout on ne l’aime pas quand on respire dans les combats comme dans son élément naturel. La guerre, qui fut pour de très grands peuples une industrie nationale, était pour un Napoléon le jeu normal et le fonctionnement naturel de son activité. Comment d’ailleurs, en le dépouillant de « cette gigantesque ambition, » et de « cette soif de domination, » dont la passion de la guerre était la cause bien plus que l’effet, le prince Napoléon ne s’est-il pas aperçu qu’il était à son oncle les raisons mêmes de vivre? Et comment n’a-t-il pas vu qu’à nous, qui ne sommes pas tellement dégénérés de nos pères, ce qu’il enlevait en même temps, c’était la raison des honneurs ou du culte national que nous rendons encore à la mémoire de Napoléon? Car les hommes sont ainsi faits que ce que nous aimons en ces victoires dont le prince évoque le nom glorieux, Arcole, Rivoli, Marengo, Austerlitz, Iéna, Friedland, Burgos, Espinosa, Somo-Sierra, c’est le témoignage de notre ambition conquérante et des sacrifices que nous avons été capables de lui faire; ce sont ces syllabes étrangères dont le son caresse notre orgueil en flattant nos oreilles; c’est l’impérissable écho du bruit dont nos armes ont autrefois rempli et étonné le monde. — Mais le prince Napoléon le sait bien; seulement il avait ses raisons pour faire comme s’il l’ignorait; et c’est ici que son livre, dans le seul chapitre qui répondît à ce que l’on attendait, tourne court, et s’achève piteusement en manifeste.

Il ne nous appartient pas de le suivre sur ce terrain. Mais quand il s’efforce de confondre la cause de Napoléon avec la cause de la révolution même et de la France contemporaine, nous pouvons faire, au point de vue de l’histoire, deux remarques de quelque importance. La première, c’est que, les opinions de M. Taine sur la révolution étant assez connues, vu qu’elles ont fait assez de bruit, on ne fait rien contre M. Taine, ou plutôt on fait pour lui, quand on confond la cause de l’empire et de l’empereur avec celle de la révolution. Si M. Taine, selon le mot célèbre, n’a voulu voir dans Napoléon qu’un « Robespierre à cheval, » ce n’est pas, comme fait le prince, en mettant ce Robespierre à pied, qu’on lui rendra M. Taine plus indulgent ou plus équitable. Puisque la révolution, toujours d’après M. Taine, — et uniquement d’après lui, — n’a causé que des maux à la France, quelle reconnaissance veut-on que M. Taine ait pour l’homme qui, d’inflammatoires qu’ils étaient, les auraient rendus chroniques, c’est-à-dire incurables? Et d’autant que l’on prouvera qu’en organisant ce désordre, Napoléon a seul eu la puissance de le faire durer, n’est-ce pas ainsi dans le sens même de M. Taine que l’on abondera?

Quant à la question maintenant de savoir en quelle mesure et jusqu’à quel point M. Taine a tort ou raison dans son paradoxe, il convient peut-être d’attendre, et ce n’est pas sur un fragment de son livre que nous pouvons en décider. Sans doute, jour le moment, à nos yeux comme aux yeux de la plupart des Français, c’est de Napoléon que date la société contemporaine, et, si nous voulions faire une longue énumération de tout ce qu’elle lui doit d’institutions durables, nous le pourrions aussi bien qu’un autre. Nous tiendrions seulement à rappeler que, d’un grand nombre d’elles, Napoléon n’est pas l’unique auteur, mais le plus récent organisateur, et que l’ancien régime, ainsi que la révolution, ne laissent pas d’y avoir une large part à revendiquer. C’est à la Constituante qu’il faut faire honneur, si l’on pense qu’il y en ait lieu, de la description administrative du sol national, et, conséquemment, de l’organisation à laquelle plus tard ce tracé même a servi de cadre. C’est à la Convention, on le sait, qu’il faut faire honneur d’avoir posé les principes et fixé les grandes lignes du Code civil, et les Berlier, les Thibaudeau, les Merlin, les Treilhard, les Cambacérès, avant d’être tribuns ou conseillers d’état, ont commencé par être autant de conventionnels. On sait moins que le Code de procédure contient encore aujourd’hui la substance de l’Ordonnance de 1670, et qu’il n’est pas jusqu’à la législation abhorrée de la Ferme dont les dispositions techniques ne régissent toujours notre matière des contributions indirectes. L’empire n’a pas tout fait, tout tiré du néant; et l’empereur, comme il avait trop de sens pratique et politique pour essayer de remonter le cours de la révolution, portait aussi trop haut le sentiment de la solidarité française pour ne pas utiliser tout ce que l’ancien régime, en tombant, léguait au nouveau. Ce sont deux choses dont la première fait un peu défaut à M. Taine, et la seconde au prince Napoléon. Mais, après tout cela, ce qu’il s’agit de savoir, c’est ce que ce nouveau régime contient lui-même en soi d’élémens de durée; c’est la question que s’est posée M. Taine; et c’est la réponse que nous devons attendre de son dernier volume.

Il disait, en effet, dans son Étude sur Napoléon, et c’en étaient même les dernières lignes ou la conclusion : « Telle est l’œuvre de Napoléon : dans sa bâtisse européenne comme dans sa bâtisse française, l’égoïsme souverain a introduit un vice de construction. Dès les premiers jours, ce vice fondamental est manifeste dans l’édifice européen, et il y produit, au bout de quinze ans, l’effondrement brusque : dans l’édifice français, il est aussi grave, quoique moins visible ; on ne le démêlera qu’au bout d’un demi-siècle ou même d’un siècle entier, mais ses effets graduels et lents ne seront pas moins pernicieux et ne sont pas moins sûrs. » Cela veut dire que M. Taine, dans le dernier volume de ses Origines, s’engage à nous montrer, dans la société que nous sommes aujourd’hui, les effets inaperçus de te vice fondamental. Et, en vérité, l’histoire de l’empire ou celle de la révolution sont-elles donc si complètement faites et parfaites, que M. Taine, avec sa ténacité d’observation et sa lenteur puissante, n’y puisse rien découvrir, rien ajouter ou changer à ce que nous en savons ? Ou, d’autre part, la France contemporaine est-elle si sûre de son lendemain, les sociétés modernes tellement confiantes en leur propre durée, que l’on ne puisse pas se demander si les institutions qui les soutiennent depuis quatre-vingts ans ne vont pas s’usant, craquant, et s’effondrant lentement tous les jours. Dans un précédent volume, celui qu’il a intitulé le Gouvernement révolutionnaire, ce que M. Taine a dit du Programme jacobin, de ses lacunes, de ses vices, et de ses chimères, il ne l’aurait pas dit, comme on l’a vu depuis, s’il n’avait eu lui-même son programme plus pratique, plus honnête, et plus complet à y opposer. De même, s’il a parlé, comme l’on sait, de l’œuvre de Napoléon, c’est qu’il se forme une certaine idée de ce qu’elle eût pu ou de ce qu’elle eût dû être, et dans le dernier volume dont cette Étude n’est qu’un fragment, il nous dira ce que le consulat et l’empire, au lieu de ce qu’ils en ont fait, pouvaient faire de la France du XIXe siècle.

Alors, et alors seulement, nous pourrons juger M. Taine à son tour. Car, et c’est ici que l’on n’est pas toujours juste envers lui, ce n’est pas, lui non plus, une Vie de Napoléon, ni une Histoire de la révolution, ni une Histoire de l’ancien régime, que M. Taine s’est proposé d’écrire ; mais ce sont les Origines de la France contemporaine qu’il a voulu démêler dans l’histoire ; et tout le reste n’est que les prémisses ou la préparation de cette conclusion. On ne saurait donc juger ses conclusions avant de les connaître, mais on ne saurait surtout l’enfermer, en quelque sorte malgré lui, dans ses prémisses. Il y a toute une part encore des jugemens de M. Taine sur l’ancien régime, sur la révolution, et sur Napoléon, non pas obscure, mais douteuse pourtant et relative, qui ne deviendra définitive et absolue qu’avec la dernière page du dernier volume de ce grand ouvrage.

On a seulement le droit de trouver que quatre ou cinq gros volumes font peut-être un bien gros appareil pour quelques pages de conclusion, et, sans insister autrement là-dessus, on peut penser, à un autre point de vue, que M. Taine, dans la mesure où il a traité Napoléon, la révolution, et l’ancien régime en eux-mêmes, a manqué de modération et d’impartialité. Car l’impartialité ne consiste pas, comme le semble croire M. Taine, quand on parle de l’ancien régime, à démontrer pourquoi la révolution était inévitable, et, quand on parle de la révolution, à démontrer comment on pouvait tout de même l’éviter. Elle ne consiste pas non plus, s’il est question de Louis XIV, à faire voir que la « vie de cour et de salons, » en énervant l’ancienne France, l’a conduite insensiblement, par un chemin de fleurs. jusqu’aux abimes ; et, s’il est question de Napoléon, à lui reprocher d’avoir rejeté loin de lui cette « charte du savoir-vivre, » et ce « code des bienséances, » et « le plus intime vêtement de la nudité humaine, » et détruit ainsi « l’œuvre suprême de la civilisation. » Mais elle consiste peut-être, selon le mot d’un grand historien, à ne jamais oublier que les hommes extraordinaires, placés par la fortune dans des circonstances extraordinaires, ont droit à une mesure d’indulgence extraordinaire. Elle consiste aussi à se rendre compte qu’en histoire comme ailleurs, il y a des valeurs qui se compensent ou qui s’équivalent, et non pas, assurément,


Qu’un pourceau secouru pèse un monde égorgé,


mais qu’un peu de domination paie un peu de servitude, un peu d’honneur beaucoup de misère, et un peu de gloire des flots de sang. Et elle consiste enfin, quoique « le bon historien ne doive être d’aucun temps ni d’aucun pays, » à se rappeler qu’après tout, Louis XIV et Mirabeau, la Convention et Napoléon, tout cela, c’est ensemble la France, et que la France n’est même que cela. Voyez cependant la justice immanente et l’ironie intérieure des choses ! Cette notion banale et vulgaire de l’impartialité, — à laquelle j’avoue qu’il est aussi difficile de se conformer qu’il est facile de la définir, — pour l’avoir oubliée, le plus froid de nos historiens, et celui qui s’est le plus piqué de science et de philosophie, en a paru, et en est devenu, sans le vouloir, le plus passionné.

Mais au moins ne voudrais-je pas terminer sans louer son courage, et, quand il a cru tenir la vérité, la tranquille et sereine audace avec laquelle il l’a toujours dite. Moins courageux ou plus habile, M. Taine, comme tous les historiens de l’ancien régime, de la révolution et de l’empire, pouvait s’aider et s’appuyer d’une partie de l’opinion contre la colère et l’indignation des deux autres. Il ne l’a pas fait. Après s’être aliéné, s’il en survit du moins quelqu’un, les partisans de l’ancien régime, il n’a pas voulu flatter l’opinion révolutionnaire, et voici qu’après en avoir essuyé les fureurs, c’est à celles des bonapartistes qu’il ne craint pas de se dévouer aujourd’hui. S’il est encore permis de parler comme l’on pense, et de ne vouloir dépendre que de soi-même, sachons-lui eu donc gré, comme d’une preuve ou d’un exemple de désintéressement, assez rare en tout temps, mais surtout de nos jours. Donnons-lui l’éloge, qui n’est pas médiocre, d’avoir toujours mis la sincérité de ses convictions et l’amour de sa vérité au-dessus des approbations populaires, du succès même, et plus d’une fois, peut-être, au-dessus de ses propres inclinations. Et, moins obstinés dans nos préjugés historiques, ajoutons enfin que dans son Napoléon, comme dans sa Révolution, comme dans son Ancien régime, parmi les erreurs, il y a bien des vérités mêlées, des vérités fortes et neuves, des vérités contre lesquelles on ne prévaudra pas.

Car j’admire l’air dont ses contradicteurs, et en particulier le prince Napoléon, veulent bit n lui dire qu’il n’a pas ce qu’il faut pour parler de Napoléon ou de la révolution. Mais qui est-ce qui a ce qu’il faut, alors, pour juger de Napoléon? Frédéric ou Catherine, peut-être, ainsi que le demandait Napoléon lui-même, « ses pairs, » ou, en d’autres termes, ceux qui, nés comme lui pour la guerre et le commandement, ne peuvent que s’admirer eux-mêmes, se justifier, et se glorifier en lui? Et qui est-ce qui jugera de la révolution? Danton sans doute ou Robespierre, c’est-à-dire ceux qui furent la révolution même? Non; ce qui les jugera, c’est l’opinion moyenne; et ce qui fera, ce qui modifiera, ce qui corrigera l’opinion moyenne, ce seront les historiens; et parmi les historiens de ce temps, quoi qu’en ait le prince Napoléon, ce sera M. Taine, pour une large part. Il était bon, d’ailleurs, que le prince Napoléon, avec l’autorité qui lui appartient, essayât de montrer ce qui manquait au Napoléon de M. Taine. On a vu qu’en plus d’un point il l’avait fait avec force, mais en plus d’un point aussi avec moins de succès que de talent. différent en ceci du Napoléon de M. Taine, le sien ressemble beaucoup à celui que nous connaissons tous. Mais ce n’est pas à dire qu’il soit le vrai ; et s’il y a quelques raisons, — dont nous avons tâché d’indiquer les principales, — pour que le Napoléon de M. Taine ne soit pas conforme à l’exacte vérité, il y en a quelques-unes au si pour qu’un esprit de la probité, de la vigueur et de l’éclat de celui de M. Taine, ne se soit pas inutilement appliqué à nous donner un nouveau portrait de cet homme extraordinaire.


F. BRUNETlÈRE.