Rob Roy/01

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Traduction par Albert Montémont.
Ménard (Œuvres de Walter Scott, volume 9p. 71-79).



ROB-ROY



CHAPITRE PREMIER.

L’ENTRETIEN.


En quoi ai-je péché, pour que cette affliction pèse si lourdement sur moi ? Je n’ai plus d’autres fils, et celui-ci même ne m’appartient plus. La malédiction qui m’accable pèse sur ma tête, et t’a changé ainsi… Voyager ? j’enverrai bientôt mon cheval en voyage.
Monsieur Thomas.


Vous m’avez prié, mon cher ami, d’employer quelques-unes de ces heures de loisir que la Providence m’accorde, au déclin de ma vie, à écrire les événements et les peines qui en ont rempli le commencement. Le souvenir de ces aventures, comme vous vous plaisez à les appeler, fait en effet sur moi une impression de plaisir et de peine, accompagnée d’un vif sentiment de reconnaissance et de vénération pour le souverain Régulateur des choses, qui a guidé mes premiers pas au milieu de dangers et de fatigues dont le souvenir et le contraste me rendent encore plus doux le bonheur qui s’attache à la fin de ma vie. Je dois croire aussi, comme vous me l’avez souvent affirmé, que les événements qui m’arrivèrent au milieu d’un peuple si remarquable par ses mœurs primitives auront quelque charme et quelque intérêt pour ceux qui aiment à écouter les récits d’un vieillard sur les temps passés.

Cependant vous devez songer que les récits faits par un ami à un ami perdent la moitié de leurs charmes quand ils sont confiés au papier, et que les histoires où vous trouviez de l’intérêt, quand elles vous étaient racontées par celui-là même qui y avait assisté, vous sembleront bien moins dignes d’attention quand vous les lirez seul dans votre cabinet. Mais votre santé robuste, votre âge moins avancé, annoncent selon les probabilités humaines, que vous survivrez à votre ami. Jetez donc ces souvenirs dans quelque tiroir secret de votre bureau, jusqu’à ce que nous soyons séparés l’un de l’autre par un événement qui peut arriver à chaque instant, et qui doit arriver avant peu, avant très-peu d’années. Quand nous nous serons quittés dans ce monde pour nous retrouver, je l’espère, dans un monde meilleur, vous chérirez, j’en suis sûr, plus qu’elle ne le mérite, la mémoire de l’ami que vous aurez perdu, et vous trouverez dans les détails que je confie maintenant au papier, un sujet de réflexions mélancoliques qui ne seront pas sans charmes. D’autres lèguent à leur ami la représentation de leur visage, moi je remets entre vos mains l’exposition fidèle de mes sentiments, de mes vertus et de mes défauts, dans la ferme espérance que les folies et la fougue de ma jeunesse trouveront en vous la même indulgence, la même disposition à les excuser, que vous avez souvent montrée pour les fautes de mon âge mûr.

Un des avantages, entre autres, d’adresser les mémoires (si je puis donner à ces feuilles un nom aussi imposant) à un ami chéri, c’est que je puis éviter quelques détails inutiles pour lui, et qui, indispensables pour un étranger, l’eussent distrait de ce qui offre le plus d’intérêt. Faudrait-il vous accabler d’ennui parce que vous êtes disposé à me lire et que j’ai devant moi de l’encre, du papier et du temps ? Et cependant je n’ose vous promettre de ne pas abuser de l’occasion si favorable qui m’est offerte de parler de moi et de ce qui me touche, même dans les choses que vous connaissez aussi bien que moi. Le charme, de raconter, quand nous sommes nous-mêmes les héros du récit, nous fait souvent oublier ce que nous devons à la patience de ceux qui nous écoutent, et les plus sages ont cédé à cette séduction. Je vous en citerai pour tout exemple cette édition originale, si rare, des Mémoires de Sully, qu’avec l’orgueil d’un bibliomane, vous mettez au-dessus de celle où les mémoires ont été rendus à la forme ordinaire, mais que moi je regarde comme fort curieuse, par cela seul qu’elle nous montre jusqu’à quel point de faiblesse un aussi grand homme fut accessible au sentiment de son importance personnelle. Si ma mémoire ne me trompe, ce grand homme d’état n’avait pas désigné moins de quatre gentilshommes de sa maison pour enregistrer tous les événements de sa vie, sous le titre de Mémorial des sages et royales affaires d’État, domestiques, politiques et militaires, faites par Henry IV, etc. Ces graves historiographes, ayant achevé leur compilation, réduisirent tous les événements remarquables de la vie de leur maître, en un récit adressé à lui-même, in propria persona. Ainsi, au lieu de raconter sa propre histoire à la troisième personne, comme Jules César, ou à la première, comme presque tous ceux qui se font les héros de leurs récits, Sully jouit du plaisir raffiné, mais bizarre, de se faire raconter son histoire par ses secrétaires, étant ainsi l’auditeur aussi bien que le héros, et probablement l’auteur de l’ouvrage. Ce doit avoir été un fort beau spectacle que l’ex-ministre, roide dans sa fraise empesée et son justaucorps galonné, assis pompeusement sous un dais, écoutant le récit de ses historiographes, qui, debout et découverts devant lui, lui disaient gravement : « Ainsi parla le duc… Ainsi conclut le duc… Tel était le sentiment de Votre Seigneurie sur ce point… Tels étaient les secrets conseils qu’elle donnait au roi en cette autre occasion : » toutes choses bien mieux connues sans doute de leur auditeur que d’eux-mêmes, et dont la plupart n’avaient pu leur être transmises que par lui.

Ma position n’est pas aussi plaisante que celle du grand Sully, et cependant il y aurait quelque chose de bizarre à voir Frank Osbaldistone donner à William Tresham des détails minutieux sur sa naissance, sa famille et son éducation. Je lutterai donc, du mieux que je pourrai, avec l’esprit tentateur du clerc de notre paroisse, et je tâcherai de ne rien vous dire de ce qui vous est déjà connu. Cependant je dois vous rappeler certaines choses, parce que, bien que vous les ayez sues, le temps peut les avoir effacées de votre mémoire, et qu’elles sont le fond de ma destinée.

Vous devez vous rappeler mon père, car le vôtre étant son associé, vous l’avez connu dès votre enfance. Cependant vous l’avez à peine vu dans son bon temps, avant que l’âge et les infirmités eussent éteint cet esprit ardent qu’il portait dans ses spéculations et ses entreprises. Il eût été plus pauvre sans doute, mais non moins heureux, s’il eût consacré aux progrès des sciences ces facultés si énergiques, cette puissance d’observation, qui se développèrent dans le commerce. Dans les fluctuations des spéculations commerciales, il y a quelque chose qui captive les esprits hasardeux, indépendamment de l’espoir du gain. Celui qui s’embarque sur cette mer incertaine doit avoir l’adresse du pilote et le courage du navigateur ; et avec ces qualités même il pourra échouer ou se perdre si le souffle de la fortune ne lui est favorable. Cette alliance de prévoyances nécessaires et de hasards inévitables, la terrible incertitude si la prudence triomphera de la fortune, ou si la fortune renversera les projets de la prudence, donnent une occupation suffisante à l’énergie comme aux sentiments de l’homme, et le commerce a tout l’attrait du jeu sans en avoir l’immoralité.

Au commencement du dix-huitième siècle, quand (Dieu m’est en aide !) j’étais un jeune homme de vingt ans, je fus tout à coup rappelé de Bordeaux pour servir mon père dans une affaire importante. Je n’oublierai jamais notre première entrevue. Vous savez la manière brève, brusque et sévère dont il faisait connaître ses volontés à ceux qui l’entouraient. Il me semble le voir encore, la tête droite et ferme, la démarche vive et résolue, l’œil pénétrant, la figure déjà ridée par les inquiétudes, et entendre ses paroles, dont aucune n’était jamais inutile, prononcées d’une voix souvent rude, mais dont la rudesse était loin d’être passée dans son âme.

À peine descendu de cheval, je courus à l’appartement de mon père. Il s’y promenait alors de l’air calme d’un homme qui délibère avec lui-même, et que ne put troubler la présence d’un fils unique, quoique nous ne nous fussions pas vus depuis quatre ans. Il était bon père, mais sans excès, et une larme ne brilla qu’un instant dans ses yeux.

« Dubourg m’écrit qu’il est content de vous, Frank.

— J’en suis charmé, monsieur…

— Mais, moi, j’ai moins sujet de l’être, » ajouta-t-il en s’asseyant à son bureau.

— J’en suis désolé, monsieur…

Charmé, désolé, Frank, sont des mots qui le plus souvent ne signifient rien. Voici votre dernière lettre. »

Il la prit au milieu de plusieurs autres réunies par un morceau de ficelle rouge, et soigneusement mises en liasse et étiquetées. Là gisait ma pauvre épître sur le sujet le plus intéressant pour moi alors, et dans un style que je croyais capable de toucher, sinon de convaincre ; là, dis-je, elle gisait enfouie au milieu de lettres concernant les différentes affaires dans lesquelles mon père se trouvait chaque jour engagé par son commerce. Je ne puis m’empêcher de sourire en songeant au sentiment de vanité blessée et de dépit avec lequel je regardais ma remontrance qui m’avait, je vous l’assure, coûté quelque peine à composer, quand je la vis tirer d’une liasse de lettres d’avis, de crédit, de tout ce fatras enfin, comme je l’appelais alors, d’une correspondance commerciale. Sans doute, pensais-je, une lettre de cette importance (je n’osais pas me dire aussi bien écrite) méritait une place à part, et une plus sérieuse attention que celles qui ne traitent que des affaires courantes d’une maison de banque.

Mon père ne remarqua point ma mauvaise humeur ; l’eût-il remarquée, il n’en eût rien dit. Il continua, ma lettre à la main : « Voici la vôtre, Frank, du 21 du mois dernier, dans laquelle vous me donnez avis (ici il lisait ma lettre) que, dans l’importante affaire de tracer un plan et de choisir une profession pour votre vie, vous espérez que ma bonté paternelle vous laissera au moins le droit de refus ; que vous avez des objections insurmontables ; oui, insurmontables, c’est bien le mot : je vous engagerai en passant à écrire d’une manière plus lisible, à barrer vos t et à ouvrir davantage les crochets de vos s, ;… des objections insurmontables à l’arrangement que je vous ai proposé !… Puis vous développez cela en quatre pages, et avec un peu plus de précision vous l’eussiez renfermé en quelques lignes ; car tout revient à ceci, que vous ne voulez pas faire ce que je veux.

— C’est-à-dire que je ne le puis faire pour le moment, mais non que je ne veux pas.

— Ces mots ont peu de poids auprès de moi, jeune homme, dit mon père, à qui son inflexibilité donnait toujours l’air du plus grand calme. Ne pas pouvoir est plus poli que ne pas vouloir ; mais ces expressions sont synonymes quand il n’y a pas d’impossibilité morale. Du reste, je n’aime point à traiter les affaires avec précipitation ; nous reprendrons ce sujet après dîner ?… Owen ! »

Owen parut, non pas avec ces cheveux d’un blanc d’argent que vous vénériez, car il n’avait guère alors que cinquante ans ; mais il portait les mêmes culottes brun clair, ou d’autres exactement semblables ; les mêmes bas de soie gris de perle, le même col avec sa boucle d’argent, les mêmes manchettes en batiste plissées qui s’avançaient sur ses mains quand il était dans le salon, mais que dans son bureau il repliait soigneusement sous ses manches pour éviter les taches d’encre ; enfin la même physionomie grave, ponctuelle, et cependant bienveillante, qui distingua jusqu’à sa mort le premier commis de la célèbre maison Osbaldistone et Tresham.

« Owen, » dit mon père quand le vieux commis m’eut serré amicalement la main, « vous dînerez aujourd’hui avec nous, pour apprendre les nouvelles que Frank nous apporte de nos amis de Bordeaux. »

Owen fit un de ces saluts empesés de respectueuse gratitude ; car, dans ce temps où la distance qui sépare les inférieurs de leurs supérieurs, était observée avec une rigidité qui n’est plus de notre époque, une pareille invitation était une faveur remarquable.

Je me rappellerai longtemps ce dîner. Profondément affecté par un sentiment d’inquiétude et de dépit, j’étais incapable de prendre à la conversation une part aussi active que mon père semblait l’espérer, et je répondis souvent d’une manière peu satisfaisante aux questions multipliées qu’il m’adressait. Owen, partagé entre son respect pour son patron et son amitié pour le jeune homme qu’il avait si souvent fait danser sur ses genoux ; Owen, avec le zèle timide de l’allié d’un pays envahi, s’efforçait, à chaque bévue où je tombais, d’expliquer mon erreur et de couvrir ma retraite ; ce qui, au lieu de me servir, ajouta encore au dépit de mon père, et en fit retomber une partie sur mon officieux défenseur. Dans la maison de Dubourg, je ne m’étais pas absolument conduit comme ce commis,


Qui, de l’œil paternel, trompant la vigilance,
Rédigeait un couplet au lieu d’une quittance ;


mais, à parler franchement, je n’avais été assidu au bureau que tout juste autant qu’il était nécessaire pour qu’il fût fait de bons rapports sur moi par ce Français, ancien correspondant de notre maison, à qui mon père m’avait confié pour m’initier aux mystères du commerce. Dans le fait, je m’étais adonné presque exclusivement à la littérature et aux exercices du corps. Mon père ne pouvait désapprouver complètement les talents qu’on peut acquérir sous ces deux rapports. Il avait trop de bon sens pour ne pas savoir qu’ils conviennent à tout le monde, et il était bien aise qu’ils vinssent ajouter du relief et de la dignité à la profession qu’il désirait me voir embrasser. Mais son ambition était avant tout que je lui succédasse, non seulement dans sa fortune, mais dans les plans et les idées par lesquels il imaginait que pouvait s’accroître et se perpétuer le riche héritage qu’il me destinait.

L’amour de sa profession était le motif sur lequel il s’appuyait le plus pour me presser d’embrasser la même carrière ; mais il en avait d’autres que je ne connus que plus tard. Aussi ardent qu’habile et hardi dans ses projets, chaque succès l’excitait à tenter une nouvelle spéculation, et lui donnait les moyens de le faire. On eût dit qu’il lui était nécessaire, comme à un ambitieux conquérant, de s’avancer d’entreprise en entreprise, sans s’arrêter à assurer ce qu’il avait acquis, encore moins à en jouir. Habitué à voir toute sa fortune dans la balance du hasard, habile à saisir les occasions de la faire pencher en sa faveur, sa santé, son activité, son ardeur paraissaient s’accroître encore par les chances même qui lui paraissaient défavorables ; il ressemblait au matelot, accoutumé à braver la mer et l’ennemi, dont le courage augmente la veille d’une tempête ou d’une bataille.

Il songeait toutefois aux dérangements que la vieillesse et les maladies pouvaient apporter à sa santé ; et il souhaitait vivement de s’assurer en moi un aide à qui ses mains fatiguées pussent remettre le gouvernail, et capable de conduire le vaisseau d’après ses conseils et ses instructions. L’amour paternel et la poursuite de ses plans lui dictaient la même détermination. Votre père, quoique toute sa fortune fût placée dans la maison, n’était qu’un associé commanditaire, comme disent les négociants ; la probité d’Owen et son habileté dans les détails du calcul, rendaient ses services inestimables comme premier commis ; mais il n’avait ni les connaissances ni les talents nécessaires pour se tirer des embarras de la direction générale. Si mon père venait à mourir tout à coup, que deviendrait cette foule de projets qu’il avait conçus, à moins que son fils, taillé en Hercule commercial, ne fût capable de porter le fardeau, quand l’Atlas défaillant le laisserait tomber ? Que deviendrait son fils lui-même, si, étranger aux affaires de ce genre, il se trouvait subitement engagé dans ce labyrinthe sans en connaître les détours, et privé du fil précieux qui pourrait l’aider à en sortir ? Par ces motifs, et par d’autres dont il ne me parla pas, mon père avait donc décidé de me lancer dans cette carrière. J’aurais dû pourtant, ce me semble, être consulté ; car, presque aussi opiniâtre que lui, j’avais pris une détermination tout à fait contraire.

On admettra, j’espère, comme excuse de la résistance qu’en cette occasion j’opposai aux desseins de mon père, que je ne comprenais pas nettement sur quoi ils étaient fondés, ni comment, tout son bonheur dépendait de leur accomplissement. Me croyant sûr de posséder un jour une immense fortune, et assez riche pour le moment, je n’avais de ma vie songé qu’il fallût, pour la recueillir, m’astreindre à un travail, à des gênes qui n’étaient ni dans mon goût, ni dans mon caractère. Je m’imaginais, lorsque mon père me proposa d’entrer dans le commerce, qu’il désirait que j’augmentasse encore les trésors par lui amassés ; et pensant être meilleur juge que lui des moyens qui me conduiraient au bonheur, je ne concevais pas comment j’accroîtrais ce bonheur en ajoutant à une fortune qui me semblait déjà suffisante, plus que suffisante même pour les besoins, les plaisirs et les jouissances de la vie.

Je dois donc répéter que je n’avais pas employé mon temps à Bordeaux comme l’eût souhaité mon père. Le but principal, selon lui, de mon séjour dans cette ville n’avait été que secondaire pour moi, et je l’aurais négligé tout-à-fait, si j’eusse osé. Dubourg, correspondant privilégié de notre maison, ce qui lui valait de bons profits, était trop habile politique pour faire au chef de la maison, sur son unique enfant, des rapports qui auraient mécontenté le fils et le père ; il se pouvait même, comme vous l’allez voir, qu’il voulût servir ses propres intérêts en me laissant négliger les occupations que mon père, en m’envoyant auprès de lui, avait principalement en vue. Ma conduite était sage et régulière ; il ne pouvait donc, en admettant qu’il y fût disposé, rendre mauvais compte de moi ; mais peut-être le rusé Français n’eût-il pas été moins complaisant, si j’eusse été sujet à des vices pires que la paresse et que l’aversion pour les affaires de commerce ; aussi, pourvu que je consacrasse une partie raisonnable de mon temps aux spéculations commerciales, il me laissait volontiers consacrer l’autre à des études plus classiques, et ne se fâchait jamais en me voyant occupé de la lecture de Corneille et de Boileau, au lieu d’étudier quelque écrivain commercial tel que Savary ou Postlethwayte, supposé que le pesant in-folio de ce dernier existât de ce temps et que M. Dubourg fût capable de prononcer ce nom. Il terminait toutes ses lettres à son correspondant par une formule aussi adroite que courte : « J’étais, disait-il, tout ce qu’un père peut désirer. »

Jamais mon père ne se fâchait pour une phrase, fût-elle mille fois répétée, pourvu qu’elle fût claire et précise ; Addison lui-même n’eût pas trouvé d’expressions capables de les satisfaire plus que celles-ci : « Au reçu de votre honorée lettre… Ayant fait honneur aux billets inclus, etc. »

Sachant donc fort bien ce qu’il désirait faire de moi, M. Osbaldistone ne doutait plus, d’après la phrase favorite de Dubourg, que je ne fusse tel qu’il souhaitait de me voir, quand, jour de douleur ! il reçut la lettre dans laquelle, après de longues et éloquentes excuses, je refusais l’emploi, le pupitre et le tabouret qui m’étaient destinés dans un coin du cabinet obscur de Crane-Alley, pupitre et tabouret qui, plus élevés que ceux d’Owen et des autres commis, ne le cédaient qu’au trépied de mon père lui-même. Dès ce moment tout alla mal, les lettres de Dubourg devinrent aussi suspectes que s’il eût laissé protester ses lettres de change ; je fus rappelé à Londres : quant à l’accueil qu’on m’y fit, je vous l’ai déjà raconté.