Sur le canal du Languedoc, pour la jonction des deux mers

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Sur le canal du Languedoc, pour la jonction des deux mers
Poésies diverses, Texte établi par Charles Marty-LaveauxHachettetome X (p. 231-232).

LXXIII

Sur le canal du Languedoc, pour la jonction des deux mers.
Imitation.

Ce titre est celui que Granet a donné à cette pièce à la page 43 des Œuvres diverses. Lorsqu’en 1668 elle a paru pour la première fois à la page 8 de l’édition originale des vers intitulés : Au Roy, sur sa conqueste de la Franche-Comté (voyez ci-dessus, p. 223, notice), elle suivait la pièce latine que nous donnons en note[1] et était seulement intitulée : Imitation. Elle parut de nouveau, en 1669, à la suite de la seconde édition des Victoires du Roi (notre pièce LXIX) ; et encore, en 1681, dans la Relation de L’État du canal royal de communication des mers en Languedoc, avec la vérification qui en a été faite par ordre de Sa Majesté, Beziers, Henri Martel, 1681, in-8o. La pièce latine a sans doute été composée en 1666, époque où le canal fut décrété. On trouve dans un manuscrit de l’Arsenal qui porte le no HF 191 bis et la date de 1689 (voyez ci-après la Notice de la pièce LXXXVII) une assez mauvaise copie intitulée : Vers latins et françois sur le canal de la jonction des deux mers l’Océan et la Méditerranée.


La Garonne et l’Atax dans leurs grottes profondes

Soupiroient de tout temps pour voir unir leurs ondes[2],
Et faire ainsi couler par un heureux penchant
Les trésors de l’aurore aux rives du couchant ;
Mais à des vœux si doux, à des flammes si belles, 5
La Nature, attachée à ses lois éternelles,
Pour obstacle invincible opposoit fièrement
Des monts et des rochers l’affreux enchaînement.
France, ton grand Roi parle, et ces rochers se fendent,
La terre ouvre son sein, les plus hauts monts descendent :10
Tout cède ; et l’eau qui suit les passages ouverts
Le fait voir tout-puissant sur la terre et les mers.


  1. In junctionem utriusque maris epigraphe.

    Ne daret optanti dudum oscula grata Garumnæ
    Mitis Atax, et aquis per mutua jura refusis
    Exuvias utriusque maris concluderet uno
    Flumine, et hesperium pelagus misceret eoo,
    Obstabat Natura, suis obnoxia semper
    Legibus, æternos non ausa revellere fines ;
    Sed Divum Lodoïcus amor, dispendia longi
    Circuitus, victrice manu, jussuque potenti
    Amputat : obsequitur supplex Natura, superbi

    Decrescunt montes, ultroque incilia replet
    Unda sequax, refluoque aperit commercia cursu.
    Sic præstant elementa fidem, promptoque futurum
    Obsequio agnoscunt terræque marisque potentem.

    I, Parisot, in Senatu tolosano causarum patronus.

    Granet a placé après la pièce de notre auteur une

    Traduction des vers de Corneille, par le P. Cleric *, jésuite.

    Dudum mitis Atax antrisque Garumna profundis
    Ardebant thalamo lymphas sooiare jugali,
    Scilicet ut junctis tandem feliciter undis
    Littus ad occiduum gazæ veherentur eoæ ;
    Talibus at votis ac talibus ignibus obstans,
    Æternamque sequens legem, Natura superbis
    Fluctibus objecit magnos longo ordine montes,
    Immensosque operi scopulos, rupesque cavandas.
    Gallia ! vix jussit Lodoix, et saxa dehiscunt,
    Terra sinus aperit, procumbunt vertice montes,
    Cedunt cuncta, subit defossos unda cauales,
    Terrarumque simul monstrat mariumque potentem.

     * Le P. Pierre Cleric, né à Béziers en 1622, mort à Toulouse en 1740, professa pendant vingt-deux ans la rhétorique dans cette dernière ville. Il est auteur de divers ouvrages en prose et en vers couronnés par l’Académie des Jeux Floraux.

  2. La copie de l’Arsenal donne : « pour marier leurs ondes. »