Théorie analytique de la chaleur/Chapitre 4

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Firmin Didot (p. Ch. IV.-339).

CHAPITRE IV.
DU MOUVEMENT LINÉAIRE ET VARIÉ DE LA CHALEUR
DANS UNE ARMILLE.
Séparateur

SECTION PREMIÈRE.

Solution générale de la question.

238.

Léquation qui exprime le mouvement de la chaleur dans une armille a été rapportée dans l’article 105 ; elle est


Il s’agit maintenant d’intégrer cette équation, on écrira seulement la valeur de représentera celle de sera désigne la longueur de l’arc compris entre un point m de l’anneau et l’origine o, est la température que l’on observerait en ce point m après un temps donné On supposera d’abord , étant une nouvelle indéterminée, on en tirera or cette dernière équation convient au cas où l’irradiation serait nulle à la surface, puisqu’on la déduirait de la précédente en y faisant on conclut de là que les différents points de l’anneau se refroidissent successivement, par l’action du milieu, sans que cette circonstance trouble en aucune manière la loi de la distribution de la chaleur. En effet, en intégrant l’équation on trouverait les valeurs de qui répondent aux différents points de l’anneau dans un même instant, et l’on connaîtrait quel serait l’état du solide si la chaleur s’y propageait sans qu’il y eût aucune déperdition à la surface ; pour déterminer ensuite quel aurait été l’état du solide au même instant, si cette déperdition eût eu lieu, il suffirait de multiplier toutes les valeurs de prises pour les divers points, et pour un même instant, par une même fraction qui est Ainsi le refroidissement qui s’opère à la surface ne change point la loi de la distribution de la chaleur ; il en résulte seulement que la température de chaque point est moindre qu’elle n’eut été sans cette circonstance, et elle diminue pour cette cause proportionnellement aux puissances successives de la fraction

239.

La question étant réduite à intégrer l’équation on cherchera, en premier lieu, les valeurs particulières les plus simples que l’on puisse attribuer à la variable on en composera ensuite une valeur générale, et l’on démontrera que cette valeur est aussi étendue que l’intégrale qui contient une fonction arbitraire en ou plutôt qu’elle est cette intégrale elle-même, mise sous la forme qu’exige la question, en sorte qu’il ne peut y avoir aucune solution différente.

On remarquera d’abord que l’équation est satisfaite si l’on donne à la valeur particulière et étant assujétis à la condition On prendra donc pour une valeur particulière de la fonction Pour que cette valeur de convienne à la question, il faut qu’elle ne change point lorsque la distance est augmentée de la quantité désignant le rayon moyen de l’anneau. Donc doit être un multiple de la circonférence ce qui donne On peut prendre pour un nombre entier quelconque ; on le supposera toujours positif parce que, s’il était négatif, il suffirait de changer dans la valeur le signe du coëfficient Cette valeur particulière ne pourrait satisfaire à la question proposée qu’autant qu’elle représenterait l’état initial du solide. Or en faisant on trouve supposons donc que les valeurs initiales de soient exprimées en effet par c’est-à-dire que les températures primitives des différents points soient proportionnelles aux sinus des angles compris entre les rayons qui passent par ces points et celui qui passe par l’origine, le mouvement de la chaleur dans l’intérieur de l’anneau sera exactement représenté par l’équation et si l’on a égard à la déperdition de la chaleur par la surface, on trouvera Dans le cas dont il s’agit, qui est le plus simple de tous ceux que l’on puisse concevoir, les températures variables conservent leurs rapports primitifs, et celle d’un point quelconque diminue comme les puissances successives d’une fraction qui est la même pour tous les points.

On remarquera les mêmes propriétés si l’on suppose que les températures initiales sont proportionnelles au sinus du double de l’arc et cela a lieu en général lorsque les températures données sont représentées par étant un nombre entier quelconque.

On arrivera aux mêmes conséquences, en prenant pour valeur particulière de la quantité on a aussi et donc l’équation


exprimera le mouvement de la chaleur dans l’intérieur de l’anneau si les températures initiales sont représentées par


Dans tous ces cas, où les températures données sont proportionnelles aux sinus ou aux cosinus d’un multiple de l’arc les rapports établis entre ces températures subsistent continuellement pendant la durée infinie du refroidissement. Il en serait de même si les températures initiales étaient représentées par la fonction étant un nombre entier, et des coëfficients quelconques.

240.

Venons maintenant au cas général dans lequel les températures initiales n’ont point les rapports que l’on vient de supposer, mais sont représentées par une fonction quelconque Donnons à cette fonction la forme en sorte qu’on ait et concevons que la fonction est décomposée en une série de sinus ou de cosinus d’arcs multiples affectés de coëfficients convenables. On posera l’équation


Les nombres sont regardés comme connus et calculés d’avance. Il est visible que la valeur de sera alors représentée par l’équation :


En effet, 1o  cette valeur de satisfera à l’équation

parce qu’elle est la somme de plusieurs valeurs particulières ;

2o  elle ne changera point lorsqu’on augmentera la distance d’un multiple quelconque de la circonférence de l’anneau ; 3o  elle satisfera à l’état initial, parce qu’en faisant , on trouvera l’équation Donc toutes les conditions de la question seront remplies, et il ne restera plus qu’à multiplier par cette valeur de

241.

À mesure que le temps augmente, chacun des termes qui compose la valeur de devient de plus en plus petit ; le système des températures tend donc continuellement à se confondre avec l’état régulier et constant dans lequel la différence de la température a la constante est représentée par . Ainsi les valeurs particulières que nous avons considérées précédemment, et dont nous composons la valeur générale, tirent leur origine de la question elle-même. Chacune d’elles représente un état élémentaire qui peut subsister de lui-même dès qu’on le suppose formé ; ces valeurs ont une relation naturelle et nécessaire avec les propriétés physiques de la chaleur.

Pour déterminer les coëfficients etc. on emploiera l’équation (Π) art. 234, qui a été démontrée dans la dernière section du chapitre précédent.

L’abscisse totale désignée par dans cette équation sera , sera l’abscisse variable, et représentera l’état initial de l’anneau, les intégrales seront prises depuis jusqu’à , on aura donc


Connaissant ainsi les valeurs de , etc. on les substituera dans l’équation, et l’on aura l’équation suivante, qui contient la solution complète de la question


Toutes les intégrales doivent être prises depuis jusqu’à Le premier terme qui sert à former la valeur de est évidemment la température moyenne initiale, c’est-à-dire, celle qu’aurait chaque point si toute la chaleur initiale était également répartie entre tous les points.

242.

On peut appliquer l’équation précédente (E), quelle que soit la forme de la fonction donnée Nous considérerons deux cas particuliers, savoir : 1o  celui qui a lieu lorsque l’anneau ayant été élevé par l’action d’un foyer à des températures permanentes, on supprime tout-à-coup le foyer ; 2o  le cas où la moitié de l’anneau échauffée également dans tous ses points serait réunie subitement à l’autre moitié qui aurait, dans toutes ses parties, la température initiale 0.

On a vu précédemment (art. 106) que les températures permanentes de l’anneau sont exprimées par l’équation et la quantité a pour valeur est le contour de la section génératrice, et la surface de cette section. Si l’on suppose qu’il y ait un seul foyer, il sera nécessaire que l’on ait l’équation au point opposé à celui qui est occupé par le foyer. La condition sera donc satisfaite en ce point. Regardons, pour plus de facilité dans le calcul, la fraction comme égale à l’unité, et prenons le rayon de l’anneau pour le rayon des tables trigonométriques, on aura donc l’état initial de l’anneau est représenté par l’équation


Il ne reste plus qu’à appliquer l’équation générale (E), et en désignant par la chaleur moyenne initiale, on aura


Cette équation exprime l’état variable d’un anneau solide, qui, ayant été échauffé par un de ses points et élevé à des températures stationnaires, se refroidit dans l’air après la suppression du foyer.

243.

Pour faire une seconde application de l’équation générale (E) nous supposerons que la chaleur initiale est tellement distribuée, qu’une moitié de l’anneau comprise depuis jusqu’à a dans tous ses points la température 1 et que l’autre partie a la température 0. Il s’agit de déterminer l’état de l’anneau après un temps écoulé

La fonction qui représente l’état initial est telle dans ce cas que sa valeur est 1 toutes les fois que la variable est comprise entre 0 et Il en résulte que l’on doit supposer et ne prendre les intégrales que depuis jusqu’à les autres parties des intégrales sont nulles d’après l’hypothèse. On obtiendra d’abord l’équation suivante qui donne le développement de la fonction proposée dont la valeur est 1 depuis jusqu’à et nulle depuis jusqu’à a


Si maintenant on substitue dans l’équation générale les valeurs qu’on vient de trouver pour les coëfficients constants, on aura l’équation


qui exprime la loi suivant laquelle varie la température à chaque point de l’anneau, et fait connaître son état après un terme donné, nous nous bornerons aux deux applications précédentes, et nous ajouterons seulement quelques observations sur la solution générale exprimée par l’équation (E)

244.

1o Si l’on suppose infini, l’état de l’anneau sera exprimé ainsi ou désignant par la température moyenne initiale La température d’un point quelconque deviendra subitement égale à la température moyenne et les différents points conserveront toujours des températures égales, ce qui est une conséquence nécessaire de l’hypothèse où l’on admet une conducibilité infinie.

2o On aura le même résultat si le rayon de l’anneau est infiniment petit.

3o Pour trouver la température moyenne de l’anneau après un temps il faut prendre l’intégrale depuis jusqu’à et diviser par En intégrant entre ces limites les différentes parties de la valeur de et supposant ensuite on trouvera que les valeurs totales des intégrales sont nulles excepté pour le premier terme ; la température moyenne a donc pour valeur, après le temps la quantité Ainsi, la température moyenne de l’anneau décroît de la même manière que si la conducibilité était infinie, les variations occasionnées par la propagation de la chaleur dans ce solide n’influent point sur la valeur de cette température.

Dans les trois cas que nous venons de considérer la température décroît proportionnellement aux puissances de la fraction ou, ce qui est la même chose, à l’ordonnée d’une courbe logarithmique, l’abscisse étant égale au temps écoulé. Cette loi est connue depuis long-temps, mais il faut remarquer qu’elle n’a lieu en général que si les corps ont une petite dimension. L’analyse précédente nous apprend que si le diamètre d’un anneau n’est pas très-petit, le refroidissement d’un point déterminé ne serait pas d’abord assujéti à cette loi, il n’en est pas de même de la température moyenne qui décroît toujours proportionnellement aux ordonnées d’une logarithmique. Au reste, il ne faut point perdre de vue que la section génératrice de l’armille est supposée avoir des dimensions assez petites pour que les points de la même section ne diffèrent point sensiblement de température.

4o  Si l’on voulait connaître quelle est la quantité de chaleur qui s’échappe dans un temps donné par la superficie d’une portion donnée de l’anneau, il faudrait employer l’intégrale et prendre cette intégrale entre les limites qui se rapportent au temps. Par exemple, si l’on choisit pour les limites de et pour les limites de c’est-à-dire si l’on veut déterminer toute la quantité de chaleur qui s’échappe de la superficie entière pendant toute la durée du refroidissement, on doit trouver après les intégrations un résultat égal à toute la chaleur initiale, ou étant la température moyenne initiale.

5o  Si l’on veut connaître combien il s’écoule de chaleur dans un temps donné, à travers une section déterminée de l'anneau, il faudra employer l’intégrale en mettant pour la valeur de cette fonction, prise au point dont il s’agit.

245.

6o  La chaleur tend à se distribuer dans l’anneau, suivant une loi qui doit être remarquée. Plus le temps écoulé augmente et plus les termes qui composent la valeur de dans l’équation (E) deviennent petits par rapport à ceux qui les précèdent. Il y a donc une certaine valeur de pour laquelle le mouvement de la chaleur commence à être sensiblement représenté par l’équation


Cette même relation continue à subsister pendant la durée infinie du refroidissement. Si dans cet état on choisit deux points de l’anneau, situés aux deux extrémités d’un même diamètre ; en représentant par et leurs distances respectives à l’origine, par et leurs températures correspondantes au temps on aura


Les sinus des arcs et ne diffèrent que par le signe, et il en est de même des quantités et donc


ainsi la demi-somme des températures des points opposés donne une quantité qui serait encore la même si l’on avait choisi deux points situés aux extrémités d’un autre diamètre. Cette quantité est, comme on l’a vu plus haut, la valeur de la température moyenne après le temps Donc la demi-somme des températures des deux points opposés quelconques décroît continuellement avec la température moyenne de l’anneau, et en représente la valeur sans erreur sensible, après que le refroidissement a duré un certain temps. Examinons plus particulièrement en quoi consiste ce dernier état qui est exprimé par l’équation


Si l’on cherche d’abord le point de l’anneau pour lequel on a la condition


On voit que la température de ce point est à chaque instant la température moyenne de l’anneau : il en est de même du point diamétralement opposé : car l’abscisse de ce dernier point satisferait encore à l’équation précédente


Désignons par la distance à laquelle le premier de ces points est placé, on aura

et substituant cette valeur de on a


Si l’on prend maintenant pour origine des abscisses le point qui répondait à l’abscisse et que l’on désigne par la nouvelle abscisse on aura


À l’origine où l’abscisse est 0 et au point opposé, la température est toujours égale à la température moyenne ; ces deux points divisent la circonférence de l’anneau en deux parties dont l’état est pareil, mais de signe opposé ; chaque point de l’une de ces parties a une température qui excède la température moyenne et la quantité de cet excès est proportionnelle au sinus de la distance à l’origine. Chaque point de l’autre partie a une température moindre que la température moyenne et la différence est la même que l’excès dans le point opposé. Cette distribution symétrique de la chaleur subsiste pendant toute la durée du refroidissement. Il s’établit aux deux extrémités de la moitié échauffée, deux flux de chaleur dirigés vers la moitié froide et dont l’effet est de rapprocher continuellement l’une et l’autre moitié de l’armille de la température moyenne.

246.

On remarquera maintenant que dans l’équation générale qui donne la valeur de chacun des termes est de la forme

on pourra donc tirer, par rapport à chaque terme, des

conséquences analogues aux précédentes. En effet, désignant par la distance pour laquelle le coëfficient


est nul, on aura l’équation et cette substitution donne, pour la valeur du coëfficient,


étant une constante. Il suit de là qu’en prenant pour l’origine des coordonnées le point dont l’abscisse était et désignant par la nouvelle abscisse on aura pour exprimer les changements de cette partie de la valeur de la fonction

Si cette même partie de la valeur de subsistait seule en sorte que les coëfficients de toutes les autres fussent nuls, l’état de l’anneau serait représenté par la fonction


et la température de chaque point serait proportionnelle au sinus du multiple de la distance de ce point à l’origine. Cet état est analogue à celui que nous avons décrit précédemment, il en diffère en ce que le nombre des points qui ont une même température toujours égale à la température moyenne de l’anneau n’est pas seulement 2, mais en général égal à Chacun de ces points ou nœuds sépare deux portions contiguës de l’anneau qui sont dans un état semblable, mais de signe opposé. La circonférence se trouve ainsi divisée en plusieurs parties égales dont l’état est alternativement positif ou négatif. Le flux de la chaleur est le plus, grand possible dans les nœuds, il se dirige toujours vers la portion qui est dans l’état négatif, et il est nul dans le point qui est à égale distance de deux nœuds consécutifs. Les rapports qui existent alors entre les températures se conservent pendant toute la durée du refroidissement, et ces températures varient ensemble très-rapidement proportionnellement aux puissances successives de la fraction

Si l’on donne successivement à les valeurs 0, 1, 2, 3, 4, etc. on connaîtra tous les états réguliers et élémentaires que la chaleur peut affecter pendant qu’elle se propage dans un anneau solide. Lorsqu’un de ces modes simples est une fois établi, il se conserve de lui-même ; et les rapports qui existaient entre les températures ne changent point ; mais quels que soient ces rapports primitifs et de quelque manière que l’anneau ait été échauffé ; le mouvement de la chaleur se décompose de lui-même en plusieurs mouvements simples, pareils à ceux que nous venons de décrire, et qui s’accomplissent tous à-la-fois sans se troubler. Dans chacun de ces états la température est proportionnelle au sinus d’un certain multiple de la distance à un point fixe. La somme de toutes ces températures partielles, prises pour un seul point dans un même instant, est la température actuelle de ce point. Or, les parties qui composent cette somme décroissent beaucoup plus rapidement les unes que les autres. Il en résulte que ces états élémentaires de l’anneau qui correspondent aux différentes valeurs de et dont la superposition détermine le mouvement total de la chaleur, disparaissent en quelque sorte les uns après les autres. Ils cessent bientôt d’avoir une influence sensible sur la valeur de la température, et laissent subsister seul le premier d’entre eux pour lequel la valeur de est la moindre de toutes. On se formera de cette manière une idée exacte de la loi suivant laquelle la chaleur se distribue dans une armille, et se dissipe par sa surface. L’état de l’armille devient de plus en plus symétrique ; il ne tarde point à se confondre avec celui vers lequel il a une tendance naturelle, et qui consiste en ce que les températures des différents points doivent être proportionnels aux sinus d’un même multiple de l’arc qui mesure la distance à l’origine. La disposition initiale n’apporte aucun changement à ces résultats.

SECTION II.

De la communication de la chaleur entre des masses
disjointes
.

247.

Nous avons maintenant à faire remarquer la conformité de l’analyse précédente avec celle que l’on doit employer pour déterminer les lois de la propagation de la chaleur entre des masses disjointes ; nous arriverons ainsi à une seconde solution de la question du mouvement de la chaleur dans une armille. La comparaison de deux résultats fera connaître les véritables fondements de la méthode que nous avons suivie, pour intégrer les équations de la propagation de la chaleur dans les corps continus. Nous examinerons en premier lieu un cas extrêmement simple, qui est celui de la communication de la chaleur entre deux masses égales.

Supposons que deux masses cubiques m et n d’égale dimension et de même matière soient inégalement échauffées ; que leurs températures respectives soient et et qu’elles soient d’une conducibilité infinie. Si l’on mettait ces deux corps en contact, la température deviendrait subitement égale dans l’une et l’autre à la température moyenne Supposons que les deux masses soient séparées par un très-petit intervalle, qu’une tranche infiniment petite du premier corps s’en détache pour se joindre au second, et qu’elle retourne au premier immédiatement après le contact. En continuant ainsi de se porter alternativement, et dans des temps égaux et infiniment petits, de l’une des masses à l’autre, la tranche interposée fait passer successivement la chaleur du corps le plus échauffé dans celui qui l’est moins ; il s’agit de déterminer quelle serait, après un temps donné, la température de chaque corps, s’ils ne perdaient par leur surface aucune partie de la chaleur qu’ils contiennent. On ne suppose point que la transmission de la chaleur dans les corps solides continus s’opère d’une manière semblable à celle que l’on vient de décrire : on veut seulement déterminer par le calcul le résultat d’une telle hypothèse.

Chacune des deux masses jouissant d’une conducibilité parfaite, la quantité de chaleur contenue dans la tranche infiniment petite, s’ajoute subitement à celle du corps avec lequel elle est en contact ; et il en résulte une température commune égale au quotient de la somme des quantités de chaleur par la somme des masses. Soit la masse de la tranche infiniment petite qui se sépare du corps le plus échauffé dont la température est soient et les températures variables qui correspondent au temps et qui ont pour valeurs initiales et Lorsque la tranche se sépare de la masse qui devient elle a comme cette masse la température et dès qu’elle touche le second corps affecté de la température elle prend en même temps que lui une température égale à . La tranche retenant cette dernière température, retourne au premier corps dont la masse est et la température On trouvera donc pour la température après le second contact

Les températures variables et deviennent, après l’instant et on trouve ces valeurs en supprimant les puissances supérieures de On a ainsi et la masse qui avait la température initiale a reçu, dans un instant, une quantité de chaleur égale à ou laquelle a été perdue dans le même temps par la première masse. On voit par-là que la quantité de chaleur qui passe en un instant du corps plus échauffé dans celui qui l’est moins, est, toutes choses d’ailleurs égales, proportionnelle à la différence actuelle des températures de ces deux corps. Le temps étant divisé en intervalles égaux, la quantité infiniment petite pourra être remplacée par étant le nombre des unités de masse dont la somme contient autant de fois que l’unité de temps contient en sorte que l’on a On obtient ainsi les équations

248.

Si l’on attribuait une plus grande valeur au volume qui sert, pour ainsi dire, à puiser la chaleur de l’un des corps pour la porter à l’autre, la transmission serait plus prompte ; il faudrait, pour exprimer cette condition augmenter dans la même raison la valeur de qui entre dans les équations. On pourrait aussi conserver la valeur de et supposer que cette tranche accomplit dans un temps donné un plus grand nombre d’oscillations, ce qui serait encore indiqué par une plus grande valeur de Ainsi ce coëfficient représente en quelque sorte la vitesse de la transmission, ou la facilité avec laquelle la chaleur passe de l’un des corps dans l’autre , c’est-à-dire leur conducibilité réciproque.

249.

En ajoutant les deux équations précédentes, on a et si l’on retranche l’une des équations de l’autre, on a et, faisant Intégrant et déterminant la constante par la condition que la valeur initiale soit on a La différence des températures diminue donc comme l’ordonnée d’une logarithmique, ou comme les puissances successives de la fraction On a pour les valeurs de et

250.

On suppose, dans le cas qui précède, que la masse infiniment petite au moyen de laquelle s’opère la transmission, est toujours la même partie de l’unité de masse, ou, ce qui est la même chose, que le coëfficient qui mesure la conducibilité réciproque est une quantité constante. Pour rendre la recherche dont il s’agit plus générale, il faudrait considérer le coëfficient comme une fonction de deux températures actuelles et On aurait alors les deux équations et dans lesquelles serait égal à la fonction de et que nous désignons par Il sera facile de connaître la loi que suivent les températures variables et lorsqu’elles approchent extrêmement de leur dernier état. Soit une nouvelle indéterminée égale à la différence entre et la dernière valeur qui est ou Soit une seconde indéterminée égale à la différence On substituera au lieu de et leurs valeurs et et, comme il s’agit de trouver les valeurs de et de lorsqu’on les suppose très-petites, on ne doit retenir dans les résultats des substitutions que la première puissance de et de On trouvera donc les deux équations


en développant les quantités qui sont sous le signe et omettant les puissances supérieures de et de On trouvera et La quantité étant constante, il s’ensuit que les équations précédentes donneront pour la valeur de la différence un résultat semblable à celui que l’on a trouvé plus haut pour la valeur de

On en conclut que si le coëfficient que l’on avait d’abord supposé constant, était représenté par une fonction quelconque des températures variables, les derniers changements qu’éprouvent ces températures, pendant un temps infini, seraient encore assujéties à la même loi que si la conducibilité réciproque était constante. Il s’agit actuellement de déterminer les lois de la propagation de la chaleur dans un nombre indéfini de masses égales qui ont actuellement des températures différentes.

251.

On suppose que des masses prismatiques en nombre et dont chacune est égale à sont rangées sur une même ligne droite, et affectées de températures différentes etc. ; que des tranches infiniment petites qui ont chacune la masse se séparent de ces différents corps excepté du dernier, et se portent en même temps du premier au second, du second au troisième, du troisième au quatrième, ainsi de suite ; qu’aussitôt après le contact ces mêmes tranches retournent aux masses dont elles s’étaient séparées ; ce double mouvement ayant lieu autant de fois qu’il y a d’instants infiniment petits on demande à quelle loi sont assujétis les changements de température.

Soient les valeurs variables qui correspondent au même temps et qui ont succédé aux valeurs initiales etc. Lorsque les tranches se seront séparées des premières masses, et mises en contact avec les masses voisines, il est aisé de voir que les températures seront devenues

Lorsque les tranches seront revenues à leurs premières places, on trouvera les valeurs des nouvelles températures en suivant la même règle qui consiste à diviser la somme des quantités de chaleur par la somme des masses, et l’on aura pour les valeurs de etc. après l’instant


le coëfficient de est la différence de deux différences consécutives prises dans la suite Quant au premier et au dernier coëfficient de ils peuvent être considérés aussi comme des différences du second ordre. Il suffit de supposer que le terme est précédé d’un terme égal à et que le terme est suivi d’un terme égal à On aura donc, en substituant, comme précédemment à les équations suivantes :

252.

Pour intégrer ces équations, on fera, suivant la méthode connue,


étant des quantités constantes qu’il faudra déterminer. Les substitutions étant faites, on aura les équations suivantes :


Si l’on regarde comme une quantité connue, on trouvera l’expression de en et puis celle de en et il en est de même de toutes les autres indéterminées etc. La première et la dernière équations peuvent être écrites sous cette forme


en retenant ces deux conditions et la valeur de contiendra la première puissance de la valeur de contiendra la seconde puissance de ainsi de suite jusqu’à qui contiendra la puissance ième de Cela posé, devant être égal à on aura, pour déterminer une équation du ième degré, et demeurera indéterminé.

Il suit de là que l’on pourra trouver pour un nombre de valeurs, et que d’après la nature des équations linéaires la valeur générale de sera composée d’un nombre de termes, en sorte que les quantités etc. seront déterminées au moyen des équations


les valeurs etc. sont en nombre et égales aux racines de l’équation algébrique du ième degré en qui a, comme on le verra plus bas, toutes ses racines réelles. Les coëfficients de la première équation etc. sont arbitraires ; quant aux coëfficients des lignes inférieures, ils sont déterminés par un nombre de systèmes d’équations semblables aux équations précédentes. Il s’agit maintenant de former ces équations.

253.

Écrivant la lettre au lieu de on aura les équations suivantes :

On voit que ces quantités appartiennent à une série récurrente dont l’échelle de relation a les deux termes et On pourra donc exprimer le terme général par l’équation en déterminant convenablement les quantités et On trouvera d’abord et en supposant égal à 0 et ensuite égal à 1, ce qui donne et et parconséquent En substituant ensuite les valeurs de etc. dans l’équation générale on trouvera

en comparant cette équation à celle-ci

qui exprime une propriété connue de sinus d’arcs croissants en progression arithmétique, on en conclut ou il ne reste plus qu’à déterminer la valeur de l’arc

La valeur générale de étant

on aura, pour satisfaire à la condition l’équation

d’où l’on tire ou étant la demi-circonférence et un nombre entier quelconque, tel que on en peut déduire les valeurs de ou Ainsi toutes les racines de l’équation en qui donnent les valeurs de sont réelles négatives et fournies par les équations :

Supposons donc qu’on ait divisé la demi-circonférence en un nombre de parties égales, et que l’on prenne pour former l’arc un nombre entier de ces parties, étant moindre que on satisfera aux équations différentielles en choisissant pour une quantité quelconque, et faisant

Comme il y a un nombre d’arcs différents que l’on peut prendre pour savoir Il y a aussi un nombre de systèmes de valeurs particulières pour etc. et les valeurs générales de ces variables sont les sommes des valeurs particulières.

254.

On voit d’abord que si l’arc est nul, les quantités qui multiplient dans les valeurs de etc. deviennent toutes égales a l’unité, car a pour valeur 1 lorsque l’arc est nul ; et il en est de même des quantités qui se trouvent dans les équations suivantes. On conclut de là qu’il doit entrer dans les valeurs générales de des termes constants.

De plus, en ajoutant toutes les valeurs particulières correspondantes de etc., on aura


équation dont le second membre se réduit à 0 toutes les fois que l’arc n’est pas nul ; mais dans ce cas on trouvera pour la valeur de On a donc en général


or les valeurs initiales des variables étant etc., il est nécessaire que l’on ait il en résulte que le terme constant qui doit entrer dans chacune des valeurs générales de


c’est-à-dire, la température moyenne entre toutes les températures initiales.

Quant aux valeurs générales de elles sont exprimées par les équations suivantes :



255.

Pour déterminer les constantes etc., il faut considérer l’état initial du système. En effet, lorsque le temps est nul les valeurs de etc., doivent être égales à etc. ; on aura donc équations semblables pour déterminer les constantes. Les quantités

peuvent être indiquées de cette manière,

les équations propres à déterminer les constantes sont, en représentant par la température moyenne initiale,

Les quantités et étant déterminées par ces équations, on connaît entièrement les valeurs des variables

On peut effectuer en général l’élimination des inconnues dans ces équations, et déterminer les valeurs des quantités etc., même lorsque le nombre des équations est infini ; on emploiera ce procédé d’élimination dans les articles suivants.

256.

En examinant les équations qui donnent les valeurs générales des variables on voit que le temps venant à augmenter les termes qui se succèdent dans la valeur de chaque variable décroissent très-inégalement : car les valeurs de etc. étant

les exposants etc. deviennent

de plus en plus grands. Si l’on suppose que le temps est infini, le premier terme de chaque valeur subsiste seul, et la température de chacune des masses devient égale à la température moyenne Lorsque le temps augmente continuellement chacun des termes de la valeur d’une des variables, diminue proportionnellement aux puissances successives d’une fraction qui est, pour le second terme pour le troisième terme ainsi de suite. La plus grande de ces fractions étant celle qui répond à la moindre des valeurs de il s’ensuit que, pour connaître la loi que suivent les derniers changements de température, on ne doit considérer que les deux premiers termes : car tous les autres deviennent incomparablement plus petits à mesure que le temps augmente. Les dernières variations de température

etc., sont donc exprimées par les équations suivantes :

257.

Si l’on divise la demi-circonférence en un nombre de parties égales, et qu’ayant abaissé les sinus, on prenne les différences entre deux sinus consécutifs ; ces différences seront proportionnelles aux coëfficients de ou aux seconds termes des valeurs de C’est pourquoi les dernières valeurs de sont telles que les différences entre ces températures finales et la température moyenne initiale sont toujours proportionnelles aux différences des sinus consécutifs. De quelque manière que les masses aient d’abord été échauffées, la distribution de la chaleur s’opère à la fin suivant une loi constante. Si l’on mesurait les températures dans les derniers instants, où elles diffèrent peu de la température moyenne, on observerait que la différence entre la température d’une masse quelconque et cette température moyenne, décroît continuellement comme les puissances successives de la même fraction ; et, en comparant entre elles les températures des différentes masses prises pour un même instant, on verrait que ces différences entre les températures actuelles et la température moyenne, sont proportionnelles aux différences des sinus consécutifs, la demi-circonférence étant divisée en un nombre de parties égales.

258.

Si l’on suppose que les masses qui se communiquent la chaleur sont en nombre infini, on trouve pour l’arc une valeur infiniment petite ; alors les différences des sinus consécutifs, prises dans le cercle, sont proportionnelles aux cosinus des arcs correspondants : car équivaut à lorsque l’arc est infiniment petit. Dans ce cas, les quantités dont les températures prises au même instant, diffèrent de la température moyenne à laquelle elles doivent toutes parvenir, sont proportionnelles aux cosinus qui correspondent aux différents points de la circonférence divisée en une infinité de parties égales. Si les masses qui se transmettent la chaleur sont situées à distances égales les unes des autres sur le périmètre de la demi-circonférence le cosinus de l’arc à l’extrémité duquel une masse quelconque est placée, est la mesure de la quantité dont la température de cette masse diffère encore de la température moyenne. Ainsi le corps placé au milieu de tous les autres est celui qui parvient le plus promptement à cette température moyenne ; ceux qui se trouvent situés d’un même côté du milieu ont tous une température excédente, et qui surpasse d’autant plus la température moyenne, qu’ils sont plus éloignés du milieu ; les corps qui sont placés de l’autre côté, ont tous une température moindre que la température moyenne, et ils s’en écartent autant que ceux du côté opposé, mais dans un sens contraire. Enfin ces différences, soit positives, soit négatives, décroissent toutes en même temps, et proportionnellement aux puissances successives de la même fraction ; en sorte qu’elles ne cessent pas d’être représentées au même instant par les valeurs des cosinus d’une même demi-circonférence. Telle est en général, et si l’on en excepte les cas singuliers, la loi à laquelle sont assujéties les dernières températures. L’état initial du système ne change point ces résultats. Nous allons présentement traiter une troisième question du même genre que les précédentes, et dont la solution nous fournira plusieurs remarques utiles.

259.

On suppose un nombre de masses prismatiques égales, placées à des distances égales sur la circonférence d’un cercle. Tous ces corps qui jouissent d’une conducibilité parfaite, ont actuellement des températures connues, différentes pour chacun d’eux ; ils ne laissent échapper à leur surface aucune partie de la chaleur qu’ils contiennent ; une tranche infiniment mince se sépare de la première masse pour se réunir à la seconde, qui est placée vers la droite ; dans le même temps une tranche parallèle se sépare de la seconde masse en se portant de gauche à droite, et se joint à la troisième ; il en est de même de toutes les autres masses, de chacune desquelles une tranche infiniment mince se sépare au même instant, et se joint à la masse suivante. Enfin, les mêmes tranches reviennent immédiatement après, et se réunissent aux corps dont elles avaient été détachées. On suppose que la chaleur se propage entre les masses au moyen de ces mouvements alternatifs, qui s’accomplissent deux fois pendant chaque instant d’une égale durée ; il s’agit de trouver suivant quelle loi les températures varient, c’est-à-dire que, les valeurs initiales des températures étant données, il faut connaître après un temps quelconque la nouvelle température de chacune des masses.

On désignera par les températures initiales dont les valeurs sont arbitraires, et par les valeurs de ces mêmes températures après le temps écoulé Il est visible que chacune des quantités est une fonction du temps et de toutes les valeurs initiales  : ce sont ces fonctions qu’il s’agit de déterminer.

260.

On représentera par la masse infiniment petite de la tranche qui se porte d’un corps à l’autre. On remarquera en premier lieu que lorsque les tranches ont été séparées des masses dont elles faisaient partie, et mises respectivement en contact avec les masses placées vers la droite, les quantités de chaleur contenue dans les différents corps sont


en divisant chacune de ces quantités de chaleur par la masse on aura pour les nouvelles valeurs des températures


c’est-à-dire que, pour trouver le nouvel état de la température après le premier contact, il faut ajouter à la valeur qu’elle avait auparavant le produit de par l’excès de la température du corps dont la tranche s’est séparée sur celle du corps auquel s’est jointe. On trouvera, par la même règle, que les températures, après le second contact, sont

Le temps étant divisé en instants égaux, on désignera par la durée de cet instant, et si l’on suppose que soit contenu dans un nombre d’unités de masse autant de fois que est contenu dans l’unité de temps, on aura En appelant les accroissements infiniment petits que reçoivent pendent l’instant les températures on aura les équations différentielles suivantes :

261.

Pour résoudre ces équations, on supposera en premier lieu, suivant la méthode connue

Les quantités sont des constantes indéterminées, ainsi que l’exposant Il est facile de voir que ces valeurs de satisfont aux équations différentielles, si l’on a les conditions suivantes :


soit on aura, en commençant par la dernière équation,

Il en résulte que l’on peut prendre pour les sinus consécutifs que l’on obtient en divisant la circonférence entière en un nombre de parties égales. En effet, en appelant l’arc. les quantités

qui sont en nombre appartiennent, comme on le sait, à

une série récurrente dont l’échelle de relation a deux termes, savoir : et en sorte que l’on a toujours la condition On prendra donc pour les quantités et l’on aura ensuite ou ou On a mis précédemment la lettre au lieu de en sorte que la valeur de est en substituant dans les équations ces valeurs de et de

on aura

262.

Ces dernières équations ne fournissent qu’une solution très-particulière de la question proposée : car si l’on suppose on aura, pour les valeurs initiales de les quantités qui en général diffèrent des valeurs données mais la solution précédente mérite d’être remarquée parce qu’elle exprime, comme on le verra par la suite, une circonstance qui appartient à tous les cas possibles, et représente les dernières variations des températures. On voit par cette solution que, si les températures initiales étaient proportionnelles aux sinus


elles demeureraient continuellement proportionnelles à ces mêmes sinus, et l’on aurait les équations

C’est pourquoi si les masses qui sont placées à distances égales sur la circonférence du cercle, avaient des températures initiales proportionnelles aux perpendiculaires abaissées sur le diamètre qui passe par le premier point ; les températures varieraient avec le temps en demeurant proportionnelles à ces perpendiculaires, et ces températures diminueraient toutes à-la-fois comme les termes d’une même progression géométrique dont la raison est la fraction

263.

Pour former la solution générale, on remarquera en premier lieu que l’on pourrait prendre pour les cosinus correspondants aux points de division de la circonférence partagée en un nombre de parties égales. Ces quantités dans lesquelles désigne l’arc. forment aussi une série récurrente dont l’échelle de relation a les deux termes et c’est pourquoi l’on pourrait prendre pour satisfaire aux équations différentielles, les équations suivantes :

Indépendamment des deux solutions précédentes, on pourrait choisir pour les valeurs de les quantités


ou celles-ci ,


En effet, chacune de ces séries est récurrente et formée de termes ; l’échelle de relation a les deux termes et et, si l’on continuait la série au-delà de termes, on en trouverait autres, qui seraient respectivement égaux aux précédents. En général, si l’on désigne par les arcs etc., on pourra prendre pour les valeurs de les quantités


ou celles-ci,


la valeur de correspondante à chacune de ces séries est donnée par l’équation

On peut donner à valeurs différentes, depuis jusqu’à En substituant ces valeurs de dans les équations de l’art. 261 ; on aura, pour satisfaire aux équations différentielles de l’art. 260, les résultats suivants :

264.

On satisferait également aux équations de l’art. 260 en composant les valeurs de chacune des variables de la somme de plusieurs valeurs particulières que l’on aurait trouvées pour cette même variable, et l’on peut aussi multiplier par des coëfficients constants quelconques, chacun des termes qui entrent dans lu valeur générale d’une des variables. il suit de là qu’en désignant par des coëfficients quelconques, on pourra prendre, pour exprimer la valeur générale d’une des variables, par exemple, de l’équation

Les quantités qui entrent dans cette équation, sont arbitraires, et les arcs sont donnés par les équations


Les valeurs des variables générales sont donc exprimées par les équations suivantes :

265.

Si l’on suppose le temps nul, les valeurs doivent se confondre avec les valeurs initiales On tire de là un nombre d’équations qui doivent servir à déterminer les coëfficients On reconnaîtra facilement que le nombre des inconnues est toujours égal à celui des équations. En effet, le nombre des termes qui entrent dans la valeur de chacune des variables, dépend du nombre des quantités différentes etc., qu’on trouve en divisant la circonférence en un nombre de parties égales. Or, le nombre des quantités etc., est beaucoup moindre que si l’on ne compte que celles qui sont différentes. En désignant le nombre par s’il est impair, et par s’il est pair, désignera toujours le nombre des sinus verses différents. D’un autre côté lorsque dans la suite des quantités

On parviendra à un sinus verse, égal à l’un des

précédents Les deux termes des équations qui contiendront ce même sinus verse, n’en formeront qu’un seul ; les deux arcs différents et qui auront le même sinus verse, auront aussi le même cosinus, et les sinus ne différeront que par le signe. Il est aisé de voir que ces arcs et qui ont le même sinus verse, sont tels que le cosinus d’un multiple quelconque de est égal au cosinus d’un même multiple de et que le sinus d’un multiple quelconque de ne diffère que par le signe du sinus du multiple de Il suit de là que lorsqu’on réunit en un seul les deux termes correspondants de chacune des équations, les deux indéterminées et qui entrent dans les équations, sont remplacées par une seule indéterminée, savoir : Quant aux deux indéterminées et elles sont aussi remplacées par une seule, qui est il en résulte que le nombre des indéterminées est égal dans tous les cas, au nombre des équations ; car le nombre des termes est toujours Il faut ajouter que l’indéterminée disparaît d’elle-même dans tous les premiers termes, parce qu’elle multiplie le sinus d’un arc nul. De plus, lorsque le nombre est pair, il se trouve à la fin de chaque équation un terme dans lequel une des indéterminées disparaît d’elle-même, parce qu’elle y multiplie un sinus nul ; ainsi le nombre des inconnues qui entrent dans les équations est égal à lorsque le nombre est pair ; par conséquent le nombre des inconnues est le même dans

tous les cas que le nombre des équations.

266.

L’analyse précédente nous fournit, pour exprimer les valeurs générales des températures les équations


Pour former ces équations, il faut continuer dans chacune la suite des termes qui contiennent


jusqu’à ce qu’on ait épuisé tous les sinus verses différents, et omettre tous les termes subséquents, en commençant par celui où il entrerait un sinus verse égal à l’un des précédents. Le nombre des équations est Si est un nombre pair égal à le nombre des termes de chaque équation est si le nombre des équations est un nombre impair représenté par le nombre des termes est encore égal à Enfin, parmi les quantités etc. qui entrent dans ces équations, il y en a qui doivent être omises et disparaissent d’elles-mêmes, comme multipliant des sinus nuls.

267.

Pour déterminer les quantités etc., qui entrent dans les équations précédentes, il faut considérer l’état initial qui est connu : on supposera et l’on écrira au lieu de etc., les quantités données etc, qui sont les valeurs initiales des températures. On aura donc, pour déterminer etc., les équations suivantes :

268.

Dans ces équations, dont le nombre est les quantités inconnues sont etc., il s’agit d’effectuer les éliminations et de trouver les valeurs de ces indéterminées. On remarquera d’abord que la même indéterminée a un multiplicateur différent dans chaque équation, et que la suite de ces multiplicateurs compose une série récurrente. En effet, cette suite est celle des sinus croissants en progression arithmétique, ou celle des cosinus des mêmes arcs ; elle peut être représentée par

L’arc est égal à si l’indéterminée dont il s’agit est ou Cela posé pour déterminer l’inconnue au moyen des équations précédentes, il faut comparer à la suite des équations la série des multiplicateurs et multiplier chaque équation par le terme correspondant de la série. Si l’on prend la somme des équations ainsi multipliées, on éliminera toutes les inconnues, excepté celle qu’il s’agit de déterminer. Il en sera de même si l’on veut trouver la valeur de il faudra multiplier chaque équation par le multiplicateur de dans cette même équation, et prendre ensuite la somme de toutes les équations. Il s’agit de démontrer qu’en opérant de cette manière, on fera disparaître en effet des équations toutes les inconnues, excepté une seule. Pour cela il suffit de faire voir 1o  que si l’on multiplie terme à terme les deux suites,


la somme des produits


sera nulle, excepté lorsque les arcs et seront les mêmes, chacun de ces arcs étant d’ailleurs supposé un multiple d’une partie de la circonférence égale à 2o  que si l’on multiplie terme à terme les deux séries,

la somme des produits sera nulle, excepté le cas où est égal à 3o  que si l’on multiplie terme à terme les deux suites,

la somme des produits sera toujours nulle.

269.

On désignera par l’arc , par l'arc et par l’arc , et étant des nombres entiers positifs moindres que Le produit de deux termes correspondants des deux premières séries sera représenté par

la lettre désignant un terme quelconque de la suite, or il est facile de prouver que si l’on donne à ses valeurs successives, depuis 0 jusqu’à la somme

aura une valeur nulle, et qu’il en sera de même de la suite.

En effet, en représentant l’arc par qui est par conséquent un multiple de on aura la suite récurrente dont la somme est nulle. Pour le faire voir, on représentera cette somme par et les deux termes de l’échelle de relation étant et on multipliera successivement les deux membres de l’équation

par et par puis ajoutant les trois équations, on connaîtra que les termes intermédiaires se détruisent d’eux-mêmes d’après la nature de la série récurrente.

Si l’on remarque maintenant que étant un multiple de la circonférence entière, les quantités etc. sont respectivement les mêmes que celles que l’on désignerait par on en conclura ainsi la somme cherchée doit en général être nulle. On trouvera de même que la somme des termes dus au développement de est nulle. Il faut excepter le cas ou l’arc représenté par serait nul, on aurait alors c’est-à-dire, que les arcs et seraient les mêmes. Dans ce cas, le terme donne encore un développement dont la somme est nulle : mais la quantité fournit des termes égaux dont chacun a pour valeur donc la somme des produits terme à terme des deux premières séries est

On trouvera de la même manière la valeur de la somme des produits terme à terme des deux secondes séries, ou en effet, on substituera à la quantité

et l’on en conclura comme dans le cas précédent, que


est nulle, est que est nulle, excepté le cas Il suit de là que la somme des produits terme à terme des deux secondes séries ou est toujours nulle, lorsque les arcs et sont différents, et égale à lorsque Il ne faut plus que distinguer les cas ou les arcs et sont tous les deux nuls, alors on a 0 pour la valeur de qui désigne la somme des deux produits terme à terme des deux premières séries. Il n’en est pas de même de la somme prise dans le cas et sont nuls ; cette somme des produits terme à terme des deux secondes séries est évidemment égale à Quant à la somme des produits terme à terme des deux séries


elle est nulle, dans tous les cas, ce qu’il est facile de reconnaître par l’analyse précédente.

270.

La comparaison de ces séries fournit donc les conséquences suivantes. Si l’on partage la circonférence en un nombre de parties égales, que l’on prenne un arc composé d’un nombre entier de ces parties, et que l’on marque les extrémités des arcs il résulte des propriétés connues des quantités trigonométriques que les quantités


forment une série récurrente périodique, composée de termes ; si l’on compare une de ces deux séries correspondantes à un arc ou à une série correspondante à un autre arc ou et qu’on multiplie terme à terme les deux deux séries comparées ; la somme des produits sera nulle lorsque les arcs et seront différents. Si les arcs et sont égaux, la somme des produits est égale à lorsque l’on compare deux séries de sinus, ou lorsque l’on compare deux séries de cosinus ; mais cette somme est nulle, si l’on compare une série de sinus à une série de cosinus. Si l’on suppose nuls les arcs et il est manifeste que la somme des produits terme à terme est nulle, toutes les fois que l’une des deux séries est formée de sinus, et lorsqu’elles le sont toutes les deux, mais la somme des produits est si les deux séries composées sont formées de cosinus. En général, la somme des produits terme à terme est égale à 0 ou ou au reste, les formules connues conduiraient directement aux mêmes résultats. On les présente ici comme des conséquences évidentes des théorèmes élémentaires de la trigonométrie.

271.

Il est aisé d’effectuer au moyen île ces remarques l’élimination des inconnues dans les équations précédentes. L’indéterminée disparaît d’elle-même comme ayant des coëfficients nuls ; pour trouver on multipliera les deux membres de chaque équation par le coëfficient de dans cette même équation, et l’on ajoutera toutes les équations ainsi multipliées, on trouvera

Pour déterminer on multipliera les deux membres de chaque équation par le coëfficient de dans cette équation et en désignant l’arc par on aura, après avoir ajouté les équations


On aura pareillement pour déterminer

En général, on trouvera chaque indéterminée en multipliant les deux membres de chaque équation par le coëfficient de l’indéterminée dans cette même équation, et en ajoutant les produits. On parvient ainsi aux résultats suivants :

Il faut, pour trouver le développement indiqué par le signe donner à ses valeurs successives etc. et prendre la somme, on aura en général

Si l’on donne au nombre entier toutes les valeurs successives etc. qu’il peut avoir, ces deux formules fourniront les équations, et si l’on développe le terme sous le signe en donnant à ses valeurs etc. on aura les valeurs des inconnues etc., et les équations art. 267 seront entièrement résolues.

272.

Il faut maintenant substituer les valeurs connues des coëfficients etc., dans les équations art. 266, et l’on trouvera les valeurs suivantes :


dans ces équations

273.

Les équations que l’on vient de rapporter, renferment la solution complète de la question proposée ; elle est représentée par cette équation générale



dans laquelle il n’entre que des quantités connues, savoir : qui sont les températures initiales, mesure de la conducibilité, valeur de la masse, nombre des masses échauffées, et le temps écoulé.

Il résulte de toute l’analyse précédente que si plusieurs corps égaux en nombre sont rangés circulairement, et qu’ayant reçu des températures initiales quelconques, ils viennent à se communiquer la chaleur comme on l’a supposé ; la masse de chaque corps étant désignée par le temps par et par un coëfficient constant, la température variable de chacune des masses qui doit être une fonction des quantités et et de toutes les températures initiales, est donnée par l’équation générale Il faut d’abord mettre au lieu de le numéro qui indique la place du corps dont on veut connaître la température, savoir : 1 pour le premier corps, 2 pour le second, etc. ; ensuite il restera la lettre qui entre sous le signe on donnera à ses valeurs successives etc., et l’on prendra la somme de tous les termes. Quant au nombre des termes qui entrent dans cette équation, il doit y en avoir autant que l’on trouve de sinus verses différents, lorsque la suite des arcs est etc., c’est-à-dire, que le nombre étant égal à ou à selon qu’il est impair ou pair, le nombre des termes qui entrent dans l’équation générale est toujours .

274.

Pour donner un exemple de l’application de cette formule, nous supposerons que la première masse est la seule que l’on ait d’abord échauffée, en sorte que les températures initiales soient toutes nulles, excepté la première, il est visible que la quantité de chaleur contenue dans la première masse se distribuera successivement entre toutes les autres. Or, la loi de cette communication de la chaleur sera exprimée par l’équation suivante :

Si la seconde masse était seule échauffée et que les températures fussent nulles, on aurait

et si l’on supposait que toutes les températures initiales

fussent nulles, excepté et on trouverait pour la valeur de la somme des valeurs trouvées dans chacune des deux hypothèses précédentes. En général, il est facile de conclure de l’équation générale art. 273 que pour trouver la loi suivant laquelle les quantités initiales de chaleur se répartissent entre les masses, on peut considérer séparément les cas ou les températures initiales seraient nulles, excepté une seule. On supposera que la quantité de chaleur contenue dans une des masses se communique à toutes les autres, en regardant ces dernières comme affectées de températures nulles, et ayant fait cette hypothèse pour chacune des masses en particulier à raison de la chaleur initiale qu’elle a reçue, on connaîtra quelle est, après un temps donné, la température de chacun des corps en ajoutant toutes les températures que ce même corps a dû recevoir dans chacune

des hypothèses précédentes.

275.

Si dans l’équation générale qui donne la valeur de , on suppose que le temps a une valeur infinie, on trouvera en sorte que chacune des masses aura acquis la température moyenne ; résultat qui est évident par lui-même.

À mesure que la valeur du temps augmente, le premier terme devient de plus en plus grand par rapport au suivant, ou à la somme des suivants. Il en est de même du second par rapport aux termes qui le suivent ; et, lorsque le temps a acquis une valeur considérable, la valeur de est représentée sans erreur sensible par l’équation suivante :

En désignant par et les coëfficients de et de et la fraction par on aura Les quantités et sont constantes, c’est-à-dire, indépendantes du temps et de la lettre qui indique le rang de la masse dont la température variable est Ces quantités sont les mêmes pour toutes les masses. La différence de la température variable à la température finale décroît donc pour chacune des masses, proportionnellement aux puissances successives de la fraction Chacun des corps tend de plus en plus à acquérir la température finale et la différence entre cette dernière limite et la température variable du même corps finit toujours par décroître comme les puissances successives d’une fraction. Cette fraction est la même, quel que soit le corps dont on considère les changements de température, le coëfficient de ou en désignant par l’arc peut être mis sous cette forme en prenant et tels que l’on ait et Si l’on voulait déterminer le coëfficient de qui se rapporte aux corps suivants : dont la température est Il faudrait ajouter à l’arc ou ainsi de suite ; c’est-à-dire, que l’on a les équations

276.

On voit, par ces équations, que les dernières différences entre les températures actuelles et les températures finales, sont représentées par les équations précédentes, en ne conservant que le premier terme du second membre de chaque équation. Ces dernières différences varient donc selon la loi suivante : si l’on ne considère qu’un seul corps, la différence variable dont il s’agit, c’est-à-dire, l’excès de la température actuelle du corps sur la température finale et commune, diminue comme les puissances successives d’une fraction, le temps augmentant par parties égales ; et, si l’on compare pour un même instant la température de tous les corps, la différence dont il s’agit varie proportionnellement aux sinus successifs de la circonférence divisée en parties égales. La température d’un même corps, pris à divers instants successifs égaux, est représentée par les ordonnées d’une logarithmique, dont l’axe est divisé en parties égales, et la température de chacun de ces corps, prise au même instant pour tous, est représentée par les ordonnées du cercle dont la circonférence est divisée en parties égales. Il est facile de voir, comme on l’a remarqué plus haut, que si les températures initiales sont telles, que les différences de ces températures à la température moyenne ou finale soient proportionnelles aux sinus successifs des arcs multiples, ces différences diminueront toutes à-la-fois sans cesser d’être proportionnelles aux mêmes sinus. Cette loi qui régnerait entre les températures initiales ne serait point troublée par l’action réciproque des corps, et se conserverait jusqu’à ce qu’ils eussent tous acquis une température commune. La différence diminuerait pour chaque corps comme les puissances successives d’une même fraction. Telle est la loi la plus simple à laquelle puisse être assujétie la communication de la chaleur entre une suite de masses égales. Lorsque cette loi est établie entre les températures initiales, elle se conserve d elle-même, et lorsqu’elle ne règne point entre les températures initiales, c’est-à-dire lorsque les différences de ces températures à la température moyenne ne sont pas proportionnelles aux sinus successifs des arcs multiples, la loi dont il s’agit tend toujours à s’établir, et le système des températures variables finit bientôt par se confondre sensiblement avec celui qui dépend des ordonnées du cercle et de celles de la logarithmique.

Puisque les dernières différences entre l’excès de la température d’un corps sur la température moyenne, sont proportionnelles aux sinus de l’arc à l’extrémité duquel le corps est placé, il s’ensuit que si l’on désigne deux corps placés aux extrémités du même diamètre, la température du premier surpassera la température moyenne et constante autant que cette température constante surpassera celle du second corps. C’est pourquoi, si l’on prend à chaque instant la somme des températures de deux masses dont la situation est opposée, on trouvera une somme constante et cette somme aura la même valeur pour deux masses quelconques placées aux extrémités d’un même diamètre.

277.

Les formules qui représentent les températures variables des masses disjointes s’appliquent facilement à la propagation de la chaleur dans les corps continus. Pour en donner un exemple remarquable, nous déterminerons le mouvement de la chaleur dans une armille, au moyen de l’équation générale qui a été rapportée précédemment.

On supposera que le nombre des masses croît successivement, et qu’en même temps la longueur de chaque masse décroît dans le même rapport, afin que la longueur du système ait une valeur constante égale à Ainsi le nombre des masses sera successivement 2 ou 4, ou 8 ou 16, à l’infini, et chacune des masses sera ou ou ou etc. Il est nécessaire de supposer aussi que la facilité avec laquelle la chaleur se transmet, augmente dans le même rapport que le nombre des masses ainsi la quantité que représente lorsqu’il n’y a que deux masses, devient double lorsqu’il y en a quatre, quadruple s’il y en a huit, ainsi de suite. En désignant par cette quantité on voit que le nombre devra être successivement remplacé par etc. Si l’on passe maintenant à la supposition du corps continu, on écrira au lieu de valeur de chaque masse infiniment, petite, l’élément au lieu du nombre des masses on mettra au lieu de on mettra ou

Quant aux températures initiales elles dépendent de la valeur de l’arc et, en considérant ces températures comme les états successifs d’une même variable, la valeur générale représente une fonction arbitraire de L’indice sera alors remplacé par À l’égard des quantités ces températures sont des variables qui dépendent des deux quantités et En désignant par cette variable on aura L’indice qui marque la place que l’un des corps occupe sera remplacé par Ainsi pour appliquer l’analyse précédente au cas où l’on aurait une infinité de tranches, formant un corps continu dont la forme serait celle d’une armille, il faudra substituer aux quantités celles qui leur correspondent, savoir : On fera ces substitutions dans l’équation art. 273 et l’on écrira au lieu de et et au lieu de et Le premier terme devient la valeur de l’intégrale prise depuis jusqu’à la quantité devient ou la valeur de est celle de est l’intégrale étant prise depuis jusqu’à et celle de est


l’intégrale étant prise entre les mêmes limites, on obtient par ces substitutions l’équation


et représentant par la quantité on aura

278.

Cette solution est la même que celle qui a été rapportée dans la section précédente, pag. 272 ; elle donne lieu à diverses remarques, 1o  Il ne serait pas nécessaire de recourir à l’analyse des équations aux différences partielles pour obtenir l’équation générale qui exprime le mouvement de la chaleur dans une armille. On pourrait résoudre la question pour un nombre déterminé de corps, et supposer ensuite ce nombre infini. Cette méthode de calcul a une clarté qui lui est propre, et qui dirige les premières recherches. Il est facile ensuite de passer à une méthode plus concise dont la marche se trouve naturellement indiquée. On voit d’abord que la distinction des valeurs particulières qui, satisfaisant à l’équation aux différences partielles, composent la valeur générale, dérive de la règle connue pour l’intégration des équations différentielles linéaires dont les coëfficients sont constants. Cette distinction est d’ailleurs fondée, comme on l’a vu plus haut, sur les conditions physiques de la question ; 2o  Pour passer du cas des masses disjointes à celui d’un corps continu, nous avons supposé que le coëfficient augmentait proportionnellement au nombre des masses. Ce changement continuel du nombre est une suite de ce que nous avons démontré précédemment, savoir que la quantité de chaleur qui s’écoule entre deux tranches d’un même prisme est proportionnelle à la valeur de désignant l’abscisse qui répond à la section, et la température. Au reste si l’on ne supposait point que le coëfficient augmente proportionnellement au nombre des masses, et que l’on retînt une valeur constante pour ce coëfficient ; on trouverait, en faisant infini, un résultat contraire à celui qu’on observe dans les corps continus. La diffusion de la chaleur serait infiniment lente, et de quelque manière que la masse eût été échauffée, la température d’un point ne subirait aucun changement sensible, pendant un temps déterminé, ce qui est opposé aux faits. Toutes les fois que l’on a recours à la considération d’un nombre infini de masses séparées qui se transmettent la chaleur, et que l’on veut passer au cas des corps continus ; il faut attribuer au coëfficient qui mesure la vitesse de la transmission, une valeur proportionnelle au nombre des masses infiniment petites qui composent le corps donné.

3o  Si dans la dernière équation que nous venons d’obtenir pour exprimer la valeur de ou on suppose il sera nécessaire que l’équation représente l’état initial, on aura donc par cette voie l’équation que nous avons obtenue précédemment, pag. 256, savoir :

Ainsi ce théorème qui donne, entre des limites assignées, le développement d’une fonction arbitraire en séries de sinus ou de cosinus d’arcs multiples se déduit des règles élémentaires du calcul. On trouve ici l’origine du procédé que nous avons employé pour faire disparaître par des intégrations successives tous les coëfficients, excepté un seul dans l’équation


ces intégrations correspondent aux éliminations des diverses inconnues dans les équations p. 313 et 320, et l’on reconnaît clairement par cette comparaison des deux méthodes que l’équation (B) page 334, a lieu pour toutes les valeurs de comprises entre et sans que l’on soit fondé à l’appliquer aux valeurs de qui excèdent ces limites.

279.

La fonction qui satisfait à la question, et dont la valeur est déterminée par l’équation (E) pag. 330 peut être exprimée comme il suit


Le signe affecte le nombre et indique que la somme doit être prise de à On peut aussi comprendre le premier terme 1 sous ce signe et l’on a


Il faut alors donner à toutes ses valeurs en nombres entiers depuis jusqu’à c’est ce que l’on a indiqué en écrivant les limites et auprès du signe l’une de ces valeurs de est 0. Telle est l’expression la plus concise de la solution. Pour développer le second membre de l’équation, on supposera et ensuite etc. et l’on doublera chaque résultat excepté le premier qui répond à Lorsque est nul il est nécessaire que la fonction représente l’état initial dans lequel les températures sont égales à on aura donc l’équation identique


On a joint aux signes et les indices des limites entre lesquelles l’intégrale et la somme doivent être prises. Ce théorème a lieu généralement quelle que soit la forme de la fonction dans l’intervalle de à il est le même que celui qui est exprimé par les équations qui donnent le développement de page 260, et nous verrons dans la suite que l’on peut démontrer immédiatement la vérité de l’équation (B), indépendamment des considérations précédentes.

280.

Il est facile de reconnaître que la question n’admet aucune solution différente de celle que donne l’équation (E) pag. 330. En effet la fonction satisfait entièrement à la question, et d’après la nature de l’équation différentielle aucune autre fonction ne peut jouir de cette même propriété. Pour s’en convaincre il faut considérer que le premier état du solide étant représenté par une équation donnée la fluxion est connue, puisqu’elle équivaut à Ainsi en désignant par ou la température au commencement du second instant, on déduira la valeur de de l’état initial et de l’équation différentielle. On connaîtra donc de la même manière les valeurs de la température d’un point quelconque du solide au commencement de chaque instant. Or la fonction satisfait à l’état initial, puisque l’on a De plus elle satisfait aussi à l’équation différentielle ; par conséquent étant différentiée elle donnerait pour etc. les mêmes valeurs que celles qui résulteraient de l’application successive de cette équation différentielle Donc si dans la fonction on donne successivement à les valeurs etc. désignant l’élément du temps ; on trouvera les mêmes valeurs etc. que l’on aurait déduites de l’état initial et de l’application continuelle de l’équation Donc toute fonction qui satisfait à l’équation différentielle et à l’état initial se confond nécessairement avec la fonction car ces fonctions donneront l’une et l’autre une même fonction de si l’on y suppose successivement etc.

On voit par là qu’il ne peut y avoir qu’une seule solution de la question, et que si l’on découvre d’une manière quelconque une fonction qui satisfasse à l’équation différentielle et à l’état initial, on est assuré qu’elle est la même que la précédente donnée par l’équation (E).

281.

Cette même remarque s’applique à toutes les recherches qui ont pour objet le mouvement varié de la chaleur ; elle suit évidemment de la forme même de l’équation générale.

C’est par la même raison que l’intégrale de l’équation ne peut contenir qu’une seule fonction arbitraire en . En effet, lorsqu’une valeur de est donnée en fonction de pour une certaine valeur du temps il est évident que toutes les autres valeurs de qui correspondent à un temps quelconque sont déterminées. On peut donc choisir arbitrairement la fonction de qui correspond à un certain état, et la fonction de deux variables et se trouve alors déterminée. Il n’en est pas de même de l’équation


que nous avons employée dans le chapitre précédent, et qui convient au mouvement constant de la chaleur ; son intégrale contient deux fonctions arbitraires en et mais on peut ramener cette recherche à celle du mouvement varié, en considérant l’état final et permanent comme dérivé de ceux qui le précèdent, et par conséquent de l’état initial qui est donné.

L’intégrale que nous avons donnée


contient une fonction arbitraire et elle a la même étendue que l’intégrale générale, qui ne contient aussi qu’une fonction arbitraire en ou plutôt elle est cette intégrale elle-même mise sous la forme qui convient à la question. En effet l’équation représentant l’état initial, et représentant l’état variable qui lui succède ; on voit que d’après la forme même du solide échauffé la valeur de ne doit point changer lorsqu’on écrit, au lieu de étant un nombre entier positif quelconque. La fonction

remplit cette condition ; elle représente aussi l’état initial lorsqu’on suppose car on a alors

équation qui a été démontrée précédemment, pages 260 et 333 et qu’il est d’ailleurs facile de vérifier. Enfin la même fonction satisfait à l’équation différentielle Quelle que soit la valeur du temps la température est donnée par une série très-convergente, et les différents termes représentent tous les mouvements partiels qui se composent pour former le mouvement total. À mesure que le temps augmente, les états partiels de l’ordre le plus élevé s’altèrent rapidement, et ne conservent aucune influence appréciable ; ensorte que le nombre des valeurs que l’on doit donner à l’exposant diminue de plus en plus. Après un certain temps le système des températures est représenté sensiblement par les termes que l’on trouve en donnant à les valeurs 0, et ou seulement 0 et ou enfin par le premier de ces termes qui est il y a donc une relation manifeste entre la forme de la solution et la marche du phénomène physique que l’on a soumis à l’analyse.

282.

Pour parvenir à cette solution on a considéré d’abord les valeurs simples de la fonction qui satisfont à l’équation différentielle ; on a formé ensuite une valeur qui convient avec l’état initial, et qui a par conséquent toute la généralité que la question comporte. On pourrait suivre une marche différente et déduire la même solution d’une autre expression de l’intégrale ; car cette solution étant une fois connue, on en transforme aisément les résultats. Si l’on suppose que le diamètre de la section moyenne de l’anneau devient de plus en plus grand à l’infini, la fonction reçoit, comme on le verra par la suite, une forme différente, et se confond avec l’intégrale qui contient une seule fonction arbitraire sous le signe d’intégrale définie. On pourrait aussi appliquer cette dernière intégrale à la question actuelle ; mais, si l’on se bornait à cette application, on n’aurait qu’une connaissance très-imparfaite du phénomène : car les valeurs des températures ne seraient pas exprimées par des séries convergentes, et l’on ne distinguerait point les états qui se succèdent à mesure que le temps augmente. Il faudrait donc attribuer à la fonction qui représente l’état initial la forme périodique que la question suppose ; mais, en modifiant ainsi cette intégrale, on n’aurait point d’autre résultat que celui-ci

On passe aisément de cette dernière équation à l’intégrale dont il s’agit, comme nous l’avons prouvé dans le Mémoire qui a précédé cet ouvrage. Il n’est pas moins facile d’obtenir l’équation en partant de l’intégrale elle-même. Ces transformations rendent de plus en plus manifeste l’accord des résultats du calcul ; mais elles n’ajoutent rien à la théorie, et ne constituent nullement une analyse différente.

On examinera dans un des chapitres suivants les différentes formes que peut recevoir l’intégrale de l’équation les rapports qu’elles ont entre elles, et les cas où elles doivent être employées.

Pour former celle qui exprime le mouvement de la chaleur dans une armille, il était nécessaire de résoudre une fonction arbitraire en une série de sinus et cosinus d’arcs multiples ; les nombres qui affectent la variable sous les signes sinus et cosinus sont les nombres naturels 1, 2, 3, 4, etc. Dans la question suivante, on réduit encore la fonction arbitraire en une série de sinus ; mais les coëfficients de la variable sous le signe sinus ne sont plus les nombres 1, 2, 3, 4, etc. ces coëfficients satisfont à une équation déterminée dont toutes les racines sont irrationnelles et en nombre infini.