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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/136

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

fils, dont il est forcé d’endosser la responsabilité. Is pater est quem nuptiœ demonstrant.

» Assurément, Humbert entend mieux la vengeance que qui que ce soit au monde ; faire un enfant à madame Humbert, uniquement pour se venger, c’est de la plus haute habileté.

« Toutes les belles choses que je viens de vous exposer forment ce qu’on appelle maintenant un prologue, et ce que, autrefois, on appelait simplement le premier acte.

» Vingt ans se sont passés. Humbert est mort ruiné, et à la poursuite d’Édouard, qu’il n’a jamais pu rencontrer ; pendant vingt ans, c’est avoir du malheur dans ses recherches ! Du reste, son projet de vengeance a parfaitement réussi d’autre part : le second fils est venu, il a grandi, et, à défaut de défunt Humbert, Pietro, son fidèle serviteur, l’exerce au maniement de l’épée, en attendant le moment où on rencontrera enfin le comte Édouard, et où on pourra le tuer définitivement.

» Voilà une famille d’armuriers qui rendrait des points, en fait de vengeance*, aux vieilles familles grecques dont nos auteurs tragiques nous ont conté si longtemps les fureurs !

» Humbert et son fidèle Pietro n’ont point trouvé Édouard : je le trouve, moi qui n’ai point affaire à lui. Édouard est à Paris, où il exerce en grand le noble métier de mouchard : c’est un comte espion de la haute police. Le drame nous conserve et nous maintient toujours dans ce qu’il y a d’intéressant et d’élevé. Outre ses plaisirs d’espion, Édouard continue l’exploitation de sa haine contre le peuple : il a débauché une jeune fille avec laquelle il vit depuis deux ans ; item, il a enlevé à ses travaux d’artisan un jeune homme appelé Georges Burns, pour en faire son secrétaire ; son but est de faire de Georges un mauvais sujet, comme il a fait de Thérèse une débauchée, toujours par haine pour le peuple. On ne croirait pas à de semblables folies si on ne les avait vues et entendues. Nous ne sommes pas au bout, et voici déjà une autre histoire.

» Ce Georges Burns n’est pas autre chose que le fils d’Édouard