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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/162

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Madame se précipita aussitôt sur l’escalier, et chacun la suivit.

La cachette avait été essayée : il avait été reconnu qu’on ne pouvait y tenir que par rang de taille, et cet ordre avait été adopté. Elle pouvait, à la rigueur, contenir quatre personnes pendant le temps d’une simple visite. Arrivé à la cachette, et la plaque ouverte, M. de Ménars entra et fut suivi par M. Guibourg ; restait mademoiselle Stylite de Kersabiec, qui ne voulait point passer avant Madame. La duchesse lui dit en riant :

— En bonne stratégie, Stylite, lorsqu on opère une retraite, le commandant doit rester le dernier.

Mademoiselle Stylite entra donc, et la duchesse derrière elle.

Les soldats ouvraient la porte de la rue lorsque celle de la cachette se referma ; ils envahirent le rez-de-chaussée, précédés des inspecteurs de police de Paris et de Nantes, qui marchaient le pistolet au poing : l’un d’eux même, dans son inexpérience à se servir de cette arme, lâcha le coup, et se blessa à la main. La troupe se répandit dans la maison ; — le devoir du général avait été de la cerner, et il Pavait fait : le devoir des policiers était de la fouiller, et il les laissa faire. M. Joly reconnut parfaitement l’intérieur aux détails que lui avait donnés Deutz. Il retrouva la table, dont on ne s’était pas encore servi, avec les sept couverts mis, quoique les deux demoiselles Duguigny, madame Charette et mademoiselle Céleste de Kersabiec fassent, en apparence, les seules habitantes de l’appartement. Il commença par s’assurer de ces dames, et, montant l’escalier comme un homme habitué à la maison, alla droit vers la mansarde, la reconnut et dit assez haut pour que la duchesse l’entendit :

— Voici la salle d’audience.

Dès lors, Madame ne douta plus que la trahison que lui annonçait la lettre arrivée de Paris ne vînt de Deutz[1]. Cette

  1. La duchesse avait, à Paris, parmi les hommes que le roi Louis-Philippe. croyait les plus dévoués, des personnes qui lui rendaient compte de tout ce qui se passait aux Tuileries et au ministère ; celle