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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/173

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Dermoncourt alors, revenant à Madame, lui demanda si elle se trouvait mieux.

— Si je me trouve mieux ? Pourquoi cette question ?

— Parce que, si Madame pouvait marcher ou ne craignait pas la voiture, il serait instant que nous quittassions la maison.

— Quitter la maison ? Mais pour aller où ? demanda-t-elle finement en regardant le général ; où allez-vous donc me conduire ?

— Au châtean, madame.

— Ah ! oui, et, de là, à Blaye, sans doute !

Mademoiselle de Kersabiec s’approcha alors du général.

— Général, dit-elle, Son Altesse royale ne peut aller à pied, cela n’est pas convenable.

— Mademoiselle, répondit Dermoncourt, permettez-moi de n’être point de votre avis. Une voiture, s’il y a quelque insulte à recevoir, ce dont je doute, ne garantira pas Madame de cette insulte ; tandis que mon bras, j’en réponds, sera, sur ce point-là du moins, un bouclier sûr.

Puis, se retournant vers la duchesse :

— Croyez-moi, madame, dit-il, allons à pied. Puisque le trajet est court, vous mettrez un chapeau sur votre tête, vous jetterez un manteau sur vos épaules, et tout ira bien.

Alors, Rusconi se précipita par les escaliers, et rapporta trois chapeaux qui, probablement, appartenaient aux demoiselles Duguigny. Parmi ces chapeaux, il y en avait un noir. Dermoncourt invita la duchesse à prendre celui-là.

— Oui, dit-elle ; en effet, il semble bien approprié à la circonstance.

Alors, prenant le bras du général, et s’adressant à ses compagnons :

— Allons, mes amis, dit-elle, partons !

Puis, passant devant la mansarde, en y jetant un dernier regard, ainsi que sur la plaque de la cheminée, qui était restée ouverte :

— Ah ! général, dit-elle en riant, si vous ne m’aviez pas fait, une guerre à la saint Laurent, — ce qui, soit dit entre paren-