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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/212

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

soient pas une des pauvretés que Boileau ait faites ? Mais, au moins, Boileau se bornait à dénoncer les pièces du vieux Corneille comme faibles : il ne les dénonçait pas à la police comme immorales.

Aussi avec quelle satisfaction le critique ne termine-t-ilpas son article par ces mots :


« Nous apprenons ce soir que M. le ministre des travaux publics a donné l’ordre de cesser la représentation de cette pièce.


Maintenant suivons le drame de notre ami Victor Hugo devant le tribunal de commerce, comme nous l’avons suivi sur la scène du théâtre Richelieu ; seulement, laissons parler l’auteur lui-même. — La prose de M. Victor Hugo vaut bien la mienne ; par conséquent, mes lecteurs ne se plaindront pas.


« L’apparition de ce drame au théâtre a donné lieu à un acte ministériel inouï.

» Le lendemain de la première représentation, l’auteur reçut de M. Jouslin de la Salle, directeur de la scène au Théâtre-Français, le billet suivant, dont il conserve précieusement l’original :


« Il est dix heures et demie, et je reçois à l’instant l’ordre de suspendre les représentations du Roi s’amuse. C’est M. Taylor qui me communique cet ordre de la part du ministre.

» Ce 23 novembre. »

« Le premier mouvement de l’auteur fut de douter. L’acte était arbitraire au point d’étre incroyable.

» En effet, ce "qu’on a appelé la Charte-Vérité dit : « Les Français ont le droit de publier… » Remarquez que le texte ne dit pas seulement le droit d’imprimer, mais largement et grandement le droit de publier. Or, le théâtre n’est qu’un moyen de publication comme la presse, comme la gravure, comme la lithographie. La liberté du théâtre est donc im-