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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/24

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

La Fayette aussi se refusait à toute démarche auprès du roi.

— Pourquoi cette répugnance, cria une voix. Le duc d’Orléans n’est-il pas la meilleure des républiques ?

— Ah ! puisque l’occasion se présente de démentir ce propos que l’on m’a faussement attribué, cria le noble vieillard, je le démens !

Enfin, on nomma trois commissaires, non pas pour aller faire amende honorable au nom de l’insurrection, mais pour implorer la clémence du roi en faveur de ceux qui tenaient encore.

Ces trois commissaires étaient François Arago, le maréchal Clausel et Laffitte.

Clausel se récusa ; Odilon Barrot lui fut substitué.

Nous n’avions pas pu entrer dans la salle des délibérations, nous autres jeunes gens ; mais, dans la cour, j’avais rencontré Savary, — Savary le membre de l’institut, le grand géomètre, le physicien, l’astronome, l’homme de bien que la mort, à peine au milieu de l’âge qu’il devait vivre, enleva depuis aux sciences et au pays ! ’

Nous étions très-frères d’opinion, et, comme notre république, à nous, n’était pas celle de tout le monde, quand nous nous rencontrions, nous nous accrochions à l’instant même pour bâtir nos utopies.

Nous nous étions donc rencontrés, nous nous étions donc accrochés, et nous attendions ensemble.

Arago sortit le premier. Nous courûmes à lui.

Louis Blanc, qui, dans son excellente Histoire de Dix Ans, n’a laissé échapper aucun détail de cette grande période, mentionne notre entrevue en ces termes :

« En sortant, M. Arago rencontra dans la cour Savary et Alexandre Dumas, un savant et un poète ; très-animés l’un et l’autre, ils n’eurent pas plus tôt appris ce qui venait de se passer chez M. Laffitte, qu’ils éclatèrent en discours pleins d’emportement et d’amertume, disant que Paris, pour se soulever, n’avait attendu qu’un signal, et qu’ils s’étaient rendus