CCXLV
Le 7 juin, au matin, Harel était chez moi.
— Allons, me dit-il, cher ami, il s’agit de ne pas perdre son temps… Voilà le calme rétabli ; comme après toutes les grandes secousses, il va y avoir une réaction en faveur des théâtres. Il faut bien oublier le choléra et l’émeute : le choléra est mort de sa belle mort, l’émeute est tuée ; ce qui prouve que Louis-Philippe est plus fort que Broussais. — Où en sommes-nous du Fils de l’Émigré ?
— Cher ami, il y a trois actes faits.
— Faits… écrits ?
— Faits, écrits ! mais je vous déclare que, pour le moment, je serais incapable de m’y remettre… Je suis écrasé de fatigue, brûlé de fièvre ; je ne mange plus !
— Finissez le Fils de l’Émigré, et puis faites un voyage… Vous allez gagner un argent fou, cet été : vous pourrez bien vous reposer un peu !
— Avez-vous de l’argent à me donner ?
— Combien vous faut-il ?
— Un millier de francs… deux peut-être… et l’autorisation de tirer sur vous pour autant.
— Donnez-moi mes deux derniers actes, et je vous donne argent et traite.
— Vous savez que je trouve cela exécrable.
— Quoi ?
— Le Fils de l’Émigré.
— Bah ! vous nous en disiez autant de la Tour de Nesle… Georges est enchantée du prologue, et Provost aussi.