Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
77
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

plomb, parmi lesquels se trouvaient bon nombre de Cosaques irréguliers. Un peintre qui faisait son portrait, M. Hummel s’approcha de lui.

— Avez-vous jamais vu des Cosaques, monseigneur ? demanda-t-il.

— Oui, certainement, j’en ai vu, répondit l’enfant : ce sont les Cosaques qui nous ont escortés quand nous sommes sortis de France.

Le portrait du prince achevé, le peintre demanda à M. Dietric hstein son précepteur :

— De quel ordre dois-je décorer Son Altesse, monsieur le comte ?

— De l’ordre de Saint-Étienne, que Sa Majesté l’empereur d’Autriche lui a envoyé au berceau.

— Mais, monsieur le comte, dit l’enfant, outre celui-là, j’en avais encore beaucoup d’autres !

— Oui, monseigneur ; mais vous ne-les portez plus.

— Pourquoi ?

— Parce qu’ils ont été abolis.

Pauvre enfant ! ce n’étaient point les ordres qui étaient abolis : c’était sa fortune qui était tombée.

À cet âge, le duc de Reichstadt était parfaitement beau, avec ses grands yeux d’azur, avec son teint qui semblait fait de feuilles de rose, avec ses longs cheveux blonds bouclés, tombant sur ses épaules. Chacun de ses mouvements était plein de grâce et de gentillesse ; il parlait le français avec l’accent particulier aux Parisiens.

Il fallut lui apprendre l’allemand ; ce fut une grande affaire, une lutte de tous les jours, un combat de tous les moments.

— Si je parle allemand, disait-il, je ne serai plus du tout Français !

Cependant, le duc de Reichstadt dut se résigner à apprendre la langue de M. de Metternich ; et ce fut, lorsqu’il la sut, celle qu’il parla constamment avec les princes de la famille impériale.

Un jour, un courrier de M. de Rothschild arriva à Vienne ;