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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

il apportait une grande nouvelle, une de ces nouvelles qu’annonçaient autrefois les comètes et les tremblements de terre : Napoléon était mort le 5 mai 1821 !

La nouvelle arrivait à Vienne le 22 juillet ; — le jour où, trois ans auparavant, le duc de Reichstadt avait perdu son nom ; le jour où, onze ans plus tard, il devait perdre la vie.

Le comte de Dietrichstein était absent ; l’empereur chargea M. Foresti d’apprendre la fatale nouvelle au jeune duc, qui venait d’achever sa dixième année.

M. Foresti adorait le prince : il était près de lui depuis 1815. Il lui annonça cette nouvelle avec toute sorte de ménagements ; mais, au premier mot qu’il prononça :

— Mon père est mort, n’est-ce pas ? dit le prince.

— Monseigneur…

— Il est mort ?

— Eh bien, oui !

— Comment voulait-on qu’il vécût… là-bas s’écria l’enfant.

Et il fondit en larmes.

Le jeune duc, contre les habitudes de l’étiquette impériale, porta le deuil un an ; il insista lorsqu’on voulut le lui faire quitter. On en référa à l’empereur, qui répondit :

— Laissez faire au cœur de l’enfant.

Veut-on savoir de quelle façon la nouvelle fut officiellement annonçée à la cour de Vienne ? Voici la lettre originale désir Hudson Lowe à M. le baron de Sturmer :


« Sainte-Hélène, 27 mai 1821.
 » Monsieur le baron,

» Il n’existe plus ! Une maladie héréditaire, suivant l’opinion de sa famille, l’a conduit au tombeau, le 5 de ce mois : un squnre et cancer à l’estomac près du pylore. En ouvrant le corps, avec le consentement des personnes qui l’entouraient, on a découvert, près du pylore, un ulcère qui causait des adhésions au foie ; et, en ouvrant l’estomac, on a pu tracer les progrès de la maladie. L’intérieur de l’estomac, presque entier,