Dans la rue (Bruant)/À Montmerte

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Aristide Bruant (Volume Ip. np-171).


À MONTMERTE


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\addlyrics {
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _
_ _ _ _
Mal -- gré que j’soye un ro -- tu -- rier, 
Le der -- nier des fils d’un Poi -- rier 
D’la ru’ "Ber - the," 
De -- puis les temps les plus an -- ciens, 
Nous ha -- bi -- tons, moi z-et les miens, 
À Mont -- "mer - te."
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Malgré que j’soye un roturier,
Le dernier des fils d’un Poirier
            D’la ru’ Berthe,
Depuis les temps les plus anciens,
Nous habitons, moi-z-et les miens,
            À Montmerte.


L’an mil-huit-cent-soixante et dix,
Mon papa qu’adorait l’trois-six
            Et la verte,
Est mort à quarante et sept ans,
C’qui fait qu’i’ r’pose d’puis longtemps,
            À Montmerte.

Deux ou trois ans après je fis
C’qui peut s’app’ler, pour un bon fils,
            Eun’ rud’ perte :
Un soir, su’ l’ boul’vard Rochechouart,
Ma pauv’ maman se laissait choir,
            À Montmerte.


Je n’fus pas très heureux depuis,
J’ai ben souvent passé mes nuits
            Sans couverte,
Et ben souvent, quand j’avais faim,
J’ai pas toujours mangé du pain,
            À Montmerte.


Mais on était chouette, en c’temps-là,
On n’sacrécœurait pas sur la
            Butt’ déserte,
Ej’ faisais la cour à Nini,
Nini qui voulait fair’ son nid,
            À Montmerte.


Un soir d’automne, à c’qu’i’ paraît
Pendant qu’la vieill’ butte r’tirait
            Sa rob’ verte,
Nous nous épousions, dans les foins,
Sans mair’, sans noce et sans témoins,
            À Montmerte.



Depuis nous avons des marmots :
Des p’tit’s jumell’s, des p’tits jumeaux
            Qui f’ront, certe,
Des p’tits Poirier qui grandiront,
Qui produiront et qui mourront,
            À Montmerte.

Malgré que j’soye un roturier,
Le dernier des fils d’un Poirier
            D’la ru’ Berthe,
Depuis les temps les plus anciens,
Nous habitons, moi-z-et les miens,
            À Montmerte.