Aller au contenu

Les Fleurs du mal/1868/À Théodore de Banville

La bibliothèque libre.

Spleen et idéal
Les Fleurs du mal (1868)Michel Lévy frèresŒuvres complètes, vol. I (p. 108).

XVI

À THÉODORE DE BANVILLE

— 1842 —


Vous avez empoigné les crins de la Déesse
Avec un tel poignet, qu’on vous eût pris, à voir
Et cet air de maîtrise et ce beau nonchaloir,
Pour un jeune ruffian terrassant sa maîtresse.

L’œil clair et plein du feu de la précocité,
Vous avez prélassé votre orgueil d’architecte
Dans des constructions dont l’audace correcte
Fait voir quelle sera votre maturité.

Poëte, notre sang nous fuit par chaque pore ;
Est-ce que par hasard la robe de Centaure,
Qui changeait toute veine en funèbre ruisseau,

Était teinte trois fois dans les baves subtiles
De ces vindicatifs et monstrueux reptiles
Que le petit Hercule étranglait au berceau ?