André del Sarto (Charpentier, 1888)/Notice

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Charpentier (Œuvres complètes d’Alfred de Musset, tome III. Comédies, ip. 139-140).
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NOTE


Ce drame, écrit et publié en 1833, fut représenté pour la première fois au Théâtre-Français le 21 novembre 1849, avec peu de changements. On avait poussé le soin de la mise en scène jusqu’à faire exécuter une copie du tableau de la Charité que possède la galerie du Louvre, et l’on s’était assuré que cette copie produisait de loin l’effet nécessaire à l’illusion du spectateur. Cependant le parterre, sachant bien qu’il n’avait pas sous les yeux le tableau original, accueillit avec un rire frivole l’exhibition de cette toile et ne prit pas au sérieux l’adieu poétique adressé par André del Sarto à son dernier chef-d’œuvre. La pièce, d’ailleurs, fut écoutée froidement ; elle n’eut qu’un petit nombre de représentations. Le même ouvrage, représenté au théâtre de l’Odéon le 21 octobre 1850, avec les changements que nous venons d’indiquer, obtint un grand succès. Malgré l’heureux résultat de cette seconde épreuve, la supériorité du premier texte nous semble incontestable.

Au moyen des variantes, les lecteurs curieux pourront comparer les deux versions. Dans la seconde, on remarquera que, dès l’exposition, Lucrèce et Cordiani ont pris la résolution de s’enfuir ensemble. L’unité de lieu est rigoureusement observée, et la pièce, réduite à deux actes au lieu de trois, marche vers son dénoûment avec une rapidité que nous trouvons exagérée, vu les énormes sacrifices que l’auteur s’est cru obligé de faire. Après le duel entre Cordiani et André del Sarto, on ne voit plus reparaître ni Lucrèce ni Cordiani. La scène où ces deux personnages se rencontraient devant la maison de la mère de Lucrèce a été supprimée. Pour éviter l’exhibition du tableau de la Charité, il fallut retrancher la scène où les envoyés de François Ier venaient demander compte à André de l’argent du roi de France. Cette coupure est tout à fait regrettable : après avoir montré André del Sarto dévoré de remords, et tremblant à l’idée de rendre ses comptes, c’était une conception éminemment dramatique que de le faire voir exalté par le chagrin et malheureux de l’infidélité de sa femme, au point de ne plus redouter la honte et de s’accuser lui-même du vol qu’il a commis.

Quant aux nombreux passages supprimés dans le dialogue, ce sont des changements qu’on ne doit pas considérer comme définitifs. Il est évident, par exemple, que l’auteur a fait preuve de trop de complaisance ou de modestie en consentant à effacer de la dernière scène le charmant récit des souvenirs d’enfance qui se présentent à l’esprit d’André au moment où il va mourir. Probablement, lorsque la pièce reviendra au théâtre, ces longueurs ces scènes réputées inutiles ou dangereuses finiront par être restituées dans leur entier.

Voici quelle était la distribution des rôles au théâtre de l’Odéon :

ANDRÉ DEL SARTO. MM. Tisserand.
CORDIANI. Martel.
DAMIEN. Harville.
LIONEL. Fleuret.
GRÉMIO. Roger.
MATHURIN. Talin.
CÉSARIO. Mlle  Bilhaud.
LUCRÈCE. Siona-Lévy.
SPINETTE. Jeanne-Anaïs.