Biographie universelle ancienne et moderne/2e éd., 1843/SANNAZAR (Jacques)

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Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843
Tome 37 page 644 à 648

SANNAZAR (Jacques)


SANNAZAR (Jacques), Poëte célèbre, naquit à Naples, le 18 juillet 1458. Sa famille, originaire d’Espagne, s’était établie à San-Nazaro, château situé entre le Pô et le Tessin, non loin de Pavie. Un de ses chefs avait suivi Charles III de Duras à la conquête du royaume de Naples et il avait obtenu de ce prince des concessions et des privilèges que ses héritiers ne gardèrent pas longtemps. Jeanne II, en montant sur le trône, n’épargna pas les favoris de ses prédécesseurs, et les San-Nazaro n’avaient plus qu’un beau nom et un patrimoine borné, lorsque Jacques vint au monde. Il commença ses études sous Giuniano Maggio, célèbre instituteur napolitain ; mais bientôt l’amour s’empara de son cœur à un âge inaccoutumé. A huit ans, il aima une noble damoiselle dont le nom n’est pas bien connu, quoiqu’il en soit souvent fait mention dans ses vers (1)[1]. Obligé de s’éloigner de la capitale pour suivre sa mère en province, le jeune Sannazar éprouva de bonne heure les chagrins de l’absence. Pendant tout le temps qu’il vécut dans le petit village de Santo-Mango, d’où sa mère tirait son nom et son origine (2) [2], il ne fit que regretter son amie et son maître. C’est au milieu de ces montagnes, à l’ombre des forêts, dans le silence de la nature, que son imagination se développait, en rêvant au bonheur et aux occupations des bergers. Le besoin d’élever ses enfants ramena la mère de Sannazar à Naples, où elle le replaça sous la direction de son ancien précepteur, qui lui apprit en peu de temps le latin et le grec. La passion du jeune élève hâta ses progrès. Maggio parla de lui comme d’un prodige à Pontanus, qui témoigna le désir de le connaître, et il le prit tellement en affection, qu’après lui avoir ouvert sa maison, il ne le crut pas indigne d’appartenir à son académie. Le zèle de Pontanus, les travaux de ses collègues et la protection dont ce corps était honoré par les Princes aragonais, l’avaient élevé au plus haut degré de splendeur. Mais Sannazar, trop malheureux dans ses affections, qu’un excès de timidité l’empêchait de manifester, n’était pas en état de jouir à ces distinctions ; et ce fut au milieu même de son triomphe qu’il fut sur le point d’attenter à son existence. Mieux inspiré, il prit la résolution de quitter son pays, espérant trouver dans les voyages quelque soulagement à ses peines. On a prétendu qu’il se rendit en France, dont on suppose que l’Arcadia, un de ses ouvrages les plus estimés, offre le tableau et les mœurs. Mais pour donner de la vraisemblance à cette opinion, il faudrait prouver d’abord que les palmiers de l’Egypte (1)[3] ombragent le sol de la France, et dériver les eaux de l’Alphée (2)[4], dont, à son retour à Naples, le poète est obligé de suivre le cours. Le seul souvenir qui reste de ce voyage, c’est celui d’une grave maladie dont Sannazar fut atteint et qui, dans un moment de danger, lui fit craindre de mourir loin de sa patrie, hors des bras de sa mère et sans avoir eu le temps de retoucher les écrits qui auraient pu lui procurer une gloire immortelle. A peine fut-il rétabli, qu’il se décida à retourner à Naples, où de nouveaux chagrins l’attendaient. Charmosyne (3)[5] (tel est le nom sous lequel il désigne quelquefois sa maîtresse) n’existait plus ; et son amant ne put que répandre des fleurs tardives sur la tombe qui la dérobait à ses yeux. Il eut aussi bientôt à pleurer la mort de sa mère, qu’il avait toujours aimée tendrement. Cédant alors aux conseils de ses amis, il alla passer quelque temps à Montella, chez le comte Cavaniglia, son confrère à l’académie de Pontanus. Ce séjour fut consacré par les crayons d’André de Salerne Voy. SABBATINI), qui, chargé de peindre un tableau pour un couvent de cette ville, eut l’idée de grouper aux pieds de la Vierge les hôtes de Cavaniglia, dont il emprunta les traits pour retracer ceux des apôtres (4)[6]. En attendant, Sannazar acquérait tous les jours plus de considération. L’accueil que le public faisait à ses vers les rendit célèbres à la cour, où l’auteur fut bientôt appelé. Il vécu dans l’intimité des princes aragonais, auxquels il se dévoua entièrement. Voulant flatter leur goût, il composa plusieurs de ces comédies connues sous le nom de Gliommeri (Glomerus) ou peloton, peut-être à cause de l’art avec lequel l’action en était déroulée. Une de ces pièces fut représentée sur le théâtre de la cour pour célébrer la prise de Grenade et la chute des Maures en Espagne (1)[7]. C’est de toutes ces farces de Sannazar la seule qui soit arrivée jusqu’à nous. Elle est écrite en italien, à la différence des autres, qui étaient, dit-on, en dialecte napolitain (2)[8]. Sannazar ne se bornait pas à amuser ses protecteurs ; il savait aussi les défendre. Lorsque le duc Alphonse se mit à la tète d’une armée pour envahir les Etats de l’Eglise, Sannazar le suivit (3)[9] dans cette désastreuse campagne, qui fut une des causes des malheurs de la maison d’Aragon. Le faible Alexandre VI se contenta de travailler, avec Ludovic Sforza, à appeler en Italie les armes de Charles VIII ; et la conquête que ce monarque fit du royaume de Naples sépara Sannazar des princes aragonais, qui s’étaient réfugiés en Sicile. Il leur resta attaché par ses sentiments et ne flatta pas, comme Pontanus, l’orgueil de leurs vainqueurs (4)[10], dont le triomphe ne fut que momentané. Au retour de Ferdinand II, le courageux dévouement de Sannazar fut payé d’indifférence ; et ce ne fut que sous le règne du successeur de ce monarque qu’il en fut récompensé. Frédéric, en prenant les rênes de l’Etat, s’empressa d’y rétablir l’ordre public, d’éteindre l’esprit de faction et d’accorder une généreuse protection aux lettres et aux arts. Au milieu de ces graves occupations, les services de Sannazar ne furent point oubliés, et le roi lui fit présent de la villa de Mergellina, ancienne résidence des princes angevins, que le poète a immortalisée dans ses vers. Ces bienfaits attachèrent de plus en plus Sannazar à la fortune de Frédéric, qu’il accompagna dans l’exil, lorsque, attaqué par les armées combinées de la France et de l’Espagne, son sceptre se brisa sous les efforts de ceux mêmes qui auraient dû le défendre. Dépossédé de sa couronne, Frédéric vint chercher un asile en France, où il trouva dans Sannazar un compagnon dévoué et désintéressé de ses disgrâces. Ce fidèle serviteur vendit la plus grande partie de son héritage au profit de celui qui avait contribué à l’agrandir ; et, après avoir fait des tentatives inutiles pour le replacer sur le trône, il revint à Tours afin de lui fermer les yeux, regrettant de confier ses cendres à une terre étrangère. Ce triste voyage ne fut pas sans avantage pour les lettres. Sannazar ramassa un grand nombre de manuscrits contenant des ouvrages peu connus ou ignorés d’anciens auteurs ; et c’est à ses soins que l’on doit les poèmes de Gratius Faliscus, d’Olympius Némésien, de Rutilius Numatianus, et quelques fragments d’Hippocrate, d’Ovide et de Solin. Après la mort de Frédéric, toutes les affections de Sannazar le rappelaient en Italie, où l’Arcadia venait d’être publiée. Cet ouvrage, malgré quelques défauts, obtint, lorsqu’il parut, l’assentiment général ; et soixante éditions, exécutées dans le cours du 16e siècle, déposent que ce succès contemporain ne s’affaiblit point sous les générations suivantes. Toutes les classes de la société s’empressaient de lire cette élégante production, à laquelle on ne trouvait rien à comparer dans la littérature moderne. Gonzalve de Cordoue, qui avait plus que tout autre contribué à la chute des Aragonais, mit en usage tous les moyens pour se rapprocher d’un si beau génie. Il aurait désiré lui faire célébrer ses triomphes ; mais celui qui avait quitté sa patrie pour suivre un roi dans l’exil n’était pas disposé à chanter les exploits de cet heureux conquérant. Sannazar tempéra la rigueur de ce refus en se rendant à l’invitation qui lui fut adressée par le grand capitaine de l’accompagner dans une tournée qu’il se proposait de faire à Pouzzoles et à Cumes, pour y admirer les derniers débris de la grandeur romaine. Jamais peut-être un plus illustre étranger ne s’y présenta assisté par un plus éloquent interprète. On rapporte que pendant le chemin Gonzalve lui parlait des victoires récentes de l’Espagne et que Sannazar lui rappelait la vieille gloire de l’Italie. « Il ne nous reste plus d’ennemis à combattre », disait le guerrier, « C’est ainsi que parlaient nos ancêtres », répondait le poète, en ayant l’air de lui en dire davantage. Sannazar, en rentrant dans sa patrie, y avait trouvé plus de réputation que de bonheur. Il n’y apercevait plus aucun des objets de son culte et de ses affections. En mettant le pied sur le sol natal, il aurait pu se croire encore sur une terre d’exil. Pontanus avait aussi terminé sa carrière en déshonorant par un acte de déloyauté les derniers jours de sa vieillesse. L’académie qu’il avait fondée lui avait survécu, et c’est parmi ses confrères que Sannazar vint chercher un dédommagement aux pertes douloureuses qu’il avait essuyées. On prétend qu’il en trouva même dans les bras de l’amour, où il osa se jeter de nouveau, malgré son âge avancé et ses premiers souvenirs. Cette inconstance peut s’expliquer par la trempe de son caractère, trop tendre pour n’être point passionné. Mais peut-être s’est-on trompé à l’expression de ses sentiments. Sous la plume animée du poète, chaque amie peut devenir une amante. C’est peut-être dans quelques vers adressés à une dame de la cour de Ferdinand II qu’on crut découvrir cette flamme, que les imitateurs de Pétrarque parviennent si difficilement à éteindre dans leurs poésies. Obligé de sortir de Naples pour ne mettre à l’abri de la peste qui s’y était développée en 1527, Sannazar, parvenu à un âge très-avancé, se réfugia dans un village au pied de Vésuve, non loin de la retraite où vivait Cassandra Marchèse, cette dame à laquelle on prétend qu’il avait consacré ses dernières pensées. Dès que la contagion eut cessé, il quitta cet asile et reprit ses occupations ordinaires, que la mort vint interrompre au bout de quelque temps. Il expira le 27 avril 1530, âgé de 72 ans (1)[11]. Ses restes reposent dans un magnifique tombeau élevé à grands frais dans une église (2)[12] que Sannazar fit bâtir sur l’emplacement même de son palais de Mergellina. Ce monument fut exécuté a Carrare par Jean-Ange Poggibonsi, de Montorsoli (3)[13], servite, d’après les dessins de Santacroce, sculpteur napolitain, qui a fourni le bas-relief et le buste. Bembo y fit graver le distique suivant :

De sacro crinari flores : hic ille Maroni
Syncerus musa proximus, ut tumulto.

En entrant dans l’académie de Pontanus, Sannazar reçut le nom d’Actius Sincerus, qui lui est donné dans ce distique et sous lequel il a publié la plupart de ses ouvrages. Il en a composé en italien et en latin : ces derniers sont plus nombreux et les plus estimés. Dans les élégies, il s’est rapproché de Properce, qu’il s’était proposé pour modèle : il faut lui savoir gré d’en avoir su plier le style à exprimer d’autres peines que celles de l’amour. Sannazar sait les oublier pour pleurer la mort de ses amis et plaindre le malheureux sort de sa patrie. Dans un poème sur l’Enfantement de la Vierge, il s’est élevé avec ce sujet si délicat, et il a réussi à ne le point profaner, quoiqu’il se soit jeté dans tous les détails de ce mystère. Le seul reproche qu’on pourrait lui adresser, c’est d’avoir mêlé les rêves du paganisme au langage de la foi et d’avoir rendu l’enfer presque fabuleux, en y renouvelant les supplices de Tartare. Mais au siècle où Sannazar vivait, l’étude de l’antiquité exerçait une telle influence par la littérature et particulièrement sur la poésie, qu’on aurait cru violer les règles de l’épopée en lui refusant l’appui de la fable. Ces accusations, que depuis Erasme on reproduit chaque fois qu’on parle du poème de l’Enfantement, n’empêchèrent pas deux papes, le regardant comme un ouvrage édifiant, d’envoyer des témoignages d’admiration à l’auteur. On a prétendu que Sannazar, encouragé par l’exemple de Bembo, avait osé aspirer à la pourpre romaine. C’est une erreur qu’il est facile de détruire en rappelant que Bembo ne reçut le chapeau qu’en 1539, c’est-à-dire neuf ans après la mort de Sannazar. Son poème, qui n’a que trois chants, lui avait coûté vingt ans de travail : chaque vers était soumis à l’examen de Poderico, vieillard vénérable, devenu aveugle, mais d’un jugement sûr, et Sannazar était souvent condamné à refaire dix fois le même vers avant de réussir à contenter cet aristarque. Cet excès de sévérité pouvait ôter à l’ouvrage cette spontanéité qui est le mérite principal d’un poème. Cependant en lisant ces vers, si péniblement travaillés, on est étonné de n’y rien apercevoir qui annonce la contrainte. Ce poème, qui avait obtenu les éloges de Léon X, auquel il était destiné, ne parut que sous les auspices de Clément VII, qui en fit également témoigner sa satisfaction à l’auteur. Ces marques d’estime que Sannazar recevait de la cour de Rome ne suffisaient pas pour étouffer son ressentiment contre Alexandre VI et César Borgia, regardés par lui comme les instruments principaux de la chute des Aragonais. Les épigrammes dont il les accabla lui ont fait attribuer à tort un caractère haineux. Les traits lancés contre Politien partaient de la main qui avait juré une amitié éternelle à Marulli, auquel le favori des Médicis ne pardonnait pas de lui avoir enlevé sa maîtresse. Si l’on excepte les épigrammes contre les papes et le duc de Valentinois, on rencontre dans les écrits de Sannazar bien peu de pages qui puissent justifier cette assertion calomnieuse. Ce qu’on a dit de sa rancune contre le prince d’Orange n’est pas moins inexact. Sannazar, qui cessa de vivre en avril 1330, ne pouvait pas se réjouir de la mort de ce général, tué le 3 août suivant (Voy. ORANGE). Il était naturel qu’il fût mal disposé coutre le destructeur d’une maison de campagne à laquelle il était attaché par les plus touchants souvenirs, bien différent de la plupart des hommes en faveur, Sannazar ne se laissa jamais éblouir par la protection que son roi lui accordait. Il vivait auprès de lui plutôt en ami qu’en courtisan. Malgré toutes les calamités auxquelles il se trouva exposé sur le retour de l’âge, il sut conserver cette tranquillité d’âme, cette égalité de caractère, dont on aime à reconnaître l’empreinte dans tous ses ouvrages. Sannazar a chanté avec le même transport les amours des bergers et les occupations des pécheurs, et pourtant l’Arcadia est l’ouvrage de sa jeunesse et les Eglogues un des fruits de son âge mûr. Par la première, il releva la poésie italienne de l’état de langueur où l’avaient jetée les froids imitateurs de Pétrarque ; et il donna dans les autres un modèle achevé d’un nouveau genre de poésie à peine soupçonné par les Grecs et entièrement inconnu aux Latins. Ses Eglogues pescatoris sont la source à laquelle on a puisé dans la suite, toutes les fois qu’on a voulu retracer les travaux et les mœurs des pécheurs. Sannazar, qui écoutait presque avec impatience les éloges prodigués à l’Arcadia, se glorifiait lui-même d’avoir été l’inventeur de la poésie maritime (Voy. ROTA). On a pourtant cherché à répandre des doutes sur l’originalité de ces Eglogues, en leur opposant une idylle de Théocrite (la 21e), qui se rapproche du genre sans en avoir les caractères : car les personnages n’ont de pécheurs que le nom, tandis que Sannazar déroule le tableau complet de la vie d’une classe d’hommes échappés à l’observation de l’antiquité. Il faut pardonner à Fontenelle le reproche qu’il lui adresse d’avoir fait un mauvais échange des bergers avec les pécheurs. Il est bien permis à un habitant de Paris de ne pas concevoir le charme que l’on éprouve, étant à Naples, à suivre de l’œil ce peuple de bateliers, empressés à gagner le rivage pour y déposer leur proie, y étendre leurs filets et se délasser de leurs travaux. Il ignorait, sans doute, l’effet ravissant de ces groupes balancés sur les vagues argentées d’une mer que la tempête embellit comme le calme. Il existe un si grand nombre de réimpressions des œuvres de Sannazar, que ce serait une témérité de vouloir les indiquer toutes : nous nous bornerons à faire quelques remarques sur les plus estimées. 1e Arcadia, Venise, Vercellese, 1502, in- 6°, très-rare, mais dont on a eu tort de douter, car elle est citée dans le Catalogue de la bibliothèque Capponi. C’est la première édition de l’Arcadia exécutée sans l’aveu du poète, qui se plaignit même de cette publication prématurée. L’Arcadia fut réimprimée à Naples, en 1504, par Summonte, ami de l’auteur, et cette édition a servi de modèle à toutes les autres. Cet ouvrage est un mélange de prose et de vers à la manière de l’Ameto de Boccace, qui a été le premier à écrire dans ce genre. Sannazar y fit usage d’une espèce de vers que les Italiens appellent sdruccioli et qu’on pourrait nommer dactyles, dont il n’a pas été l’inventeur, comme on l’a cru, mais qu’il a maniés avec beaucoup de facilité et de goût. Il empruntait des mots sdruccioli à la langue latine toutes les fois qu’il n’en trouvait pas de convenables en italien,

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lien, ce qui donne souvent à ses églogues un air tant soit peu bizarre. On doit à Jean Martin une traduction française de l’Arcadia, Paris, Vascosan, 1544, in-8e. 2e Sonetti e Canzoni, Naples, 1530, in-4., très-rare. Si dans ces poésies Sannazar ne s’est montré qu’un imitateur de Pétrarque, il faut convenir qu’il en a été le plus élégant. L’Arcadia, les Sonetti, les Canzoni, une petite pièce sur la prise de Grenade et quelques lettres qui composent le Recueil complet des ouvrages italiens de Sannazar, ont été publiés, en 1723, en un seul volume in-4, à Padoue, précédés de la vie du poète écrite par Crispe de Gallipoli. 3e De partu Virginie lib. 3. — Eglogae 5. — Salices et lamentario de morte Christi, Naples, 1526, in-4. Le poème de l’Enfantement de la Vierge ne fut achevé qu’après le dernier retour de l’auteur, ce qui n’empêche pas qu’il ait pu être commencé même avant son départ. Dans quelques éditions postérieures, on a inséré les deux brefs de Léon X et de Clément VII ; le premier rédigé par Bembo et l’autre par Sadolet. Ce poème, qui valut à Sannazar le titre de Virgile chrétien, a été traduit en français par Colletet, qui l’a intitulé les Couches sacrées de la Vierge, Paris, 1646 (1)[14], et en italien par Giolito, Casaregi, Bigoni et Lazzari. Les Eglogues sont au nombre de cinq et probablement les seules que Sannazar ait composées. Ceux qui, sur l’assertion de Giovio et de Paul Manuce, ont cru qu’un pareil nombre s’était égaré pendant le séjour du poète en France n’ont pas réfléchi que la quatrième églogue est adressée à Ferdinand d’Aragon, retenu prisonnier à Madrid après la mort de son père, et la cinquième à Cassandre Marchese, à laquelle Sannazar ne s’attacha qu’après son retour à Naples. Le poème sur l’Enfantement et les autres poésies latines de Sannazar furent réimprimés ensemble, en 1719, à Padoue, in-4o, précédés de la vie du poète, écrite en latin par J.-Ant. Volpi. Cette édition contient, entre autres, les épigrammes que des éditeurs plus scrupuleux ont quelquefois supprimées, par égard pour la cour de Rome ; une des plus belles est celle que l’auteur composa pour Venise, et dont il fut noblement récompensé par le sénat de cette ville. Sannazar avait une telle prédilection pour Virgile et Properce qu’il célébrait tous les ans la tète du premier par un banquet, dans lequel un de ses valets lui récitait les vers du second. Ce domestique était un nègre, auquel le maître avait imposé son propre nom : ce qui a fait dire à Lenfant dans le Poggiana que le poète Sannazar n’était pas un chevalier napolitain, mais un affranchi d’Actius Sincerus. La vie de Sannazar a été écrite par Crispo, Giovio, Porcacchi, Volpi, et en dernier lieu par Mgr Colangelo, dont l’ouvrage a été réimprimé en 1820, in 8o. A-g-s.

SAN PIETRO. Vegas SAMPIETRO.

SAN PLANCAT. Voyez CAMOT.


  1. (1) Crispo, Volpi et tous ceux qui les ont copiés ont donné à cette demoiselle le nom de Carmosina Bonifacio, Mgr Coanangela combat cette assertion en invoquant le témoignage de Fabrice de Luna, qui dans un dictionnaire imprimé à Naples, en 1636, dit positivement que la personne aimée par Sannazar était une fille de Pontanus. Malgré cette autorité, nous douterons encore de la déconcerte. Il nous parait en effet peu probable que celui qui jouait tous les jours et même a chaque heure (Voyez la 7e prose de l’Arcadia) avec la fille, fût resté inaperçu au père ; car Sannazar ne fut présenté à Pontanus, que peu avant d’entrer dans son académie.
  2. (2) La mère de Sannazar s’appelait Masella Santo-Mango et descendait d’une noble famille salernitaise. Devenue veuve, elle quitta Naples et se retira dans une terre appartenant à ses parents, et qui en portait le nom. Sannazar en parle dans une de ses élégies, où il dit :

    At mihi pagana dictant silvestria Musa
    Carmina !

    ce qui a fait croire à quelques-uns qu’il avait habité la ville de Nocera de Pagena. Mais il aurait été facile d’échapper à cette erreur en consultant une autre élégie (la 2e du 2e livre) où Sannazar a consigné les souvenirs de son enfance. La description qu’il y fait de sa retraite ne laisse aucun doute sur celle que nous lui avons assignée. La terre de Santo-Mango est près de San Cipriano, dans le comté de Gifuni, à environ quatre lieues de Salerne ; les montagnes et les forêts y portent les mêmes noms que ceux qui lui sont donnés par Sannazar.

  3. (1) La orientale palma (Arcad., 1ère prose).
  4. (2) Voyez dans la 12e prose de l’Arcadia, la description du voyage sous-marin que le poète est obligé de faire en revenant à Naples.
  5. (3) Sannazar l’appelle indistinctement Philis, Amaranthe et Chermosyne : ce qui prouve que ce sont des noms purement poétiques. Dans presque toutes les éditions on lit Hermosynen ; nous avons préféré Chermosynen, qui en grec signifie joie, comme Philis, amour et Amaranthe, immortelle.
  6. (4) Ce tableau fait maintenant partie de la galerie Borbonia, à Naples.
  7. (1) Il fut joué, le 4 mai 1492, en présence d’Alphonse, duc de Calabre, au château Capurno.
  8. (2) C’est Volpi qui l’assure ; il avait rassemblé plusieurs de ces Gliommeri, qui devaient faire partie de la belle édition de Sannazar ; mais, en ayant trouvé le style bas et vulgaire, il crut devoir les supprimer, craignant qu’elles ne portassent atteinte à la réputation du poète.
  9. (3) On s’est trompé en disant que Sannazar avait suivi Alphonse en Toscane. Il ne dépassa point la ville de Rome, comme il nous l’apprend lui-même dans la 1ère élégie du 11e livre. Le poète y raconte ce qu’il a vu dans le cours de cette expédition. Ipse ego quae vidi referum : et il ne vit que Tuscula latius (Tusculum ou Franscati, et non pas la Toscane ; limpha aniena : la cascade de Tivoli ; latios agros, la campagne de Rome ; araes nomentinas et magus Tyburia : les murailles de Nomentum et de Tivoli, dans la Sabine, etc. Il n’y a pas un seul mot qui se rapporte à la Toscane : et pourtant cette erreur a été partagée par tous ceux qui ont écrit la vie de Sannazar.
  10. (4) Voyez la 8e élégie du 1er livre, adressée à Rochefort (Rocunfortia), grand chancelier de Charles VII (voy. son article).
  11. (1) On n’est pas bien d’accord sur la date de la mort de Sannazar. Crispo, Costanzo et Engenio le font mourir en 1532 ; Pucacchi, Capaccio et le Giovo, une année plus tard. Dans cette disparité d’opinions, nous nous en sommes tenus à l’année marquée sur son tombeau à Mergellina. Cette date est confirmée 1e par le cardinal Seripando, qui, dans son journal conservé à la bibliothèque royale de Naples, a écrit :
    1520
    Die 24 Aprilia Actius Sincerus maritur

    2e par un avis au lecteur placé à la fin de l’édition des Sonetti et des Canzoni, exécutée à Naples en novembre 1630, où l’imprimeur Bultzbach s’excuse des fautes qui se sont glissées dans ce livre, à cause de la mort très-récente de l’auteur. Boccalini s’est trompé en le faisant périr de misère à Rome.

  12. (2) Elle porte même à présent le nom de Santa Maria del parto, Ste Marie de l’enfantement.
  13. (3) On ne comprend pas d’après quelle tradition un écrivain moderne, d’ailleurs très-exact, a pu avancer que ce tombeau était l’ouvrage de Basio Zenchi. Il a voulu dire sans doute Zanchi, dont il existe effectivement un Tumulus sur la mort de Sannazar ; mais ce n’est qu’une pièce de vers, car Zaschi n’était que poète. Voy. Barassi, qui en a écrit la vie.
  14. (1) L’abbé de la Tour a donné une traduction française de ce poème (Paris, 1830, in 10e, en y joignant une notice sur la vie et les ouvrages de l’auteur. M. St-Marc Girardin a fait de ce même ouvrage l’objet d’une appréciation intéressante, Revue des Deux-Mondes, avril 1850. gelo, dont l’ouvrage a été réimprimé en 1820, in 8e.